Texte intégral
Q- R. Sicard-. On disait tout à l'heure dans le journal qu'une bavure policière aurait eu lieu à Paris ces derniers jours. Quatre policiers sont mis en cause ; ils auraient passé un automobiliste à tabac. Comment réagissez-vous ?
R- "Je crois qu'il faut être prudent. Il faut surtout que la transparence ait lieu, que l'on sache ce qui s'est passé. S'il y a faute et "bavure" comme on dit, il faut qu'il y ait sanction. Le métier de policier est effectivement un métier difficile, un métier à risques mais il doit se faire dans le respect essentiel du droit, des droits de la personne, même si parfois on est en situation difficile. La demande que l'on peut faire à ce stade aujourd'hui, c'est qu'il n'y ait aucun secret et que tout soit transparent. Je crois qu'il serait nécessaire que les choses soient rappelées au ministre de l'Intérieur."
Q- Le ministre de l'Intérieur a déjà réagi. Comme vous, il dit qu'il faut prendre des sanctions s'il y a faute.
R- "A ce stade, je ne veux pas en faire un élément polémique. Je crois qu'il y a assez matière à critiquer - je l'ai d'ailleurs fait avec un responsable national de la sécurité du PS, récemment - sur la politique suivie par N. Sarkozy, pour ne pas tout de suite sauter comme la vérole sur le bas clergé, sur les moindres mauvais comportements policiers. Maintenant, il est vrai qu'à partir du moment où on pousse les hommes à faire du chiffre, il peut aussi y avoir des dérapages et on peut être dans ce type de situation."
Q-Autre dossier : les chiffres du chômage. Ils viennent de tomber et ils sont plutôt bons. Il y aurait plus de 27.000 personnes en moins sur les listes de l'ANPE. C'est le retour de la croissance que le Gouvernement espérait ?
R- "Non. Je crois qu'il n'y a pas de quoi pavoiser, pas de quoi être fier. C'est un effet d'abord statistique avant d'être un effet économique. On a sorti du calcul des Assedic un certain nombre de personnes. Celles-ci ne répondent plus automatiquement aux convocations de l'ANPE, elles n'apparaissent donc plus dans les chiffres du chômage. On est loin, très loin, des bonnes nouvelles que nous annonce le ministre de l'Economie, malheureusement."
Q- Le ministère reconnaît qu'une partie est due à cet effet statistique, mais il dit quand même qu'il y a aussi le retour de la croissance qui commence à jouer...
R- "A partir du moment où on a sorti un certain nombre de gens des calculs des chiffres du chômage, maintenant, on va nous expliquer que c'est la reprise. C'est naturel de la part du ministre de l'Economie que d'essayer de tirer à lui la couverture."
Q- Vous n'y croyez pas ? Même l'Insee dit que le retour de la croissance se profile.
R- "Je suis très prudent, parce que je considère que la politique économique suivie par le Gouvernement ne crée pas les conditions d'un véritable retour à la croissance. Je ne suis pas du tout convaincu que dans les mois qui viennent, tout cela va aller mieux."
Q- Le PS dépose justement une motion de censure à l'Assemblée nationale, contre la politique économique et sociale du Gouvernement. Mais le Gouvernement dit que c'est une opération politicienne, juste à un mois des élections régionales ?
R- "En quoi est-ce une manoeuvre politicienne ? Nous avons une Assemblée nationale, c'est le Parlement, c'est là où se discute la politique de la France. Il est normal qu'à ce stade, nous essayons de créer les conditions d'un véritable débat politique sur ce qui a été fait depuis deux ans."
Q- Pourquoi juste à un mois des régionales ?
R- "Depuis plusieurs semaines maintenant, nous demandons un débat contradictoire. Nous avons demandé par exemple, qu'il y ait à 20h30, sur n'importe quelle chaîne de télévision, un débat entre F. Hollande et J.-P. Raffarin, pour qu'il y ait justement information. La moindre des choses, le moindre des respects que l'on doit à nos concitoyens, à la veille d'une élection régionale et cantonale, c'est que l'on puisse en saisir les enjeux. Les enjeux ne sont pas des enjeux locaux. Et d'ailleurs, le Gouvernement..."
Q- Ce n'est pas ce que dit J.-P. Raffarin, qui dit justement que c'est une élection locale, et que dans ces conditions, il n'a pas lieu de faire un débat national, même à la télé.
R- "Il essaye de dépolitiser au maximum le scrutin. Mais je vais vous faire une remarque : vous êtes peut-être comme moi quelqu'un qui paye ses impôts et donc, vous avez reçu votre déclaration d'impôts. Un document accompagne la déclaration et c'est un véritable tract de propagande électorale. Je voudrais savoir sur quel compte de campagne est facturé ce document. Cela veut dire tout simplement que pendant que le Gouvernement..."
Q- Mais tous les ans, il y a un petit le mot du ministre avec la déclaration d'impôts...
R-"Là, honnêtement, on n'est pas dans le petit mot du ministre ! Je suis à peu près certain que si je fais la comparaison entre ce document et un trac de l'UMP, il n'y aura pas beaucoup de différence. Cela veut qu'on a un Gouvernement, qui, d'un côté, essaye d'endormir et de l'autre, effectivement, qui fait tout pour essayer de préserver sa situation. Depuis deux ans, le Gouvernement a mis en place ce que j'appellerais un "capitalisme dur". On le voit : ce sont les patrons voyous, les salariés Kleenex, les conditions stressantes de travail..."
Q- Les patrons voyous, ce n'est pas de la faute du Gouvernement...
R- "Non, évidemment, ce n'est pas la faute du Gouvernement en tant que tel. Mais c'est un climat qui s'installe en France. Aujourd'hui, ce sont des salariés qui baissent la tête, qui acceptent n'importe quoi parce qu'il n'y a pas beaucoup de travail, ce sont des travailleurs pauvres, avec la mise en place du revenu minimum tel que le conçoit le Gouvernement. On a donc ce capitalisme dur, qui est contraire à l'histoire de notre pays, contraire aux principes de solidarité et qui, d'ailleurs, d'un certain point de vue, tourne même la page de l'héritage gaulliste. Il est donc normal, à ce stade, dans ces élections, que nous posions ces questions-là et que nous demandions à nos concitoyens s'il faut oui ou non, que l'on continue ou s'il faut dire "stop". C'est la dernière élection avant trois ans. Il est donc normal qu'il y ait ce débat-là. La motion de censure a donc pour vocation d'attirer l'attention de l'ensemble de nos concitoyens sur la politique suivie par le Gouvernement, sur l'enjeu de ses élections. La question qui est posée, c'est de savoir si on veut faire des régions et des départements des remparts contre cette politique libérale en matière d'éducation, de logement, parce que ce ne sont pas simplement des élections de politique nationale, c'est aussi la vie quotidienne des Français qui est concernée par cela. Et quand on voit, par exemple, ce qui est en train de se préparer à l'Assemblée nationale - c'est aussi cela, le sens de la motion de censure -, c'est-à-dire une décentralisation, on va envoyer aux collectivités locales un certain nombre de responsabilités qui appartenaient à l'Etat, sans leur donner les moyens financiers, on voit le risque que l'on va encourir. Donc, voilà le sens de la motion de censure."
Q- Ce que dit le Gouvernement, c'est que s'il prend des mesures un peu difficiles, c'est parce que la gauche, quand elle était au pouvoir, n'a rien fait et qu'il faut rattraper le temps perdu.
R- "J'aime à citer cette phrase du Président Mao Tse Toung qui disait : "L'avenir est radieux mais la route est sinueuse". On dit toujours ça. Je crois qu'on aurait ou faire autrement. Si on n'avait pas baisser les impots des riches comme on l'a fait, on aurait pu disposer d'un certain nombre de marges financières. Si on n'avait pas supprimé les emplois-jeunes, on ne se retrouverait pas dans une situation de montée du chômage. Les mesures qui ont été prises sont donc dans une logique : accompagner le processus d'intégration de la France dans la mondialisation libérale. En même temps, on se rend compte des dégâts sociaux considérables que cela génère. Donc, on aurait pu avoir... Ce qui me gêne, si vous voulez, c'est que le message du 21 avril 2002 de nos concitoyens est un message qui demande plus de sécurité, plus de protection. Et c'est l'inverse qui est en train d'être mis en place."
Q- En 2002, les gens ont élu J. Chirac et il fait sa politique.
R- "Oui, ils ont élu J. Chirac qui, au premier tour, ne faisait que 19 %. Ils n'ont pas voté pour le capitalisme dur que nous connaissons aujourd'hui, ils n'ont pas voté pour cette politique qui, je crois, est essentiellement inégalitaire et qui fait que les forts s'en sortent toujours mieux et les faibles sont dans des situations plus difficiles. Ce qui me frappe en ce moment,c'est que dans mes permanences, au quotidien, y compris dans la campagne électorale, je vois beaucoup de gens venir me dire : "Monsieur, c'est dur en ce moment, on n'y arrive plus. On n'est pas partis en vacances, parce que cette fois-ci, on est obligé de compter. On ne sait pas comment on va arriver à payer nos impôts". C'est cette situation que vivent beaucoup de nos concitoyens, pour quelques privilégiés qui s'en sortent."
Q- Le paradoxe, c'est que ce mécontentement ne se capitalise pas pour la gauche, on ne sent pas dans les sondages une montée en puissance de la gauche.
R- "Je crois au contraire que quelque chose est en train de se préparer : une grosse colère. Ce que j'espère, effectivement, c'est que les gens vont se servir du bulletin de vote pour exprimer aussi cette colère-là. Il faut voter et il faut dire ce que l'on pense de la situation actuelle. Quand je vois ce qui est en train de se passer, dans toutes les professions de la recherche, dans toutes les professions du spectacle, quand je vois, y compris, d'un certain point de vue, l'exemplarité du conflit des intermittents, qui malgré le mépris du ministre, sont en train de montrer qu'ils vont gagner quelque chose. Eh bien, il me semble que toute cette colère-là doit se retrouver dans ces élections. J'ai le sentiment qu'il y aujourd'hui une utilisation intelligente du bulletin de vote, socialiste notamment ou de la gauche rassemblée, pour dire qu'il faut en finir avec cette politique du Gouvernement."
Q- Le risque, pour vous, n'est-ce pas la montée en puissance de l'extrême gauche ?
R- "De l'extrême gauche, je ne crois. Le risque, aujourd'hui, c'est effectivement d'abord l'abstention, c'est-à-dire un certain désespoir qui gagnerait nos concitoyens, en disant que "finalement, tout ça c'est pareil". Je veux leur dire que la gauche, dans les régions et les départements, servira de rempart face au libéralisme. C'est pour cela que le message doit être clair et qu'il faut dénoncer les manoeuvres du Gouvernement, qui voudrait tout faire pour qu'il n'y ait aucune lisibilité du résultat des élections."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 2 mars 2004)
R- "Je crois qu'il faut être prudent. Il faut surtout que la transparence ait lieu, que l'on sache ce qui s'est passé. S'il y a faute et "bavure" comme on dit, il faut qu'il y ait sanction. Le métier de policier est effectivement un métier difficile, un métier à risques mais il doit se faire dans le respect essentiel du droit, des droits de la personne, même si parfois on est en situation difficile. La demande que l'on peut faire à ce stade aujourd'hui, c'est qu'il n'y ait aucun secret et que tout soit transparent. Je crois qu'il serait nécessaire que les choses soient rappelées au ministre de l'Intérieur."
Q- Le ministre de l'Intérieur a déjà réagi. Comme vous, il dit qu'il faut prendre des sanctions s'il y a faute.
R- "A ce stade, je ne veux pas en faire un élément polémique. Je crois qu'il y a assez matière à critiquer - je l'ai d'ailleurs fait avec un responsable national de la sécurité du PS, récemment - sur la politique suivie par N. Sarkozy, pour ne pas tout de suite sauter comme la vérole sur le bas clergé, sur les moindres mauvais comportements policiers. Maintenant, il est vrai qu'à partir du moment où on pousse les hommes à faire du chiffre, il peut aussi y avoir des dérapages et on peut être dans ce type de situation."
Q-Autre dossier : les chiffres du chômage. Ils viennent de tomber et ils sont plutôt bons. Il y aurait plus de 27.000 personnes en moins sur les listes de l'ANPE. C'est le retour de la croissance que le Gouvernement espérait ?
R- "Non. Je crois qu'il n'y a pas de quoi pavoiser, pas de quoi être fier. C'est un effet d'abord statistique avant d'être un effet économique. On a sorti du calcul des Assedic un certain nombre de personnes. Celles-ci ne répondent plus automatiquement aux convocations de l'ANPE, elles n'apparaissent donc plus dans les chiffres du chômage. On est loin, très loin, des bonnes nouvelles que nous annonce le ministre de l'Economie, malheureusement."
Q- Le ministère reconnaît qu'une partie est due à cet effet statistique, mais il dit quand même qu'il y a aussi le retour de la croissance qui commence à jouer...
R- "A partir du moment où on a sorti un certain nombre de gens des calculs des chiffres du chômage, maintenant, on va nous expliquer que c'est la reprise. C'est naturel de la part du ministre de l'Economie que d'essayer de tirer à lui la couverture."
Q- Vous n'y croyez pas ? Même l'Insee dit que le retour de la croissance se profile.
R- "Je suis très prudent, parce que je considère que la politique économique suivie par le Gouvernement ne crée pas les conditions d'un véritable retour à la croissance. Je ne suis pas du tout convaincu que dans les mois qui viennent, tout cela va aller mieux."
Q- Le PS dépose justement une motion de censure à l'Assemblée nationale, contre la politique économique et sociale du Gouvernement. Mais le Gouvernement dit que c'est une opération politicienne, juste à un mois des élections régionales ?
R- "En quoi est-ce une manoeuvre politicienne ? Nous avons une Assemblée nationale, c'est le Parlement, c'est là où se discute la politique de la France. Il est normal qu'à ce stade, nous essayons de créer les conditions d'un véritable débat politique sur ce qui a été fait depuis deux ans."
Q- Pourquoi juste à un mois des régionales ?
R- "Depuis plusieurs semaines maintenant, nous demandons un débat contradictoire. Nous avons demandé par exemple, qu'il y ait à 20h30, sur n'importe quelle chaîne de télévision, un débat entre F. Hollande et J.-P. Raffarin, pour qu'il y ait justement information. La moindre des choses, le moindre des respects que l'on doit à nos concitoyens, à la veille d'une élection régionale et cantonale, c'est que l'on puisse en saisir les enjeux. Les enjeux ne sont pas des enjeux locaux. Et d'ailleurs, le Gouvernement..."
Q- Ce n'est pas ce que dit J.-P. Raffarin, qui dit justement que c'est une élection locale, et que dans ces conditions, il n'a pas lieu de faire un débat national, même à la télé.
R- "Il essaye de dépolitiser au maximum le scrutin. Mais je vais vous faire une remarque : vous êtes peut-être comme moi quelqu'un qui paye ses impôts et donc, vous avez reçu votre déclaration d'impôts. Un document accompagne la déclaration et c'est un véritable tract de propagande électorale. Je voudrais savoir sur quel compte de campagne est facturé ce document. Cela veut dire tout simplement que pendant que le Gouvernement..."
Q- Mais tous les ans, il y a un petit le mot du ministre avec la déclaration d'impôts...
R-"Là, honnêtement, on n'est pas dans le petit mot du ministre ! Je suis à peu près certain que si je fais la comparaison entre ce document et un trac de l'UMP, il n'y aura pas beaucoup de différence. Cela veut qu'on a un Gouvernement, qui, d'un côté, essaye d'endormir et de l'autre, effectivement, qui fait tout pour essayer de préserver sa situation. Depuis deux ans, le Gouvernement a mis en place ce que j'appellerais un "capitalisme dur". On le voit : ce sont les patrons voyous, les salariés Kleenex, les conditions stressantes de travail..."
Q- Les patrons voyous, ce n'est pas de la faute du Gouvernement...
R- "Non, évidemment, ce n'est pas la faute du Gouvernement en tant que tel. Mais c'est un climat qui s'installe en France. Aujourd'hui, ce sont des salariés qui baissent la tête, qui acceptent n'importe quoi parce qu'il n'y a pas beaucoup de travail, ce sont des travailleurs pauvres, avec la mise en place du revenu minimum tel que le conçoit le Gouvernement. On a donc ce capitalisme dur, qui est contraire à l'histoire de notre pays, contraire aux principes de solidarité et qui, d'ailleurs, d'un certain point de vue, tourne même la page de l'héritage gaulliste. Il est donc normal, à ce stade, dans ces élections, que nous posions ces questions-là et que nous demandions à nos concitoyens s'il faut oui ou non, que l'on continue ou s'il faut dire "stop". C'est la dernière élection avant trois ans. Il est donc normal qu'il y ait ce débat-là. La motion de censure a donc pour vocation d'attirer l'attention de l'ensemble de nos concitoyens sur la politique suivie par le Gouvernement, sur l'enjeu de ses élections. La question qui est posée, c'est de savoir si on veut faire des régions et des départements des remparts contre cette politique libérale en matière d'éducation, de logement, parce que ce ne sont pas simplement des élections de politique nationale, c'est aussi la vie quotidienne des Français qui est concernée par cela. Et quand on voit, par exemple, ce qui est en train de se préparer à l'Assemblée nationale - c'est aussi cela, le sens de la motion de censure -, c'est-à-dire une décentralisation, on va envoyer aux collectivités locales un certain nombre de responsabilités qui appartenaient à l'Etat, sans leur donner les moyens financiers, on voit le risque que l'on va encourir. Donc, voilà le sens de la motion de censure."
Q- Ce que dit le Gouvernement, c'est que s'il prend des mesures un peu difficiles, c'est parce que la gauche, quand elle était au pouvoir, n'a rien fait et qu'il faut rattraper le temps perdu.
R- "J'aime à citer cette phrase du Président Mao Tse Toung qui disait : "L'avenir est radieux mais la route est sinueuse". On dit toujours ça. Je crois qu'on aurait ou faire autrement. Si on n'avait pas baisser les impots des riches comme on l'a fait, on aurait pu disposer d'un certain nombre de marges financières. Si on n'avait pas supprimé les emplois-jeunes, on ne se retrouverait pas dans une situation de montée du chômage. Les mesures qui ont été prises sont donc dans une logique : accompagner le processus d'intégration de la France dans la mondialisation libérale. En même temps, on se rend compte des dégâts sociaux considérables que cela génère. Donc, on aurait pu avoir... Ce qui me gêne, si vous voulez, c'est que le message du 21 avril 2002 de nos concitoyens est un message qui demande plus de sécurité, plus de protection. Et c'est l'inverse qui est en train d'être mis en place."
Q- En 2002, les gens ont élu J. Chirac et il fait sa politique.
R- "Oui, ils ont élu J. Chirac qui, au premier tour, ne faisait que 19 %. Ils n'ont pas voté pour le capitalisme dur que nous connaissons aujourd'hui, ils n'ont pas voté pour cette politique qui, je crois, est essentiellement inégalitaire et qui fait que les forts s'en sortent toujours mieux et les faibles sont dans des situations plus difficiles. Ce qui me frappe en ce moment,c'est que dans mes permanences, au quotidien, y compris dans la campagne électorale, je vois beaucoup de gens venir me dire : "Monsieur, c'est dur en ce moment, on n'y arrive plus. On n'est pas partis en vacances, parce que cette fois-ci, on est obligé de compter. On ne sait pas comment on va arriver à payer nos impôts". C'est cette situation que vivent beaucoup de nos concitoyens, pour quelques privilégiés qui s'en sortent."
Q- Le paradoxe, c'est que ce mécontentement ne se capitalise pas pour la gauche, on ne sent pas dans les sondages une montée en puissance de la gauche.
R- "Je crois au contraire que quelque chose est en train de se préparer : une grosse colère. Ce que j'espère, effectivement, c'est que les gens vont se servir du bulletin de vote pour exprimer aussi cette colère-là. Il faut voter et il faut dire ce que l'on pense de la situation actuelle. Quand je vois ce qui est en train de se passer, dans toutes les professions de la recherche, dans toutes les professions du spectacle, quand je vois, y compris, d'un certain point de vue, l'exemplarité du conflit des intermittents, qui malgré le mépris du ministre, sont en train de montrer qu'ils vont gagner quelque chose. Eh bien, il me semble que toute cette colère-là doit se retrouver dans ces élections. J'ai le sentiment qu'il y aujourd'hui une utilisation intelligente du bulletin de vote, socialiste notamment ou de la gauche rassemblée, pour dire qu'il faut en finir avec cette politique du Gouvernement."
Q- Le risque, pour vous, n'est-ce pas la montée en puissance de l'extrême gauche ?
R- "De l'extrême gauche, je ne crois. Le risque, aujourd'hui, c'est effectivement d'abord l'abstention, c'est-à-dire un certain désespoir qui gagnerait nos concitoyens, en disant que "finalement, tout ça c'est pareil". Je veux leur dire que la gauche, dans les régions et les départements, servira de rempart face au libéralisme. C'est pour cela que le message doit être clair et qu'il faut dénoncer les manoeuvres du Gouvernement, qui voudrait tout faire pour qu'il n'y ait aucune lisibilité du résultat des élections."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 2 mars 2004)