Texte intégral
Q - Angela Merkel et Gerhard Schröder ont fait jeu égal hier devant les électeurs, la perspective de cette Allemagne difficilement gouvernable est-elle une heureuse nouvelle pour la France ?
R - C'est vrai que la situation est incertaine et que nous entrons dans une période de tractations entre les partis. Quelle que soit la coalition qui sortira des tractations, la relation franco-allemande sera toujours au cur de l'impulsion européenne, elle est même indispensable à cette construction européenne.
Une fois au pouvoir, je suis persuadé que le chancelier, quel qu'il soit, jouera le jeu du pilier franco-allemand.
Q - Cela ne facilitera pas la prise de décisions, voire la prise d'initiatives, du côté allemand, par exemple pour relancer l'Europe, cela nous concerne-t-il ?
R - Je suis persuadé que l'Europe politique a besoin d'être relancée, je suis persuadé que nos amis allemands, que ce soit la CDU ou les socialistes, seront avec nous, ceux qui parleront haut et fort au prochain sommet informel britannique, en octobre, pour porter l'Europe politique.
Q - Tout n'est pas égal. Si l'un des deux camps l'avait emporté largement, il y aurait un pouvoir fort, aucun des deux camps ne l'ayant emporté, la perspective d'une grande coalition se dessinant, on peut donc imaginer un pouvoir faible et donc une faiblesse pour l'Europe ?
R - Je ne partage pas ce que vous dites. Ce n'est pas parce qu'il y a aujourd'hui, en effet, une incertitude, que l'on peut dire que l'Allemagne est affaiblie et donc l'Europe. Ce n'est pas vrai. Je suis persuadé aujourd'hui que nous pouvons, avec nos amis allemands, redessiner un pilier franco-allemand fort, par exemple dans le domaine de la recherche, des hautes technologies. Nous avions commencé au dernier Conseil des ministres franco-allemand, il faut que nous fassions cette Europe de la recherche, il faut que nous ayons une Agence européenne de la Recherche, il faut que nous investissions autant que les Américains, les Indiens ou les Chinois, dans les bios, les nanos, les info-technologies, et cela, que ce soit avec l'un ou l'autre, de toute façon, cela s'imposera car l'Europe politique s'impose aujourd'hui. Nous devons être, dans ce monde multipolaire, l'un des quatre ou cinq pôles du monde.
Q - Lorsque l'on est diplomate, on est obligé d'être optimiste ?
R - Je ne crois pas, je ne pense pas que c'est de l'optimisme de diplomatie comme vous le dites, c'est un optimisme qui s'impose à nous, parce que, comment voulez-vous demain penser à diminuer le chômage si vous n'avez pas une Europe de la recherche, si vous n'avez pas une Europe de l'innovation, si vous n'avez pas une Europe des bio et nano-technologies ? Je suis donc persuadé que les Allemands le savent comme nous et cela s'imposera au futur chancelier.
Q - Angela Merkel et Gerhard Schröder sont tous les deux candidats à la chancellerie, Quelle serait la préférence de la diplomatie française, Monsieur le Ministre ?
R - Nous n'allons pas nous permettre d'entrer dans la politique intérieure des Allemands. Nous avons travaillé longuement avec l'équipe de M. Schröder et nous connaissons également depuis très longtemps Angela Merkel avec laquelle j'ai personnellement travaillé.
Q - Vous la connaissez ?
R - Je la connais depuis une dizaine d'années car nous avons souvent travaillé ensemble, dans le cadre du parti démocrate-chrétien dont j'étais le Secrétaire général et elle était à l'époque la présidente de son parti. Je peux vous assurer que le pilier franco-allemand est majeur. Vous savez, il y a là-bas, comme chez nous, les mêmes difficultés, il y a la lutte contre le chômage, il y a le problème de la fiscalité, l'avenir des retraites, les réformes de l'Etat providence, la flexibilité du marché du travail avec le droit du licenciement, on voit les mêmes problèmes. Il est évident qu'il faut moderniser la société politique allemande comme il faut moderniser la société politique française, on voit évidemment les extrêmes monter comme l'extrême-gauche. Nous connaissions ces sujets depuis une dizaine d'années, les Allemands découvrent cela aujourd'hui.
Q - La diplomatie française souhaite-t-elle que la crise politique se résolve vite en Allemagne ? Les tractations durent depuis un moment déjà !
R - Nous souhaitons que les tractations se fassent, évidemment le plus rapidement possible, mais comme ils sont pratiquement à égalité, on voit aujourd'hui que les deux grands partis ne dépassent pas, avec leurs alliés, le seuil fatidique de 48,5 %, ce qui donne, comme vous le savez, la majorité absolue des sièges au Bundestag.
Q - Béatrice Hadjaje, qui est une envoyée spéciale de RTL pour ces élections, disait ce matin que le programme libéral d'Angela Merkel avait fait peur aux électeurs, est-ce un avertissement pour l'UMP de Nicolas Sarkozy ?
R - Oui mais en même temps, vous voyez que le FPD qui est le parti libéral n'a jamais recueilli autant de voix.
Q - Le parti chrétien démocrate semble avoir déstabilisé une partie de son électorat.
R - Le parti démocrate a en effet fait un score qui, dans son histoire, peut être considéré comme classique, par contre le parti libéral est monté de plusieurs points.
(...)
Q - Vous êtes à New York depuis le début de la semaine dernière, vous tentez de résoudre cette difficile crise iranienne. Le pouvoir iranien enrichissant l'uranium au mépris, semble-t-il, de ses engagements internationaux, le Conseil de l'ONU sera-t-il saisi prochainement de cette question, devant l'impasse des négociations ?
R - C'est un sujet qui est très sensible, il faut réagir ensemble.
Il ne faut pas interdire à l'Iran de développer de l'énergie nucléaire, mais il faut être sûr que cette énergie nucléaire soit à des visées pacifiques civiles et non militaires.
Q - Et on n'en est pas sûr, n'est-ce pas ?
R - Nous allons travailler cette semaine, avec nos partenaires européens, à bâtir un consensus international pour mettre en garde les Iraniens ; nous le ferons à Vienne, où se réunit le Conseil des gouverneurs de l'Agence dans quelques heures ; s'il faut transmettre le dossier au Conseil de sécurité des Nations unies pour le faire, nous le ferons.
Q - S'en rapproche-t-on ?
R - Nous le verrons tout à l'heure, ce qui est sûr, c'est que nous disons aux Iraniens : "oui, vous pouvez avoir accès à un programme nucléaire mais qui soit pacifique et, pour cela, nous demandons à l'AIEA de nous assurer que ce n'est pas à des fins militaires. Nous croyons au multilatéralisme, nous croyons aux Nations unies, nous pensons que c'est l'Agence qui doit contrôler les activités suspectes, voire les arrêter, nous demandons donc une régulation internationale des activités nucléaires de l'Iran, cela me paraît très important.
Q - Vous avez vu le président iranien jeudi, quelle impression vous a-t-il fait ?
R - Quand le président iranien dit vouloir avoir droit à la conversion et à l'enrichissement de l'uranium nous lui répondons qu'il doit établir la confiance en offrant des garanties objectives sur la nature exclusivement pacifique de son programme et qu'il accepte, comme les autres pays, comme aujourd'hui la Corée du Nord, qu'il accepte que l'Agence internationale de l'Energie atomique puisse vérifier justement que ce n'est pas à des fins militaires. Encore une fois, si l'on transmet le dossier au Conseil de sécurité, il n'est pas question de sanction, mais de se donner des moyens de pression pour amener les Iraniens aux mesures de confiance ; nous souhaitons avoir confiance.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 septembre 2005)
R - C'est vrai que la situation est incertaine et que nous entrons dans une période de tractations entre les partis. Quelle que soit la coalition qui sortira des tractations, la relation franco-allemande sera toujours au cur de l'impulsion européenne, elle est même indispensable à cette construction européenne.
Une fois au pouvoir, je suis persuadé que le chancelier, quel qu'il soit, jouera le jeu du pilier franco-allemand.
Q - Cela ne facilitera pas la prise de décisions, voire la prise d'initiatives, du côté allemand, par exemple pour relancer l'Europe, cela nous concerne-t-il ?
R - Je suis persuadé que l'Europe politique a besoin d'être relancée, je suis persuadé que nos amis allemands, que ce soit la CDU ou les socialistes, seront avec nous, ceux qui parleront haut et fort au prochain sommet informel britannique, en octobre, pour porter l'Europe politique.
Q - Tout n'est pas égal. Si l'un des deux camps l'avait emporté largement, il y aurait un pouvoir fort, aucun des deux camps ne l'ayant emporté, la perspective d'une grande coalition se dessinant, on peut donc imaginer un pouvoir faible et donc une faiblesse pour l'Europe ?
R - Je ne partage pas ce que vous dites. Ce n'est pas parce qu'il y a aujourd'hui, en effet, une incertitude, que l'on peut dire que l'Allemagne est affaiblie et donc l'Europe. Ce n'est pas vrai. Je suis persuadé aujourd'hui que nous pouvons, avec nos amis allemands, redessiner un pilier franco-allemand fort, par exemple dans le domaine de la recherche, des hautes technologies. Nous avions commencé au dernier Conseil des ministres franco-allemand, il faut que nous fassions cette Europe de la recherche, il faut que nous ayons une Agence européenne de la Recherche, il faut que nous investissions autant que les Américains, les Indiens ou les Chinois, dans les bios, les nanos, les info-technologies, et cela, que ce soit avec l'un ou l'autre, de toute façon, cela s'imposera car l'Europe politique s'impose aujourd'hui. Nous devons être, dans ce monde multipolaire, l'un des quatre ou cinq pôles du monde.
Q - Lorsque l'on est diplomate, on est obligé d'être optimiste ?
R - Je ne crois pas, je ne pense pas que c'est de l'optimisme de diplomatie comme vous le dites, c'est un optimisme qui s'impose à nous, parce que, comment voulez-vous demain penser à diminuer le chômage si vous n'avez pas une Europe de la recherche, si vous n'avez pas une Europe de l'innovation, si vous n'avez pas une Europe des bio et nano-technologies ? Je suis donc persuadé que les Allemands le savent comme nous et cela s'imposera au futur chancelier.
Q - Angela Merkel et Gerhard Schröder sont tous les deux candidats à la chancellerie, Quelle serait la préférence de la diplomatie française, Monsieur le Ministre ?
R - Nous n'allons pas nous permettre d'entrer dans la politique intérieure des Allemands. Nous avons travaillé longuement avec l'équipe de M. Schröder et nous connaissons également depuis très longtemps Angela Merkel avec laquelle j'ai personnellement travaillé.
Q - Vous la connaissez ?
R - Je la connais depuis une dizaine d'années car nous avons souvent travaillé ensemble, dans le cadre du parti démocrate-chrétien dont j'étais le Secrétaire général et elle était à l'époque la présidente de son parti. Je peux vous assurer que le pilier franco-allemand est majeur. Vous savez, il y a là-bas, comme chez nous, les mêmes difficultés, il y a la lutte contre le chômage, il y a le problème de la fiscalité, l'avenir des retraites, les réformes de l'Etat providence, la flexibilité du marché du travail avec le droit du licenciement, on voit les mêmes problèmes. Il est évident qu'il faut moderniser la société politique allemande comme il faut moderniser la société politique française, on voit évidemment les extrêmes monter comme l'extrême-gauche. Nous connaissions ces sujets depuis une dizaine d'années, les Allemands découvrent cela aujourd'hui.
Q - La diplomatie française souhaite-t-elle que la crise politique se résolve vite en Allemagne ? Les tractations durent depuis un moment déjà !
R - Nous souhaitons que les tractations se fassent, évidemment le plus rapidement possible, mais comme ils sont pratiquement à égalité, on voit aujourd'hui que les deux grands partis ne dépassent pas, avec leurs alliés, le seuil fatidique de 48,5 %, ce qui donne, comme vous le savez, la majorité absolue des sièges au Bundestag.
Q - Béatrice Hadjaje, qui est une envoyée spéciale de RTL pour ces élections, disait ce matin que le programme libéral d'Angela Merkel avait fait peur aux électeurs, est-ce un avertissement pour l'UMP de Nicolas Sarkozy ?
R - Oui mais en même temps, vous voyez que le FPD qui est le parti libéral n'a jamais recueilli autant de voix.
Q - Le parti chrétien démocrate semble avoir déstabilisé une partie de son électorat.
R - Le parti démocrate a en effet fait un score qui, dans son histoire, peut être considéré comme classique, par contre le parti libéral est monté de plusieurs points.
(...)
Q - Vous êtes à New York depuis le début de la semaine dernière, vous tentez de résoudre cette difficile crise iranienne. Le pouvoir iranien enrichissant l'uranium au mépris, semble-t-il, de ses engagements internationaux, le Conseil de l'ONU sera-t-il saisi prochainement de cette question, devant l'impasse des négociations ?
R - C'est un sujet qui est très sensible, il faut réagir ensemble.
Il ne faut pas interdire à l'Iran de développer de l'énergie nucléaire, mais il faut être sûr que cette énergie nucléaire soit à des visées pacifiques civiles et non militaires.
Q - Et on n'en est pas sûr, n'est-ce pas ?
R - Nous allons travailler cette semaine, avec nos partenaires européens, à bâtir un consensus international pour mettre en garde les Iraniens ; nous le ferons à Vienne, où se réunit le Conseil des gouverneurs de l'Agence dans quelques heures ; s'il faut transmettre le dossier au Conseil de sécurité des Nations unies pour le faire, nous le ferons.
Q - S'en rapproche-t-on ?
R - Nous le verrons tout à l'heure, ce qui est sûr, c'est que nous disons aux Iraniens : "oui, vous pouvez avoir accès à un programme nucléaire mais qui soit pacifique et, pour cela, nous demandons à l'AIEA de nous assurer que ce n'est pas à des fins militaires. Nous croyons au multilatéralisme, nous croyons aux Nations unies, nous pensons que c'est l'Agence qui doit contrôler les activités suspectes, voire les arrêter, nous demandons donc une régulation internationale des activités nucléaires de l'Iran, cela me paraît très important.
Q - Vous avez vu le président iranien jeudi, quelle impression vous a-t-il fait ?
R - Quand le président iranien dit vouloir avoir droit à la conversion et à l'enrichissement de l'uranium nous lui répondons qu'il doit établir la confiance en offrant des garanties objectives sur la nature exclusivement pacifique de son programme et qu'il accepte, comme les autres pays, comme aujourd'hui la Corée du Nord, qu'il accepte que l'Agence internationale de l'Energie atomique puisse vérifier justement que ce n'est pas à des fins militaires. Encore une fois, si l'on transmet le dossier au Conseil de sécurité, il n'est pas question de sanction, mais de se donner des moyens de pression pour amener les Iraniens aux mesures de confiance ; nous souhaitons avoir confiance.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 septembre 2005)