Texte intégral
Q- T. Breton, bienvenue et bonjour.
R- Bonjour J.-P. Elkabbach.
Q- C'est bien Bercy ?
R- C'est surtout un honneur, un honneur pour moi de servir la France, un honneur pour moi de me battre pour les Françaises et les Français et c'est une fierté aussi.
Q- Est-ce que vous pouvez décider aussi vite que dans l'entreprise ?
R- On peut décider vite, oui, oui, bien sûr. Vous savez, d'abord on peut décider vite parce que je connais très bien beaucoup des directeurs, des fonctionnaires, des agents qui travaillent à Bercy, parce que moi-même j'ai été un grand utilisateur de Bercy depuis de nombreuses années donc je les ai retrouvés et maintenant je suis leur patron.
Q- Est-ce que vous vous considérez comme un ministre technique ou un ministre politique d'abord ?
R- Je suis un ministre au service de l'économie, et un ministre au service de l'économie c'est un ministre technique, parce que d'abord, il faut contrôler le budget, il faut faire en sorte de tenir nos engagements, il faut faire en sorte de tenir les objectifs que nous nous sommes fixés. Et puis un ministre politique aussi, parce que l'économie, c'est aussi politique.
Q- Alors on va prendre des exemples, Gaz de France, est-ce que vous renoncez à ouvrir le capital de GDF ou vous en retardez le moment ?
R- Ah non, pas du tout, vous savez, il y a une loi qui a été votée, donc je suis là aussi pour faire appliquer les lois. La loi a été votée pour Gaz de France, elle a été votée aussi pour EDF. Donc aujourd'hui, j'ai demandé à ces deux très grandes entreprises françaises de se tenir prêtes. Elles sont je crois maintenant prêtes.
Q- Prêtes à quoi ?
R- Prêtes à ouvrir leur capital, ce qui est très important, parce que cela va leur donner les moyens de plus de flexibilité.
Q- Vous pensez que c'est bon pour l'entreprise et les salariés ?
R- Des moyens de plus d'autonomie, donc bien sûr c'est bon pour l'entreprise et pour les salariés et pour revenir à Gaz de France, j'ai demandé à J.-F. Cirelli de prendre les dispositions pour être prêt. Après cela, J.-P. Elkabbach, c'est moi qui décide et je déciderai quand je jugerai le moment venu, j'espère que cela sera avant l'été.
Q- Oui, avant l'été, c'est-à-dire avant le 21 juin.
R- Avant les vacances d'été.
Q- Avant les vacances d'été, c'est-à-dire après le référendum et avant les vacances d'été.
R- Ah non, non, cela peut commencer tout de suite, et cela peut être, jusqu'au... je ne sais pas les vacances d'été, disons le mois d'août quoi, après ça les marchés sont fermés vous savez.
Q- Et pour EDF qui est prévu à l'automne pas de changement ?
R- Eh bien EDF, pareil, j'ai demandé à P. Gadonneix de se tenir prêt pour faire en sorte que nous puissions intervenir, si c'est possible et si les conditions de marché le permettent car il s'agira d'une très grande augmentation de capital, qui donnera, encore une fois à EDF les moyens de son développement, eh bien à l'automne ce serait bien.
Q- Le prix du gaz qui est indexé sur celui du pétrole est en train d'atteindre des records, les tarifs du gaz devaient augmenter je crois le 1er mai, c'est toujours le 1er mai ?
R- On a demandé effectivement, là encore, à J.-F. Cirelli, le président de Gaz de France de nous proposer une méthode qui va permettre d'indexer, ce qui est normal, les tarifs du gaz sur le prix du brut. La décision va être prise et celle-ci devrait intervenir là encore début juillet, mais avec une visibilité, avec une visibilité sur les années qui viennent, car il faut que les consommateurs sachent ce qui les attend.
Q- Aujourd'hui, troisième rencontre de R. Dutreil avec les fonctionnaires. Ce qui est acquis, c'est une augmentation de 1,8 %, 'est-à-dire le taux de l'inflation, T. Breton. Il y a une pression syndicale, de Force ouvrière en particulier, et cette pression augmente sur les salaires du privé et du public. Est-ce que vous souhaitez, pour la réunion de tout à l'heure, un engagement des syndicats pour 2006 et avec de préférence un accord sur la modernisation de la Fonction publique en même temps ?
R- Il y a deux choses J.-P. Elkabbach, tout d'abord effectivement, il y a un problème de pouvoir d'achat dans ce pays, nous en sommes conscients, j'en suis conscient en tant que ministre de l'Economie, donc il faut faire un effort...
Q- D'accord, vous êtes conscient, qu'est-ce que vous faites ?
R- Et précisément nous avons avec R. Dutreil, avec l'ensemble du gouvernement donc fait en sorte que cette année les fonctionnaires vont pouvoir obtenir 1,8% d'augmentation, c'est-à-dire un petit peu plus que l'augmentation de l'inflation, donc c'est une bonne chose. Mais l'année prochaine, là encore R. Dutreil va discuter avec les syndicats, moi je suis clairement pour une discussion qui soit une discussion ouverte, constructible. Vous savez, je souhaite un Etat exemplaire, je souhaite un Etat qui se réforme, et ça on le fera avec l'ensemble des agents. Donc R. Dutreil va ouvrir un vaste chantier, un vaste chantier...
Q- Est-ce que l'année prochaine, pour être concret, est-ce que l'année prochaine vous dites également, comme l'inflation ?
R- Un vaste chantier je voulais dire, parce que, ce qu'il faut, c'est que l'on se réforme, ce qu'il faut c'est qu'on travaille mieux au service des Français et pour cela si on augmente la productivité, la compétitivité, je trouve qu'il est légitime que tout le monde en bénéficie, à savoir les agents de l'état, mais aussi les consommateurs. Donc cela ne me choque pas du tout, que si les efforts sont là, eh bien qu'ils soient redistribués, en particulier aux agents de la Fonction publique.
Q- Donc le Gouvernement, T. Breton, écoute les fonctionnaires, il écoute les agriculteurs pour leurs congés payés, il écoute bientôt les médecins, il aide les emplois Borloo... Est-ce que vous avez calculé l'addition des nouvelles promesses et aussi leurs conséquences sur les finances publiques ?
R- Vous savez, mon travail c'est de faire en sorte que ceux-ci tiennent dans les engagements de la France, ces engagements de la France je les ai pris au nom de la France et je les ai répétés à Bruxelles, c'est-à-dire que nous serons en dessous de 3 % de déficit en 2005, on y sera ! Après ça, à charge pour moi précisément de faire en sorte que l'ensemble de ces dépenses soient compensées par des améliorations de la productivité, des économies et pour l'instant on tient.
Q- C'est un pari ?
R- Non, c'est une obligation.
Q- Oui mais de l'autre côté, quand vous dites, productivité etc., vous n'êtes pas assuré de l'obtenir.
R- Oui, mais je sais faire les additions, J.-P. Elkabbach.
Q- Et comment vous la faites, là ?
R- Eh bien, précisément, en travaillant globalement avec l'ensemble de mes collègues du Gouvernement.
Q- En période électorale, en France, est-ce qu'on arrive à tenir les comptes, ou est-ce qu'il faut oublier les comptes ?
R- Attendez, on n'est pas dans une période électorale classique, on est dans une période référendaire où l'ensemble des Françaises et des Français vont avoir à prendre position sur le traité constitutionnel. Ce n'est pas une période électorale, on n'est pas dans des jeux électoralistes. Peut-être certains le sont, en tout cas pas le Gouvernement.
Q- Oui, oui, mais il y en a pas mal qui sentent qu'ils sont en période
intéressante : les fonctionnaires, les agriculteurs !
R- Certains pourraient peut-être espérer, mais ce n'est pas du tout la politique du Gouvernement.
Q- L'Etat dépense chaque année T. Breton, 20 % de plus que les impôts qu'il prélève. Dès le premier jour à Bercy, vous avez promis d'être intraitable sur les dépenses publiques. Quarante jours après et entre nous, vous pouvez répéter "intraitable" ?
R- Eh bien je pense que... demandez ça à mes collègues du Gouvernement, ils répondront mieux que moi.
Q- Pour financer la solidarité, est-ce que vous avez vraiment besoin du jour de la Pentecôte ou vous pouvez faire autrement ?
R- J.-P. Elkabbach, souvenons-nous, 2003, la canicule. Souvenons-nous qu'un certain nombre de nos aînés en souffrent. A ce moment là, formidable geste de solidarité de l'ensemble des Françaises et des Français. On décide de faire le sacrifice, le mot est un peu fort, d'un jour férié, d'un jour férié où on va travailler, cela rapporter 2 milliards pour nos aînés, pour les handicapés. Tout le monde est d'accord. Et puis après, quand on arrive au pied du mur, qu'est-ce que j'entends, qu'est-ce que nous entendons ? "Touche pas à mon férié !". Est-ce que c'est vraiment digne ?
Q- Vous voulez dire qu'il y a un manque de solidarité au niveau national, ou à une forme d'égoïsme de la part de chacun ?
R- Je pense, J.-. Elkabbach, qu'il faut être conscient que nous sommes aujourd'hui dans une société et c'est formidable, où la durée de vie est beaucoup plus longue qu'auparavant. Quand j'ai démarré ma vie active, on rentrait dans la vie active à 18 ans, on en sortait à 65 ans. Aujourd'hui on rentre, hélas - on y reviendra peut-être tout à l'heure dans la vie active - à 24 ans et on en sort à 57 ans, alors que dans le même temps, l'espérance de vie est passée de 74 ans à 84 ans, cherchez l'erreur ...
Q- Alors qu'est-ce que vous dites aux syndicats, qui sont divisés par ailleurs, et qui se retrouvent pour demander la suppression du lundi férié de la Pentecôte, qu'est-ce que vous leur dites ?
R- Je leur dis ; pensez aussi à vos aînés !
Q- La Commission de Bruxelles qui fait tout son possible pour donner le moral aux Français et aux Européens prévoit une baisse de la croissance, 1,6 à cause de la flambée du pétrole aujourd'hui encore et de l'euro. Vous, pour la France, c'est combien ?
R- Tout d'abord, l'année dernière, la Commission européenne prévoyait pour l'Europe 2, nous avons fait 2,6. Cette année, elle prévoit pour l'Europe 1,6 et j'ai pris, là, encore une fois, un engagement : c'est de tout faire pour être entre 2 et 2,5 et je répète cet engagement aujourd'hui aux Françaises et aux Français J.-P. Elkabbach.
Q- Mais, vous dites, je vais tout faire... Mais c'est toute la collectivité française qui est concernée.
R- Ah mais bien entendu !
Q- Est-ce que vous dites aux patrons, etc., parce que je lisais que J.-L. Borloo demandait aux patrons par exemple plus de patriotisme. Cela veut peut-être dire qu'ils ne sont pas assez audacieux, pas assez patriotes alors ?
R- Non, je crois que, vous savez les patrons, ils sont là pour s'engager. Vous savez, je vais beaucoup sur le terrain, vous me connaissez depuis longtemps, j'aime ça et j'en ai besoin. La semaine dernière, j'étais dans les Bouches du Rhône, la semaine d'avant dans le Tarn-et-Garonne, en Ariège ou dans le Cantal. Je rencontre partout où je vais des Françaises et des Français qui veulent se battre, qui veulent se retrousser les manches. Et les patrons, qu'ils soient grands ou petits, sont dans cet état d'esprit. Donc J.-P. Elkabbach, moi j'ai confiance, j'ai confiance dans mon pays, j'ai confiance dans ceux qui se battent, j'ai confiance dans ceux qui disent : il faut aussi travailler pour créer de la richesse.
Q- Mais d'où elle vient cette confiance, d'où vient-elle ?
R- Cette confiance elle vient des hommes et des femmes qui nous entourent. N'écoutons pas uniquement les oiseaux de mauvais augure. Vous savez, quand on est ministre des Finances on doit dire la situation de la France. Nous avons un déficit trop important, nous avons une dette trop importante. Mais il y a aussi des éléments positifs et c'est pour ça que j'ai pris un engagement de faire une communication tous les trois mois aux Françaises et aux Français en leur disant ce qu'il va bien, parce qu'il y a aussi beaucoup de choses qui vont bien - Dieu soit loué - dans notre pays !
Q- Vous, vous croyez en l'Europe, T. Breton. Les sondages donnent au "non" une certaine avance, qui se stabilise aujourd'hui. Est-ce que c'est réversible ?
R- Le président de la République a souhaité un référendum. Il aurait pu faire comme certains pays, uniquement le faire par l'Assemblée et le Sénat...
Q- Il ne l'a pas fait !
R- Il a souhaité que chaque Française et chaque Français s'expriment. C'est aussi pour que le "oui" de la France soit un "oui" plus fort. Car effectivement, si jamais tout le monde vote, on sera plus fort dans l'Europe. Moi je veux dire une seule chose, j'ai négocié pour la France, selon les consignes du président de la République, la modification du pacte de stabilité et de croissance. Eh bien je voudrais vous dire, J.-P. Elkabbach, que nous avons réussi à faire entendre la voix de la France, pourquoi ? Parce que la France est forte dans l'Europe.
Q- Mais cela veut dire que s'il y a un "non", cela change tout ?
R- Non, non, je ne dis pas ça.
Q- Sans exagérer le pire, s'il y a un "non", quel est le scénario et les conséquences pour l'économie ?
R- J.-P. Elkabbach, je ne dis pas ça et encore une fois, chaque voix compte et chacune est respectable. Je dis uniquement que si jamais nous avons un "non", la France sera moins forte dans l'Europe, c'est tout. Et ce sera donc plus difficile de nous faire entendre, car voyez-vous l'Europe se fera, avec ou sans la France. Donc ou bien on est sur un strapontin et puis on ne se fera pas beaucoup entendre, ou bien on est clairement avec l'ensemble des autres pays en position et en tête et à ce moment là on fera entendre la différence de la France, notre spécificité, notre petite lumière intérieure à l'ensemble des Européens. Et c'est pour ça que moi je dis très clairement : il faut voter oui, c'est clair.
Q- Au sommet européen de Bruxelles et à Tokyo, vous paraissiez faire des démonstrations techniques avec votre portable au président de la République. Est-ce que vous êtes en train d'en faire un fan des nouvelles technologies ? Lui vous a appris le sumo, en échange qu'est-ce que vous lui apprenez ?
R- D'abord, j'ai beaucoup à apprendre du président de la République et effectivement nous regardions sur mon téléphone portable les dernières nouvelles, il s'agissait en l'occurrence d'une bonne nouvelle, qui était la différence entre les taux de change eurodollar. Le fait que la FED américaine avait augmenté d'un quart de point les taux.
Q- Et votre ami du Poitou-Charentes, J.-P. Raffarin, il vous soutient ?
On prétend même que la préférence de J.-P. Raffarin pour T. Breton irait jusqu'à chauffer déjà son fauteuil de Matignon pour vous, c'est vrai ça ?
R- C'est plutôt la différence que je devrais dire : moi je suis l'un des ministres de J.-P. Raffarin et donc en tant qu'un ministre de J.-P. Raffarin, j'essaye de tout faire pour soutenir le Gouvernement, et le Premier ministre, bien entendu.
Q- Citez-moi et on termine, deux grands principes de la stratégie Breton pour l'industrie, pour l'économie !
R- D'abord, la transparence et puis la confiance et puis je rajouterai aussi l'engagement.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 6 avril 2005)
R- Bonjour J.-P. Elkabbach.
Q- C'est bien Bercy ?
R- C'est surtout un honneur, un honneur pour moi de servir la France, un honneur pour moi de me battre pour les Françaises et les Français et c'est une fierté aussi.
Q- Est-ce que vous pouvez décider aussi vite que dans l'entreprise ?
R- On peut décider vite, oui, oui, bien sûr. Vous savez, d'abord on peut décider vite parce que je connais très bien beaucoup des directeurs, des fonctionnaires, des agents qui travaillent à Bercy, parce que moi-même j'ai été un grand utilisateur de Bercy depuis de nombreuses années donc je les ai retrouvés et maintenant je suis leur patron.
Q- Est-ce que vous vous considérez comme un ministre technique ou un ministre politique d'abord ?
R- Je suis un ministre au service de l'économie, et un ministre au service de l'économie c'est un ministre technique, parce que d'abord, il faut contrôler le budget, il faut faire en sorte de tenir nos engagements, il faut faire en sorte de tenir les objectifs que nous nous sommes fixés. Et puis un ministre politique aussi, parce que l'économie, c'est aussi politique.
Q- Alors on va prendre des exemples, Gaz de France, est-ce que vous renoncez à ouvrir le capital de GDF ou vous en retardez le moment ?
R- Ah non, pas du tout, vous savez, il y a une loi qui a été votée, donc je suis là aussi pour faire appliquer les lois. La loi a été votée pour Gaz de France, elle a été votée aussi pour EDF. Donc aujourd'hui, j'ai demandé à ces deux très grandes entreprises françaises de se tenir prêtes. Elles sont je crois maintenant prêtes.
Q- Prêtes à quoi ?
R- Prêtes à ouvrir leur capital, ce qui est très important, parce que cela va leur donner les moyens de plus de flexibilité.
Q- Vous pensez que c'est bon pour l'entreprise et les salariés ?
R- Des moyens de plus d'autonomie, donc bien sûr c'est bon pour l'entreprise et pour les salariés et pour revenir à Gaz de France, j'ai demandé à J.-F. Cirelli de prendre les dispositions pour être prêt. Après cela, J.-P. Elkabbach, c'est moi qui décide et je déciderai quand je jugerai le moment venu, j'espère que cela sera avant l'été.
Q- Oui, avant l'été, c'est-à-dire avant le 21 juin.
R- Avant les vacances d'été.
Q- Avant les vacances d'été, c'est-à-dire après le référendum et avant les vacances d'été.
R- Ah non, non, cela peut commencer tout de suite, et cela peut être, jusqu'au... je ne sais pas les vacances d'été, disons le mois d'août quoi, après ça les marchés sont fermés vous savez.
Q- Et pour EDF qui est prévu à l'automne pas de changement ?
R- Eh bien EDF, pareil, j'ai demandé à P. Gadonneix de se tenir prêt pour faire en sorte que nous puissions intervenir, si c'est possible et si les conditions de marché le permettent car il s'agira d'une très grande augmentation de capital, qui donnera, encore une fois à EDF les moyens de son développement, eh bien à l'automne ce serait bien.
Q- Le prix du gaz qui est indexé sur celui du pétrole est en train d'atteindre des records, les tarifs du gaz devaient augmenter je crois le 1er mai, c'est toujours le 1er mai ?
R- On a demandé effectivement, là encore, à J.-F. Cirelli, le président de Gaz de France de nous proposer une méthode qui va permettre d'indexer, ce qui est normal, les tarifs du gaz sur le prix du brut. La décision va être prise et celle-ci devrait intervenir là encore début juillet, mais avec une visibilité, avec une visibilité sur les années qui viennent, car il faut que les consommateurs sachent ce qui les attend.
Q- Aujourd'hui, troisième rencontre de R. Dutreil avec les fonctionnaires. Ce qui est acquis, c'est une augmentation de 1,8 %, 'est-à-dire le taux de l'inflation, T. Breton. Il y a une pression syndicale, de Force ouvrière en particulier, et cette pression augmente sur les salaires du privé et du public. Est-ce que vous souhaitez, pour la réunion de tout à l'heure, un engagement des syndicats pour 2006 et avec de préférence un accord sur la modernisation de la Fonction publique en même temps ?
R- Il y a deux choses J.-P. Elkabbach, tout d'abord effectivement, il y a un problème de pouvoir d'achat dans ce pays, nous en sommes conscients, j'en suis conscient en tant que ministre de l'Economie, donc il faut faire un effort...
Q- D'accord, vous êtes conscient, qu'est-ce que vous faites ?
R- Et précisément nous avons avec R. Dutreil, avec l'ensemble du gouvernement donc fait en sorte que cette année les fonctionnaires vont pouvoir obtenir 1,8% d'augmentation, c'est-à-dire un petit peu plus que l'augmentation de l'inflation, donc c'est une bonne chose. Mais l'année prochaine, là encore R. Dutreil va discuter avec les syndicats, moi je suis clairement pour une discussion qui soit une discussion ouverte, constructible. Vous savez, je souhaite un Etat exemplaire, je souhaite un Etat qui se réforme, et ça on le fera avec l'ensemble des agents. Donc R. Dutreil va ouvrir un vaste chantier, un vaste chantier...
Q- Est-ce que l'année prochaine, pour être concret, est-ce que l'année prochaine vous dites également, comme l'inflation ?
R- Un vaste chantier je voulais dire, parce que, ce qu'il faut, c'est que l'on se réforme, ce qu'il faut c'est qu'on travaille mieux au service des Français et pour cela si on augmente la productivité, la compétitivité, je trouve qu'il est légitime que tout le monde en bénéficie, à savoir les agents de l'état, mais aussi les consommateurs. Donc cela ne me choque pas du tout, que si les efforts sont là, eh bien qu'ils soient redistribués, en particulier aux agents de la Fonction publique.
Q- Donc le Gouvernement, T. Breton, écoute les fonctionnaires, il écoute les agriculteurs pour leurs congés payés, il écoute bientôt les médecins, il aide les emplois Borloo... Est-ce que vous avez calculé l'addition des nouvelles promesses et aussi leurs conséquences sur les finances publiques ?
R- Vous savez, mon travail c'est de faire en sorte que ceux-ci tiennent dans les engagements de la France, ces engagements de la France je les ai pris au nom de la France et je les ai répétés à Bruxelles, c'est-à-dire que nous serons en dessous de 3 % de déficit en 2005, on y sera ! Après ça, à charge pour moi précisément de faire en sorte que l'ensemble de ces dépenses soient compensées par des améliorations de la productivité, des économies et pour l'instant on tient.
Q- C'est un pari ?
R- Non, c'est une obligation.
Q- Oui mais de l'autre côté, quand vous dites, productivité etc., vous n'êtes pas assuré de l'obtenir.
R- Oui, mais je sais faire les additions, J.-P. Elkabbach.
Q- Et comment vous la faites, là ?
R- Eh bien, précisément, en travaillant globalement avec l'ensemble de mes collègues du Gouvernement.
Q- En période électorale, en France, est-ce qu'on arrive à tenir les comptes, ou est-ce qu'il faut oublier les comptes ?
R- Attendez, on n'est pas dans une période électorale classique, on est dans une période référendaire où l'ensemble des Françaises et des Français vont avoir à prendre position sur le traité constitutionnel. Ce n'est pas une période électorale, on n'est pas dans des jeux électoralistes. Peut-être certains le sont, en tout cas pas le Gouvernement.
Q- Oui, oui, mais il y en a pas mal qui sentent qu'ils sont en période
intéressante : les fonctionnaires, les agriculteurs !
R- Certains pourraient peut-être espérer, mais ce n'est pas du tout la politique du Gouvernement.
Q- L'Etat dépense chaque année T. Breton, 20 % de plus que les impôts qu'il prélève. Dès le premier jour à Bercy, vous avez promis d'être intraitable sur les dépenses publiques. Quarante jours après et entre nous, vous pouvez répéter "intraitable" ?
R- Eh bien je pense que... demandez ça à mes collègues du Gouvernement, ils répondront mieux que moi.
Q- Pour financer la solidarité, est-ce que vous avez vraiment besoin du jour de la Pentecôte ou vous pouvez faire autrement ?
R- J.-P. Elkabbach, souvenons-nous, 2003, la canicule. Souvenons-nous qu'un certain nombre de nos aînés en souffrent. A ce moment là, formidable geste de solidarité de l'ensemble des Françaises et des Français. On décide de faire le sacrifice, le mot est un peu fort, d'un jour férié, d'un jour férié où on va travailler, cela rapporter 2 milliards pour nos aînés, pour les handicapés. Tout le monde est d'accord. Et puis après, quand on arrive au pied du mur, qu'est-ce que j'entends, qu'est-ce que nous entendons ? "Touche pas à mon férié !". Est-ce que c'est vraiment digne ?
Q- Vous voulez dire qu'il y a un manque de solidarité au niveau national, ou à une forme d'égoïsme de la part de chacun ?
R- Je pense, J.-. Elkabbach, qu'il faut être conscient que nous sommes aujourd'hui dans une société et c'est formidable, où la durée de vie est beaucoup plus longue qu'auparavant. Quand j'ai démarré ma vie active, on rentrait dans la vie active à 18 ans, on en sortait à 65 ans. Aujourd'hui on rentre, hélas - on y reviendra peut-être tout à l'heure dans la vie active - à 24 ans et on en sort à 57 ans, alors que dans le même temps, l'espérance de vie est passée de 74 ans à 84 ans, cherchez l'erreur ...
Q- Alors qu'est-ce que vous dites aux syndicats, qui sont divisés par ailleurs, et qui se retrouvent pour demander la suppression du lundi férié de la Pentecôte, qu'est-ce que vous leur dites ?
R- Je leur dis ; pensez aussi à vos aînés !
Q- La Commission de Bruxelles qui fait tout son possible pour donner le moral aux Français et aux Européens prévoit une baisse de la croissance, 1,6 à cause de la flambée du pétrole aujourd'hui encore et de l'euro. Vous, pour la France, c'est combien ?
R- Tout d'abord, l'année dernière, la Commission européenne prévoyait pour l'Europe 2, nous avons fait 2,6. Cette année, elle prévoit pour l'Europe 1,6 et j'ai pris, là, encore une fois, un engagement : c'est de tout faire pour être entre 2 et 2,5 et je répète cet engagement aujourd'hui aux Françaises et aux Français J.-P. Elkabbach.
Q- Mais, vous dites, je vais tout faire... Mais c'est toute la collectivité française qui est concernée.
R- Ah mais bien entendu !
Q- Est-ce que vous dites aux patrons, etc., parce que je lisais que J.-L. Borloo demandait aux patrons par exemple plus de patriotisme. Cela veut peut-être dire qu'ils ne sont pas assez audacieux, pas assez patriotes alors ?
R- Non, je crois que, vous savez les patrons, ils sont là pour s'engager. Vous savez, je vais beaucoup sur le terrain, vous me connaissez depuis longtemps, j'aime ça et j'en ai besoin. La semaine dernière, j'étais dans les Bouches du Rhône, la semaine d'avant dans le Tarn-et-Garonne, en Ariège ou dans le Cantal. Je rencontre partout où je vais des Françaises et des Français qui veulent se battre, qui veulent se retrousser les manches. Et les patrons, qu'ils soient grands ou petits, sont dans cet état d'esprit. Donc J.-P. Elkabbach, moi j'ai confiance, j'ai confiance dans mon pays, j'ai confiance dans ceux qui se battent, j'ai confiance dans ceux qui disent : il faut aussi travailler pour créer de la richesse.
Q- Mais d'où elle vient cette confiance, d'où vient-elle ?
R- Cette confiance elle vient des hommes et des femmes qui nous entourent. N'écoutons pas uniquement les oiseaux de mauvais augure. Vous savez, quand on est ministre des Finances on doit dire la situation de la France. Nous avons un déficit trop important, nous avons une dette trop importante. Mais il y a aussi des éléments positifs et c'est pour ça que j'ai pris un engagement de faire une communication tous les trois mois aux Françaises et aux Français en leur disant ce qu'il va bien, parce qu'il y a aussi beaucoup de choses qui vont bien - Dieu soit loué - dans notre pays !
Q- Vous, vous croyez en l'Europe, T. Breton. Les sondages donnent au "non" une certaine avance, qui se stabilise aujourd'hui. Est-ce que c'est réversible ?
R- Le président de la République a souhaité un référendum. Il aurait pu faire comme certains pays, uniquement le faire par l'Assemblée et le Sénat...
Q- Il ne l'a pas fait !
R- Il a souhaité que chaque Française et chaque Français s'expriment. C'est aussi pour que le "oui" de la France soit un "oui" plus fort. Car effectivement, si jamais tout le monde vote, on sera plus fort dans l'Europe. Moi je veux dire une seule chose, j'ai négocié pour la France, selon les consignes du président de la République, la modification du pacte de stabilité et de croissance. Eh bien je voudrais vous dire, J.-P. Elkabbach, que nous avons réussi à faire entendre la voix de la France, pourquoi ? Parce que la France est forte dans l'Europe.
Q- Mais cela veut dire que s'il y a un "non", cela change tout ?
R- Non, non, je ne dis pas ça.
Q- Sans exagérer le pire, s'il y a un "non", quel est le scénario et les conséquences pour l'économie ?
R- J.-P. Elkabbach, je ne dis pas ça et encore une fois, chaque voix compte et chacune est respectable. Je dis uniquement que si jamais nous avons un "non", la France sera moins forte dans l'Europe, c'est tout. Et ce sera donc plus difficile de nous faire entendre, car voyez-vous l'Europe se fera, avec ou sans la France. Donc ou bien on est sur un strapontin et puis on ne se fera pas beaucoup entendre, ou bien on est clairement avec l'ensemble des autres pays en position et en tête et à ce moment là on fera entendre la différence de la France, notre spécificité, notre petite lumière intérieure à l'ensemble des Européens. Et c'est pour ça que moi je dis très clairement : il faut voter oui, c'est clair.
Q- Au sommet européen de Bruxelles et à Tokyo, vous paraissiez faire des démonstrations techniques avec votre portable au président de la République. Est-ce que vous êtes en train d'en faire un fan des nouvelles technologies ? Lui vous a appris le sumo, en échange qu'est-ce que vous lui apprenez ?
R- D'abord, j'ai beaucoup à apprendre du président de la République et effectivement nous regardions sur mon téléphone portable les dernières nouvelles, il s'agissait en l'occurrence d'une bonne nouvelle, qui était la différence entre les taux de change eurodollar. Le fait que la FED américaine avait augmenté d'un quart de point les taux.
Q- Et votre ami du Poitou-Charentes, J.-P. Raffarin, il vous soutient ?
On prétend même que la préférence de J.-P. Raffarin pour T. Breton irait jusqu'à chauffer déjà son fauteuil de Matignon pour vous, c'est vrai ça ?
R- C'est plutôt la différence que je devrais dire : moi je suis l'un des ministres de J.-P. Raffarin et donc en tant qu'un ministre de J.-P. Raffarin, j'essaye de tout faire pour soutenir le Gouvernement, et le Premier ministre, bien entendu.
Q- Citez-moi et on termine, deux grands principes de la stratégie Breton pour l'industrie, pour l'économie !
R- D'abord, la transparence et puis la confiance et puis je rajouterai aussi l'engagement.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 6 avril 2005)