Déclaration de Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, notamment sur l'Europe de l'enseignement supérieur et la coopération européenne en matière de politique industrielle , à Metz le 30 septembre 2005.

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Circonstance : Déplacement en Moselle, le 30 septembre 2005

Texte intégral

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs,
Je suis particulièrement heureuse d'être parmi vous aujourd'hui en cette période de rentrée universitaire, au moment où le Premier ministre vient d'annoncer une série de mesures importantes en faveur des étudiants et des universités, ainsi qu'un projet de loi ambitieux sur la recherche. Je sais que ces messages étaient nécessaires et aussi attendus. Merci pour les paroles que vous avez prononcées, Monsieur le Président.
J'avais souhaité cette rencontre comme ministre déléguée aux Affaires européennes. C'est un moment important pour moi car je sais que les étudiants en général, et vous plus encore, sont engagés dans le projet européen, le soutiennent et souhaitent le voir avancer.
Vos trois écoles, que je salue et remercie de s'être réunies dans cet amphithéâtre, incarnent cette ouverture sur l'Europe, propres aux régions frontalières, puisqu'elles proposent des formations transfrontalières et européennes, en partenariat avec des universités et des entreprises allemandes, luxembourgeoises et belges. Vous êtes à l'image des nouveaux Européens : votre champ d'action est désormais l'Europe, il n'est plus national quelque soit l'attachement que nous portons à notre pays, et la plupart d'entre vous seront amenés à passer une partie de leur vie professionnelle dans un autre Etat membre. Vous multipliez ainsi vos chances et vous faites exister concrètement l'Europe. Plus de la moitié des étudiants français issus de l'Institut supérieur franco-allemand de Techniques, d'économie et de Sciences (ISFATES), l'un des établissements représentés aujourd'hui, travaillent aujourd'hui en Allemagne.
Nous devons encore renforcer l'Europe de l'enseignement supérieur, car elle nous permet de montrer le vrai visage de l'Europe, celui de l'Europe concrète. Une Europe plus concrète, c'est l'objectif que s'est assigné le gouvernement français avec l'ensemble de ses partenaires comme la meilleure réponse à ce qui s'est passé en mai dernier. Cette Europe de l'enseignement supérieur se constitue peu à peu, grâce en particulier aux différents programmes de mobilité qui permettent aux étudiants, mais aussi aux chercheurs et aux enseignants, d'effectuer des séjours chez nos partenaires. Il faut rappeler que plus d'un million d'étudiants européens ont passé une année d'étude dans un autre Etat membre depuis la création du programme Erasmus en 1987. Parmi eux, plus de 20.000 étudiants français en bénéficient chaque année, ce qui place la France au premier rang. Erasmus est peut être le mieux connu, le cinéma y a contribué avec un film ensoleillé à tous points de vue, d'ailleurs ce film a eu une suite ! Mais d'autres programmes européens, que nous souhaitons faire connaître et développer, s'adressent aussi aux apprentis, aux élèves de BTS et d'IUT, qui peuvent accomplir un stage dans un autre Etat membre grâce au programme Leonardo qui concerne quelques centaines de personnes, nous pouvons faire beaucoup plus !
Mais il faut faire encore plus pour la mobilité des jeunes en Europe. Sur la base de ces différents programmes, nous devrions offrir à chaque jeune qui le souhaite la possibilité de passer plusieurs mois chez l'un de nos partenaires, que ce soit dans le cadre d'une formation, d'un stage en entreprise ou d'un volontariat auprès d'une association. Il faudrait pour cela doter les programmes existants de moyens supplémentaires. Vous le savez sans doute puisque vous vous intéressez à l'actualité européenne, le budget de l'Union européenne pour les années 2007-2013 n'a pu encore être arrêté. Les négociations restent ouvertes. Mais dans la proposition luxembourgeoise de juin dernier, que la France a soutenue, il était prévu d'augmenter de 33% le budget des politiques en faveur de la compétitivité parmi lesquelles l'éducation. C'est notre base de négociation. Enfin, pour donner à chaque jeune la possibilité de mieux connaître l'Europe et faire ainsi exister davantage l'identité européenne, le Premier ministre a proposé de mettre en place un véritable service civil européen, pour encourager notamment, ce qui attire les jeunes de votre âge, les projets humanitaires.
L'Europe de l'enseignement supérieur, c'est aussi l'harmonisation des cursus avec le nouveau système LMD (licence, master, doctorat). Là encore, l'objectif est de favoriser la mobilité des étudiants européens grâce à un système de crédits transférables d'une université à l'autre et d'un pays à l'autre. Avec le LMD, il est désormais possible de commencer ses études à Paris, de les poursuivre à Florence et de les finir à Cambridge ! Ou l'inverse !
La mobilité devient un élément clef de l'avenir on le sait bien, l'enseignement a beaucoup a gagné avec cette mobilité.
Dans cette Europe de l'enseignement supérieur, la France doit donner tous les atouts à ses universités et à sa recherche. C'est là que se joue l'avenir de notre pays. C'est pourquoi les mesures gouvernementales annoncées hier visent à améliorer les conditions de vie et de travail des étudiants comme des enseignants, et à doter la recherche des meilleurs instruments. Parmi les cinq objectifs prioritaires retenus par le gouvernement, j'en citerais trois qui vous intéressent particulièrement : favoriser les coopérations pour donner une meilleure visibilité internationale à notre recherche ; renforcer l'attractivité des carrières scientifiques ; accroître la compétitivité des laboratoires dans un contexte de compétition internationale. L'ensemble de ces mesures doit permettre à notre pays de tenir son rang dans la construction de l'espace européen de la recherche. Un projet de loi va être proposé, ce sont plusieurs milliards d'euros qui vont être dégagés.
Pour que l'Europe apparaisse plus concrète, elle doit aussi répondre à la principale préoccupation des Français : la croissance et l'emploi. Je suis convaincue que les futurs cadres d'entreprise que vous êtes sont attachés à cette préoccupation. Le gouvernement en fait l'axe principal de son action, et les premiers résultats sont là. Au niveau européen, c'est le même objectif qu'il faut poursuivre.
Il y a cinq ans à Lisbonne, les Européens s'étaient donné pour objectif de faire de l'Union la zone la plus compétitive au monde d'ici 2010. Mais nous sommes encore loin de l'objectif et il ne reste que 5 ans pour l'atteindre. Nous devons donc mobiliser toutes les politiques européennes qui contribuent à la compétitivité de l'Union européenne.
La conquête des emplois de demain passe par une action plus volontariste en matière de politique industrielle, d'innovation et de grands réseaux. Je sais que vous êtes particulièrement sensible à ces enjeux, qui sont votre quotidien. Le gouvernement s'est pleinement engagé dans ces politiques, à travers notamment les pôles de compétitivité, comme le pôle "matériaux innovants" piloté par la Lorraine et dont l'une des trois écoles représentées aujourd'hui, l'Ecole nationale supérieure des Arts et Métiers (ENSAM), est le porteur ; à travers aussi l'Agence pour l'innovation industrielle. L'Europe dispose aussi d'excellents instruments. Nous avons réussi à faire Airbus. Utilisons les moyens à notre disposition, avec les grands projets tels ITER et Galileo, avec l'approfondissement du marché intérieur, pour faire émerger les grands champions européens de demain. Nous avons besoin d'être unis pour être plus forts. Suscitons l'innovation, en créant une agence européenne de l'innovation, comme l'a proposé le président de la République à Reims le 30 août dernier, ainsi qu'un institut européen de technologie sur le modèle de l'Institut universitaire européen de Florence. Ce sont nos objectifs.
Mais je n'ai pas à vous convaincre, vous savez déjà quelle est l'Europe qui marche : c'est l'Europe des grands projets industriels, des coopérations transfrontalières, des programmes d'échange, des aides aux territoires. C'est ce projet européen que nous voulons encore développer. Ce qu'apporte le projet vous le sentez déjà dans vos vies quotidiennes.
Ce projet d'une Europe forte et ambitieuse, la France veut le réaliser avec l'ensemble de ses partenaires. C'est une Europe unie que nous voulons voir avancer.
Enfin, ce même projet, la France doit le réaliser avec les citoyens : le gouvernement désire mieux les associer aux processus de décision européens, afin qu'ils puissent davantage faire leur la construction européenne. Ce sera mon rôle au sein du gouvernement de Dominique de Villepin et c'est aussi le sens de ma présence parmi vous aujourd'hui pour avoir un échange et un dialogue. A la demande du président de la République, le Premier ministre fera des propositions à ce sujet dans les prochaines semaines, et je m'efforce auprès de lui d'imaginer des actions novatrices à la hauteur de l'ambition que nous, Français, avons pour l'Europe.
C'est pourquoi j'ai besoin de recueillir des témoignages, des idées, des réactions, des attentes. Et pour cela, je compte sur vous. La parole vous revient donc. Je souhaite pouvoir débattre librement avec vous sur tous les sujets européens qui vous tiennent à coeur. Vous êtes des acteurs européens et j'ai besoin de vous entendre.
Je vous remercie pour votre attention.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 5 octobre 2005)