Déclaration de M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie, sur les relations entre la France et le Laos, le développement des investissements français et européens dans ce pays, la coopération économique et culturelle et l'enseignement du français, Vientiane le 22 octobre 1998.

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Circonstance : Voyage de M. Josselin au Laos et en Thaïlande du 22 au 24 octobre 1998-diner à Vientiane (Laos) le 22

Texte intégral

Monsieur le Ministre,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,
Permettez-moi, en tout premier lieu, de vous remercier pour la chaleur de l'accueil dont vous m'avez témoigné ainsi qu'à ma délégation depuis notre arrivée à Vientiane. Je voudrais aussi vous redire combien sont précieux les échanges de vues que j'ai eus avec vous et avec les personnalités qui vous entourent ce soir.
Cette trop brève visite, la première que j'effectue au Laos, m'aura néanmoins permis de mieux percevoir la réalité de votre pays et la diversité des formes de coopération que nous menons ensemble.
J'ai ainsi pu découvrir dans la ville de Luang Prabang, un exemple de coopération décentralisée particulièrement réussie, conduite par le gouverneur, M. Chansy Phosikham, et par M. Yves Gauge, présent aujourd'hui à mes côtés. Je dois dire à quel point j'ai été séduit par cette ancienne capitale royale, îlot de perfection, qui est maintenant inscrite dans le registre du patrimoine mondial.
Tout en préservant sa culture, votre pays se tourne résolument vers l'avenir. A cet égard, la France salue la politique d'ouverture menée par le Laos depuis une dizaine d'année et qui l'a conduit à sa pleine insertion dans la communauté internationale et dans son environnement régional. J'en citerai deux exemples : la participation active du Laos à la Commission du Mékong et, surtout, depuis juillet 1997, sont entrée dans l'ASEAN, permettant ainsi de renforcer le rôle de cette organisation dans la stabilité de la région.
Nos échanges de vues montrent que les relations bilatérales entre nos deux pays sont plus riches que jamais :
Tout d'abord, nos relations politiques ont reçu une nouvelle impulsion avec la visite officielle à Paris du président Khamtay Siphandone, alors Premier ministre en avril 1997. Nous souhaitons qu'elles se renforcent à tous les niveaux, avec tous les acteurs, notamment, les parlementaires, qui sont représentés aujourd'hui à mes côtés par MM. Suchod et Dauge.
Ensuite, la France, quasiment absente il y a quinze ans, est aujourd'hui parmi les premiers pays donateurs et le premier investisseur européen au Laos. Notre aide tournée vers notre développement, nous la menons à titre bilatéral mais aussi dans le cadre de l'Union européenne avec laquelle vous avez signé, en avril 1997, un accord de coopération. A cet égard, la France ne manquera pas de plaider auprès de ses partenaires européens pour un renforcement des liens qui unissent le Laos à l'Union européenne.
Cette visite au Laos intervient toutefois dans un contexte économique régional particulier.
Je tiens à vous dire que face à la crise économique et financière que traverse actuellement l'Asie, la France entend poursuivre, au côté de ses partenaires européens et au sein des organisations financières internationales, une solidarité active afin que l'Asie, forte de ses potentialités et de ses richesses humaines, retrouve le chemin de la croissance. Cette solidarité s'exprimera plus particulièrement auprès des populations les plus affectées par la crise. Car nous ne concevons pas une prospérité économique qui ne permette pas un meilleur équilibre social, reflétée notamment par l'accès à l'éducation et à la santé, et une répartition des richesses plus équitables. Nous faisons valoir ce point de vue bien sûr auprès de nos partenaires européens mais aussi et surtout auprès des institutions de Bretton Woods - et je sais que vous êtes sensibles à cette préoccupation.
Il n'en est pas moins vrai que le retour à la croissance ne sera durablement possible que si les pays asiatiques poursuivent les efforts courageux qu'ils ont entrepris, rejettent les tentations de repli et vont résolument de l'avant dans la mise en oeuvre des réformes.
Mais nous sommes de façon générale confiants pour l'avenir car, comme vous le savez, l'Europe connaît des mutations majeures, notamment à travers la réalisation de l'Union économique et monétaire. La mise en oeuvre d'une monnaie unique, l'euro, va, je l'espère, engager une nouvelle phase d'échange et de croissance qui bénéficiera, non seulement à l'Europe, mais aussi à l'ensemble de l'économie mondiale.
Notre soutien résolu par notre appartenance à l'Union européenne va de pair avec l'expression d'autres solidarités dont la Francophonie est sans doute l'une de celles qui nous est les plus chères.
Dans un monde dont l'avenir serait compromis par les dangers inhérents à l'uniformisation linguistique mais surtout culturelle, l'appartenance à ce qu'il est convenu d'appeler la communauté des pays ayant le français en partage constitue pour tous ses membres une chance de préserver leur identité nationale. Depuis l'adhésion du Laos aux instances de la Francophonie en 1991, la France a particulièrement apprécié le rôle qu'il y a joué, notamment lors du 7ème Sommet d'Hanoï. Les décisions prises, pour la première fois sur le continent asiatique, ont concrétisé la maturité de cette organisation et ont permis d'engager une réforme favorable à une meilleure utilisation des ressources au service d'objectifs déterminés en commun.
Grâce à cette forme particulière de solidarité, nous entendons, pour notre part, fonder des actions pour la paix, le développement, et la démocratie. Et quand je dis démocratie, je n'entends pas qu'elle se décline sur la base d'un modèle particulier ou supérieur mais plutôt sur des principes : la liberté d'expression, la prise en compte des aspirations de la société civile, la transparence de la justice et de la gestion de l'Etat, le respect de la dignité de l'individu.
J'ai évoqué l'action de la France au sein de la Communauté européenne et francophone. Je conclurai sur notre action plus proprement bilatérale au Laos.
Je me réjouis d'abord que les effectifs de la communauté française, qui compte une majorité d'entrepreneurs ou de volontaires travaillant au sien de nombreux ONG, ont quadruplé au cours des huit dernières années.
Cette expertise, elle bénéficie au développement des infrastructures du pays dont témoignent par exemple le colossal projet hydroélectrique de Nam Theun 2, que vous avez classé comme prioritaire, ou encore, à une autre échelle, le projet de la société Match, PME française, qui souhaite établir une co-entreprise avec un partenaire lao, pour la réhabilitation des routes.
En matière de coopération technique, la France, à la demande de votre gouvernement, entend privilégier les actions conduites dans le domaine de la formation des hommes. Formations dans les universités en France bien sûr, mais aussi sur place, à Vientiane, ou dans les établissements régionaux, pour démultiplier l'effort tout en respectant la qualité à laquelle nous sommes toujours attentifs. L'apprentissage de la langue française, dans les classes bilingues en particulier, n'est pas une fin en soi mais un outil préalable au service de cette politique de formation que nous entendons développer en concertation étroite avec les responsables lao des ministères et des entreprises concernés.
Cette coopération, je souhaite la renforcer. Le gouvernement de Lionel Jospin met en oeuvre actuellement une ambitieuse réforme du dispositif de Coopération français. Bien que les éléments techniques relatifs à ce changement ne soient pas encore tous mis en place, je tiens à vous indiquer que nous envisageons actuellement d'élargir les moyens dont dispose notre coopération avec le Laos. Le ministère des Affaires étrangères et l'agence française de développement en seront les vecteurs.
Les moyens élargis témoigneront des liens particuliers de fidélité et de solidarité entre nos deux pays. Ils permettront également d'augmenter notre coopération économique et de développement si votre pays est prêt à s'engager dans un partenariat à la fois ouvert et exigeant avec la France. Ce serait le sens du message que j'adresserai demain au nom du gouvernement français au président de la République démocratique populaire lao, son excellence M. Khamthay Sipandhone.
Soyez donc assurés que la France, en poursuivant son chemin conjointement sur la voie de ses ambitions européennes, de son attachement à la Francophonie et d'une politique active en faveur du développement, restera résolument aux côtés du Laos.
Permettez-moi, en souhaitant à chacun d'entre vous bonne santé et réussite, de lever mon verre à l'amitié entre nos deux peuples et au développement de notre coopération, aujourd'hui et demain.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 octobre 2001)