Texte intégral
Monsieur le Ministre, cher Renaud,
Mesdames et Messieurs les membres du Haut Conseil,
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux de vous accueillir aujourd'hui, avec mon collègue Renaud Donnedieu de Vabres, dans ce lieu unique, qui est, depuis cent vingt-trois ans, la plus prestigieuse faculté d'histoire de l'art d'Europe !
Nous n'aurions pu trouver meilleur endroit que l'École du Louvre pour installer le Haut Conseil de l'éducation artistique et culturelle. Ici, où tant de jeunes (et de moins jeunes) ont approfondi la connaissance du patrimoine de l'humanité, nous renouons d'une certaine manière la chaîne des temps : aussi je souhaite que l'esprit conquérant qui a présidé à la création de cette école en 1882 anime aussi votre Ha ut Conseil, instrument essentiel du renouveau de l'éducation artistique dans notre pays !
Je suis d'autant plus heureux d'être ici que c'est, en fait, la première occasion publique qui m'est donnée de prendre la parole sur ce sujet. C'est un sujet capital, c'est un sujet immense, c'est un sujet passionnant, car il est en rapport direct avec l'idée même que nous nous faisons de la France. Voulons-nous que notre pays continue d'être demain un acteur de premier rang dans la production artistique ? Voulons-nous que les jeunes français connaissent et apprécient le patrimoine immense qui les entoure ? Voulons-nous des générations de nouveaux créateurs dans tous les domaines ? Évidemment la réponse est oui, la réponse est évidente, et il faut s'en donner les moyens !
Je ne suis donc pas venu simplement vous dire que la continuité de l'État était assurée; non, je suis venu vous dire mon enthousiasme pour l'éducation artistique et vous faire part des voies d'action que j'envisage ; cet enthousiasme a été nourri par une longue expérience d'élu dont je vous dirai un mot tout à l'heure.
Vous comprendrez que je souhaite partager avec vous un peu des convictions qui m'animent.
I. L'importance de l'éducation artistique et culturelle
Aujourd'hui, plus que jamais, l'ouverture des esprits à l'art et à la culture est une mission essentielle de l'École de la République. A une époque où la vitesse et la rentabilité tendent à l'emporter sur tout le reste, il est bon que les jeunes gens sachent encore regarder gratuitement une oeuvre ; qu'ils apprennent à s'étonner d'une couleur, d'une forme, à vibrer, à s'émerveiller d'une mélodie, d'un mouvement, d'une intonation ; qu'ils apprennent aussi à déchiffrer et à rendre vivant le patrimoine que nous a légué l'histoire. Il ne serait pas digne de la France que les jeunes générations vivent comme étrangères aux trésors qui les entourent. Et cela d'autant plus que la connaissance de ces trésors est aussi la condition des innovations radicales !
Pour rester vivants, pour rester unis, pour rester acteurs dans l'Histoire, nous devons nous reconnaître dans un fonds de représentations communes. C'est une des raisons d'être de l'éducation artistique et culturelle.
Mais il ne s'agit pas seulement de connaissance ! Il s'agit aussi de pratique artistique ! Il n'est d'ailleurs guère d'éducation réelle de l'oeil, de l'oreille, de la sensibilité sans une éducation active de la main, de la voix, du corps tout entier. Pour bien apprécier, il faut aussi avoir une idée de la pratique, aussi modeste soit-elle.
Cet éveil de la sensibilité, cet extraordinaire élargissement de l'horizon, ce déploiement des cinq sens et de toutes les capacités sensorielles ne sauraient être réservés à quelques uns ! Il revient à l'École de la République de les offrir à tous. Cela découle des principes non négociables de notre système éducatif. J'en fais, pour ma part, un pan essentiel de la politique de l'égalité des chances.
Cette éducation passe d'abord par les professeurs d'arts plastiques et d'éducation musicale, qui en sont les premiers dépositaires, puisque c'est avec eux que tout commence. Leurs compétences, leur expertise sont essentielles, et je salue ici leur engagement passionné dans leur discipline.
Mais l'enjeu est ici collectif et l'intérêt commun ; c'est pourquoi j'en appelle aussi à la mobilisation de tous les acteurs éducatifs, qu'il s'agisse des enseignants d'autres disciplines ou de l'ensemble des personnels à tous les niveaux de responsabilité. J'appelle aussi de mes voeux la prise en compte d'apports extérieurs diversifiés (artistes, professionnels de la culture, associations, collectivités). Je suis en effet convaincu que le système éducatif gagnera toujours à s'appuyer sur la concertation, la mutualisation, le partenariat.
Ma conviction profonde sur ce dernier point s'enracine dans mon expérience d'élu local, à Amiens, où je me suis engagé depuis longtemps pour l'éducation artistique.
II. L'expérience amiénoise
Rassurez-vous ! Je ne vous infligerai pas un compte rendu détaillé des différents projets que j'ai eu l'occasion de mettre en oeuvre dans ma ville !
Quelques mots seulement. D'abord j'ai toujours eu à coeur de relayer très énergiquement les dispositifs ministériels, quel que soit le Gouvernement, que ce soit dans les domaines de la musique, de la danse, du cinéma ou encore du patrimoine. Dans tous ces domaines, l'éducation artistique amiénoise a fait la preuve de son dynamisme.
Mais je pense surtout au " Contrat local d'éducation artistique " amorcé dès 1993 entre l'inspection académique de la Somme, l'agglomération amiénoise et la DRAC de Picardie. Il permet de faire bénéficier les élèves des écoles maternelles et élémentaires, en temps et hors temps scolaire, d'une éducation artistique et culturelle pilotée par ce que l'on peut appeler " le binôme de la réussite " : l'enseignant et l'artiste. En temps scolaire, pour 2005, 3591 enfants de 72 écoles maternelles et primaires de l'agglomération y ont participé. Cette expérience, qui touche les arts plastiques, le cinéma, la danse, l'écriture, la musique, le théâtre a prouvé cette année encore sa richesse et sa fécondité, dans le cadre de l'année Jules Verne.
III. Les voies d'une politique
De cette pratique de terrain, je retire deux convictions essentielles :
o les démarches partenariales sont fructueuses ;
o la territorialisation de la politique d'éducation artistique et culturelle est une voie d'avenir.
Fort de ces convictions, je ne vous surprendrai donc pas en vous disant que j'ai pris connaissance avec un vif intérêt du Plan de relance annoncé par mon prédécesseur et Renaud Donnedieu deVabres en janvier 2005. J'en reprends d'autant plus volontiers à mon compte les principales orientations que j'y lis les ferments d'une réponse aux postulats que je viens d'énoncer. J'en assume volontiers l'héritage, tout en comptant bien en prolonger la dynamique et, pourquoi pas, l'amplifier. J'estime en effet qu'un plan de relance est d'abord une feuille de route dont il est essentiel d'entretenir en permanence le sens et la consistance. Je souhaite donc clairement concrétiser les grandes orientations contenues dans le plan. J'ai en tout cas le plaisir aujourd'hui de constater la réalisation de deux d'entre elles : l'installation du nouveau Haut Conseil, en lieu et place du précédent Haut Comité, et le lancement du portail interministériel, qui vous a été présenté tout à l'heure.
Mais j'entends bien aller plus loin ; et sans tomber dans une énumération programmatique, vous me permettrez d'évoquer très brièvement quelques perspectives sur lesquelles j'ai demandé à mes services de travailler.
J'ai décidé de faire porter notre effort sur :
o les territoires,
o les formations,
o les ressources.
1. Les territoires
Je commencerai par la question des territoires. L'enjeu est clair : lutter contre le morcellement des projets, l'émiettement des actions et la solitude des acteurs. Aussi originale, aussi brillante et inspirée soit-elle, une initiative locale ne touche le plus souvent qu'un nombre très limité d'élèves, trop souvent à l'échelle très réduite de la classe. Le Plan a proposé deux remèdes à ce double risque :
o la systématisation régionale, d'une part, qui implique que les recteurs et les DRAC mettent sur pied une politique territoriale d'éducation artistique. L'objectif est tout simplement que chaque territoire tire le meilleur de son environnement culturel, de son vivier d'artistes et y adapte son projet éducatif.
o la généralisation dans les établissements, d'autre part ; sur ce point, j'ai demandé aux équipes éducatives d'inscrire la dimension artistique et culturelle dans tous les projets d'école ou d'établissement.
Je souhaite que tous les acteurs éducatifs s'engagent dans cette voie de façon significative en leur proposant notamment des exemples de cadres d'aménagement territorial, sur le modèle des chartes d'éducation au patrimoine ou encore des chartes de pratique du chant choral dont je souhaite élargir le principe à d'autres domaines artistiques.
De même, je veux aider les professeurs à inscrire leurs actions dans le cadre du projet d'établissement : c'est pourquoi, nous leur adresserons un guide méthodologique exposant la diversité de s formules possibles en fonction du contexte local. Ce guide sera prêt au printemps prochain.
2. La formation
Une telle évolution, qui passe par la mobilisation de tous, est indissociable d'un effort de formation. Or, vous le savez, une occasion formidable se présente, puisque nous allons redéfinir le cahier des charges de la formation des enseignants des IUFM. Il importe en effet que les futurs professeurs soient sensibles aux implications artistiques et culturelles de leur propre discipline.
Il me paraît enfin indispensable d'envisager simultanément la formation des équipes éducatives et notamment des cadres (personnels d'inspection, d'encadrement ou d'accompagnement). J'ai donc donné mandat à mes services de bâtir un programme de formation spécifique dont j'ai plaisir à vous annoncer qu'il commencera dès 2006, par un séminaire national, s'adressant aux personnels d'encadrement des premier et second degrés. Notre souhait est que ce premier séminaire puisse par la suite se décliner en regroupements inter-académiques de façon à aller au plus près des besoins des territoires.
3. Les ressources
Il va de soi qu'à ces dispositifs de formation devra correspondre un ensemble de ressources éditoriales en parfaite adéquation avec les attentes qui portent sur les personnels. J'ai donc demandé au CNDP de me faire des propositions en faveur d'une politique éditoriale consacrée à l'éducation artistique et culturelle.
C'est dans ce cadre notamment que devra être pensée l'évolution des Pôles nationaux de ressources, dont Renaud Donnedieu de Vabres et moi-même avons l'intention de mieux préciser les missions afin qu'ils puissent jouer, conjointement à leur action territoriale, un rôle d'accompagnement privilégié de nos priorités ministérielles.
J'en ai terminé avec ces quelques perspectives, dont vous aurez compris qu'elles sont d'abord pour moi des occasions très opérationnelles de faire avancer les choses à tous les niveaux.
Les réalisations les plus réussies se nouent d'abord dans le dialogue, dans le travail conjoint et dans le partenariat bien compris ; c'est pourquoi, il est pour nous si important d'avancer en concertation réelle, et en parfaite confiance, avec nos homologues du ministère de la Culture qui partagent nos choix autant que nos ambitions.
Mais mon tour d'horizon ne serait pas complet si je n'en venais pas à l'objet même de cette manifestation. Le moment est donc venu d'installer ce Haut Conseil de l'Education artistique et culturelle.
Je veux adresser un message de bienvenue et de reconnaissance à toux ceux qui ont accepté d'y consacrer de leur temps comme de leur compétence et de leur générosité. Nous attendons de vous un regard global, qui ne soit ni partiel ni partial, un regard sans complaisance mais aussi sans acrimonie ; un regard qui sache nous pousser dans nos retranchements tout en gardant en tête les prérogatives et les contraintes qui nous sont propres.
Je suis convaincu que la conjugaison de vos talents, de vos compétences et de vos expertises saura nous stimuler au mieux de l'intérêt collectif, qui dépasse infiniment la somme de tous nos intérêts propres ; et puisque l'éducation artistique et culturelle doit être l'apanage de tous, c'est au nom de tous ceux que nous servirons ensemble que je vous remercie très chaleureusement.
Nous allons maintenant remettre à Didier Lockwood, vice-président du Haut Conseil, la lettre de mission que nous venons de cosigner. Sans plus attendre, je donne la parole à M. Lockwood.
(Source http://www.education.gouv.fr, le 25 octobre 2005)
Mesdames et Messieurs les membres du Haut Conseil,
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux de vous accueillir aujourd'hui, avec mon collègue Renaud Donnedieu de Vabres, dans ce lieu unique, qui est, depuis cent vingt-trois ans, la plus prestigieuse faculté d'histoire de l'art d'Europe !
Nous n'aurions pu trouver meilleur endroit que l'École du Louvre pour installer le Haut Conseil de l'éducation artistique et culturelle. Ici, où tant de jeunes (et de moins jeunes) ont approfondi la connaissance du patrimoine de l'humanité, nous renouons d'une certaine manière la chaîne des temps : aussi je souhaite que l'esprit conquérant qui a présidé à la création de cette école en 1882 anime aussi votre Ha ut Conseil, instrument essentiel du renouveau de l'éducation artistique dans notre pays !
Je suis d'autant plus heureux d'être ici que c'est, en fait, la première occasion publique qui m'est donnée de prendre la parole sur ce sujet. C'est un sujet capital, c'est un sujet immense, c'est un sujet passionnant, car il est en rapport direct avec l'idée même que nous nous faisons de la France. Voulons-nous que notre pays continue d'être demain un acteur de premier rang dans la production artistique ? Voulons-nous que les jeunes français connaissent et apprécient le patrimoine immense qui les entoure ? Voulons-nous des générations de nouveaux créateurs dans tous les domaines ? Évidemment la réponse est oui, la réponse est évidente, et il faut s'en donner les moyens !
Je ne suis donc pas venu simplement vous dire que la continuité de l'État était assurée; non, je suis venu vous dire mon enthousiasme pour l'éducation artistique et vous faire part des voies d'action que j'envisage ; cet enthousiasme a été nourri par une longue expérience d'élu dont je vous dirai un mot tout à l'heure.
Vous comprendrez que je souhaite partager avec vous un peu des convictions qui m'animent.
I. L'importance de l'éducation artistique et culturelle
Aujourd'hui, plus que jamais, l'ouverture des esprits à l'art et à la culture est une mission essentielle de l'École de la République. A une époque où la vitesse et la rentabilité tendent à l'emporter sur tout le reste, il est bon que les jeunes gens sachent encore regarder gratuitement une oeuvre ; qu'ils apprennent à s'étonner d'une couleur, d'une forme, à vibrer, à s'émerveiller d'une mélodie, d'un mouvement, d'une intonation ; qu'ils apprennent aussi à déchiffrer et à rendre vivant le patrimoine que nous a légué l'histoire. Il ne serait pas digne de la France que les jeunes générations vivent comme étrangères aux trésors qui les entourent. Et cela d'autant plus que la connaissance de ces trésors est aussi la condition des innovations radicales !
Pour rester vivants, pour rester unis, pour rester acteurs dans l'Histoire, nous devons nous reconnaître dans un fonds de représentations communes. C'est une des raisons d'être de l'éducation artistique et culturelle.
Mais il ne s'agit pas seulement de connaissance ! Il s'agit aussi de pratique artistique ! Il n'est d'ailleurs guère d'éducation réelle de l'oeil, de l'oreille, de la sensibilité sans une éducation active de la main, de la voix, du corps tout entier. Pour bien apprécier, il faut aussi avoir une idée de la pratique, aussi modeste soit-elle.
Cet éveil de la sensibilité, cet extraordinaire élargissement de l'horizon, ce déploiement des cinq sens et de toutes les capacités sensorielles ne sauraient être réservés à quelques uns ! Il revient à l'École de la République de les offrir à tous. Cela découle des principes non négociables de notre système éducatif. J'en fais, pour ma part, un pan essentiel de la politique de l'égalité des chances.
Cette éducation passe d'abord par les professeurs d'arts plastiques et d'éducation musicale, qui en sont les premiers dépositaires, puisque c'est avec eux que tout commence. Leurs compétences, leur expertise sont essentielles, et je salue ici leur engagement passionné dans leur discipline.
Mais l'enjeu est ici collectif et l'intérêt commun ; c'est pourquoi j'en appelle aussi à la mobilisation de tous les acteurs éducatifs, qu'il s'agisse des enseignants d'autres disciplines ou de l'ensemble des personnels à tous les niveaux de responsabilité. J'appelle aussi de mes voeux la prise en compte d'apports extérieurs diversifiés (artistes, professionnels de la culture, associations, collectivités). Je suis en effet convaincu que le système éducatif gagnera toujours à s'appuyer sur la concertation, la mutualisation, le partenariat.
Ma conviction profonde sur ce dernier point s'enracine dans mon expérience d'élu local, à Amiens, où je me suis engagé depuis longtemps pour l'éducation artistique.
II. L'expérience amiénoise
Rassurez-vous ! Je ne vous infligerai pas un compte rendu détaillé des différents projets que j'ai eu l'occasion de mettre en oeuvre dans ma ville !
Quelques mots seulement. D'abord j'ai toujours eu à coeur de relayer très énergiquement les dispositifs ministériels, quel que soit le Gouvernement, que ce soit dans les domaines de la musique, de la danse, du cinéma ou encore du patrimoine. Dans tous ces domaines, l'éducation artistique amiénoise a fait la preuve de son dynamisme.
Mais je pense surtout au " Contrat local d'éducation artistique " amorcé dès 1993 entre l'inspection académique de la Somme, l'agglomération amiénoise et la DRAC de Picardie. Il permet de faire bénéficier les élèves des écoles maternelles et élémentaires, en temps et hors temps scolaire, d'une éducation artistique et culturelle pilotée par ce que l'on peut appeler " le binôme de la réussite " : l'enseignant et l'artiste. En temps scolaire, pour 2005, 3591 enfants de 72 écoles maternelles et primaires de l'agglomération y ont participé. Cette expérience, qui touche les arts plastiques, le cinéma, la danse, l'écriture, la musique, le théâtre a prouvé cette année encore sa richesse et sa fécondité, dans le cadre de l'année Jules Verne.
III. Les voies d'une politique
De cette pratique de terrain, je retire deux convictions essentielles :
o les démarches partenariales sont fructueuses ;
o la territorialisation de la politique d'éducation artistique et culturelle est une voie d'avenir.
Fort de ces convictions, je ne vous surprendrai donc pas en vous disant que j'ai pris connaissance avec un vif intérêt du Plan de relance annoncé par mon prédécesseur et Renaud Donnedieu deVabres en janvier 2005. J'en reprends d'autant plus volontiers à mon compte les principales orientations que j'y lis les ferments d'une réponse aux postulats que je viens d'énoncer. J'en assume volontiers l'héritage, tout en comptant bien en prolonger la dynamique et, pourquoi pas, l'amplifier. J'estime en effet qu'un plan de relance est d'abord une feuille de route dont il est essentiel d'entretenir en permanence le sens et la consistance. Je souhaite donc clairement concrétiser les grandes orientations contenues dans le plan. J'ai en tout cas le plaisir aujourd'hui de constater la réalisation de deux d'entre elles : l'installation du nouveau Haut Conseil, en lieu et place du précédent Haut Comité, et le lancement du portail interministériel, qui vous a été présenté tout à l'heure.
Mais j'entends bien aller plus loin ; et sans tomber dans une énumération programmatique, vous me permettrez d'évoquer très brièvement quelques perspectives sur lesquelles j'ai demandé à mes services de travailler.
J'ai décidé de faire porter notre effort sur :
o les territoires,
o les formations,
o les ressources.
1. Les territoires
Je commencerai par la question des territoires. L'enjeu est clair : lutter contre le morcellement des projets, l'émiettement des actions et la solitude des acteurs. Aussi originale, aussi brillante et inspirée soit-elle, une initiative locale ne touche le plus souvent qu'un nombre très limité d'élèves, trop souvent à l'échelle très réduite de la classe. Le Plan a proposé deux remèdes à ce double risque :
o la systématisation régionale, d'une part, qui implique que les recteurs et les DRAC mettent sur pied une politique territoriale d'éducation artistique. L'objectif est tout simplement que chaque territoire tire le meilleur de son environnement culturel, de son vivier d'artistes et y adapte son projet éducatif.
o la généralisation dans les établissements, d'autre part ; sur ce point, j'ai demandé aux équipes éducatives d'inscrire la dimension artistique et culturelle dans tous les projets d'école ou d'établissement.
Je souhaite que tous les acteurs éducatifs s'engagent dans cette voie de façon significative en leur proposant notamment des exemples de cadres d'aménagement territorial, sur le modèle des chartes d'éducation au patrimoine ou encore des chartes de pratique du chant choral dont je souhaite élargir le principe à d'autres domaines artistiques.
De même, je veux aider les professeurs à inscrire leurs actions dans le cadre du projet d'établissement : c'est pourquoi, nous leur adresserons un guide méthodologique exposant la diversité de s formules possibles en fonction du contexte local. Ce guide sera prêt au printemps prochain.
2. La formation
Une telle évolution, qui passe par la mobilisation de tous, est indissociable d'un effort de formation. Or, vous le savez, une occasion formidable se présente, puisque nous allons redéfinir le cahier des charges de la formation des enseignants des IUFM. Il importe en effet que les futurs professeurs soient sensibles aux implications artistiques et culturelles de leur propre discipline.
Il me paraît enfin indispensable d'envisager simultanément la formation des équipes éducatives et notamment des cadres (personnels d'inspection, d'encadrement ou d'accompagnement). J'ai donc donné mandat à mes services de bâtir un programme de formation spécifique dont j'ai plaisir à vous annoncer qu'il commencera dès 2006, par un séminaire national, s'adressant aux personnels d'encadrement des premier et second degrés. Notre souhait est que ce premier séminaire puisse par la suite se décliner en regroupements inter-académiques de façon à aller au plus près des besoins des territoires.
3. Les ressources
Il va de soi qu'à ces dispositifs de formation devra correspondre un ensemble de ressources éditoriales en parfaite adéquation avec les attentes qui portent sur les personnels. J'ai donc demandé au CNDP de me faire des propositions en faveur d'une politique éditoriale consacrée à l'éducation artistique et culturelle.
C'est dans ce cadre notamment que devra être pensée l'évolution des Pôles nationaux de ressources, dont Renaud Donnedieu de Vabres et moi-même avons l'intention de mieux préciser les missions afin qu'ils puissent jouer, conjointement à leur action territoriale, un rôle d'accompagnement privilégié de nos priorités ministérielles.
J'en ai terminé avec ces quelques perspectives, dont vous aurez compris qu'elles sont d'abord pour moi des occasions très opérationnelles de faire avancer les choses à tous les niveaux.
Les réalisations les plus réussies se nouent d'abord dans le dialogue, dans le travail conjoint et dans le partenariat bien compris ; c'est pourquoi, il est pour nous si important d'avancer en concertation réelle, et en parfaite confiance, avec nos homologues du ministère de la Culture qui partagent nos choix autant que nos ambitions.
Mais mon tour d'horizon ne serait pas complet si je n'en venais pas à l'objet même de cette manifestation. Le moment est donc venu d'installer ce Haut Conseil de l'Education artistique et culturelle.
Je veux adresser un message de bienvenue et de reconnaissance à toux ceux qui ont accepté d'y consacrer de leur temps comme de leur compétence et de leur générosité. Nous attendons de vous un regard global, qui ne soit ni partiel ni partial, un regard sans complaisance mais aussi sans acrimonie ; un regard qui sache nous pousser dans nos retranchements tout en gardant en tête les prérogatives et les contraintes qui nous sont propres.
Je suis convaincu que la conjugaison de vos talents, de vos compétences et de vos expertises saura nous stimuler au mieux de l'intérêt collectif, qui dépasse infiniment la somme de tous nos intérêts propres ; et puisque l'éducation artistique et culturelle doit être l'apanage de tous, c'est au nom de tous ceux que nous servirons ensemble que je vous remercie très chaleureusement.
Nous allons maintenant remettre à Didier Lockwood, vice-président du Haut Conseil, la lettre de mission que nous venons de cosigner. Sans plus attendre, je donne la parole à M. Lockwood.
(Source http://www.education.gouv.fr, le 25 octobre 2005)