Déclaration de M. François d'Aubert, ministre délégué à la recherche, sur la mise en place de pôles de compétitivité et l'enjeu pour le développement de la recherche, Paris le 12 janvier 2005.

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Circonstance : Colloque "Pôles de compétitivité : gagner la bataille économique grâce aux territorires" à Paris le 12 janvier 2005

Texte intégral

Mesdames et Messieurs,
Je suis heureux de m'exprimer devant vous, en ce début d'année 2005 placée sous le signe de la Recherche, à la fois par le Président de la République et par le Premier ministre.
Permettez-moi tout d'abord de saluer l'initiative qui vous réunit en nombre ici, aujourd'hui, pour débattre et échanger sur la politique des pôles de compétitivité.
Les pôles de compétitivité font partie d'un ensemble de mesures qui ont été adoptées ou qui vont l'être prochainement, visant à restaurer l'attractivité et la force de l'économie française.
Le Ministère de la Recherche joue un rôle moteur dans ce dispositif gouvernemental. D'abord parce qu'il est au cur de la logique des pôles de compétitivité. Ensuite parce qu'il proposera prochainement de compléter la politique en faveur des jeunes entreprises innovantes qui avait été mise en place par une précédente loi sur la recherche et l'innovation. Enfin, parce que la loi d'orientation et de programmations sur la Recherche proposera la mise en place de pôles de recherche et d'enseignement supérieur regroupant les universités, les organismes et les grandes écoles d'un même territoire mais aussi la création de parcs de recherche fédérant un ensemble de starts-up technologiques.
Qui plus est, la loi d'orientation et de programmation sur la Recherche donnera une véritable cohérence territoriale, organisationnelle et technologique à ces différentes mesures. Nous veillerons à articuler et à combiner les pôles de recherche et d'enseignement supérieur et les parcs de recherche chaque fois que cela sera possible. Ainsi l'addition d'un PRES (un pôle de recherche et d'enseignement supérieur) et d'un parc de recherche constitue selon moi un candidat idéal pour la labellisation en tant que pôle de compétitivité à vocation technologique.
A la suite de l'appel à propositions lancé au cours du précédent CIADT, sous l'impulsion du Premier ministre, plusieurs pôles de compétitivité seront prochainement labellisés.
Ce nouveau projet est une étape importante de la décentralisation. Les pôles de compétitivité consacrent les territoires en tant que pilier et périmètre de cohérence du développement économique, comme l'a parfaitement montré Madame Matteaccioli dans son dernier ouvrage.
C'est un enjeu majeur pour nos régions et nos départements, à la fois en matière :
- d'emploi dans l'industrie mais aussi dans les services,
- de recherche et d'innovation pour les entreprises, pour les organismes publics et pour les universités et les grandes écoles,
- de rayonnement national et international pour la France et ses régions.
Ces pôles de compétitivité appellent, à n'en pas douter une mobilisation renforcée de l'ensembles des acteurs territoriaux.
Quelles sont donc les raisons qui ont conduit à une telle initiative ?
Mesdames et messieurs,
Aujourd'hui, la France doit faire face à une concurrence croissante, de la part des pays industrialisés, aux Etats-Unis, au Japon, au sein de l'Union Européenne élargie, mais aussi de plus en plus dans les pays émergents, Inde, Chine, Asie du Sud.
Aujourd'hui, nos entreprises et nos emplois, notre pays, nos régions et nos territoires, sont exposés à une compétition internationale sévère et protéiforme.
Il y a l'internationalisation des échanges et la remise en cause rapide des avantages comparatifs des entreprises qui supposent une capacité de réaction et d'innovation accrues. Cette agilité des entreprises dépend notamment de leur capacité à mobiliser un grand nombre de ressources extérieures notamment scientifiques et technologiques.
Il y a aussi les délocalisations, et leurs conséquences économiques et sociales douloureuses, parfois intolérables, leur cortège funèbre de licenciements et l'appauvrissement local qui en résulte.
Et pour y répondre, notre pays se devait d'innover, d'adapter son modèle économique.
C'est dans cette perspective que le Gouvernement a décidé de créer ces pôles de compétitivité. Ces pôles proposent de bâtir, à l'échelle d'un territoire, un système réactif regroupant des entreprises, des centres de formation et bien sûr des unités de recherche.
Toute l'ambition qui est la nôtre avec les pôles de compétitivité est de construire, par volontarisme, des écosystèmes de croissance et de développement pour faire face à cette compétition internationale qui ne se joue plus seulement sur le terrain social avec les faibles coûts des salaires dans les pays sous-développés, mais aussi de plus en plus sur le terrain technologique et organisationnel.
Le gouvernement a ainsi souhaité donner l'impulsion politique au plus haut niveau, et tracer la voie d'une nouvelle politique volontariste de développement et de croissance économique.
En choisissant la voie de l'appel à projets, le gouvernement a établi les règles, mis en place le processus et fixé les critères qui présideront à la labellisation des projets de pôles de compétitivité.
Depuis le 2 décembre, date du lancement de cet appel à projets, l'initiative revient désormais aux forces vives qui, à l'échelle des territoires, sont au cur de la dynamique des pôles. Au premier rang figurent bien sûr les entreprises, les acteurs de la recherche et de la formation. Ce sont eux qui sont invités à créer ces nouveaux tissus de relations économiques et sociales, à établir de nouveaux liens entre le public et le privé, à s'unir dans des partenariats actifs pour l'innovation à la conquête de nouveaux marchés, pour la croissance durable et les emplois de demain.
A leurs côtés, l'engagement des collectivités territoriales doit fournir à ces initiatives l'assise régionale ou locale indispensable, qui plus est à l'heure d'une nouvelle étape d'approfondissement de la décentralisation.
Quelles sont donc les conditions pour qu'un projet de pôle ait des chances d'aboutir ? Il y en a 3 qu'a fixé le Gouvernement. Ce sont les 3 facteurs clés de succès : Création de richesses nouvelles, partenariats nouveaux et ambitieux pour la recherche et l'innovation, visibilité internationale.
A tout seigneur, tout honneur, la Recherche.
La recherche est traditionnellement au coeur du développement régional et de l'aménagement du territoire, c'est elle qui est à l'origine des connaissances, des savoirs et des innovations qui demain irrigueront le pays d'emplois et de technologies nouvelles. A l'heure de l'économie de la connaissance, la recherche et l'innovation sont en effet les moteurs de la croissance et des emplois.
Notre ambition, votre ambition doit être de les placer au coeur des projets de pôles de compétitivité comme le noyau dur autour duquel doivent graviter et fusionner l'ensemble des acteurs.
C'est la première condition : un pôle réussi sera un pôle ayant l'excellence scientifique et technologique au coeur de sa stratégie de développement. Face à l'intensification de la concurrence internationale, il faut absolument créer les conditions permettant aux entreprises et au territoire français d'atteindre l'excellence dans les domaines scientifiques et technologiques porteurs en matière de croissance et d'emplois.
C'est à ce prix que notre pays pourra être considéré comme un site privilégié d'implantation pour l'installation d'activités de recherche, de développement et d'innovation d'entreprises privées.
Seconde condition : une vision partenariale du développement local. A l'échelle de nos territoires, le rapprochement du monde de la recherche et de l'enseignement supérieur avec le monde des entreprises produira les interactions indispensables à la meilleure diffusion des connaissances et des savoirs et à l'irrigation de notre tissu économique par les ferments de l'innovation.
Troisième condition : la taille critique. Les pôles que nous devrons sélectionner devront aussi être en mesure d'atteindre la taille critique et d'acquérir la visibilité internationale indispensable, afin de constituer de véritables pôles d'attractivité :
- pour les activités de R D des grands groupes français et étrangers, et en particulier pour les multinationales qui installent seulement un ou deux centres de recherche en Europe ;
- pour les meilleurs chercheurs et étudiants qui souhaitent travailler dans un environnement de la plus haute qualité et reconnu ;
- pour les créateurs d'entreprises qui veulent bénéficier, certes, d'offres locatives intéressantes mais surtout de la proximité de ressources humaines, technologiques et financières abondantes et de débouchés potentiels ;
- pour les investisseurs, qui pourront ainsi identifier des projets technologiques prometteurs.
Sur cette logique s'effectuera la première sélection des sites capables de bénéficier des avantages accordés aux pôles de compétitivité. Ce qui n'implique pas un modèle unique, ne regroupant forcément par exemple une grande école ou un centre de R D industriel.
Il y a aussi dans la diversité des solutions et des modes d'organisation, une grande richesse qu'il importe de savoir mettre à profit. A situations différentes, solutions différentes. Même si, je dois vous le dire, ma préférence va à ceux qui auront une composante recherche et innovation forte
Actuellement nous pouvons compter environ 80 projets de pôles en gestation sur l'ensemble du territoire. Tous ne seront pas labellisés au printemps prochain.
Les premiers pôles de compétitivité qui seront retenus auront valeur d'exemple.
Il faudra que ceux-ci, dans l'attente des labellisations prochaines, enclenchent le cercle vertueux du renouveau économique de nos territoires, par la recherche et l'innovation, pour le développement et l'emploi.
Mesdames et Messieurs, je vous remercie de votre attention et je vous souhaite une matinée d'échanges et de débats riches et fructueux.

(Source http://www.recherche.gouv.fr, le 13 janvier 2005)