Point de presse de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur les relations franco-grecques et sur les négociations d'adhésion de Chypre à l'Union européenne, Paris le 30 novembre 1998.

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Circonstance : Entretien de M. Védrine avec M. Théo Pangalos, ministre grec des affaires étrangères à Paris le 30 novembre 1998

Texte intégral

Mesdames et Messieurs, j'ai reçu avec plaisir mon ami Theo Pangalos pour procéder à un tour d'horizon des relations franco-grecques et discuter des sujets qui nous intéressent de part et d'autre, à commencer par les questions européennes du moment. Cet entretien a eu lieu tôt ce matin, il est un peu décalé parce qu'il y a aussi, aujourd'hui, le sommet franco-allemand à Postdam qui m'oblige à partir tôt. Sinon, comme d'habitude, nous aurions poursuivi cet entretien sous la forme d'un déjeuner sympathique, mais ce n'est que partie remise. Nous avons fait le point des relations bilatérales, nous avons parlé des différents volets de l'actualité européenne, les questions touchant à l'agenda 2000, les questions touchant à l'élargissement et nous avons bien sûr parlé, et cela ne vous étonnera pas, de la situation dans les Balkans.
Peut-être M. Pangalos voudra-t-il dire un mot et le mieux, c'est que nous répondions ensuite à vos questions.
Q - Avez-vous parlé de Chypre ?
R - Nous avons évidemment parlé du problème de Chypre. Je vous ai indiqué tout à l'heure que nous avions fait le point sur les questions d'élargissement. La position française est la suivante : nous sommes dans le cadre de l'accord passé en 1995 puisque nous avons accepté cette année, l'ouverture formelle des négociations le 31 mars, et l'engagement concret des négociations le 10 novembre y compris avec Chypre.
Vous connaissez notre ligne de conduite générale par rapport aux négociations d'élargissement. Nous pensons que ces négociations portant sur plusieurs pays doivent être suivies étroitement par le Conseil Affaires générales qui doit garder le contrôle politique d'ensemble de ces négociations. Nous pensons que chaque dossier doit être traité selon ses mérites propres, aussi bien Chypre que chacun des autres ; je veux dire par là que chaque problème spécifique doit faire l'objet d'un examen spécifique.
On sait que dans le cas de Chypre, il y a un problème particulier qui est celui de la division, en tout cas en fait. Nous estimons que les négociations d'élargissement qui ont été engagées doivent être utilisées de toutes les façons et mises à profit pour faciliter, le plus vite possible, le mieux possible, une solution politique. En sens inverse, il est clair qu'une solution politique des problèmes de la division de Chypre faciliterait grandement les négociations d'élargissement. Mais, ce n'est qu'une application à un cas particulier d'une idée générale sur la façon dont on doit gérer sérieusement et méthodiquement les négociations d'élargissement avec chacun des pays.
C'est un sujet sur lequel il était important que nous poursuivions notre dialogue, que nous puissions parler, entre la France et la Grèce, non seulement à l'occasion des Conseils Affaires générales mais aussi dans le cadre d'un dialogue politique bilatéral.
J'ajoute que j'ai également rappelé à M. Pangalos la préoccupation de la France, qu'il connaît bien, à propos des perspectives d'installation des missiles S-300 à Chypre.
Voilà où nous en sommes et naturellement, cette discussion est appelée à se poursuivre.
Q - La solution politique est-elle un préalable à l'adhésion de Chypre ?
R - D'une façon générale, nous souhaitons évidemment qu'il y ait une solution mais je ne peux que vous redire la même chose que ce que je viens déjà de dire. Dans la négociation d'élargissement, il faut que tous les problèmes qui se posent soient traités sérieusement. C'est vrai pour Chypre, mais c'est vrai pour les autres pays candidats, ce n'est pas une théorie inventée pour Chypre. Chaque dossier doit être traité selon ses mérites propres ; lorsqu'il y a un problème particulier, il doit être traité particulièrement.
Dans le cas de Chypre, le problème particulier qui saute aux yeux, qui est une évidence, c'est celui de la division. Nous avons accepté, je le rappelais tout à l'heure, l'ouverture des négociations parce que cela faisait partie d'un accord qui comportait d'autres volets d'ailleurs, notamment le protocole financier avec la Turquie qui remonte à 1995. Nous avons accepté, nous avons tenu notre engagement sur ce point. L'engagement portait sur l'ouverture de la négociation. Maintenant, la négociation est engagée, il y a un travail sérieux, méthodique à faire comme pour tous les candidats notamment en ce qui concerne la reprise de l'acquis communautaire.
Je ne veux pas aller au-delà des formules parce que je ne sais pas encore moi-même quelle va être la nature de la dynamique que cette négociation va engager. Nous souhaitons que tout soit mis en oeuvre pour aboutir le plus rapidement possible à une solution politique. Nous souhaitons que ces négociations d'élargissement soient un stimulant sur ce plan. Je ne peux que redire qu'une solution politique faciliterait la négociation d'élargissement, je crois que chacun doit en être conscient.
Je rappelle que nous avons, à plusieurs reprises aussi, invité la communauté chypriote turque à donner suite à l'offre de négociation, aux négociations d'adhésion qui lui ont été faites par le gouvernement de Chypre, parce que, comme nous le disons, comme l'Europe le dit dans son ensemble d'ailleurs, l'objectif est que l'adhésion puisse bénéficier à toutes les communautés pour concourir à la paix civile et à la réconciliation. Mais, une fois que j'ai rappelé ce cadre général de travail, je ne veux pas compliquer les choses plus qu'elles ne le sont déjà.
Q - La Grèce souhaitait intégrer l'espace Schengen. La France la soutiendra-t-elle
R - Nous n'avons pas parlé de ce point aujourd'hui.
Il n'y a pas eu de question sur les Balkans. Je voudrais simplement dire à ce sujet que nous avons des positions très proches sur la nécessité d'intensifier la recherche d'une solution politique sur la question du Kossovo. Nos approches sont vraiment très complémentaires et très convergentes sur ce point.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 8 octobre 2001)