Déclaration de M. Serge Lepeltier, ministre de l'écologie et du développement durable, sur les grandes orientations du plan Climat, à l'Assemblée nationale le 10 février 2005.

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Circonstance : Deuxièmes rencontres parlementaires pour la maîtrise de l'énergie, à l'Assemblée nationale le 10 février 2005

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames et Messieurs,
Vous me permettrez de remercier Claude GATIGNOL qui a su réunir tous les acteurs, tous les élus, autour d'un thème essentiel, celui de notre énergie, celui de notre bouquet énergétique.
Cette journée, à voir la qualité et le nombre des interventions, a été riche d'enseignements.
Vous m'avez laissé au cours des nombreuses rencontres que j'ai pu avoir avec vous, avec les élus, avec les décideurs, une impression générale : celle que les choses avancent, que les mentalités sont en train de considérablement changer.
Les mentalités ont changé grâce au travail de fond des précurseurs, parmi lesquels bien sûr Claude GATIGNOL, mais je pense aussi à Serge POIGNANT, ou encore Marcelle RAMONET, qui ont vraiment contribué à faire avancer la connaissance et la décision publique dans ces domaines, et beaucoup d'autres.
Les mentalités changent, et c'est heureux, car il y a urgence : le défi de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050, ce défi ne peut s'accomplir qu'en commençant à agir maintenant.
Les énergies renouvelables, et plus généralement toutes les " technologies propres ", sont aujourd'hui unanimement reconnues comme nécessaires par toutes les décideurs :
· Nécessaires à notre pays pour la lutte contre l'effet de serre.
· Nécessaires à notre pays pour apporter une alternative à la société du tout-pétrole, et à la raréfaction des ressources pétrolières qui menace déjà nos économies.
· Nécessaires pour garantir une diversification de notre bouquet énergétique, à travers des sources d'énergie décentralisées, qui sont une garantie de sécurité de l'approvisionnement énergétique.
Elles sont devenues un point d'intérêt convergent des pouvoirs publics, des entreprises et des collectivités. Elles sont inscrites dans les politiques, dans les agendas 21.
La véritable question qui se pose aujourd'hui est : comment créer le " déclic " pour passer des objectifs à la réalité ? comment aller jusqu'au bout de ce défi de la lutte contre le changement climatique et des énergies renouvelables ? Défi qui est aujourd'hui, partagé par tous !
Créer ce déclic, c'est l'ambition du Plan Climat que j'ai annoncé, au nom de l'ensemble du Gouvernement, le 22 juillet dernier.
· La réponse passe, d'abord, par la recherche et la technologie.
La France est en train, aujourd'hui, de se doter réellement d'une vraie stratégie industrielle écologique. Les décideurs, les entreprises, comme le Gouvernement, ont pris la mesure du formidable enjeu pour notre pays que représente la recherche industrielle dans les technologies propres.
Nous ne pouvons pas rester en retrait, sur la recherche, par rapport aux Etats-Unis et au Japon qui ont misé massivement sur la technologie pour répondre aux problèmes écologiques de demain. L'ambition de l'Europe, dans la stratégie de Lisbonne, de consacrer 3% du Produit Intérieur Brut à la recherche et au développement, doit être poursuivie en ce sens, et notamment par la France.
Le Plan Climat a déjà permis de débloquer 40 millions d'euros supplémentaires pour la recherche sur les véhicules propres, hybrides ou électriques. Une Fondation bâtiment-énergie, dotée de 8 millions d'euros, a également été créée. Il faut sans doute aller plus loin, et mobiliser tous les secteurs de l'économie.
Le discours du Président de la République aux forces vives de la Nation, le 4 janvier dernier, permet de donner à la France les moyens de cette ambition économique.
Le Président a annoncé que 2 milliards d'euros supplémentaires, issus des recettes de privatisation, seront dédiés à des grands programmes industriels et innovants pour la France. Une agence de l'innovation industrielle, placée auprès du Premier ministre, lancera et pilotera ces grands programmes.
Bien sûr, il faut définir dans le détail ces programmes, et cela fera l'objet d'un travail de fond avec les acteurs. Mais vous remarquerez que sur les dix grands programmes industriels préconisés par le rapport de Jean-Louis Beffa au Président de la République, six de ces grands programmes sont écologiques. Permettez-moi de les citer :
1. la pile à combustible et la filière hydrogène ;
2. la voiture économe et propre ;
3. les biocarburants ;
4. le solaire photovoltaïque ;
5. la capture et la séquestration du CO2 ;
6. le bâtiment économe.
C'est une nouvelle vision de notre avenir industriel qui est ainsi tracée. C'est une stratégie dessinée pour la France qui reconnaît ce fait essentiel, que les marchés de demain seront fondés sur les technologies propres.
La France a des atouts considérables, de par ses chercheurs, de par les fleurons technologiques que sont ses entreprises, des atouts pour être leader en matière de technologies propres.
Ces annonces du Président de la République contribuent aujourd'hui à créer une véritable dynamique dont nous ne pouvons que nous réjouir. Des " pôles de compétitivité " vont se créer sur notre territoire, pour que nous soyons au cur du défi économique mondial.
J'ai demandé à mes services d'y travailler, avec les industriels, avec les constructeurs automobiles, avec la fédération du bâtiment, avec l'ensemble des acteurs économiques. Et j'aimerais que vous aussi, tous ensemble, nous donnions de la matière à ces grands programmes.
· La réponse passe, ensuite, par les instruments économiques.
Des instruments profondément innovants viennent de voir le jour, dans le cadre du Plan Climat que j'ai annoncé et dont l'action avance.
Je mentionnerai les principaux de ses outils :
- Les certificats d'économie d'énergie, qui vont permettre de lancer par le biais des fournisseurs d'énergie de grands projets de rénovation et d'amélioration de l'efficacité énergétique de l'habitat ;
- le plan de quotas de CO2, qui est le fruit d'une année et demi de travail avec vingt-trois fédérations industrielles, plan qui plafonne les émissions industrielles de CO2 et qui vient d'être approuvé par Bruxelles : les premières affectations de quotas aux entreprises auront lieu le 28 février. Le plan français est incitatif puisqu'il prévoit un effort de réduction de 2,5% supplémentaires en plus des engagements volontaires de réductions déjà consentis par les industriels.
A nous, tous ensemble, d'apprendre à utiliser ces outils nouveaux.
A nous, aussi, de savoir les faire évoluer dans le bon sens. A nous d'inventer, dans les années à venir les évolutions et les moyens d'élargir ces nouveaux outils et d'en faire des leviers d'action efficaces, pourquoi pas dans d'autres domaines que l'industrie : l'habitat, les transports et notamment le transport aérien, et l'énergie...
Le marché de quotas de CO2 est un instrument tout à fait incitatif, moderne, qui inscrit l'écologie au cur du monde économique, dans un cadre européen et même mondial grâce à l'entrée en vigueur du protocole de Kyoto le 16 février.
Je donnerai un exemple concret de cette incitation : le partenariat qui vient d'être signé entre la Caisse des Dépôts et Consignations, Dalkia et Dexia va permettre d'offrir aux collectivités locales des moyens de financer leurs investissements de chauffage urbain " renouvelables " plus facilement, grâce à des prêts bonifiés profitant de la valorisation des tonnes de CO2 économisées.
Ces types de services seront nécessairement, amenés à se développés de plus en plus dans l'avenir.
· La réponse passe, enfin, par la concertation et l'action au niveau local.
Les collectivités locales ont évidemment un rôle crucial à jouer pour décliner les objectifs du Plan Climat sur le terrain, au plus près des citoyens.
Vous, les élus, pouvez porter le message du changement climatique auprès de nos concitoyens. Vous engagez et vous menez les actions au niveau local.
C'est pourquoi le Plan Climat contient donc un volet entier consacré à la déclinaison locale des mesures, et au développement de " Plans Climat Territoriaux ".
L'objectif, est qu'une collectivité locale (une Région, un département, une ville) puisse se doter de son propre " bilan carbone " et mettre en place des actions de réduction, dans le cadre des Agenda 21 locaux.
C'est une très grande satisfaction de voir que plusieurs collectivités importantes ont déjà annoncé la préparation de Plans Climats Locaux, qui s'inscrivent pleinement dans cette logique.
Nous sommes là pour vous y accompagner, et une boite à outils à destination des collectivités locales, pour la création de " Bilans Carbone " des collectivités sera mise à disposition par l'ADEME dans les tous prochains mois.
Vous l'avez compris, ce que j'aimerais chercher aujourd'hui avec vous, c'est lancer de nouvelles pistes, mais aussi et avant tout créer une dynamique.
Pour créer et continuer cette dynamique, je compte sur vous et sur votre conviction auprès des Français.
Le message que j'aimerais faire passer aux Français, aujourd'hui, c'est " l'écologie a besoin de vous ". En voyant la qualité de cette auditoire, je suis convaincu que vous saurez porter ce message, et que vous serez, plus que jamais, les plus ardents défenseurs de l'écologie auprès de nos concitoyens.
(Source http://www.ecologie.gouv.fr, le 14 février 2005)