Déclaration de M. Xavier Darcos, ministre délégué à la coopération, au développement et à la francophonie, sur les relations entre les pays du Nord et du Sud, notamment dans le cadre des "Objectifs du millénaire pour le développement", à Paris le 19 janvier 2005.

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Circonstance : Clôture du Forum du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), à Paris du 17 au 19 janvier 2005

Texte intégral

Madame la Présidente,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur l'Administrateur,
Mesdames et Messieurs les Directeurs
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux et très honoré de clôturer les travaux du 3ème Forum sur le développement humain. Je voudrais tout d'abord rendre hommage au Programme des Nations unies pour le Développement, qui a très largement contribué au succès de cet événement, et tout particulièrement à son administrateur, M. Mark Malloch Brown. Je saisis cette occasion pour le féliciter à nouveau de ses nouvelles fonctions de directeur de cabinet du Secrétaire général des Nations unies, dans lesquelles je lui souhaite naturellement la plus entière réussite. Et vous savez l'intérêt que nous attachons au système des Nations unies.
Je salue également les nombreuses autres institutions qui ont concouru au succès de ce forum et notamment l'Institut du développement durable et des relations internationales, l'Institut des Sciences politiques de Paris ainsi que l'Agence française de développement
Au terme de trois jours de discussions, en quoi peut-on dire que la tenue à Paris de ce 3ème Forum a été un succès ? Principalement pour les trois raisons suivantes.
D'abord, ce forum marque le lancement officiel de cette "année du développement" que sera l'année 2005, avec, en perspective, la tenue à New York, en septembre prochain, du Sommet des chefs d'Etat sur la Déclaration du Millénaire. En effet, son ouverture, avant-hier, a coïncidé avec la remise à New York au Secrétaire général des Nations unies du rapport sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), rédigé sous la coordination du professeur Jeffrey Sachs.
Nous accueillons favorablement ce travail, qui a nécessité deux années d'études ainsi que la mobilisation de plusieurs centaines d'experts et a fait l'objet d'une large concertation. Les recommandations auxquelles il a abouti rejoignent nos préoccupations et, notamment, celles relatives à la mise en place de stratégies nationales définies à partir des OMD, la nécessité de trouver des ressources additionnelles et stables pour le développement, l'amélioration des capacités d'absorption ou le soutien aux initiatives régionales.
Sur les ressources, vous savez l'effort qui est celui de la France depuis quelques années. Le président de la République a pris l'engagement de consacrer à cette aide 0,5% du PIB en 2007 et 0,7% en 2012. Dès 2005, nous serons à 0,44%, objectif que se fixe ce rapport pour 2006. Je souhaite bien entendu que tous se joignent à ceux qui, comme la France, font des efforts budgétaires considérables. Pour aller au-delà, et surtout pour garantir des ressources stables dans la durée, il nous reste encore à avancer sur la question de contributions internationales, volontaires ou obligatoires, telles qu'elles ont été proposées par le rapport Landau il y a quelques mois. C'est particulièrement important dans les secteurs où seul un effort continu est efficace, comme par exemple la lutte contre le sida, à laquelle le produit d'une première taxe internationale pourrait être affecté.
Ensuite, ce forum a réuni de très nombreux acteurs du développement en une instance de dialogue et d'échanges, qui est primordiale pour confronter la théorie et la pratique en matière de développement humain et pour améliorer l'efficacité des politiques menées en la matière et renforcer leur harmonisation.
Enfin, il a abordé les problématiques essentielles auxquelles sont confrontés les acteurs du développement dans leurs différents métiers.
Ainsi, les débats consacrés au thème de "la diversité culturelle et la démocratie" ont permis de souligner que la diversité culturelle est un facteur de plus en plus déterminant de la prise de décision politique. La mondialisation et ses flux accrus de biens, d'idées et de personnes posent en outre de nombreux défis aux Etats pour qu'ils garantissent les échanges de biens culturels, tout en assurant le respect des savoirs traditionnels.
Un monde multiculturel, c'est un monde plus stable, plus sûr, qui repose sur des échanges constructifs entre des personnes de cultures différentes. Contrairement à ce que beaucoup pensaient autrefois, c'est par la différence, et non par l'uniformité, que nous pourrons lutter efficacement contre le terrorisme international et contre la pauvreté.
Cela fait longtemps que la France plaide en ce sens, longtemps que la composante culturelle est essentielle à notre action en faveur du développement. Il nous faut aujourd'hui un contenu opérationnel renforcé au niveau mondial, et je salue les travaux de l'UNESCO pour la convention sur la diversité culturelle.
Les débats ont permis de mieux identifier les entraves au développement. Qu'il s'agisse des diverses formes d'exclusions et de discriminations auxquelles sont confrontés de nombreux groupes dans leurs propres sociétés ou bien de la persistance d'inégalités excessives entre les pays et en leur sein.
Cet important volet du forum de même que les contributions sur les thèmes de l'exclusion et de la démocratie ont également permis de mieux appréhender les difficultés auxquelles se heurtent la mesure des inégalités, l'évaluation de l'impact des politiques et de l'assistance et la définition de mesures statistiques de l'intégration politique et démocratique.
Les débats consacrés aux OMD ont permis de rappeler leur importance majeure. L'adoption en 2000 à l'Assemblée générale des Nations unies d'"objectifs du développement" dans la Déclaration du Millénaire a constitué la première pierre d'un nouveau consensus pour la coopération mondiale. Cette déclaration rend compte des principaux défis auxquels se trouve confrontée l'humanité. Elle propose des solutions pour faire face à ces défis et établit des critères précis d'évaluation des performances au moyen d'un ensemble d'engagements, d'objectifs et de cibles concernant le développement, la gouvernance, la paix, la sécurité et les Droits de l'Homme.
La France se prononce clairement en faveur d'un renforcement des efforts permettant d'atteindre les OMD. Mais pour atteindre ces Objectifs et pour les légitimer face à nos opinions publiques, nous devons davantage expliquer l'intérêt partagé que nous avons à développer le monde. A cet égard, je voudrais rappeler les travaux en cours du groupe de travail international sur les biens publics mondiaux (BPM), créé à l'initiative de la France et de la Suède. Ces travaux peuvent conduire à un renouvellement de l'agenda de la coopération internationale et, en partie au moins, à un dépassement de la problématique des OMD dans la mesure ou ils abordent de front des défis mondiaux qui ne peuvent avoir de solutions purement nationales.
Les six thèmes prioritaires identifiés par le groupe de travail sont : la paix et la sécurité, le commerce international, la stabilité financière internationale, la gestion durable des ressources naturelles, la prévention et le contrôle des maladies transmissibles, et enfin la connaissance et la recherche.
Bien entendu, cette problématique ne se limite pas aux OMD et pour certains sujets, elle ouvre des perspectives nouvelles. La question de l'éducation, par exemple, n'est pas envisagée seulement du point de vue de l'éducation de base, mais du point de vue de l'accès et du partage des connaissances et donc du rôle de l'enseignement supérieur et de la recherche. Mais pouvons-nous, Mesdames et Messieurs, envisager un développement durable sans progrès de la connaissance scientifique dans les pays les plus pauvres ?
Comme vous le savez, le groupe des Biens publics mondiaux rendra un rapport final comprenant des propositions concrètes en terme de définition des politiques à la fin du mois de juin ou début juillet, à Paris.
Cette thématique des Biens publics mondiaux est aussi celle des pays émergents. Pour ces pays, l'enjeu n'est plus limité au traitement social de la réduction de la pauvreté. Certains ont ainsi à faire face à la question du traitement social des inégalités.
Elle est aussi celle de la coopération française qui a mis en place une stratégie d'intervention dans les pays émergents. La coopération avec ces pays s'appuie sur une vision régulée de la mondialisation.
Pour conclure, je souhaite réaffirmer que les OMD ont contribué à réactiver la nécessaire solidarité entre pays riches et pauvres. La France en tire les conséquences en adaptant son dispositif de coopération et en encourageant l'adaptation du dispositif européen d'actions extérieures.
Les transformations au Sud imposent une évolution de l'agenda de la coopération internationale qui doit se projeter parfois au-delà des OMD. Les réflexions en cours permettront à notre dispositif de coopération d'illustrer une certaine vision de la régulation de la mondialisation dans ces différents domaines tout en contribuant à l'approfondissement de la réflexion sur les thèmes du développement humain, de la diversité culturelle, de la démocratie et de l'équité.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 janvier 2005)