Texte intégral
Q - Vous dites qu'il est temps de redonner espoir aux salariés. En quoi le 4 octobre s'inscrit dans cette perspective ?
Jean-Claude Mailly : La nécessité d'une mobilisation a été évoquée entre les confédérations dès le mois de juin quand le gouvernement a décidé de créer le contrat "nouvelles embauches". Les mesures annoncées en septembre ont confirmé ce besoin. Rien n'est venu sur le pouvoir d'achat, à part la prime pour prime pour l'emploi qui permet aux employeurs d'alimenter la trappe à bas salaires puisque l'État prend en charge une partie de la rémunération. Alors, quand les salariés ne sont pas entendus et que le dialogue social ne fonctionne pas, il n'y a pas d'autres solutions que la force collective. Personne ne se met en grève pour le plaisir. Nous voulons obtenir satisfaction. Et il faut créer pour cela un rapport de forces puissant. Après, la balle est dans le camp de nos interlocuteurs. On attend des réponses.
Q - Les réponses gouvernementales après le 10 mars ont été maigres au regard de la mobilisation...
Jean-Claude Mailly : Le 10 mars a permis d'obtenir 0,8 % d'augmentation salariale pour les fonctionnaires et la relance des négociations de branche concernant les salaires minimaux. Cela n'est pas suffisant, mais cette journée n'a pas non plus servi à rien. Dominique de Villepin a annoncé jeudi dernier son souhait de relancer la négociation dans les branches. On l'a déjà obtenu depuis 6 mois et il reste encore 200 branches à examiner! Le gouvernement comme le patronat persistent à ne pas répondre aux attentes des salariés. L'examen des scrutins politiques (de la présidentielle au référendum sur l'Europe) montre que les travailleurs utilisent leur bulletin de vote comme une action. Ils se demandent quoi faire pour être enfin entendus. Tout cela pèse sur le climat social.
Q - Sur le pouvoir d'achat, quels signes seraient de nature à apaiser le mécontentement social ?
Jean-Claude Mailly : D'abord, accélérer les négociations dans les branches professionnelles pour que plus un minimum conventionnel ne soit sous le niveau du SMIC. Le patronat de la restauration, qui a obtenu 1,5 milliard d'euros d'aides mais qui refuse de négocier des augmentations de salaire, doit rembourser. Il va y avoir dans le budget 2006 de nouvelles exonérations de charges patronales. Le gouvernement doit non seulement compenser intégralement le manque à gagner pour la Sécurité sociale, ce qu'il ne fait jamais, mais aussi conditionner leur attribution à des augmentations négociées de salaire.
Dans la foulée du 10 mars, les demandes d'ouverture de négociations de salaire se sont multipliées. Il faut continuer de déposer les revendications. De même que l'État employeur ne peut pas attendre que le budget soit bouclé avant d'engager les négociations dans la fonction publique.
Le problème du pouvoir d'achat est aiguisé par l'augmentation des prix. Il faut donc agir sur ce paramètre et particulièrement le coût du pétrole. Les agriculteurs ou les routiers ont obtenu des aides. Les salariés, rien. Nous réclamons la généralisation d'une prime, de type de celle qui existe en Île-de-France, avec une traduction sur la feuille de paie et pas seulement pour les transports collectifs, aussi pour celles et ceux qui prennent leur voiture pour aller travailler.
Q - Vous voulez conditionner les aides publiques aux choix salariaux. Peuvent-elles aussi devenir des incitations à l'emploi ?
Jean-Claude Mailly : Oui. Si elles émanent des collectivités par exemple, l'entreprise devrait s'engager à ne pas délocaliser, sous peine de sanctions. Nous voulons aussi le rétablissement de la commission de contrôle des aides publiques. Il n'y a pas de miracle. Pour soutenir la consommation, il faut créer des emplois. Le gouvernement n'a pas tiré les leçons du 29 mai. Il reste sur la même logique. Quand il réaffirme l'objectif de 2,9 % de déficit budgétaire, il annonce la remise en cause du service public et l'accélération des privatisations. Il cherche de l'argent et vend les bijoux de famille. La privatisation annoncée de la SNCM avec des entreprises de placement n'a pas de but industriel. L'objectif est de rentabiliser, de revendre et d'opérer une plus-value.
Q - C'est pour cette raison que vous insistez pour défendre les services publics demain ?
Jean-Claude Mailly : Il est important de porter la défense des services publics dans des mobilisations interprofessionnelles. FO est très attachée au modèle républicain, terme que nous préférons de loin à modèle social. Si le gouvernement continue de privatiser ou de gérer l'État avec des critères de gestion privée, ce modèle va être mis en péril. On ne peut pas être dans une République sans services publics qui assurent un minimum d'égalité de traitement entre les citoyens et donnent un caractère universel aux droits.
Entretien réalisé par Paule Masson
(Source http://www.force-ouvriere.fr, le 12 octobre 2005)
Jean-Claude Mailly : La nécessité d'une mobilisation a été évoquée entre les confédérations dès le mois de juin quand le gouvernement a décidé de créer le contrat "nouvelles embauches". Les mesures annoncées en septembre ont confirmé ce besoin. Rien n'est venu sur le pouvoir d'achat, à part la prime pour prime pour l'emploi qui permet aux employeurs d'alimenter la trappe à bas salaires puisque l'État prend en charge une partie de la rémunération. Alors, quand les salariés ne sont pas entendus et que le dialogue social ne fonctionne pas, il n'y a pas d'autres solutions que la force collective. Personne ne se met en grève pour le plaisir. Nous voulons obtenir satisfaction. Et il faut créer pour cela un rapport de forces puissant. Après, la balle est dans le camp de nos interlocuteurs. On attend des réponses.
Q - Les réponses gouvernementales après le 10 mars ont été maigres au regard de la mobilisation...
Jean-Claude Mailly : Le 10 mars a permis d'obtenir 0,8 % d'augmentation salariale pour les fonctionnaires et la relance des négociations de branche concernant les salaires minimaux. Cela n'est pas suffisant, mais cette journée n'a pas non plus servi à rien. Dominique de Villepin a annoncé jeudi dernier son souhait de relancer la négociation dans les branches. On l'a déjà obtenu depuis 6 mois et il reste encore 200 branches à examiner! Le gouvernement comme le patronat persistent à ne pas répondre aux attentes des salariés. L'examen des scrutins politiques (de la présidentielle au référendum sur l'Europe) montre que les travailleurs utilisent leur bulletin de vote comme une action. Ils se demandent quoi faire pour être enfin entendus. Tout cela pèse sur le climat social.
Q - Sur le pouvoir d'achat, quels signes seraient de nature à apaiser le mécontentement social ?
Jean-Claude Mailly : D'abord, accélérer les négociations dans les branches professionnelles pour que plus un minimum conventionnel ne soit sous le niveau du SMIC. Le patronat de la restauration, qui a obtenu 1,5 milliard d'euros d'aides mais qui refuse de négocier des augmentations de salaire, doit rembourser. Il va y avoir dans le budget 2006 de nouvelles exonérations de charges patronales. Le gouvernement doit non seulement compenser intégralement le manque à gagner pour la Sécurité sociale, ce qu'il ne fait jamais, mais aussi conditionner leur attribution à des augmentations négociées de salaire.
Dans la foulée du 10 mars, les demandes d'ouverture de négociations de salaire se sont multipliées. Il faut continuer de déposer les revendications. De même que l'État employeur ne peut pas attendre que le budget soit bouclé avant d'engager les négociations dans la fonction publique.
Le problème du pouvoir d'achat est aiguisé par l'augmentation des prix. Il faut donc agir sur ce paramètre et particulièrement le coût du pétrole. Les agriculteurs ou les routiers ont obtenu des aides. Les salariés, rien. Nous réclamons la généralisation d'une prime, de type de celle qui existe en Île-de-France, avec une traduction sur la feuille de paie et pas seulement pour les transports collectifs, aussi pour celles et ceux qui prennent leur voiture pour aller travailler.
Q - Vous voulez conditionner les aides publiques aux choix salariaux. Peuvent-elles aussi devenir des incitations à l'emploi ?
Jean-Claude Mailly : Oui. Si elles émanent des collectivités par exemple, l'entreprise devrait s'engager à ne pas délocaliser, sous peine de sanctions. Nous voulons aussi le rétablissement de la commission de contrôle des aides publiques. Il n'y a pas de miracle. Pour soutenir la consommation, il faut créer des emplois. Le gouvernement n'a pas tiré les leçons du 29 mai. Il reste sur la même logique. Quand il réaffirme l'objectif de 2,9 % de déficit budgétaire, il annonce la remise en cause du service public et l'accélération des privatisations. Il cherche de l'argent et vend les bijoux de famille. La privatisation annoncée de la SNCM avec des entreprises de placement n'a pas de but industriel. L'objectif est de rentabiliser, de revendre et d'opérer une plus-value.
Q - C'est pour cette raison que vous insistez pour défendre les services publics demain ?
Jean-Claude Mailly : Il est important de porter la défense des services publics dans des mobilisations interprofessionnelles. FO est très attachée au modèle républicain, terme que nous préférons de loin à modèle social. Si le gouvernement continue de privatiser ou de gérer l'État avec des critères de gestion privée, ce modèle va être mis en péril. On ne peut pas être dans une République sans services publics qui assurent un minimum d'égalité de traitement entre les citoyens et donnent un caractère universel aux droits.
Entretien réalisé par Paule Masson
(Source http://www.force-ouvriere.fr, le 12 octobre 2005)