Déclaration de M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie, sur les divers choix des pays à travers le monde par rapport à la production d'énergie nucléaire, Pékin le 17 mai 2005.

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Circonstance : Conférence Icône 13 à Pékin le 17 mai 2005

Texte intégral


Monsieur le Vice-Premier Ministre,
Monsieur le Président,
Messieurs les Présidents d'honneurs,
Mesdames, Messieurs,
C'est à la fois pour moi un honneur et un privilège de m'exprimer au nom de la France, et également en tant membre du Conseil des Ministres de l'Energie de l'Union Européenne, à l'occasion de cette manifestation internationale ICONE 13. Cette dernière s'inscrit me semble-t-il dans une suite de manifestations marquantes consacrées au nucléaire au niveau international comme l'a été tout récemment la Conférence qui s'est tenue à Paris les 21 et 22 mars 2005 intitulée " L'énergie nucléaire pour le 21ème siècle ".
Je fais tout naturellement le lien entre cette Conférence de Paris et notre manifestation d'aujourd'hui à Pékin. J'y vois comme un signal fort et clair de l'intérêt renouvelé porté dans le monde à l'énergie nucléaire. Ainsi à Paris, 74 pays étaient représentés ainsi que 10 organisations internationales.
Ai-je besoin de souligner la représentativité d'ICONE 13 qui associe à la fois des gouvernements, des entreprises, des milieux académiques venant de tous les horizons. Entre Paris et Pékin, il y a donc une continuité manifeste dans l'intérêt que suscite de nouveau l'énergie nucléaire.
Certes, je tiens à rappeler que chaque Etat est bien entendu libre de définir sa propre politique énergétique et de faire le choix ou le non-choix du nucléaire.
C'est d'ailleurs le cas au sein de l'Union européenne où des choix énergétiques différents ont été opérés récemment.
o Des pays comme l'Allemagne ou la Belgique ont préféré opter pour une politique de retrait progressif du nucléaire ;
o D'autres au contraire ont confirmé activement leur choix en faveur du nucléaire : c'est le cas de la Finlande en décembre 2003, c'est aussi le cas de la France au printemps de cette année qui a décidé de construire un EPR ;
o Certains qui n'ont pas retenu initialement cette option s'interrogent ouvertement sur la révision de leur politique comme l'Italie ou la Pologne.
o Parmi les nouveaux Etats membres de l'Union européenne, cinq entendent rester des pays nucléaires : la Lituanie, la Slovaquie, la Slovénie, la Hongrie et la République tchèque .
o Enfin, parmi les futurs Etats membres qui rejoindront l'Union à l'horizon 2007, la Bulgarie a décidé en mai 2004 de se doter d'une nouvelle centrale nucléaire qui devra entrer en fonction en 2010.
Au total, l'Union européenne couvre 38 % de sa production électrique grâce à l'énergie nucléaire. Il y a donc un fait nucléaire européen massif.
Si je regarde maintenant l'Asie, j'ai l'impression de retrouver cette même émergence d'un choix nucléaire important.
o C'est déjà manifestement le cas pour des pays comme l'Inde, le Japon et la Corée du Sud.
o Je sais par ailleurs que le Vietnam envisage de recourir à l'énergie nucléaire à partir de 2017. L'Indonésie s'interroge également sur la question.
o Quant à la Chine, elle a déjà fait ce choix qui s'est traduit par la réalisation de 5 centrales avec 9 réacteurs. Cette option va aujourd'hui prendre une autre dimension et changer d'échelle puisque la Chine a décidé de se doter à l'avenir d'un parc standardisé de 25 à 30 nouveaux réacteurs afin de répondre aux besoins de sa formidable croissance économique.
En effet, l'Asie tout entière doit répondre au double défi d'un large accès à l'énergie, qui est une des conditions de son développement, tout en respectant la qualité de l'environnement.
Dans ces conditions, aucune filière énergétique ne saurait être négligée.
Aussi, l'énergie nucléaire apparaît comme pouvant à la fois satisfaire les besoins énergétiques, le développement économique d'un grand nombre de pays tout en sauvegardant l'environnement puisqu'elle ne génère ni pollution atmosphérique ni émissions de gaz à effet de serre.
De plus, depuis 2000, compte tenu des tensions sur le marché pétrolier mondial, la stabilité des prix de l'énergie ainsi que la sécurité de l'approvisionnement sont devenues des préoccupations constantes et majeures qui sont désormais au cur de toutes les politiques énergétiques.
Or l'énergie nucléaire vous met à l'abri de la volatilité des prix des combustibles fossiles. Comme l'approvisionnement énergétique contribue de façon décisive au développement économique, il doit donc être assuré aux meilleures conditions possibles en termes de fiabilité, de coût et de qualité. Aussi, pour des pays importateurs d'énergie comme le sont les pays européens et asiatiques pour la plupart d'entre eux, l'option nucléaire constitue un facteur de sécurité et de stabilité.
Je dois également ajouter que l'énergie nucléaire s'appuie en outre sur des technologies éprouvées. Aussi elle fournit dans bien des cas une électricité à un prix compétitif aussi bien aux personnes qu'aux entreprises. Cette compétitivité par rapport à la comparaison du prix moyen d'autres sources d'énergie contribue à la compétitivité globale des économies.
Il est certain que le choix du nucléaire est inséparable d'une " culture de la sûreté " qui doit rester au cur de l'activité des entreprises du secteur nucléaire. Garantir un niveau élevé de sûreté et de sécurité des matières et des installations nucléaires est une condition non négociable de l'acceptation politique et sociale de l'énergie nucléaire.
Dans ce but, il est souhaitable que les Etats coordonnent leurs efforts et partagent leurs expériences. Cette " culture de la sûreté " doit s'inscrire bien entendu dans le strict respect des règles et des normes internationales. Cette dimension internationale permet le développement et l'utilisation de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques. A cet égard, l'Agence internationale de l'énergie atomique a un rôle essentiel à jouer pour promouvoir la coopération internationale et en diffusant auprès du grand public une information de qualité sur l'énergie nucléaire.
C'est ici à ICONE 13 que se fait le lien entre le politique, l'économique et le technique. C'est la raison pour laquelle je tiens à vous apporter personnellement, en tant que français mais aussi d'européen, mes plus vifs encouragements. En effet, de vos travaux peut résulter en partie une réponse au défi planétaire majeur que représente une demande globale d'énergie dont la croissance dépasse la capacité d'approvisionnement au même moment où les ressources fossiles s'épuisent.
En d'autres termes, les améliorations technologiques qui seront au cur de vos débats doivent nous permettre de combler ce fossé entre l'offre et la demande.
(Source http://www.industrie.gouv.fr, le 18 mai 2005)