Point de presse de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, sur l'urgence d'assurer la viabilité économique et la sécurité dans la bande de Gaza, après le retrait israélien, Jérusalem le 7 septembre 2005.

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Circonstance : Voyage de Philippe Douste-Blazy dans les Territoires palestiniens et en Israël les 7 et 8 septembre 2005 : point de presse au Consulat général de France à Jérusalem le 7

Texte intégral

Q - (Au sujet de l'entretien du ministre avec Miguel Angel Moratinos )
R - (...) Il avait rencontré M. Sharon. Il allait rencontrer Shimon Pérès juste après notre entrevue. Il avait rencontré également Mahmoud Abbas. Nous avons la même impression. Nous avons la même vision, c'est à dire que je crois qu'il est important, plus que jamais aujourd'hui, de tout mettre en place pour "réussir" Gaza : après le retrait, il faut essayer de rendre économiquement viable ce territoire.
En même temps, il faut parler des points d'entrées et de sorties, et là nous aurons des propositions à faire dans les heures qui viennent. Nous avons déjà commencé à le faire, en disant que l'Union européenne est prête à jouer le rôle de tierce partie. Cela a été très positivement accepté du côté palestinien. Nous allons voir du côté israélien, mais il me semble que c'est la même chose. Voilà ce qui s'est dit avec M. Moratinos et nous nous sommes dit qu'on allait y revenir, ensemble et que l'Union européenne avait plus que jamais sa place ici.
Au fur et à mesure que les jours passent, quel est le grand enjeu ? Le grand enjeu est de montrer aux Israéliens que la sécurité existe du côté des Territoires palestiniens, que l'Etat de droit est respecté. On a vu malheureusement ce matin, avec cet attentat, la traduction d'une augmentation de la dégradation de la situation, de la violence dans les Territoires palestiniens. Et donc, en accordant plus de formation, plus également de moyens, plus de restructuration à la police palestinienne, Mahmoud Abbas obtiendra une crédibilité supérieure vis-à-vis d'Ariel Sharon.
Donc il me paraît de plus en plus important d'aller vers l'économie, dans l'esprit du plan Wolfensohn, même à titre bilatéral, comme nous l'avons fait : le centre d'épuration, le plan santé mentale, le plan santé publique, les micro-projets. Tout cela n'est possible que s'il y a la sécurité. Quand on parle de la barrière de sécurité, en réalité, quel est l'argument donné par les Israéliens pour la justifier ? C'est le manque de sécurité. Donc il est important d'avoir une police structurée, coordonnée, commandée, formée, professionnelle dans l'Autorité palestinienne. C'est majeur.

Q - Et est-ce que vous avez l'impression que l'Autorité palestinienne peut encore fonctionner ? Sans vouloir exagérer l'importance de ce qui s'est passé cette nuit, il y a quand même un décalage très grand entre le plan que soutient la communauté internationale, qui pourrait se développer et ce qui se passe concrètement à Gaza depuis plusieurs mois. L'assassinat d'Arafat, c'est un nouvel épisode d'une série d'évènements : la France a été touchée il n'y a pas très longtemps. Qu'est ce qui marche encore dans l'Autorité palestinienne ?
R - Je trouve que vous êtes très sévère. Je pense que Mahmoud Abbas a prouvé durant ce retrait de Gaza que, face à une décision courageuse prise par le Premier ministre Ariel Sharon, il y avait un esprit de responsabilité collective.
Les réformes se font. Le contrôle financier et administratif, c'est quelque chose qui avance. Il n'y a pas d'Etat de droit sans justice objective et sévère quand il le faut. Simplement, c'est vrai qu'il n'y a jamais eu autant de violence en même temps, d'où votre question. Je crois qu'il ne faut pas remettre en cause le travail qui est fait par l'Autorité palestinienne aujourd'hui parce qu'il y a des regains de violence. Ce que je crois, c'est que si l'on regarde les auteurs de ces crimes ou de ces attentats, on s'aperçoit que, parfois, ce sont ceux qui ne devraient pas le faire qui le font. D'un autre côté, il doit y avoir aujourd'hui dans la police palestinienne, une police professionnalisée, organisée, payée bien sûr, mais professionnelle.
Q - Quelles sont vos réactions et votre opinion quant à la poursuite de la construction des colonies ? Quelle est la position de la France quant au mur qui est en train d'encercler Jérusalem ?
R - Alors la France, d'abord, a toujours été très claire : la France estime que l'assise territoriale du futur Etat palestinien est une assise qui rend indissociable Gaza, la Cisjordanie, et Jérusalem-Est. Je réponds à votre deuxième question.
Maintenant sur le sujet des colonisations, nous avons toujours été très clairs. La Feuille de route le dit. Nous avons un texte international qui a été reconnu disant : oui, il faut qu'il n'y ait plus de nouvelles colonies. Donc nous pensons qu'il ne faut pas le faire. Et d'ailleurs, nous croyons depuis toujours, ici comme ailleurs, que le processus politique est la seule réponse. Or, qui dit processus politique, dit règlement des deux parties. Il n'y aura pas de règlement par les deux parties si une des deux faute. Et une des fautes c'est de coloniser. Voilà, c'est assez clair.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 16 septembre 2005)