Déclaration de M. François Bayrou, président de l'UDF, sur la préparation par l'UDF d'un "projet alternatif", à Paris le 19 octobre 2005

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Circonstance : Ouverture du colloque "Aux racines du mal français", à la Maison des Polytechniciens, à Paris le 20 octobre 2005

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,
Je veux d'abord vous remercier pour votre présence.
Remercier chacun des participants, qu'ils figurent sur le programme - " plateau " comme on dit, exceptionnel - ou dans la salle. Les uns et les autres auront l'occasion de s'exprimer.
Le but de cette série de rencontres, nous en avons programmé quinze d'ici au mois de juin, est, je l'avoue, ambitieux.
Il s'agit de préparer, par l'exercice d'une réflexion partagée largement au-delà des rangs d'une seule formation politique, un projet alternatif. Pour " alternatif " le dictionnaire propose la définition suivante : " qui constitue une solution de remplacement ".
Dans cette définition, à mes yeux, le mot important, ce n'est pas remplacement, c'est solution !
Le " mal français " qu'Alain Peyrefitte, qui avait un génie de ce type de formules, diagnostiqua il y a déjà 30 ans Le mal français, dont tous les analystes du " déclin " de notre pays parcourent à l'envi les manifestations économiques, sociales, budgétaires, sans jamais parvenir à en contrarier le cours
Le sujet de cette rencontre repose tout entier sur cette intuition : si nous sommes incapables de changer le cours si défavorable de notre histoire récente, c'est que nous nous acharnons à soigner les symptômes, sans même songer à soigner les causes.
Depuis des années, la politique, pour détourner les termes médicaux est symptomatique. Elle devrait d'abord être étiologique.
Je fais référence à la dernière grande présence politique de notre temps. Quand le général de Gaulle, après douze années de traversée du désert, s'avance à nouveau sur la scène de l'histoire de notre pays en 1958, il est armé d'une réflexion simple.
Le mal français, qui a conduit notre pays à l'humiliation d'aller quêter nos fins de mois au FMI, est dans la carence de nos institutions. Il les changera donc, pour soigner non pas les symptômes, mais les causes de notre affaiblissement national.
Il a une deuxième conviction, moins explicite, ignorée à peu près de tous, c'est que l'émulation est une bonne chose. Le traité de Rome vient d'être signé, les " gaullistes " comme on disait encore ont été largement sceptiques. Pierre Mendès-France lui-même est monté à la tribune pour combattre ce " marché commun ", avec un argument dévastateur, que nous connaissons bien encore aujourd'hui : l'économie française ne supportera pas le choc de la concurrence, frontières ouvertes, avec les autres pays européens.
Comme il fallait s'y attendre on présente au général un projet de renonciation, ou au moins de renégociation du traité de Rome, un plan B en quelque sorte pour éviter cette épreuve du marché commun et se renfermer dans nos frontières.
En marge de cette proposition, de Gaulle écrit ces simples mots : " non. Les Français sont forts, mais ils ne le savent pas ".
Et la troisième conviction, celle-là ignorée de tous, c'est que l'oeuvre de décolonisation devra précéder le redressement du pays.
Voilà avec quelle simplicité d'idées on sauve la République. Il suffit d'identifier non pas les symptômes du mal, mais les racines du mal. C'est à la racine qu'il faut soigner le mal.
Et c'est pourquoi cette rencontre est organisée.
Bien entendu, les intervenants de la tribune dialogueront en apparence avec les intervenants de la salle, dans l'attention vigilante des participants de la salle.
Mais, à la vérité, l'audience est beaucoup plus large et la discussion débordera de beaucoup les murs de cette maison des Polytechniciens que je remercie pour son accueil. Le nombre des participants d'aujourd'hui est volontairement limité, mais les participants de demain sont très nombreux, puisque sous forme d'actes, sous forme de transmission par Internet, sous forme de DVD intégral ce colloque est largement ouvert et fera l'objet de reprises dans toutes les régions et même tous les départements français. Au terme de ces échanges une contribution écrite en reprendra les principes directeurs.

(Source http://www.udf.org, le 24 octobre 2005)