Texte intégral
(Entretien avec LCI à Paris le 7 janvier 2005) :
Q - Notre confrère Libération est sans nouvelles de son envoyée spéciale en Irak, Florence Aubenas et de son accompagnateur irakien. Avez-vous des informations ? Considérez-vous déjà que c'est une nouvelle prise d'otages ?
R - Non, nous ne savons pas de quoi il s'agit. Nous partageons l'inquiétude du journal "Libération", de la rédaction, de la famille de Florence Aubenas et de Hussein Anoun qui est son guide interprète assistant. Ce sont deux personnes très expérimentées, chacune dans leur métier. Nous avons donc une inquiétude parce que nous n'avons pas de nouvelles, mais nous n'avons pas de certitude. Donc, au moment où je vous parle il y a plusieurs hypothèses et je ne sais pas quelle est l'hypothèse correcte. Nous recherchons, nous demandons des informations, nous l'avons fait auprès des autorités irakiennes, nous avons visité les hôpitaux, nous la recherchons. Voilà ce que je peux dire. Ce que je peux ajouter naturellement, c'est que l'Irak, chacun le sait, chacun le voit, est un pays dangereux, où il faut faire très attention. Christian Chesnot et Georges Malbrunot, quand ils sont revenus, ont mis en garde leurs confrères. Il y a eu une douzaine de journalistes tués, plusieurs dont nous n'avons pas de nouvelles. Je n'oublie pas le cas de Fred Nérac, un autre journaliste qui a disparu il y a plus d'un an et demi en Irak. D'autres ont été enlevés, nous le savons. Donc, il faut faire attention.
Q - Quand vous dites "il faut faire attention", recommandez-vous aux rédactions de ne pas envoyer de journalistes en Irak, voire de rappeler ceux qui se trouvent aujourd'hui en Irak ?
R - Nous avons recommandé depuis des mois, à l'ensemble des médias, de ne pas envoyer de journalistes. Mais naturellement, en disant cela, j'assume ma responsabilité, qui est de prévenir, qui est de dire que c'est un pays dangereux. Nous avons aussi notre responsabilité d'aider nos compatriotes. Nous l'avons fait patiemment et sérieusement avec Christian Chesnot et Georges Malbrunot, et nous le faisons aujourd'hui pour Florence Aubenas. Mais chacun a sa responsabilité. Les journalistes ont un devoir d'information. Donc ils prennent leurs responsabilités aussi.
Q - Précisément, dans ce contexte, croyez-vous possible que se déroulent correctement et de manière crédible, les élections en Irak le 30 janvier prochain ?
R - C'est difficile et c'est possible, voilà ce que je pense. Je l'avais d'ailleurs dit à Charm el-Cheikh au cours de la Conférence, qui a été une étape préparatoire de cette élection. Je crois que ces élections ont été fixées avec une règle du jeu, avec un mode d'élection, n'y revenons pas. Elles doivent avoir lieu, elles peuvent avoir lieu, c'est une étape importante. Il faut naturellement que le maximum d'Irakiens y participent. Mais ce n'est pas la fin de la course. Il y a ensuite une Constitution, il y a aussi d'autres étapes, et notamment celle du départ des troupes étrangères à la fin 2005.
Q - Vous dites qu'il faut que "le maximum d'Irakiens y participe". Si on a des élections, comme c'est déjà probable, qui ne réunissent que, d'un côté, les Chiites, de l'autre, les Kurdes, et dont le scrutin serait boudé par les Sunnites, quelle crédibilité, quelle légitimité auront ces élections ?
R - J'ai moi-même employé ce mot de "crédibilité" devant Colin Powell et le ministre irakien, à Charm el-Cheikh, en disant : il faut que ces élections soient les plus crédibles possibles. Nous savons bien que ce sont des élections particulières. Néanmoins, le choix a été fait - il a été fait dans la fameuse résolution 1546 que nous avons approuvée - de sortir de ce trou noir de l'Irak, de cette guerre, par la politique, par le dialogue politique, par les élections, par la démocratie. Les étapes sont très difficiles. Il faut les franchir une à une, même si elles ne sont pas parfaites. Nous souhaitons que ces élections soient possibles, qu'elles ouvrent l'étape suivante de la réforme constitutionnelle, qu'elles ouvrent la perspective dont les Irakiens ont besoin qui est de retrouver leur totale souveraineté, c'est-à-dire le départ des troupes étrangères. Nous souhaitons que ce pays ait en lui-même et dans ses mains son propre destin. Et nous sommes prêts, comme le prouve la prochaine visite du président irakien à Paris, à participer à sa reconstruction politique et économique, à alléger sa dette, à participer à sa reconstruction économique, régionale aussi.
Q - Venons-en un instant au Proche-Orient maintenant...
R - Nous ne sommes pas loin, tout se tient.
Q - "Nous ne sommes pas loin"...les Palestiniens vont élire le nouveau président de l'Autorité palestinienne, dimanche. Les Israéliens ont expliqué qu'ils voulaient rendre possibles ces élections, notamment par la liberté de circulation. Pensez-vous que l'interdiction faite aux 8.000 prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes de voter est une erreur de la part de Jérusalem ?
R - Israël, a compris, me semble-t-il, même si tout n'est pas parfait, qu'il fallait faciliter cette élection. Je veux dire aussi que les Palestiniens donnent une preuve de responsabilité. J'avais déjà bien mesuré cela au moment tragique, dramatique pour eux, du décès de Yasser Arafat. On a vu quatre leaders palestiniens venir à Paris, assumer cette responsabilité de l'intérim. Et on voit aujourd'hui, à travers la préparation, et je l'espère, dimanche, le déroulement lui-même de ces élections, le peuple palestinien prendre en main son destin, de manière très responsable et très digne, très "mûre" si je puis dire. C'est une étape très importante qui se joue dimanche. Je suis sûr que 2005 doit être, et peut être, l'année de la paix entre Israéliens et Palestiniens.
Q - Pour que ce soit l'année de la paix, ne faut-il pas qu'Ariel Sharon, outre le retrait de Gaza, annonce le principe d'un retrait de Cisjordanie ? Le peut-il politiquement ?
R - Lorsque j'ai vu Ariel Sharon, chez lui, il y a quelques semaines, je lui ai posé cette question. Pour lui, le retrait de Gaza est une décision importante. Je l'ai qualifiée de "courageuse", je le pense. Parce que l'on voit bien que cela lui pose de vrais problèmes, il a même été obligé d'élargir son gouvernement pour retrouver une majorité à la Knesset. Mais il faut aller plus loin. Le retrait de Gaza et la réussite du retrait de Gaza, ce qui est un peu différent, doivent être complétés, "articulés" comme l'a dit Jacques Chirac hier, avec la Feuille de route. Et quand j'ai posé cette question à Ariel Sharon, il m'a dit : "Pour moi, la Feuille de route est toujours là". Donc, faisons confiance aux Palestiniens, qui vont choisir leurs nouveaux dirigeants, et il y a d'autres élections après - législatives et municipales ; faisons confiance à Ariel Sharon et à son nouveau gouvernement. Et, si je puis dire, utilisons le nouvel état d'esprit entre Américains et Européens...
Q - Comme un levier ?
R - ...pour faire repartir, comme un levier, avec les Russes et les Nations unies, ce Processus de paix. Les Américains et les Européens ont une responsabilité particulière et historique cette année, en faisant de leur nouvelle relation le test ou la preuve qu'elle est utile pour faire redémarrer ce processus entre Israéliens et Palestiniens.
Q - Le président de la République a annoncé que vous iriez bientôt au Proche-Orient. Est-ce une démarche purement française ou peut-on imaginer que ce soit une démarche européenne, quitte à ce que vous y alliez, comme ce fut le cas jadis, avec l'un de vos collègues, Joschka Fischer, l'Allemand, ministre des Affaires étrangères ?
R - D'abord, je vais revenir dans cette région. Je suis déjà allé à Ramallah passer une nuit, rencontrer Yasser Arafat à l'époque, puis je suis allé voir le gouvernement israélien. Chaque fois - cela ne vous étonnera pas que je vous le dise - que je vais dans une région comme celle-là, j'y vais comme ministre français des Affaires étrangères, mais j'y vais aussi comme l'un des ministres européens. Je suis convaincu que les Européens seront respectés et écoutés, utiles, s'ils parlent d'une seule voix, et s'ils agissent ensemble dans cette région. Oui donc, j'irai, comme un ministre européen, à nouveau rencontrer les autorités israéliennes et palestiniennes, dans quelques jours, à la fin du mois.
Q - Tout à l'heure vous serez à Bruxelles pour un sommet consacré aux problèmes du tsunami et de l'Asie, et de l'aide européenne. La France n'est-elle pas mal placée pour réclamer un engagement massif de l'Union européenne, alors que sa contribution, par exemple par rapport à celle de l'Allemagne, est sept fois moindre ?
R - Ecoutez, je ne veux pas me livrer à ce jeu des surenchères. Nous faisons l'effort maximal, les uns et les autres. Nous le faisons ensemble dans le cadre de l'Union européenne. Nous allons en parler aujourd'hui en écoutant le rapport du président du Conseil, le Premier ministre luxembourgeois, du président de la Commission. Xavier Darcos, le ministre français de la Coopération, était présent à Jakarta. Il faudrait tout compter. Nous venons de décider d'augmenter nos moyens militaires sur place : des bateaux, des navires, des hélicoptères. Il y a une formidable solidarité populaire aussi. Plus il y a de l'argent, mieux cela vaut. Le problème ce sera, au-delà des effets d'annonces, le suivi. A quoi cet argent va-t-il être utilisé, concrètement ? Nous voulons par exemple, nous Français, cibler notre intervention sur certains sujets : l'aide aux enfants, la lutte contre les épidémies, l'éducation, et dans certains régions, par exemple il y a une région indonésienne, Meulaboh, qui a été tragiquement détruite, nous voulons concentrer notre aide sur certaines régions.
Q - Un dernier mot : pouvez-vous donner un chiffre exact aujourd'hui des morts français, des disparus, des blessés ?
R - Je veux être très prudent sur ce sujet qui touche beaucoup de familles françaises, auxquelles nous pensons. Il y a, au moment où je vous parle, 22 Français qui ont été tués dans cette tragédie ; il y a moins de 90 personnes aujourd'hui - ce chiffre évolue plutôt à la baisse - de personnes disparues, dont nous pensons qu'elles ont sans doute été tuées, mais dont nous n'avons pas retrouvé les corps. Et puis, il y a encore plusieurs centaines de personnes dont nous n'avons pas de nouvelles. Et je redis, chaque fois que j'en ai l'occasion, à des gens qui seraient revenus, là où ils habitent, pas seulement en Europe, aux Français qui habitent à Shanghai, à Pékin, ou à Hong-Kong, de nous le dire, en téléphonant à la cellule de crise du Quai d'Orsay au 0 800 174 174. Nous avons besoin de savoir où se trouvent les gens pour pouvoir travailler sur des statistiques plus précises
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 janvier 205)
(Entretien avec France 2 à Bruxelles le 7 janvier 2004) :
Q - Est-ce que vous avez des nouvelles concernant notre consoeur de "Libération" ?
R - Voilà maintenant plus de deux jours que Florence Aubenas et Hussein Hanoun, qui est son assistant accompagnateur, ont disparu. Et au moment où je vous parle, nous n'avons pas de nouvelle de l'un et de l'autre. Ce sont des professionnels expérimentés qui connaissent bien Bagdad. Il y a plusieurs hypothèses. Je ne sais pas, au moment où je vous parle, quelle est l'hypothèse correcte qui explique cette disparition. Nous recherchons ces deux personnes dans les hôpitaux, dans les différents services où nous pouvons obtenir des informations. Nous avons une vraie inquiétude, mais pour l'instant nous n'avons pas de certitude.
Q - Est-ce que vous invité les médias français à ne plus envoyer d'envoyés spéciaux à Bagdad en Irak ?
R - Le président de la République a dit clairement les choses ce matin et voilà plusieurs mois que nous recommandons de faire attention. Naturellement, les journalistes ont leur responsabilité qui est celle du devoir d'informer et ils prennent leurs responsabilités en sachant les risques. Nous, notre responsabilité c'est de dire que Bagdad, l'Irak, sont des territoires dangereux, et on le voit bien.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 janvier 2005)
Q - Notre confrère Libération est sans nouvelles de son envoyée spéciale en Irak, Florence Aubenas et de son accompagnateur irakien. Avez-vous des informations ? Considérez-vous déjà que c'est une nouvelle prise d'otages ?
R - Non, nous ne savons pas de quoi il s'agit. Nous partageons l'inquiétude du journal "Libération", de la rédaction, de la famille de Florence Aubenas et de Hussein Anoun qui est son guide interprète assistant. Ce sont deux personnes très expérimentées, chacune dans leur métier. Nous avons donc une inquiétude parce que nous n'avons pas de nouvelles, mais nous n'avons pas de certitude. Donc, au moment où je vous parle il y a plusieurs hypothèses et je ne sais pas quelle est l'hypothèse correcte. Nous recherchons, nous demandons des informations, nous l'avons fait auprès des autorités irakiennes, nous avons visité les hôpitaux, nous la recherchons. Voilà ce que je peux dire. Ce que je peux ajouter naturellement, c'est que l'Irak, chacun le sait, chacun le voit, est un pays dangereux, où il faut faire très attention. Christian Chesnot et Georges Malbrunot, quand ils sont revenus, ont mis en garde leurs confrères. Il y a eu une douzaine de journalistes tués, plusieurs dont nous n'avons pas de nouvelles. Je n'oublie pas le cas de Fred Nérac, un autre journaliste qui a disparu il y a plus d'un an et demi en Irak. D'autres ont été enlevés, nous le savons. Donc, il faut faire attention.
Q - Quand vous dites "il faut faire attention", recommandez-vous aux rédactions de ne pas envoyer de journalistes en Irak, voire de rappeler ceux qui se trouvent aujourd'hui en Irak ?
R - Nous avons recommandé depuis des mois, à l'ensemble des médias, de ne pas envoyer de journalistes. Mais naturellement, en disant cela, j'assume ma responsabilité, qui est de prévenir, qui est de dire que c'est un pays dangereux. Nous avons aussi notre responsabilité d'aider nos compatriotes. Nous l'avons fait patiemment et sérieusement avec Christian Chesnot et Georges Malbrunot, et nous le faisons aujourd'hui pour Florence Aubenas. Mais chacun a sa responsabilité. Les journalistes ont un devoir d'information. Donc ils prennent leurs responsabilités aussi.
Q - Précisément, dans ce contexte, croyez-vous possible que se déroulent correctement et de manière crédible, les élections en Irak le 30 janvier prochain ?
R - C'est difficile et c'est possible, voilà ce que je pense. Je l'avais d'ailleurs dit à Charm el-Cheikh au cours de la Conférence, qui a été une étape préparatoire de cette élection. Je crois que ces élections ont été fixées avec une règle du jeu, avec un mode d'élection, n'y revenons pas. Elles doivent avoir lieu, elles peuvent avoir lieu, c'est une étape importante. Il faut naturellement que le maximum d'Irakiens y participent. Mais ce n'est pas la fin de la course. Il y a ensuite une Constitution, il y a aussi d'autres étapes, et notamment celle du départ des troupes étrangères à la fin 2005.
Q - Vous dites qu'il faut que "le maximum d'Irakiens y participe". Si on a des élections, comme c'est déjà probable, qui ne réunissent que, d'un côté, les Chiites, de l'autre, les Kurdes, et dont le scrutin serait boudé par les Sunnites, quelle crédibilité, quelle légitimité auront ces élections ?
R - J'ai moi-même employé ce mot de "crédibilité" devant Colin Powell et le ministre irakien, à Charm el-Cheikh, en disant : il faut que ces élections soient les plus crédibles possibles. Nous savons bien que ce sont des élections particulières. Néanmoins, le choix a été fait - il a été fait dans la fameuse résolution 1546 que nous avons approuvée - de sortir de ce trou noir de l'Irak, de cette guerre, par la politique, par le dialogue politique, par les élections, par la démocratie. Les étapes sont très difficiles. Il faut les franchir une à une, même si elles ne sont pas parfaites. Nous souhaitons que ces élections soient possibles, qu'elles ouvrent l'étape suivante de la réforme constitutionnelle, qu'elles ouvrent la perspective dont les Irakiens ont besoin qui est de retrouver leur totale souveraineté, c'est-à-dire le départ des troupes étrangères. Nous souhaitons que ce pays ait en lui-même et dans ses mains son propre destin. Et nous sommes prêts, comme le prouve la prochaine visite du président irakien à Paris, à participer à sa reconstruction politique et économique, à alléger sa dette, à participer à sa reconstruction économique, régionale aussi.
Q - Venons-en un instant au Proche-Orient maintenant...
R - Nous ne sommes pas loin, tout se tient.
Q - "Nous ne sommes pas loin"...les Palestiniens vont élire le nouveau président de l'Autorité palestinienne, dimanche. Les Israéliens ont expliqué qu'ils voulaient rendre possibles ces élections, notamment par la liberté de circulation. Pensez-vous que l'interdiction faite aux 8.000 prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes de voter est une erreur de la part de Jérusalem ?
R - Israël, a compris, me semble-t-il, même si tout n'est pas parfait, qu'il fallait faciliter cette élection. Je veux dire aussi que les Palestiniens donnent une preuve de responsabilité. J'avais déjà bien mesuré cela au moment tragique, dramatique pour eux, du décès de Yasser Arafat. On a vu quatre leaders palestiniens venir à Paris, assumer cette responsabilité de l'intérim. Et on voit aujourd'hui, à travers la préparation, et je l'espère, dimanche, le déroulement lui-même de ces élections, le peuple palestinien prendre en main son destin, de manière très responsable et très digne, très "mûre" si je puis dire. C'est une étape très importante qui se joue dimanche. Je suis sûr que 2005 doit être, et peut être, l'année de la paix entre Israéliens et Palestiniens.
Q - Pour que ce soit l'année de la paix, ne faut-il pas qu'Ariel Sharon, outre le retrait de Gaza, annonce le principe d'un retrait de Cisjordanie ? Le peut-il politiquement ?
R - Lorsque j'ai vu Ariel Sharon, chez lui, il y a quelques semaines, je lui ai posé cette question. Pour lui, le retrait de Gaza est une décision importante. Je l'ai qualifiée de "courageuse", je le pense. Parce que l'on voit bien que cela lui pose de vrais problèmes, il a même été obligé d'élargir son gouvernement pour retrouver une majorité à la Knesset. Mais il faut aller plus loin. Le retrait de Gaza et la réussite du retrait de Gaza, ce qui est un peu différent, doivent être complétés, "articulés" comme l'a dit Jacques Chirac hier, avec la Feuille de route. Et quand j'ai posé cette question à Ariel Sharon, il m'a dit : "Pour moi, la Feuille de route est toujours là". Donc, faisons confiance aux Palestiniens, qui vont choisir leurs nouveaux dirigeants, et il y a d'autres élections après - législatives et municipales ; faisons confiance à Ariel Sharon et à son nouveau gouvernement. Et, si je puis dire, utilisons le nouvel état d'esprit entre Américains et Européens...
Q - Comme un levier ?
R - ...pour faire repartir, comme un levier, avec les Russes et les Nations unies, ce Processus de paix. Les Américains et les Européens ont une responsabilité particulière et historique cette année, en faisant de leur nouvelle relation le test ou la preuve qu'elle est utile pour faire redémarrer ce processus entre Israéliens et Palestiniens.
Q - Le président de la République a annoncé que vous iriez bientôt au Proche-Orient. Est-ce une démarche purement française ou peut-on imaginer que ce soit une démarche européenne, quitte à ce que vous y alliez, comme ce fut le cas jadis, avec l'un de vos collègues, Joschka Fischer, l'Allemand, ministre des Affaires étrangères ?
R - D'abord, je vais revenir dans cette région. Je suis déjà allé à Ramallah passer une nuit, rencontrer Yasser Arafat à l'époque, puis je suis allé voir le gouvernement israélien. Chaque fois - cela ne vous étonnera pas que je vous le dise - que je vais dans une région comme celle-là, j'y vais comme ministre français des Affaires étrangères, mais j'y vais aussi comme l'un des ministres européens. Je suis convaincu que les Européens seront respectés et écoutés, utiles, s'ils parlent d'une seule voix, et s'ils agissent ensemble dans cette région. Oui donc, j'irai, comme un ministre européen, à nouveau rencontrer les autorités israéliennes et palestiniennes, dans quelques jours, à la fin du mois.
Q - Tout à l'heure vous serez à Bruxelles pour un sommet consacré aux problèmes du tsunami et de l'Asie, et de l'aide européenne. La France n'est-elle pas mal placée pour réclamer un engagement massif de l'Union européenne, alors que sa contribution, par exemple par rapport à celle de l'Allemagne, est sept fois moindre ?
R - Ecoutez, je ne veux pas me livrer à ce jeu des surenchères. Nous faisons l'effort maximal, les uns et les autres. Nous le faisons ensemble dans le cadre de l'Union européenne. Nous allons en parler aujourd'hui en écoutant le rapport du président du Conseil, le Premier ministre luxembourgeois, du président de la Commission. Xavier Darcos, le ministre français de la Coopération, était présent à Jakarta. Il faudrait tout compter. Nous venons de décider d'augmenter nos moyens militaires sur place : des bateaux, des navires, des hélicoptères. Il y a une formidable solidarité populaire aussi. Plus il y a de l'argent, mieux cela vaut. Le problème ce sera, au-delà des effets d'annonces, le suivi. A quoi cet argent va-t-il être utilisé, concrètement ? Nous voulons par exemple, nous Français, cibler notre intervention sur certains sujets : l'aide aux enfants, la lutte contre les épidémies, l'éducation, et dans certains régions, par exemple il y a une région indonésienne, Meulaboh, qui a été tragiquement détruite, nous voulons concentrer notre aide sur certaines régions.
Q - Un dernier mot : pouvez-vous donner un chiffre exact aujourd'hui des morts français, des disparus, des blessés ?
R - Je veux être très prudent sur ce sujet qui touche beaucoup de familles françaises, auxquelles nous pensons. Il y a, au moment où je vous parle, 22 Français qui ont été tués dans cette tragédie ; il y a moins de 90 personnes aujourd'hui - ce chiffre évolue plutôt à la baisse - de personnes disparues, dont nous pensons qu'elles ont sans doute été tuées, mais dont nous n'avons pas retrouvé les corps. Et puis, il y a encore plusieurs centaines de personnes dont nous n'avons pas de nouvelles. Et je redis, chaque fois que j'en ai l'occasion, à des gens qui seraient revenus, là où ils habitent, pas seulement en Europe, aux Français qui habitent à Shanghai, à Pékin, ou à Hong-Kong, de nous le dire, en téléphonant à la cellule de crise du Quai d'Orsay au 0 800 174 174. Nous avons besoin de savoir où se trouvent les gens pour pouvoir travailler sur des statistiques plus précises
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 10 janvier 205)
(Entretien avec France 2 à Bruxelles le 7 janvier 2004) :
Q - Est-ce que vous avez des nouvelles concernant notre consoeur de "Libération" ?
R - Voilà maintenant plus de deux jours que Florence Aubenas et Hussein Hanoun, qui est son assistant accompagnateur, ont disparu. Et au moment où je vous parle, nous n'avons pas de nouvelle de l'un et de l'autre. Ce sont des professionnels expérimentés qui connaissent bien Bagdad. Il y a plusieurs hypothèses. Je ne sais pas, au moment où je vous parle, quelle est l'hypothèse correcte qui explique cette disparition. Nous recherchons ces deux personnes dans les hôpitaux, dans les différents services où nous pouvons obtenir des informations. Nous avons une vraie inquiétude, mais pour l'instant nous n'avons pas de certitude.
Q - Est-ce que vous invité les médias français à ne plus envoyer d'envoyés spéciaux à Bagdad en Irak ?
R - Le président de la République a dit clairement les choses ce matin et voilà plusieurs mois que nous recommandons de faire attention. Naturellement, les journalistes ont leur responsabilité qui est celle du devoir d'informer et ils prennent leurs responsabilités en sachant les risques. Nous, notre responsabilité c'est de dire que Bagdad, l'Irak, sont des territoires dangereux, et on le voit bien.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 11 janvier 2005)