Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
C'est pour moi un grand plaisir de venir ici, aujourd'hui, inaugurer la ligne téléphonique Azur " Accompagner la fin de la vie, s'informer, en parler ".
La fin de vie nous pose des difficultés, elle nous dérange. Il est temps que la société française comprenne et accepte qu'elle doit la même considération à celui qui va mourir et à celui qui va naître. C'est le respect et la dignité de la personne, de toute la personne, à tous les âges de la vie, qui est ici en jeu.
De la même façon que nous assurons à celui qui naît les conditions de son développement, nous devons à celui qui s'en va un accompagnement éclairé, dans le respect de ses convictions.
Parmi les propositions que Marie de Hennezel a faites dans son rapport remarquable " Fin de vie : le devoir d'accompagnement ", une mesure m'est apparue d'emblée comme particulièrement importante, et j'ai souhaité lui donner la priorité. Il s'agit de mettre à la disposition du grand public une ligne téléphonique permettant de rompre la solitude dans laquelle se trouvent celles et ceux qui accompagnent un proche dans sa fin de vie.
Ce numéro de téléphone permettra de répondre aux besoins d'information, de conseils et d'écoute, afin de mieux comprendre, mieux maîtriser la situation, et mieux s'orienter vers les ressources existantes, en matière de soins palliatifs et d'accompagnement.
Nous le savons tous - Marie de Hennezel l'a souligné dans son état des lieux, le député Jean Léonetti l'a confirmé dans le rapport de la Mission parlementaire qu'il a conduite - la société est particulièrement désemparée face à la mort.
Ainsi domine le sentiment d'être démuni, peu informé, peu soutenu, lorsque l'on est confronté à la mort d'un proche. Pourtant, plus on dénie la mort, plus elle angoisse.
C'est pourquoi l'importance d'ouvrir un espace de parole, afin que cette solitude puisse être exprimée et entendue, m'est-elle apparue comme une priorité.
Aussi, j'ai chargé la Direction générale de la santé d'étudier les conditions de la mise en uvre de ce nouveau service. Les différentes inquiétudes qui ont pu naître devant l'ampleur de la tâche sont déjà à moitié apaisées.
Mais la population française n'a pas seulement besoin de confier ses angoisses, elle a besoin d'être informée. Informée de ses droits, informée des toutes récentes avancées législatives, informées des ressources qui existent en matière de soulagement de la douleur et de soins palliatifs. Or, elle ne l'est pas suffisamment. Toutes sortes de fantasmes et d'idées fausses circulent encore à propos des problèmes soulevés par la fin de vie.
Le débat récent qui a accompagné le vote de la loi relative aux " Droits des malades et à la fin de vie a montré que l'on confond souvent le " laisser mourir " et le " faire mourir ". On imagine trop souvent que la seule manière digne et humaine de mourir est de demander la mort. On ignore les progrès immenses qui ont été effectués ces dernières années pour soulager les souffrances en fin de vie.
On finit aussi par oublier qu'une fin de vie accompagnée représente un moment fort de la vie d'un être humain, nourri de paroles et de gestes qui font sens.
Notre société doit retrouver le " savoir faire " et le " savoir être " - que la vie actuelle a momentanément, je l'espère, éclipsés - qui permettent tous deux d'accompagner celui qui va mourir. Le bon sens et le cur dictent souvent ce qu'il convient de dire ou de faire. Beaucoup de ceux qui accompagnent ont parfois seulement besoin d'être encouragés par des personnes expérimentées.
C'est donc cela que vous ferez : écouter, informer et orienter.
Par votre écoute et vos conseils, vous contribuerez au développement progressif de la culture de l'accompagnement de la fin de vie dans la population générale. Vous contribuerez ainsi à briser le mur de la solitude qui entoure la mort et les mourants. Vous répondrez ainsi aux attentes nombreuses de nos contemporains.
C'est cette avancée culturelle que j'ai souhaitée. C'est pourquoi j'ai demandé, à la Fondation Croix Saint-Simon et au Centre de ressources national François-Xavier Bagnoud, d'organiser la mise en place de cette nouvelle ligne d'information et d'écoute.
J'ai demandé volontairement que cette organisation se fasse en partenariat avec la Ligue nationale contre le cancer, qui a mis en place l'année dernière la ligne Cancer Info Service, avec une efficacité et un professionnalisme reconnus de tous.
Je voudrais remercier ici les représentants de la Ligue nationale contre le cancer d'avoir accepté de participer à ce projet.
Vous avez ainsi conçu un dispositif original, ouvert du lundi au samedi de 8 heures à 20 heures, avec deux niveaux d'écoute.
Un premier niveau, assuré par les téléconseillers de la ligne Cancer Info Service - tous professionnels de santé, infirmiers spécifiquement formés aux soins palliatifs et à l'accompagnement de fin de vie - va traiter les demandes d'information et d'orientation. Ils le feront grâce à une base documentaire très fournie et grâce à un répertoire des structures de proximité spécialisées en soins palliatifs et douleur.
Lorsque l'appelant demandera une écoute plus spécialisée et une disponibilité plus grande, il sera systématiquement basculé vers un deuxième niveau, situé dans les locaux du Centre François-Xavier Bagnoud, donc ici même.
Je suis particulièrement heureux de rencontrer votre équipe, que je salue. Vous avez tous une expérience précieuse de l'accompagnement des fins de vie et une pratique de l'écoute active, si nécessaire dans ce domaine. Certains d'entre vous sont même des psychologues.
Je suis certain que vous saurez écouter et apaiser, rompre cette solitude dont nous souffrons trop dès qu'il est question de la mort. J'apprécie le souci que vous avez eu d'offrir à vos " écoutants " la possibilité d'être eux-mêmes accompagnés et soutenus dans cette tâche difficile. C'est indispensable pour assumer votre responsabilité dans la durée.
Je voudrais vous dire combien je suis fier de cette réalisation, qui, tout en répondant aux attentes des personnes en fin de vie et de ceux et celles qui les accompagnent, contribuera par ailleurs à jouer le rôle non négligeable d'observatoire de la fin de vie.
Enfin, je tiens à rendre hommage à toutes celles et tous ceux, qui personnellement ou au travers d'associations caritatives, uvrent pour rendre la mort un peu plus humaine en accompagnant chaque jour l'Autre dans ce passage délicat.
Merci à l'ensemble des acteurs impliqués dans ce projet pour cette responsabilité difficile, et tellement belle, que vous avez accepté de prendre.
Merci de nous aider à humaniser la fin de vie.
(Source http://www.sante.gouv.fr, le 20 mai 2005)