Texte intégral
Chers collègues,
Mesdames, Messieurs,
Je tiens pour commencer à remercier tous les intervenants et les participants qui sont venus nombreux à ce colloque, organisé dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne. Même si je n'ai personnellement pas pu assister à l'ensemble des présentations j'ai été particulièrement attentif au débat qui s'est déroulé sous nos yeux il y a quelques instants et que j'ai trouvé de très grande qualité et d'intérêt.
Je tiens bien évidemment à remercier tout particulièrement les ministres et commissaires qui ont accepté de faire le déplacement jusqu'à Lille pour s'exprimer devant vous :
- Monsieur Philippe BUSQUIN, Commissaire européen pour la recherche. La Commission est à l'origine de l'initiative GMES Global Monitoring for Environment and Security lancée en 1998 à Baveno et dont nous parlons aujourd'hui. Elle doit avoir un rôle d'animateur et de coordonnateur des actions qui seront lancées dans le cadre de ce projet ;
- Lord SAINSBURY de Turville, qui est le président en exercice du conseil de l'Agence spatiale européenne (ESA) au niveau ministériel, et dont la présence ici est pour moi le signe que les questions qui ont été abordées au cours de ces deux journées seront bien prises en compte dans le cadre de la préparation du prochain Conseil de l'ESA au second semestre de l'année 2001 ;
- Monsieur Yvan YLIEFF, Commissaire à la politique scientifique du Gouvernement du Royaume de Belgique, qui assurait avant Lord SAINSBURY la présidence du conseil de l'ESA. Comme cela a été rappelé il y a quelques instants, la Belgique coopère avec la France et la Suède depuis le début des années 80 à la filière SPOT d'observation de la Terre par satellite. Ces deux pays prendront la présidence de l'Union européenne en 2001 à la suite de la France, ce qui me paraît très positif pour les actions qui seront lancées sur GMES dans les semaines qui viennent.
Le succès de cette manifestation et votre présence ici sont pour moi le signe de la pertinence de la démarche entreprise dans le cadre de GMES et de l'intérêt de l'organisation de cette manifestation qui je l'espère aura permis à tous d'avoir une meilleure perception des enjeux de ce dossier et des actions à entreprendre, en vue du Conseil recherche qui se tiendra le 16 novembre prochain où nous aurons à en discuter dans le cadre de la résolution relative à la stratégie spatiale européenne.
Je souhaiterais maintenant revenir sur les raisons qui m'ont poussé à soutenir l'initiative prise par la Commission sur GMES et à proposer, en tant que président du Conseil recherche, que ce thème soit un axe fort de la stratégie spatiale européenne.
L'émergence de la société de l'information avec la diffusion en temps réel des événements et de leurs conséquences, la multiplication et le développement de nouvelles sources d'acquisition des données et le progrès scientifique ont progressivement fait de la surveillance de l'environnement, de la gestion des ressources naturelles, du suivi et de la gestion des crises et catastrophes des enjeux majeurs de cette fin de XXème siècle. Désormais, le concept de développement et de progrès technologique et économique cède petit à petit la place au concept de développement durable.
Notre époque, est ainsi particulièrement sensible à des phénomènes dont nous comprenons encore mal les origines, que nous ne sommes donc pas en mesure d'anticiper et dont nous ne sommes pas capables de prévoir les évolutions potentielles sur le long terme. Tout juste pouvons nous chercher à en gérer les conséquences qui peuvent être considérables sur le plan financier.
Ces phénomènes s'expriment au niveau global, c'est le cas de l'effet de serre, de l'évolution de la couche d'ozone, de la variation du niveau des mers ; mais aussi au niveau local avec la multiplication de phénomènes météorologiques exceptionnels, avec les inondations et les séismes.
L'Europe se doit de disposer d'une capacité propre d'analyse et de suivi de ces questions pour préparer les décisions publiques au niveau national et communautaire. C'est un enjeu politique qui correspond à une attente forte de nos concitoyens.
C'est également un enjeu stratégique et économique en raison des conséquences potentielles des traités internationaux sur l'environnement comme le protocole de Kyoto, de l'importance que prendra progressivement la question de la gestion des ressources naturelles comme l'eau, enfin de l'apport potentiel d'un tel outil pour le rayonnement de l'Europe et pour l'aide au développement.
Les moyens spatiaux constituent naturellement un outil privilégié de l'observation de la Terre et de son environnement car ils offrent des données de façon permanente et fiable en couvrant toutes les échelles nécessaires d'espace et de temps. Ils sont ainsi un outil privilégié pour le suivi de l'évolution du climat et des changements naturels sur le long terme comme de la prévision météorologique à court terme qui peut aller jusqu'au suivi d'heure en heure de l'évolution des cyclones tropicaux.
Les Etats-Unis ont bien compris le rôle que jouent les systèmes spatiaux dans le domaine de l'observation de la terre et ont une politique spatiale particulièrement active dans ce domaine.
Il est cependant clair que les outils spatiaux ne peuvent seuls répondre à l'ensemble des questions qui sont ici soulevées et que tout ne peut être mesuré depuis l'espace. Ce n'est que par une fusion de ces données avec celles acquises au sol, dans les océans et le sous-sol que nous pourrons avancer sur les voies ouvertes aujourd'hui.
Mais l'acquisition de données n'est pas une fin en soi. Un important effort de recherche reste à faire pour comprendre les processus d'évolution de l'environnement et pour les modéliser afin de pouvoir aider la décision publique en ce domaine.
L'Europe dispose de l'ensemble des compétences nécessaires pour prendre une place à la mesure de ses ambitions sur ces questions avec une communauté scientifique remarquable et des organisations fonctionnant déjà au niveau européen comme l'organisation européenne pour les satellites de météorologie EUMETSAT, le Centre Européen de Prévision Météorologique à Moyen Terme, l'Agence européenne de l'environnement ou encore l'Agence spatiale européenne.
Elle dispose d'une longue tradition d'excellence dans le domaine de l'observation de la Terre par satellite. Mon collègue, Monsieur Yvan Ylieff a souligné l'excellence de la filière SPOT et de l'instrument VEGETATION dont le développement il faut le souligner a été financé avec le soutien de la Commission européenne. On peut également citer les programmes d'EUMETSAT, ceux de l'ESA, notamment le satellite radar ERS qui permet entre autres de repérer les dégazages des pétroliers en haute mer et bientôt je l'espère, Monsieur le directeur général de l'ESA, le satellite ENVISAT sera opérationnel.
Comment enfin ne pas citer le satellite d'océanographie franco-américain TOPEX-POSEIDON qui a eu une contribution déterminante pour la compréhension et le suivi du phénomène EL NINO - LA NINA.
Ces différents programmes permettent à notre industrie, dont je salue ici les représentants, de se situer au meilleur niveau aussi bien pour la réalisation des satellites que pour les composantes au sol de traitement et d'exploitation des données.
L'Europe dispose de toutes les compétences nécessaires pour répondre aux besoins exprimés au cours de ces deux journées. Il nous faut donc maintenant aller de l'avant pour répondre aux attentes de nos concitoyens.
La priorité est de préciser les besoins exprimés aujourd'hui en liaison étroite avec les utilisateurs potentiels, de cerner les enjeux prioritaires, de conduire des actions pilote de démonstration et de définir les projets les plus accessibles car nous ne pourrons bien évidemment répondre rapidement à toutes les questions abordées ici.
Monsieur le Commissaire BUSQUIN, la Commission européenne a un rôle particulier à jouer pour donner une nouvelle impulsion aux recherches sur l'environnement et pour favoriser le développement d'applications et de services opérationnels reposant sur des données de multiples origines. Les différentes directions de la Commission ont des actions dans le domaine de l'environnement, de l'agriculture, des relations extérieures et bien évidemment celui de la recherche qui recouvrent les questions développées au cours de ces deux journées. Elle me paraît ainsi mieux à même de construire cette relation étroite avec les différents utilisateurs que les acteurs traditionnels du spatial qu'il s'agisse des agences nationales ou de l'ESA.
Cette mobilisation des utilisateurs doit d'abord passer par l'utilisation des données issues des moyens existants ou en cours de développement et la réalisation de projets pilote.
Nous avons créé en France un réseau de recherche et d'innovation technologique réunissant des industriels, des scientifiques et des établissements publics pour travailler en liaison avec les administrations potentiellement intéressées par les applications de l'observation de la terre pour la gestion de l'eau ou de la forêt, la cartographie haute définition, l'agriculture de précision, les pollutions. De ce réseau, appelé Terre et espace, est en train d'émerger une première action qui devrait être lancée dès cette année dans le domaine de la prévision et de la maîtrise du risque inondations pour mettre en place un prototype de service directement utilisable en temps réel.
De telles initiatives, je suis convaincu qu'il en existe dans d'autres pays européens et qu'il est possible de leur donner une dynamique nouvelle et pourquoi pas de réaliser assez rapidement des projets communs car les objectifs poursuivis me paraissent assez largement partagés.
Mais nous devrons aller rapidement au-delà de cette période de nature expérimentale pour étudier les conditions de distribution des données recueillies par les différentes sources d'information aux différents utilisateurs potentiels et de coordination des moyens d'observation.
L'Agence spatiale européenne aura un rôle clé à jouer dans la mise en place de cette initiative dans le cadre d'un partenariat avec les autres agences spatiales dont les compétences seront je l'espère prochainement regroupées et coordonnées au sein d'un réseau des centres techniques conformément aux orientations définies par le Conseil de l'ESA en 1999.
L'ESA a en effet de grands succès à son actif et d'importantes perspectives devant elle à condition qu'elle continue à se moderniser et à répondre rapidement aux évolutions que nous connaissons aujourd'hui.
Mais c'est plus généralement les compétences de l'ensemble des Etats membres, scientifiques, industriels, agences que nous devrons mobiliser pour atteindre les objectifs que nous visons.
Je crois, Monsieur le Commissaire, que les actions que nous envisageons de lancer aujourd'hui dans le cadre de cette initiative peuvent être un exemple de la mise en uvre des principes de l'Espace européen de la recherche que vous nous avez proposé de mettre en place et pour lequel vous recevez un large soutien des Etats-membres.
L'industrie devra naturellement être partie prenante de ces travaux, d'abord car nous aurons besoin de faire appel à ses compétences, ensuite car au-delà des missions de service public susceptibles d'être développées dans le cadre de GMES, de nombreux services pouvant faire l'objet d'applications commerciales pourront être mis en place avec le développement de la société de l'information.
Il ne faut cependant pas surestimer les capacités de l'industrie à investir sur l'effet de serre ou l'évolution de la couche d'ozone et nous reposer entièrement sur elle si nous souhaitons répondre aux questions que nous posent nos concitoyens sur l'environnement.
L'Europe a à son actif de nombreuses réussites dans le domaine du Partenariat entre le secteur public et le secteur privé dans le domaine spatial avec ARIANESPACE qui est aujourd'hui le leader commercial du marché des lanceurs ou l'opérateur de télécommunications EUTELSAT.
Je suis convaincu que nous avons les moyens de trouver un schéma de partenariat adapté pour nombre de problématiques évoquées ici.
Je souhaiterai également aborder devant vous le volet Sécurité de GMES dont je sais qu'il appelle des réserves de la part de certains. Je crois que les applications potentielles d'un tel système en terme de sécurité des populations civiles par rapport aux catastrophes naturelles ou d'origine industrielle, les questions de sécurité alimentaire, de qualité de l'eau c'est à dire plus généralement ce qu'on appelle maintenant la sécurité environnementale ne soulèvent pas de difficultés.
Le débat si j'ai bien compris porte plus sur les utilisations sur le plan militaire ou celui des relations internationales qu'on pourrait faire d'un tel système. Sans espérer clore ce débat ou convaincre l'ensemble des intéressés je souhaiterais simplement ici souligner deux points :
- d'abord les moyens spatiaux ne sont pas des outils militaires offensifs ; ils permettent de comprendre les événements pour décider des réactions les plus adaptées aux évolutions des crises et des conflits et pour contribuer au maintien de la paix ;
- ensuite la démarche que nous devons engager dans le cadre de l'initiative GMES doit être suffisamment souple pour pouvoir s'adapter aux évolutions et au rythme de ce que les Etats membres souhaiteront faire dans le cadre de la Politique extérieure de sécurité commune, la P.E.S.C.
Je souhaiterai maintenant conclure en rappelant d'abord que nous devons maintenant franchir dès cette année une étape dans la mise en uvre de ce programme pour pouvoir prendre en compte la problématique GMES dans le cadre du prochain conseil de l'ESA au niveau ministériel qui se tiendra au second semestre 2001 mais aussi dans celui de la préparation du 6ème PCRD qui devra prendre en compte la priorité accordée désormais par nos concitoyens aux questions environnementales.
Je proposerai donc à mes collègues que le Conseil de l'Union demande à la Commission conjointement avec l'ESA et en étroite coordination avec les Etats membres de finaliser le cadre de définition de cette initiative et de formuler des propositions concrètes pour sa mise en uvre avant la fin du 1er semestre 2001.
Je tiens ici tout particulièrement à insister sur un point, c'est l'organisation et le pilotage de cette initiative. Il me paraît indispensable, Monsieur le Commissaire et Monsieur le directeur général de l'ESA que pour chacune des actions que nous engagerons les pilotes soient clairement identifiés et que la coordination de ces actions soit bien assurée au sein d'une entité unique. Comme vous le savez, les Etats-membres ont été particulièrement sensibilisés à cet aspect par les difficultés que connaît le programme GALILEO sur ce point et je crois indispensable que ces questions soient clarifiées avant d'aller plus loin sur GMES.
J'insiste également pour que cet exercice soit conduit en étroite coordination avec les Etats-membres. L'année 2000 consacrée à l'élaboration de la stratégie spatiale européenne a montré tous les bénéfices qu'on pouvait tirer de cette concertation.
Elle nous permet aujourd'hui de disposer d'un document correspondant aux attentes de tous et qui constitue une base pour permettre à l'Europe d'aller plus loin dans le domaine spatial. Car c'est bien au niveau européen qu'il nous faut réunir et rationaliser nos efforts et nos ressources face à un partenaire américain dont l'effort public dans le spatial représente cinq fois celui de l'Europe.
Vous nous avez proposé Monsieur le Commissaire et Monsieur le Directeur général de mettre en place une task force conjointe entre l'ESA et la Commission pour l'approfondissement de la stratégie spatiale européenne et pour formuler des propositions pour sa mise en oeuvre.
Cette task force me paraît le cadre idéal pour discuter à haut niveau entre les différentes directions de la Commission et de l'ESA des initiatives à prendre sur GMES. Je pense que cette question méritera d'ailleurs sans doute un groupe de travail spécifique associant les Etats-membres.
Une de ses premières tâches sera à mon sens de donner un nom à cette initiative GMES et je vous invite à lancer un appel pour cela dans toute l'Europe.
Je terminerai en remerciant très chaleureusement les équipes qui au sein de l'ESA, de la Commission, du Conseil général du Nord Pas de Calais dont je salue tout particulièrement le Président Michel DELEBARRE qui était présent parmi vous hier, et du ministère de la recherche se sont mobilisés pour l'organisation de cette manifestation. Je tiens également à remercier les équipes du Centre national d'études spatiales (CNES) dont j'ai pu déjà à plusieurs reprises apprécier le professionnalisme et les grandes compétences.
Tous ont contribué à faire de cette manifestation un succès qui nous permettra je l'espère avec le soutien des présidence belge et suédoise, dont la forte représentation ici me paraît rassurante, d'avancer sur la voie de la mise en uvre de cette initiative GMES pour réconcilier Science et Environnement et plus généralement Science et Société.
(source http://www.recherche.gouv.fr, le 19 octobre 2000)
Mesdames, Messieurs,
Je tiens pour commencer à remercier tous les intervenants et les participants qui sont venus nombreux à ce colloque, organisé dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne. Même si je n'ai personnellement pas pu assister à l'ensemble des présentations j'ai été particulièrement attentif au débat qui s'est déroulé sous nos yeux il y a quelques instants et que j'ai trouvé de très grande qualité et d'intérêt.
Je tiens bien évidemment à remercier tout particulièrement les ministres et commissaires qui ont accepté de faire le déplacement jusqu'à Lille pour s'exprimer devant vous :
- Monsieur Philippe BUSQUIN, Commissaire européen pour la recherche. La Commission est à l'origine de l'initiative GMES Global Monitoring for Environment and Security lancée en 1998 à Baveno et dont nous parlons aujourd'hui. Elle doit avoir un rôle d'animateur et de coordonnateur des actions qui seront lancées dans le cadre de ce projet ;
- Lord SAINSBURY de Turville, qui est le président en exercice du conseil de l'Agence spatiale européenne (ESA) au niveau ministériel, et dont la présence ici est pour moi le signe que les questions qui ont été abordées au cours de ces deux journées seront bien prises en compte dans le cadre de la préparation du prochain Conseil de l'ESA au second semestre de l'année 2001 ;
- Monsieur Yvan YLIEFF, Commissaire à la politique scientifique du Gouvernement du Royaume de Belgique, qui assurait avant Lord SAINSBURY la présidence du conseil de l'ESA. Comme cela a été rappelé il y a quelques instants, la Belgique coopère avec la France et la Suède depuis le début des années 80 à la filière SPOT d'observation de la Terre par satellite. Ces deux pays prendront la présidence de l'Union européenne en 2001 à la suite de la France, ce qui me paraît très positif pour les actions qui seront lancées sur GMES dans les semaines qui viennent.
Le succès de cette manifestation et votre présence ici sont pour moi le signe de la pertinence de la démarche entreprise dans le cadre de GMES et de l'intérêt de l'organisation de cette manifestation qui je l'espère aura permis à tous d'avoir une meilleure perception des enjeux de ce dossier et des actions à entreprendre, en vue du Conseil recherche qui se tiendra le 16 novembre prochain où nous aurons à en discuter dans le cadre de la résolution relative à la stratégie spatiale européenne.
Je souhaiterais maintenant revenir sur les raisons qui m'ont poussé à soutenir l'initiative prise par la Commission sur GMES et à proposer, en tant que président du Conseil recherche, que ce thème soit un axe fort de la stratégie spatiale européenne.
L'émergence de la société de l'information avec la diffusion en temps réel des événements et de leurs conséquences, la multiplication et le développement de nouvelles sources d'acquisition des données et le progrès scientifique ont progressivement fait de la surveillance de l'environnement, de la gestion des ressources naturelles, du suivi et de la gestion des crises et catastrophes des enjeux majeurs de cette fin de XXème siècle. Désormais, le concept de développement et de progrès technologique et économique cède petit à petit la place au concept de développement durable.
Notre époque, est ainsi particulièrement sensible à des phénomènes dont nous comprenons encore mal les origines, que nous ne sommes donc pas en mesure d'anticiper et dont nous ne sommes pas capables de prévoir les évolutions potentielles sur le long terme. Tout juste pouvons nous chercher à en gérer les conséquences qui peuvent être considérables sur le plan financier.
Ces phénomènes s'expriment au niveau global, c'est le cas de l'effet de serre, de l'évolution de la couche d'ozone, de la variation du niveau des mers ; mais aussi au niveau local avec la multiplication de phénomènes météorologiques exceptionnels, avec les inondations et les séismes.
L'Europe se doit de disposer d'une capacité propre d'analyse et de suivi de ces questions pour préparer les décisions publiques au niveau national et communautaire. C'est un enjeu politique qui correspond à une attente forte de nos concitoyens.
C'est également un enjeu stratégique et économique en raison des conséquences potentielles des traités internationaux sur l'environnement comme le protocole de Kyoto, de l'importance que prendra progressivement la question de la gestion des ressources naturelles comme l'eau, enfin de l'apport potentiel d'un tel outil pour le rayonnement de l'Europe et pour l'aide au développement.
Les moyens spatiaux constituent naturellement un outil privilégié de l'observation de la Terre et de son environnement car ils offrent des données de façon permanente et fiable en couvrant toutes les échelles nécessaires d'espace et de temps. Ils sont ainsi un outil privilégié pour le suivi de l'évolution du climat et des changements naturels sur le long terme comme de la prévision météorologique à court terme qui peut aller jusqu'au suivi d'heure en heure de l'évolution des cyclones tropicaux.
Les Etats-Unis ont bien compris le rôle que jouent les systèmes spatiaux dans le domaine de l'observation de la terre et ont une politique spatiale particulièrement active dans ce domaine.
Il est cependant clair que les outils spatiaux ne peuvent seuls répondre à l'ensemble des questions qui sont ici soulevées et que tout ne peut être mesuré depuis l'espace. Ce n'est que par une fusion de ces données avec celles acquises au sol, dans les océans et le sous-sol que nous pourrons avancer sur les voies ouvertes aujourd'hui.
Mais l'acquisition de données n'est pas une fin en soi. Un important effort de recherche reste à faire pour comprendre les processus d'évolution de l'environnement et pour les modéliser afin de pouvoir aider la décision publique en ce domaine.
L'Europe dispose de l'ensemble des compétences nécessaires pour prendre une place à la mesure de ses ambitions sur ces questions avec une communauté scientifique remarquable et des organisations fonctionnant déjà au niveau européen comme l'organisation européenne pour les satellites de météorologie EUMETSAT, le Centre Européen de Prévision Météorologique à Moyen Terme, l'Agence européenne de l'environnement ou encore l'Agence spatiale européenne.
Elle dispose d'une longue tradition d'excellence dans le domaine de l'observation de la Terre par satellite. Mon collègue, Monsieur Yvan Ylieff a souligné l'excellence de la filière SPOT et de l'instrument VEGETATION dont le développement il faut le souligner a été financé avec le soutien de la Commission européenne. On peut également citer les programmes d'EUMETSAT, ceux de l'ESA, notamment le satellite radar ERS qui permet entre autres de repérer les dégazages des pétroliers en haute mer et bientôt je l'espère, Monsieur le directeur général de l'ESA, le satellite ENVISAT sera opérationnel.
Comment enfin ne pas citer le satellite d'océanographie franco-américain TOPEX-POSEIDON qui a eu une contribution déterminante pour la compréhension et le suivi du phénomène EL NINO - LA NINA.
Ces différents programmes permettent à notre industrie, dont je salue ici les représentants, de se situer au meilleur niveau aussi bien pour la réalisation des satellites que pour les composantes au sol de traitement et d'exploitation des données.
L'Europe dispose de toutes les compétences nécessaires pour répondre aux besoins exprimés au cours de ces deux journées. Il nous faut donc maintenant aller de l'avant pour répondre aux attentes de nos concitoyens.
La priorité est de préciser les besoins exprimés aujourd'hui en liaison étroite avec les utilisateurs potentiels, de cerner les enjeux prioritaires, de conduire des actions pilote de démonstration et de définir les projets les plus accessibles car nous ne pourrons bien évidemment répondre rapidement à toutes les questions abordées ici.
Monsieur le Commissaire BUSQUIN, la Commission européenne a un rôle particulier à jouer pour donner une nouvelle impulsion aux recherches sur l'environnement et pour favoriser le développement d'applications et de services opérationnels reposant sur des données de multiples origines. Les différentes directions de la Commission ont des actions dans le domaine de l'environnement, de l'agriculture, des relations extérieures et bien évidemment celui de la recherche qui recouvrent les questions développées au cours de ces deux journées. Elle me paraît ainsi mieux à même de construire cette relation étroite avec les différents utilisateurs que les acteurs traditionnels du spatial qu'il s'agisse des agences nationales ou de l'ESA.
Cette mobilisation des utilisateurs doit d'abord passer par l'utilisation des données issues des moyens existants ou en cours de développement et la réalisation de projets pilote.
Nous avons créé en France un réseau de recherche et d'innovation technologique réunissant des industriels, des scientifiques et des établissements publics pour travailler en liaison avec les administrations potentiellement intéressées par les applications de l'observation de la terre pour la gestion de l'eau ou de la forêt, la cartographie haute définition, l'agriculture de précision, les pollutions. De ce réseau, appelé Terre et espace, est en train d'émerger une première action qui devrait être lancée dès cette année dans le domaine de la prévision et de la maîtrise du risque inondations pour mettre en place un prototype de service directement utilisable en temps réel.
De telles initiatives, je suis convaincu qu'il en existe dans d'autres pays européens et qu'il est possible de leur donner une dynamique nouvelle et pourquoi pas de réaliser assez rapidement des projets communs car les objectifs poursuivis me paraissent assez largement partagés.
Mais nous devrons aller rapidement au-delà de cette période de nature expérimentale pour étudier les conditions de distribution des données recueillies par les différentes sources d'information aux différents utilisateurs potentiels et de coordination des moyens d'observation.
L'Agence spatiale européenne aura un rôle clé à jouer dans la mise en place de cette initiative dans le cadre d'un partenariat avec les autres agences spatiales dont les compétences seront je l'espère prochainement regroupées et coordonnées au sein d'un réseau des centres techniques conformément aux orientations définies par le Conseil de l'ESA en 1999.
L'ESA a en effet de grands succès à son actif et d'importantes perspectives devant elle à condition qu'elle continue à se moderniser et à répondre rapidement aux évolutions que nous connaissons aujourd'hui.
Mais c'est plus généralement les compétences de l'ensemble des Etats membres, scientifiques, industriels, agences que nous devrons mobiliser pour atteindre les objectifs que nous visons.
Je crois, Monsieur le Commissaire, que les actions que nous envisageons de lancer aujourd'hui dans le cadre de cette initiative peuvent être un exemple de la mise en uvre des principes de l'Espace européen de la recherche que vous nous avez proposé de mettre en place et pour lequel vous recevez un large soutien des Etats-membres.
L'industrie devra naturellement être partie prenante de ces travaux, d'abord car nous aurons besoin de faire appel à ses compétences, ensuite car au-delà des missions de service public susceptibles d'être développées dans le cadre de GMES, de nombreux services pouvant faire l'objet d'applications commerciales pourront être mis en place avec le développement de la société de l'information.
Il ne faut cependant pas surestimer les capacités de l'industrie à investir sur l'effet de serre ou l'évolution de la couche d'ozone et nous reposer entièrement sur elle si nous souhaitons répondre aux questions que nous posent nos concitoyens sur l'environnement.
L'Europe a à son actif de nombreuses réussites dans le domaine du Partenariat entre le secteur public et le secteur privé dans le domaine spatial avec ARIANESPACE qui est aujourd'hui le leader commercial du marché des lanceurs ou l'opérateur de télécommunications EUTELSAT.
Je suis convaincu que nous avons les moyens de trouver un schéma de partenariat adapté pour nombre de problématiques évoquées ici.
Je souhaiterai également aborder devant vous le volet Sécurité de GMES dont je sais qu'il appelle des réserves de la part de certains. Je crois que les applications potentielles d'un tel système en terme de sécurité des populations civiles par rapport aux catastrophes naturelles ou d'origine industrielle, les questions de sécurité alimentaire, de qualité de l'eau c'est à dire plus généralement ce qu'on appelle maintenant la sécurité environnementale ne soulèvent pas de difficultés.
Le débat si j'ai bien compris porte plus sur les utilisations sur le plan militaire ou celui des relations internationales qu'on pourrait faire d'un tel système. Sans espérer clore ce débat ou convaincre l'ensemble des intéressés je souhaiterais simplement ici souligner deux points :
- d'abord les moyens spatiaux ne sont pas des outils militaires offensifs ; ils permettent de comprendre les événements pour décider des réactions les plus adaptées aux évolutions des crises et des conflits et pour contribuer au maintien de la paix ;
- ensuite la démarche que nous devons engager dans le cadre de l'initiative GMES doit être suffisamment souple pour pouvoir s'adapter aux évolutions et au rythme de ce que les Etats membres souhaiteront faire dans le cadre de la Politique extérieure de sécurité commune, la P.E.S.C.
Je souhaiterai maintenant conclure en rappelant d'abord que nous devons maintenant franchir dès cette année une étape dans la mise en uvre de ce programme pour pouvoir prendre en compte la problématique GMES dans le cadre du prochain conseil de l'ESA au niveau ministériel qui se tiendra au second semestre 2001 mais aussi dans celui de la préparation du 6ème PCRD qui devra prendre en compte la priorité accordée désormais par nos concitoyens aux questions environnementales.
Je proposerai donc à mes collègues que le Conseil de l'Union demande à la Commission conjointement avec l'ESA et en étroite coordination avec les Etats membres de finaliser le cadre de définition de cette initiative et de formuler des propositions concrètes pour sa mise en uvre avant la fin du 1er semestre 2001.
Je tiens ici tout particulièrement à insister sur un point, c'est l'organisation et le pilotage de cette initiative. Il me paraît indispensable, Monsieur le Commissaire et Monsieur le directeur général de l'ESA que pour chacune des actions que nous engagerons les pilotes soient clairement identifiés et que la coordination de ces actions soit bien assurée au sein d'une entité unique. Comme vous le savez, les Etats-membres ont été particulièrement sensibilisés à cet aspect par les difficultés que connaît le programme GALILEO sur ce point et je crois indispensable que ces questions soient clarifiées avant d'aller plus loin sur GMES.
J'insiste également pour que cet exercice soit conduit en étroite coordination avec les Etats-membres. L'année 2000 consacrée à l'élaboration de la stratégie spatiale européenne a montré tous les bénéfices qu'on pouvait tirer de cette concertation.
Elle nous permet aujourd'hui de disposer d'un document correspondant aux attentes de tous et qui constitue une base pour permettre à l'Europe d'aller plus loin dans le domaine spatial. Car c'est bien au niveau européen qu'il nous faut réunir et rationaliser nos efforts et nos ressources face à un partenaire américain dont l'effort public dans le spatial représente cinq fois celui de l'Europe.
Vous nous avez proposé Monsieur le Commissaire et Monsieur le Directeur général de mettre en place une task force conjointe entre l'ESA et la Commission pour l'approfondissement de la stratégie spatiale européenne et pour formuler des propositions pour sa mise en oeuvre.
Cette task force me paraît le cadre idéal pour discuter à haut niveau entre les différentes directions de la Commission et de l'ESA des initiatives à prendre sur GMES. Je pense que cette question méritera d'ailleurs sans doute un groupe de travail spécifique associant les Etats-membres.
Une de ses premières tâches sera à mon sens de donner un nom à cette initiative GMES et je vous invite à lancer un appel pour cela dans toute l'Europe.
Je terminerai en remerciant très chaleureusement les équipes qui au sein de l'ESA, de la Commission, du Conseil général du Nord Pas de Calais dont je salue tout particulièrement le Président Michel DELEBARRE qui était présent parmi vous hier, et du ministère de la recherche se sont mobilisés pour l'organisation de cette manifestation. Je tiens également à remercier les équipes du Centre national d'études spatiales (CNES) dont j'ai pu déjà à plusieurs reprises apprécier le professionnalisme et les grandes compétences.
Tous ont contribué à faire de cette manifestation un succès qui nous permettra je l'espère avec le soutien des présidence belge et suédoise, dont la forte représentation ici me paraît rassurante, d'avancer sur la voie de la mise en uvre de cette initiative GMES pour réconcilier Science et Environnement et plus généralement Science et Société.
(source http://www.recherche.gouv.fr, le 19 octobre 2000)