Déclaration de Mme Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF, sur les enjeux de la lutte contre le sida à l'échelle nationale, européenne et en direction des pays du Sud, à Paris le 26 novembre 2004.

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Circonstance : Etats Généraux de l'Association Aides, à Paris, Espace Oscar Niemeyer, le 26 novembre 2004

Texte intégral

Chers amis,
Permettez-moi de vous souhaiter au nom du Parti communiste français la bienvenue dans cet espace Oscar Niemeyer à l'occasion de vos Etats généraux. En ce 20ème anniversaire de votre action déterminée contre le sida, je veux vous exprimer la solidarité de notre parti et vous dire sa volonté de mieux agir avec vous, comme avec l'ensemble des acteurs de cette lutte, au niveau local comme au niveau national et international.
Aides a donc vingt ans cette année. Quel chemin parcouru : depuis les années 80, où la lutte médicale était si démunie, où votre action a permis la mobilisation de l'opinion publique et des institutions. C'est peu dire que les conditions de la lutte contre le sida ont changé depuis la création d'Aides par Daniel Defert, en 1984, depuis l'avènement des trithérapies, mais aussi du fait de l'impact considérable du sida dans les pays du Sud.
Je voudrais évoquer en quelques mots les enjeux de cette lutte d'aujourd'hui, tels que le Parti communiste les aborde, avec le souci constant de soutenir les acteurs - associations, professionnels, citoyens - mais aussi avec la volonté de contribuer, dans les municipalités, les départements, les régions, à l'Assemblée nationale et au Parlement européen, dans les luttes, à la mobilisation.
Il y a dans le monde beaucoup d'argent inutile, et beaucoup d'argent utilisé à des choses pour le moins contestables. Et lorsque l'on sait que seulement 5 milliards de dollars ont été mobilisés en 2003 contre le sida au plan mondial, alors que 900 milliards étaient en faveur des dépenses militaires, on se dit que -pour ne prendre qu'elle- cette disproportion est éclairante.
Votre lutte pose les problèmes essentiels du développement humain de tous les pays, de l'accès aux droits fondamentaux sur toute la planète, de la construction de services publics de santé et de systèmes de protection sociale pour tous. Nous partageons pleinement cette ambition considérable, à la fois très concrète et très globale.
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La situation en Europe et en France est certes très différente de celles des pays du Sud. Mais elle n'est en rien rassurante. Les programmes de prévention en France restent insuffisants. Le relâchement des pratiques sexuelles montre que rien est acquis durablement en la matière. Le nombre de personnes accédant à un traitement reste trop bas. Et le nombre est important de celles et ceux - étrangers, sans papiers, en précarité - qui du fait de leur situation, restent éloignés du soin, exclus du soutien social et de l'accompagnement. C'est pourquoi nous partageons l'appréciation formulée par votre président, Christian Saout, soulignant qu'il n'y a aujourd'hui plus de politique nationale de lutte contre le sida et que dans le contexte actuel de fragilisation de la mobilisation, il est urgent de faire converger les énergies disponibles pour lutter contre toutes les discriminations et pour les droits.
Nous savons comment le remodelage ultralibéral de notre société pèse sur les hommes et les femmes dans toutes les dimensions de leur vie, et nous voulons travailler dès aujourd'hui avec tous ceux et celles qui le veulent, à d'autres possibles. Le Parti communiste est engagé dans tous les mouvements qui visent à garantir les droits des personnes, la solidarité nationale et internationale. Aussi, pour nous, faire du sida une grande cause nationale, comme votre association l'a proposé pour 2005 au côté d'autres acteurs, c'est bel et bien mobiliser la société pour une prise en charge solidaire de la maladie, pour en prévenir l'extension et pour agir ensemble.
La récente conférence de Bangkok a permis de montrer une nouvelle fois le paradoxe cruel de la situation actuelle : oui, l'humanité possède les moyens médicaux, techniques, financiers pour affronter l'épidémie, pour la prévenir, pour la soigner - à défaut de la guérir - ; des États, des organisations non gouvernementales, des communautés du monde entier sont mobilisés ; mais les moyens consacrés à cette lutte demeurent très largement insuffisants. En fait, les pays les plus riches, les organismes internationaux restent l'arme au pied, tandis que l'industrie pharmaceutique reste globalement mue par ses seuls intérêts financiers. La santé des êtres humains n'est pas une marchandise, et les inégalités dramatiques et obscènes entretenues par les grands trusts sont une insulte à l'humanité.
Votre lutte, dans ses contenus comme dans ses modalités, est à nos yeux un mouvement précurseur et prometteur à plusieurs titres. Prise de parole des malades ; interpellation du politique sur ses responsabilités et les enjeux de droits ; émergence d'une démocratie sanitaire, ce sont là des domaines fondamentaux dans lesquels l'expérience de Aides constitue, au-delà même d'ailleurs de la lutte contre le sida, un atout précieux, une amorce prometteuse en même temps qu'un défi d'actualité. J'espère que nous aurons l'occasion, avec vous, de poursuivre les échanges afin que nous puissions dans la responsabilité qui est celle d'une force politique uvrer dans les mêmes objectifs.
Permettez-moi, pour finir, de saluer votre travail quotidien de prévention, de soutien et d'accompagnement, dans ses dimensions individuelles et sociales, la sollicitation constante de l'engagement bénévole, celle des professionnels et des spécialistes, dans un rapport de respect et d'écoute, dans un esprit de grande liberté.
Les communistes sont honorés de mettre à votre disposition leurs locaux. Je vous souhaite plein succès dans vos travaux.

(Source http://www.pcf.fr, le 2 décembre 2004)