Texte intégral
J'ai souhaité que ces manifestations consacrées à mieux faire connaître la science continuent d'avoir lieu sur une durée d'une semaine, mais reprennent un intitulé plus ludique, analogue à celui retenu par Hubert Curien en 1991.
Elles s'appellent donc désormais "Fête de la Science". Ce qui, à l'audition, peut d'ailleurs s'entendre de deux manières :
- "Fête", au sens festif, car la science peut être elle aussi une fête, parler à l'imagination, à l'affectivité, susciter la passion ou le rêve.
- "Faîtes", au sens d'un impératif, proposant en particulier aux jeunes de s'engager plus nombreux dans les études et les carrières scientifiques.
Filles et sciences
Cette invitation à s'engager plus volontiers dans les disciplines scientifiques s'adresse notamment aux jeunes filles. Un colloque particulier intitulé "Sciences, pourquoi les filles ?" sera organisé au CNAM le 26 octobre.
Quand elles s'y engagent, les femmes excellent dans les disciplines scientifiques. Sans même remonter à Marie Curie et à Irène Joliot-Curie, Prix Nobel l'une et l'autre, on peut constater qu'aujourd'hui la direction générale du CNRS et le secrétariat perpétuel de l'Académie des Sciences sont assurés par deux femmes : Geneviève Berger et Nicole Le Douarin.
Raison de plus pour en finir avec une répartition archaïque et sexiste des rôles, qui orienterait les garçons vers les sciences exacts ou " dures " et les filles vers les carrières littéraires. Les unes et les autres ont un égal intérêt, pour tous et pour toutes.
Pour une science publique
D'une manière générale, pour renforcer son attractivité, la science n'est plus du tout repliée dans une tour d'ivoire ou dans une forteresse de la recherche académique. La science doit aller à la rencontre du public et "descendre dans la rue". L'impératif, c'est une science publique, agissant à ciel ouvert.
C'est l'objet même de cette "Fête de la Science" : créer un sentiment de proximité et de familiarité avec la science. Une science qui doit être proche de tous. Partout, dans toutes les régions et dans un très grand nombre de communes, sont organisées des rencontres entre les chercheurs et le public, des expositions, des ateliers scientifiques, des animations, des spectacles, des visites, des colloques, sous des formes usuelles ou nouvelles : "Café du gêne", "Ballade du Paris savant" en bus rétro, ou " Marathon des sciences " avec pour premier prix un voyage au Centre spatial de Guyane, à Kourou.
Tous les organismes de recherche, les universités, les écoles d'ingénieurs, les associations scientifiques participent à cette " Fête de la Science ", à cette opération qu'on pourrait aussi dénommer " science partout, science pour tous ".
Celle-ci devrait renforcer l'intérêt de tous les publics pour les sciences et aussi susciter chez les jeunes de nouvelles vocations scientifiques.
A l'inverse de ce qu'avait dit le Tribunal révolutionnaire quand il avait condamné Lavoisier, je dirais : "La République a besoin de savants".
La vitalité d'un pays, sa place et son rang dans le monde dépendent pour beaucoup de l'effort qu'il consacre à la recherche. Celle-ci est bien sûr la matrice des nouveaux savoirs, mais elle est aussi devenue le moteur principal de la compétitivité, de la croissance et de l'emploi. Notamment avec la création des start-up, des jeunes entreprises technologiques innovantes.
Le pari le moins risqué et le plus nécessaire, c'est le pari sur l'intelligence, c'est le pari sur la connaissance et sur l'accès de tous au savoir.
Pour une science citoyenne
Par ailleurs, cette Fête de la Science doit contribuer à un second objectif : développer une science citoyenne, une science au contact direct des citoyens et de leurs interrogations.
Il faut rapprocher science et société. Il faut "repolitiser la science", c'est-à-dire lui faire retrouver sa place dans la Cité, dans le débat civique et politique. Comme il importe en démocratie.
Ce qui est en jeu, c'est le droit de savoir, pour disposer du pouvoir de décider.
Nos concitoyens doivent être pleinement informés des avancées mais aussi des incertitudes de la recherche scientifique, pleinement informés de ses enjeux. Ils doivent pouvoir en débattre avec les chercheurs et avec les responsables politiques.
Nos concitoyens aspirent à débattre et à participer à la décision sur les applications de la génomique et de la post-génomique, sur les recherches éventuelles sur les cellules souches embryonnaires, sur les OGM ou sur le devenir des déchets radioactifs.
Mieux se soigner, mieux s'alimenter, mieux vivre en sécurité : ce sont les enjeux et les défis auxquels est confrontée la recherche et auxquels il faut faire participer nos concitoyens. Sans cela, le débat démocratique serait incomplet ou "décalé" par rapport aux véritables préoccupations de chacun.
A cet égard, le Ministère de la Recherche, qui est installé rue Descartes, dans l'ancienne Ecole Polytechnique et qui comporte donc plusieurs amphitéâtres, organise, sur place, le samedi 21 octobre un cycle de conférences données par cinq des Prix Nobel français : "Le Siècle du gène" par François Jacob ; "Mes engagements de scientifiques humanistes" par Jean Dausset ; " Manipulation d'atomes par faisceau laser" par Claude Cohen-Tannoudji ; "Le dogmatisme contre la science" par Maurice Allais ; et "La médecine en partage" par Jean-Hervé Bradol, président de Médecins sans frontières (prix Nobel de la paix 1999).
Notre objectif, c'est donner la parole aux Nobel et les faire dialoguer avec le public. C'est mettre la science de plus haut niveau au contact de tous. C'est ouvrir un grand débat, à plusieurs voix, sur la science, son rôle dans la société, ses enjeux, ses interrogations.
Nous voulons une science vivante, de plain-pied avec son époque. Une science attentive à autrui, à l'écoute des préoccupations, des interrogations des hommes et des femmes de notre temps. Bref, une science partagée par la société.
Pourquoi le XXIème siècle, qui finira bien par commencer, ne serait-il pas, lui aussi, un "siècle des Lumières"? Un siècle qui ouvre les voies du progrès et de l'espoir ? Si la recherche peut contribuer à faire rêver à un autre avenir, alors oui la science peut, un jour, devenir une fête.
C'est ce que je nous souhaite, en ouvrant aujourd'hui, par anticipation, cette "Fête de la science".
(source http://www.recherche.gouv.fr, le 17 octobre 2000)
Elles s'appellent donc désormais "Fête de la Science". Ce qui, à l'audition, peut d'ailleurs s'entendre de deux manières :
- "Fête", au sens festif, car la science peut être elle aussi une fête, parler à l'imagination, à l'affectivité, susciter la passion ou le rêve.
- "Faîtes", au sens d'un impératif, proposant en particulier aux jeunes de s'engager plus nombreux dans les études et les carrières scientifiques.
Filles et sciences
Cette invitation à s'engager plus volontiers dans les disciplines scientifiques s'adresse notamment aux jeunes filles. Un colloque particulier intitulé "Sciences, pourquoi les filles ?" sera organisé au CNAM le 26 octobre.
Quand elles s'y engagent, les femmes excellent dans les disciplines scientifiques. Sans même remonter à Marie Curie et à Irène Joliot-Curie, Prix Nobel l'une et l'autre, on peut constater qu'aujourd'hui la direction générale du CNRS et le secrétariat perpétuel de l'Académie des Sciences sont assurés par deux femmes : Geneviève Berger et Nicole Le Douarin.
Raison de plus pour en finir avec une répartition archaïque et sexiste des rôles, qui orienterait les garçons vers les sciences exacts ou " dures " et les filles vers les carrières littéraires. Les unes et les autres ont un égal intérêt, pour tous et pour toutes.
Pour une science publique
D'une manière générale, pour renforcer son attractivité, la science n'est plus du tout repliée dans une tour d'ivoire ou dans une forteresse de la recherche académique. La science doit aller à la rencontre du public et "descendre dans la rue". L'impératif, c'est une science publique, agissant à ciel ouvert.
C'est l'objet même de cette "Fête de la Science" : créer un sentiment de proximité et de familiarité avec la science. Une science qui doit être proche de tous. Partout, dans toutes les régions et dans un très grand nombre de communes, sont organisées des rencontres entre les chercheurs et le public, des expositions, des ateliers scientifiques, des animations, des spectacles, des visites, des colloques, sous des formes usuelles ou nouvelles : "Café du gêne", "Ballade du Paris savant" en bus rétro, ou " Marathon des sciences " avec pour premier prix un voyage au Centre spatial de Guyane, à Kourou.
Tous les organismes de recherche, les universités, les écoles d'ingénieurs, les associations scientifiques participent à cette " Fête de la Science ", à cette opération qu'on pourrait aussi dénommer " science partout, science pour tous ".
Celle-ci devrait renforcer l'intérêt de tous les publics pour les sciences et aussi susciter chez les jeunes de nouvelles vocations scientifiques.
A l'inverse de ce qu'avait dit le Tribunal révolutionnaire quand il avait condamné Lavoisier, je dirais : "La République a besoin de savants".
La vitalité d'un pays, sa place et son rang dans le monde dépendent pour beaucoup de l'effort qu'il consacre à la recherche. Celle-ci est bien sûr la matrice des nouveaux savoirs, mais elle est aussi devenue le moteur principal de la compétitivité, de la croissance et de l'emploi. Notamment avec la création des start-up, des jeunes entreprises technologiques innovantes.
Le pari le moins risqué et le plus nécessaire, c'est le pari sur l'intelligence, c'est le pari sur la connaissance et sur l'accès de tous au savoir.
Pour une science citoyenne
Par ailleurs, cette Fête de la Science doit contribuer à un second objectif : développer une science citoyenne, une science au contact direct des citoyens et de leurs interrogations.
Il faut rapprocher science et société. Il faut "repolitiser la science", c'est-à-dire lui faire retrouver sa place dans la Cité, dans le débat civique et politique. Comme il importe en démocratie.
Ce qui est en jeu, c'est le droit de savoir, pour disposer du pouvoir de décider.
Nos concitoyens doivent être pleinement informés des avancées mais aussi des incertitudes de la recherche scientifique, pleinement informés de ses enjeux. Ils doivent pouvoir en débattre avec les chercheurs et avec les responsables politiques.
Nos concitoyens aspirent à débattre et à participer à la décision sur les applications de la génomique et de la post-génomique, sur les recherches éventuelles sur les cellules souches embryonnaires, sur les OGM ou sur le devenir des déchets radioactifs.
Mieux se soigner, mieux s'alimenter, mieux vivre en sécurité : ce sont les enjeux et les défis auxquels est confrontée la recherche et auxquels il faut faire participer nos concitoyens. Sans cela, le débat démocratique serait incomplet ou "décalé" par rapport aux véritables préoccupations de chacun.
A cet égard, le Ministère de la Recherche, qui est installé rue Descartes, dans l'ancienne Ecole Polytechnique et qui comporte donc plusieurs amphitéâtres, organise, sur place, le samedi 21 octobre un cycle de conférences données par cinq des Prix Nobel français : "Le Siècle du gène" par François Jacob ; "Mes engagements de scientifiques humanistes" par Jean Dausset ; " Manipulation d'atomes par faisceau laser" par Claude Cohen-Tannoudji ; "Le dogmatisme contre la science" par Maurice Allais ; et "La médecine en partage" par Jean-Hervé Bradol, président de Médecins sans frontières (prix Nobel de la paix 1999).
Notre objectif, c'est donner la parole aux Nobel et les faire dialoguer avec le public. C'est mettre la science de plus haut niveau au contact de tous. C'est ouvrir un grand débat, à plusieurs voix, sur la science, son rôle dans la société, ses enjeux, ses interrogations.
Nous voulons une science vivante, de plain-pied avec son époque. Une science attentive à autrui, à l'écoute des préoccupations, des interrogations des hommes et des femmes de notre temps. Bref, une science partagée par la société.
Pourquoi le XXIème siècle, qui finira bien par commencer, ne serait-il pas, lui aussi, un "siècle des Lumières"? Un siècle qui ouvre les voies du progrès et de l'espoir ? Si la recherche peut contribuer à faire rêver à un autre avenir, alors oui la science peut, un jour, devenir une fête.
C'est ce que je nous souhaite, en ouvrant aujourd'hui, par anticipation, cette "Fête de la science".
(source http://www.recherche.gouv.fr, le 17 octobre 2000)