Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Directeur,
Mesdames et Messieurs les journalistes,
Mesdames, Messieurs,
En quelques années, l'Ifen a su devenir un interlocuteur privilégié des pouvoirs publics, comme de tous les acteurs qui interviennent dans nos domaines. L'Ifen a su s'imposer comme un outil non seulement au service du ministère de l'Environnement, mais aussi des autres administrations, des collectivités, des associations, des entreprises et des partenaires internationaux.
Depuis 1991, deux présidents se sont succédé à sa tête : Yves Pietrasanta et Jean-François Saglio. Aujourd'hui, j'ai le plaisir de vous présenter le troisième président de l'Ifen, François Letourneux.
1. Un nouveau président
Est-il utile de vous le présenter ? Il n'est certes pas un inconnu pour tous ceux, militants ou professionnels, qui s'occupent d'environnement et de protection de la nature. De 1978 à 1980, il fut directeur du plus ancien parc naturel régional, celui de Saint-Amand, dans le Nord, puis a dirigé la fondation d'Espace naturel régional, créé à l'initiative du Conseil régional Nord-Pas-de-Calais au début des années 1980. Après un passage à la Datar, qui fit de lui un pionnier du rapprochement entre Environnement et Aménagement du territoire, il fut directeur de la protection de la nature, entre 1983 et 1992.
Depuis 6 ans, il dirige le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, un outil reconnu et efficace pour la protection d'espaces fragiles et très convoités. Doté d'une telle expérience, le nouveau président de l'Ifen saura, j'en suis sûre, lui donner un nouveau souffle.
2. Le rapport sur l'environnement
Si nous nous réunissons aujourd'hui, c'est aussi parce que l'Ifen publie son troisième rapport sur l'environnement en France. Après une première édition nationale en 1994, puis une deuxième en 1996, orientée sur une approche régionale, la version 1999, réalisée en co-édition avec les éditions La Découverte, présente des améliorations tant sur la forme que sur le fond.
Sur la forme, la maquette est rendue lisible pour les non-spécialistes, grâce à plusieurs niveaux de lecture, et aux illustrations nombreuses et didactiques. Au final, c'est un ouvrage qui concilie facilité d'accès et richesse des données rassemblées.
Sur le fond, l'édition 1999 s'enrichit de plusieurs thèmes et problématiques, tels que " les émissions " dans l'air, dans l'eau ou dans le sol, " la pêche ", " le littoral et la montagne ", ou encore les " organismes génétiquement modifiés ".
Je me réjouis aussi de voir que le chapitre consacré aux " professionnels " fait la part belle aux emplois et aux métiers de l'environnement. Vous le savez, la lutte contre le chômage est la priorité du gouvernement, et il n'est pas inutile de rappeler que le secteur de l'environnement et des éco-industries est créateur d'emplois.
Je note également avec satisfaction l'introduction de la problématique santé-environnement, qui me tient à cur, et la mise en perspective de la situation française dans le contexte européen et mondial.
Sur la forme comme sur le fond, le cru 98 de l'Etat de l'environnement mérite donc d'être goûté. Ce travail de l'Ifen va dans le sens de la transparence et de la diffusion de l'information, auxquelles je suis attachée.
3. De nouvelles perspectives
L'arrivée d'un nouveau président et la publication de cet état des lieux me donnent l'occasion d'ébaucher avec vous des axes de travail pour les mois qui viennent.
L'Ifen n'est pas uniquement le service statistique du ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement. Il doit être davantage capable de structurer et de diffuser les données indispensables à la compréhension des problématiques environnementales.
1. La transparence. Malgré les progrès réalisés, en partie grâce à l'Ifen, les données environnementales restent encore trop dispersées, et parfois lacunaires. L'Ifen doit devenir un " guichet unique ", accessible à tous, y compris aux simples citoyens et non plus uniquement aux organismes publics ou privés. C'est en devenant une " tête de réseau " d'observatoires régionaux de l'environnement, avec l'appui des services déconcentrés de l'Etat, que l'Ifen pourra contribuer au débat public, en facilitant la prise de décision et l'évaluation des politiques.
Je sais que cette transparence n'est pas sans risque, comme on a pu le voir récemment avec la publication du rapport de l'Ifen sur les pesticides présents dans les eaux de surface et dans les nappes. Malgré les interprétations parfois alarmistes des médias, je continue à penser que cette transparence est nécessaire, dès lors qu'elle se fonde sur des données objectives et validées.
2. Organiser le débat économique. La mise en place, le 15 décembre prochain, de la Commission des comptes et de l'économie de l'environnement, dont l'Ifen est le rapporteur, doit permettre une meilleure appréhension des relations entre l'économie et l'environnement. Celui-ci ne doit plus être considéré comme une source de contraintes et de coûts (dépollution, assainissement, gestion des déchets, lutte contre le bruit), mais aussi être apprécié en termes de biens communs. L'évaluation des biens environnementaux (la biodiversité, l'eau, l'air, les paysages) est nécessaire, pour que prévale une saine gestion des ressources naturelles et des paysages, et pour apprécier le coût des atteintes à l'environnement.
De même, le croisement entre des données physiques (taux d'émission ou de prélèvement dans l'environnement) et données économiques, permet de mettre l'accent sur les contributions relatives des différentes activités humaines à des problématiques globales, du type effet de serre. L'Ifen pourrait ainsi mettre en lumière, le plus objectivement possible, les impacts des politiques publiques de chaque secteur sur les ressources et sur les milieux.
3. Intégrer l'environnement dans toutes les politiques publiques. La qualité de l'environnement est à la fois une condition et un objectif du développement durable, qui est le fil rouge de mon action, puisqu'il réconcilie l'aménagement du territoire et l'environnement. Je me réjouis à cet égard de l'entrée de la Datar dans le conseil d'administration de l'Ifen.
Dans chaque politique sectorielle : agriculture, énergie, transports, tourisme, et bien entendu dans la politique d'aménagement du territoire, l'intégration environnementale doit pouvoir être mesurée avec rigueur et objectivité. Par exemple, l'Ifen pourrait étudier l'étalement urbain et ses conséquences sur la qualité de la vie.
Par ailleurs, l'Ifen poursuivra ses travaux sur les impacts environnementaux de l'agriculture et de l'industrie. Enfin, l'observatoire des zones humides sera renforcé, afin de fournir les données indispensables pour orienter les décisions d'aménagement.
4. L'action internationale. Par son rôle de " point focal " de l'Agence européenne de l'environnement, l'Ifen participe à la construction d'un système communautaire d'information. Mais, au delà de sa contribution aux instances de l'Union et de l'OCDE en termes de méthodes, de données et d'indicateurs, l'Ifen devrait poursuivre dans la voie d'une évaluation de la " performance " de la France, au regard de ses engagements internationaux, en publiant des indicateurs de performance environnementale.
L'Ifen suivra l'élaboration d'indicateurs qu'a entamée la Commission de développement durable des Nations unies, et travaillera avec les autorités marocaines, après avoir aidé la Tunisie. Cette approche multilatérale de l'information sur le développement durable s'appuie sur les projets originaux menés par la France, qui met au point des indicateurs de durabilité, prochainement soumis au débat public.
Enfin, l'Ifen pourrait profiter de la présidence française de l'Union européenne, qui démarre dans 18 mois, pour proposer une publication synthétisant les efforts pour améliorer l'environnement à l'échelle continentale.
5. Renforcer le pôle de compétences social de l'Ifen. La prise en compte de l'évolution de l'opinion et des pratiques sociales et culturelles s'avère essentielle dans les politiques d'environnement. L'Observatoire des pratiques et des représentations sociales de l'environnement (OPRESE), créé par l'Ifen, doit donc être renforcé, pour combler les déficits de connaissance sur les pratiques des citoyens, par exemple en matière de déchets ou de déplacements.
De son côté, l'Observatoire des réseaux et des métiers de l'environnement (ORME) voit son rôle s'accroître en même temps que se développe le secteur des éco-industries et des autres emplois liés à l'environnement. L'ORME est chargé de suivre et d'évaluer, qualitativement et quantitativement, le programme " nouveaux services, nouveaux emplois ", et de fournir des publications sur la création d'emplois et la formation.
Bien sûr, pour cette montée en puissance que j'appelle de mes vux, de nouveaux moyens sont nécessaires. Comme vous le savez, le budget du ministère a été significativement augmenté, et cette progression permettra la création de 9 postes à l'Ifen, portant l'effectif de cet Institut à 43.
Je voudrais conclure en évoquant la " schizophrénie " que relatait récemment un article paru dans un quotidien du soir. On le sait, nos concitoyens, quand on les interroge, se déclarent réellement préoccupés par les problèmes d'environnement. Ils se disent prêts à trier leurs déchets, à laisser leur voiture au garage quand ils peuvent faire autrement, à tenir compte de l'impact environnemental dans leurs comportements de consommateur, etc. La réalité est certes assez éloignée de ces bonnes intentions, mais la prise de conscience est un préalable au changement de comportement.
L'Ifen est un outil indispensable pour que la diffusion de l'information accélère cette prise de conscience, et finalement contribue à réduire cet écart entre la sensibilisation aux questions environnementales et l'action concrète qui devrait en découler, pour chaque citoyen comme pour les pouvoirs publics.
Si vous le voulez bien, je donne maintenant la parole à M. Bernard Morel, directeur de l'Ifen, qui va revenir plus en détail sur l'édition 99 de l'Etat de l'environnement, et qui répondra à vos questions.
Je vous remercie.
(source http://www.environnement.gouv.fr, le 20 septembre 2001)