Déclaration de M. Christian Poncelet, président du Sénat, sur les relations culturelles entre la France et la Chine, Paris le 28 janvier 2004.

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Circonstance : Toast prononcé à l'occasion du déjeuner offert en l'honneur de Son Excellence M. Hu Jintao, Président de la République Populaire de Chine, au Sénat le 28 janvier 2004

Texte intégral

Monsieur le Président de la République,
Messieurs les Ministres,
Messieurs les Vice-Présidents du Sénat,
Mesdames et Messieurs les Secrétaires du Sénat,
Monsieur le Président de la Commission des Affaires étrangères,
Monsieur le Président de la Commission des Affaires Culturelles,
Monsieur le Président du groupe interparlementaire,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
Permettez-moi tout d'abord, Monsieur le Président de la République, de vous souhaiter de nouveau la plus respectueuse et cordiale bienvenue au Sénat de la République française.
Il fallait bien ces salons chargés d'art et d'histoire pour accueillir le Président de la République populaire de Chine, le premier pays au monde par sa démographie, l'un des premiers par sa taille et assurément le premier par son avenir.
En ce quarantième anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France - et je voudrais saluer ici l'une de ces fulgurantes intuitions historiques du Général de Gaulle, qui une fois encore a précédé le mouvement - tout indique que la relation franco-chinoise s'inscrit sous des auspices favorables.
Je n'oublie pas en effet que 2004 est l'année du singe, signe ô combien bénéfique, riche en promesses de dialogue, de médiation, de progrès et de prospérité.
Je n'oublie pas non plus que 2004 est l'année de la Chine en France, suivie en 2005 de l'année de la France en Chine.
Le Sénat va d'ailleurs s'associer à cet événement en organisant une exposition de photographies de Vincent LEYMA qui célèbrera la grandeur et la diversité de la Chine.
Tout concourt donc, vous le voyez, Monsieur le Président de la République, à faire de cette nouvelle année une année propice au renforcement des relations entre nos deux pays. Je suis d'ailleurs certain que la visite d'Etat que vous accomplissez cette semaine est un premier jalon parmi beaucoup d'autres, tout aussi prometteurs.
C'est que les bonnes relations entre la France et la Chine s'appuient sur des fondements solides.
D'abord, nos deux Nations partagent la même conception d'un monde qu'elles souhaitent multipolaire et respectueux de la diversité culturelle et du droit international. L'une comme l'autre préfèrent le droit à la force, le dialogue au monologue, l'ouverture au repli.
Ensuite, nos deux peuples sont pétris de culture et d'histoire et se sont toujours attachés à en retenir les enseignements.
Certes, l'histoire comme la culture chinoises, sont plus anciennes que l'histoire et la culture françaises. Nous ne pouvons prétendre, comme vous au pays de Confucius, à plusieurs millénaires de tradition culturelle et politique. Les Européens que nous sommes ne sont pas prêts d'oublier l'émerveillement du vénitien Marco Polo lorsqu'il fit ses premiers pas en Chine au XIII° siècle et découvrit tout à la fois le papier monnaie, la boussole, la poudre ou encore les vaccins, autant d'exemples, parmi beaucoup d'autres, de ce que le monde doit aux Chinois. Nous n'oublions pas non plus que la première encyclopédie fut chinoise.
Les Français n'ont pas la prétention d'avoir une culture et une histoire aussi ancienne que les Chinois mais ils savent en revanche qu'ils partagent avec eux une certaine propension à l'universalité, une certaine appétence pour l'unité, deux traits qui nous rapprochent.
Une même conception du monde contemporain, un même respect de la culture et de l'histoire, voilà déjà de quoi unir deux peuples.
Mais il y a autre chose, et, à cette heure de la journée, je serais presque tenté de dire, il y a plus : la Chine et la France ont en effet l'une et l'autre le privilège unique d'abriter la meilleure cuisine du monde, la plus subtile et la plus fine. Nous espérons le prouver aujourd'hui, à tout le moins pour ce qui nous concerne.
Forts de ces bonnes relations politiques, nos deux pays doivent maintenant hisser à cette même hauteur nos relations économiques et commerciales, encore modestes, au regard de ce qu'elles devraient, de ce qu'elles pourraient être.
A prestation égale, il est somme toute légitime de privilégier l'offre d'un pays ami. Sinon, à quoi sert l'amitié ? Après tout, on juge les amis à leur solidarité dans les périodes difficiles mais aussi à leur présence dans les moments heureux.
Pour ce qui est de la France, soyez sûrs qu'elle s'efforce toujours de ne pas décevoir ses amis et qu'elle a moins que jamais l'intention de changer à cet égard.
Je me réjouis que l'afflux de plus en plus visible de touristes chinois en France en général et à Paris en particulier participe d'ores et déjà de cet essor de nos liens économiques et commerciaux, mais aussi culturels et humains.
L'économie, c'est bien. Le progrès économique est une condition du développement des classes moyennes et du progrès social, qui favorisent l'extension de la démocratie et la consolidation des droits de l'homme, lesquels sont à leur tour facteur de progrès économique - c'est en quelque sorte une boucle vertueuse-.
Mais l'économie, ce ne serait rien sans la culture, qui doit toujours l'accompagner, sauf à ce que l'homme se déshumanise.
C'est pourquoi, en cette année de la Chine en France, il nous faut veiller à la pérennité de nos relations culturelles, pérennité qui suppose que la culture ne soit pas l'apanage de quelques privilégiés mais s'étendent à tous. En France comme en Chine, veillons à ce qu'une fois passé l'enthousiasme des deux saisons culturelles, qui doivent améliorer notre compréhension réciproque, nos populations conservent cet intérêt l'une pour l'autre, comme en témoigne pour la France le succès du défilé du Nouvel An sur les Champs Elysées.
A cet effet, je ne manquerai jamais d'insister sur les efforts que doit encore faire notre pays pour mieux accueillir les étudiants chinois, aujourd'hui trop peu nombreux. Ils sont en effet notre avenir commun et ne bénéficient pas de toutes les facilités qu'ils mériteraient.
Enfin, parce que nous sommes en Europe, et parce que je crois plus que jamais à la construction européenne, quelles que soient les vicissitudes du moment, je souhaiterais rappeler l'importance du dialogue euro-chinois, dont la France vous le savez, a fait l'une de ses priorités à Bruxelles. Je me félicite que nous ayons fait des émules et que beaucoup d'Etats membres partagent désormais ce que nous considérons comme une priorité de la politique étrangère européenne.
Mais je sais, Monsieur le Président de la République, à quel point votre emploi du temps est chargé et il me faut conclure.
Aussi, permettez-moi tout simplement de lever mon verre à l'amitié entre nos peuples :
Vive la Chine !
Vive la France !
Vive l'amitié franco-chinoise !
(Source http://www.senat.fr, le l3 février 2004)