Texte intégral
Madame, Messieurs les parlementaires, Messieurs les présidents, Mesdames, Messieurs,
Cette réunion de travail s'inscrit dans la continuité de celles qui nous ont déjà réunis, avant Seattle, à Seattle et depuis. Celle d'aujourd'hui est pour la première fois consacrée spécifiquement aux négociations engagées à l'OMC dans le secteur des services.
A plusieurs reprises au cours de nos réunions précédentes, certains d'entre vous m'avez fait part de vos observations, et en particulier de vos préoccupations, quant à la teneur et à la portée de ces négociations.
Un échange de positions auquel j'ai participé a même commencé sur ce sujet par presse interposée, qui me semble très stimulant.
J'ai retenu en particulier des préoccupations exprimées celles portant sur la défense des services publics (notamment dans des secteurs aussi importants que la santé et l'éducation), celles portant également sur la défense de nos politiques d'encouragement à la diversité culturelle ; j'ai bien noté la nécessité que l'OMC ne cherche pas à subordonner les politiques publiques au principe de libéralisation des échanges, en particulier par le contrôle de la réglementation intérieure et des subventions.
Comme vous le savez, le gouvernement attache une importance toute particulière à ces points dans la conduite de la négociation. J'ai eu l'occasion de me prononcer publiquement sur ce sujet. Nous en reparlerons au cours de cette rencontre.
Mais je souhaite aussi que cette réunion permette d'aborder aussi de façon plus précise les raisons pour lesquelles la poursuite d'une libéralisation "ordonnée" du commerce des services nous paraît aussi souhaitable.
Avant de vous passer la parole, quelques indications sur le déroulement de la négociation à Genève et sur les positions défendues par la France et l'Union européenne.
1) Le calendrier à Genève :
La négociation services est "formellement" ouverte depuis le 1er janvier à Genève, conformément à l'engagement pris à l'issue du cycle d'Uruguay de reprendre des négociations au bout de 5 ans. Aucune limite dans le temps n'est fixée pour la mener à bien.
Que s'est-il passé depuis le début de l'année ?
En mai, le conseil du commerce des services, réuni en session spéciale de négociation, a adopté un programme de travail pour la 1ère phase des négociations : il a été convenu que, d'ici à fin décembre 2000, les membres de l'OMC pouvaient soumettre des propositions "sur toutes questions en rapport avec la négociation" et il a été décidé qu'un bilan d'étape serait dressé en mars 2001. Ce calendrier est plus ou moins calqué sur celui qui a été retenu pour l'agriculture.
L'essentiel des propositions présentées jusqu'à présent par les membres de l'OMC ne porte pas sur la substance, mais sur la procédure. Cette orientation n'est pas surprenante au début d'une négociation, d'autant que l'accord GATS lui-même prévoit la mise en place de lignes directrices et de procédures pour la négociation. Des contributions ont été présentées en ce sens par l'Union européenne, les Etats-Unis, Hong-Kong et le groupe africain.
D'ici fin décembre, plusieurs membres (dont les Etats-Unis) ont annoncé qu'ils présenteraient des contributions explicitant les secteurs ou les thèmes de la négociation dans lesquels ils disposent d'intérêts offensifs. Hong Kong a par exemple déjà indiqué que l'audiovisuel figurerait au nombre de ses priorités offensives. Au niveau communautaire, le travail d'identification des intérêts sectoriels européens dans la négociation a commencé, la discussion n'est pas finie.
Au cours de cette année, les Etats membres de l'OMC ont également procédé, comme les dispositions de l'accord GATS les y invitaient, à l'examen des exemptions à la clause de la nation la plus favorisée, afin de déterminer si les conditions qui avaient rendu ces exemptions nécessaires existent toujours. Quelques délégations (Japon, Corée, Hong-Kong-Chine) ont tenté, sans succès, de mettre en cause la nécessité des exemptions, notamment dans le secteur audiovisuel. Elles se sont heurtées notamment à la détermination de l'Union européenne, du Canada et de la Suisse. Cette discussion n'est pas formellement achevée mais en tout état de cause elle ne peut déboucher sur une remise en cause de nos exemptions communautaires et nationales.
Les membres de l'OMC ont également entamé l'examen du secteur du transport aérien, comme ils s'y étaient engagés. Je vous rappelle que l'essentiel de ce secteur, et en particulier les droits de trafic, est exclu du champ du GATS. L'examen en cours a pour objet de déterminer si cette exclusion est toujours justifiée, et dans quelle mesure.
Que va-t-il se passer dans les prochains mois ?
Lors de la session de négociation de décembre, l'essentiel des discussions va porter sur la préparation des lignes directrices et des procédures. La date de leur adoption ne peut être déterminée avec certitude compte-tenu du degré de préparation très inégal des partenaires à l'OMC. Le bilan d'étape de mars 2001 pourrait donner aux membres l'opportunité de les adopter et d'établir le calendrier de la seconde phase, à tout le moins en fixant la date de remise des demandes bilatérales.
Je rappelle qu'il n'y a aucune date butoir fixée pour ces négociations. Les Etats-Unis avaient proposé la date de 2002, mais l'Union européenne, soutenue par un grand nombre de pays, tant développés qu'en développement, s'y est opposée. En effet, et je souhaite le réaffirmer devant vous, notre objectif, qui est celui de l'Union européenne dans son ensemble, reste d'intégrer ces discussions dès que cela sera possible dans le cadre d'un cycle global de négociations, qui soit à la fois un cycle d'ouverture et de régulation, avec une attention particulière à la question du développement. Ce n'est que dans le cadre d'un cycle global que nous progresserons réellement dans les négociations de l'agenda incorporé: cela vaut aussi pour l'agriculture.
2) Quels enseignements tirer des propositions actuellement présentées ?
Sur la méthode de négociation, il semble y avoir un large consensus pour reprendre celle qui a été appliquée pendant le cycle d'Uruguay, et qui consiste à présenter des demandes bilatérales de libéralisation, puis à élaborer des offres conditionnelles de libéralisation, qui font ensuite l'objet de négociations. Cette position a été proposée par l'Union européenne, largement à l'instigation de la France. Le recours à des formules alternatives n'est pas exclu, mais suscite une plus grande prudence. A tout le moins, sa justification doit être démontrée au cas par cas.
Sur l'articulation entre la libéralisation sectorielle et les disciplines à mettre en place dans le domaine dit des règles (sauvegardes, subventions, marchés publics, réglementation intérieure), la proposition européenne de les laisser progresser en parallèle ne suscite pas de contestation. Nous devons bien évidemment veiller à ce que la conclusion de la négociation services s'effectue globalement, à la lumière de l'équilibre général des engagements souscrits.
Sur le calendrier intermédiaire de la négociation, le point moyen des positions exprimées à Genève fait apparaître une disponibilité à distribuer des demandes bilatérales dans le courant ou à la fin de l'année 2001. La présentation des offres conditionnelles de libéralisation devrait intervenir ultérieurement, pour permettre à chaque membre de prendre en compte les demandes qui lui ont été adressées.
3) La position française :
J'en viens maintenant à la position de la France dans cette négociation. J'ai déjà eu l'occasion de rappeler notre attachement à la préservation de notre droit à réglementer, notamment au regard des services publics et de la diversité culturelle.
Je souhaiterais néanmoins indiquer l'esprit dans lequel nous abordons cette négociation. La France est un grand producteur mondial et un grand exportateur de services. 57% de notre PIB provient du secteur des services. Nous en sommes le 3ème exportateur mondial. Notre solde commercial dans ce secteur dégageait en 1999 un excédent de 125 milliards de francs.
Nous disposons d'entreprises très performantes et présentes au niveau mondial dans des secteurs aussi variés que les télécommunications, les services financiers, les services environnementaux, le transport aérien, le transport maritime, le commerce électronique: Havas Interactive est le 1er éditeur mondial de logiciels grand public, nos créateurs de jeux Ubisoft et Infogrames font partie des 5 premières entreprises mondiales du secteur des jeux électroniques.
Ce rapide inventaire - loin d'être exhaustif - montre que nous avons intérêt à aborder cette négociation dans un esprit ouvert et ambitieux, ce qui ne signifie pas que nous oubliions pour autant nos sensibilités et nos intérêts "défensifs". Le principe de base qui nous guide dans ces négociations est d'offrir et de demander à nos partenaires ce que nous avons déjà libéralisé en interne dans le cadre du marché unique. Je sais que certains de nos partenaires voudraient que nous adoptions la démarche inverse -libéraliser à l'OMC pour nous contraindre à libéraliser en interne- : ce n'est clairement pas notre démarche. Nous veillerons tout au long de ces négociations à ce que nos offres à l'OMC n'aillent pas au-delà de l'acquis communautaire.
L'ambition est légitime quand elle s'applique au développement des échanges internationaux, à l'ouverture de nouveaux marchés et au progrès de la règle de droit - pensons par exemple au principe de non-discrimination. Elle doit en revanche bien veiller à ne pas remettre en cause les identités, les particularismes. De ce point de vue, nous sommes très attentifs à ce que le développement de disciplines sur les règles ne conduise pas à une telle remise en cause.
Derrière les positions exprimées, par voie de presse parfois, sur cette négociation, se profilent des considérations plus globales sur la mondialisation et l'économie de marché.
Ceux qui refusent par principe la négociation sur les services, doivent prendre en compte que ce qui peut être vrai sur l'audiovisuel ne l'est pas forcément pour la banque : tous les services n'entretiennent pas des rapports avec l'identité fondamentale des peuples mais ont simplement une utilité économique.
Les formes alternatives, le micro-crédit, par exemple ne peuvent pas répondre à tous les besoins des populations, en particulier le développement de leurs propres entreprises.
Nous savons que les pays en développement ont besoin de capitaux et que ces capitaux ne pourront pas venir de l'aide publique à elle seule, même si elle augmentait considérablement.
Il me semble donc dans l'intérêt de tous que soit offert un cadre sûr pour les entreprises étrangères dans des secteurs comme l'environnement, les télécommunications, etc., si l'on veut que ces secteurs puissent décoller et avec eux les pays concernés.
Ceux qui s'opposent à ce type de raisonnement économique simple oublient que l'investissement des entreprises dans un pays étranger est avant tout une prise de risque débouchant parfois sur des gains importants mais pouvant aussi évoluer moins favorablement ou moins bien que prévu sur le plan de sa rentabilité . Ils peuvent aussi sous-estimer qu'un gouvernement démocratique d'un pays développé a aussi des devoirs par rapport à ses propres citoyens, en particulier ceux qui travaillent dans des entreprises dont la compétence internationale est élevée.
Bref, si nous gardons à l'esprit certains principes, si nous pratiquons le dialogue et la transparence, nous pouvons avec la négociation services mettre en place une logique d'ouverture qui serve le développement dans les pays industrialisés et dans les pays pauvres.
Je vous propose de commencer nos travaux en donnant d'abord la parole aux entreprises pour qu'elles nous disent ce que leur a apporté l'accord GATS conclu à Marrakech, et l'intérêt pour elles d'une poursuite, ou non, d'une libéralisation dans leur secteur. Nous avons parmi nous des représentants de plusieurs secteurs et je les invite à s'exprimer. Nous pourrons ensuite passer à des questions plus transversales telles que les règles et la question très importante des services publics. Nos amis parlementaires peuvent bien évidemment intervenir quand ils le souhaitent.
Avant de vous passer la parole, je souhaitais ajouter qu'un dossier vous sera remis en fin de réunion sur ces différents sujets. Dans un souci de parfaite transparence, et pour ceux qui souhaitent une information détaillée, vous trouverez notamment dans ce dossier les engagements spécifiques de Marrakech et les exceptions demandées par l'Union européenne.
(source http://www.commerce-exterieur.gouv.fr, le 22 novembre 2000)
Cette réunion de travail s'inscrit dans la continuité de celles qui nous ont déjà réunis, avant Seattle, à Seattle et depuis. Celle d'aujourd'hui est pour la première fois consacrée spécifiquement aux négociations engagées à l'OMC dans le secteur des services.
A plusieurs reprises au cours de nos réunions précédentes, certains d'entre vous m'avez fait part de vos observations, et en particulier de vos préoccupations, quant à la teneur et à la portée de ces négociations.
Un échange de positions auquel j'ai participé a même commencé sur ce sujet par presse interposée, qui me semble très stimulant.
J'ai retenu en particulier des préoccupations exprimées celles portant sur la défense des services publics (notamment dans des secteurs aussi importants que la santé et l'éducation), celles portant également sur la défense de nos politiques d'encouragement à la diversité culturelle ; j'ai bien noté la nécessité que l'OMC ne cherche pas à subordonner les politiques publiques au principe de libéralisation des échanges, en particulier par le contrôle de la réglementation intérieure et des subventions.
Comme vous le savez, le gouvernement attache une importance toute particulière à ces points dans la conduite de la négociation. J'ai eu l'occasion de me prononcer publiquement sur ce sujet. Nous en reparlerons au cours de cette rencontre.
Mais je souhaite aussi que cette réunion permette d'aborder aussi de façon plus précise les raisons pour lesquelles la poursuite d'une libéralisation "ordonnée" du commerce des services nous paraît aussi souhaitable.
Avant de vous passer la parole, quelques indications sur le déroulement de la négociation à Genève et sur les positions défendues par la France et l'Union européenne.
1) Le calendrier à Genève :
La négociation services est "formellement" ouverte depuis le 1er janvier à Genève, conformément à l'engagement pris à l'issue du cycle d'Uruguay de reprendre des négociations au bout de 5 ans. Aucune limite dans le temps n'est fixée pour la mener à bien.
Que s'est-il passé depuis le début de l'année ?
En mai, le conseil du commerce des services, réuni en session spéciale de négociation, a adopté un programme de travail pour la 1ère phase des négociations : il a été convenu que, d'ici à fin décembre 2000, les membres de l'OMC pouvaient soumettre des propositions "sur toutes questions en rapport avec la négociation" et il a été décidé qu'un bilan d'étape serait dressé en mars 2001. Ce calendrier est plus ou moins calqué sur celui qui a été retenu pour l'agriculture.
L'essentiel des propositions présentées jusqu'à présent par les membres de l'OMC ne porte pas sur la substance, mais sur la procédure. Cette orientation n'est pas surprenante au début d'une négociation, d'autant que l'accord GATS lui-même prévoit la mise en place de lignes directrices et de procédures pour la négociation. Des contributions ont été présentées en ce sens par l'Union européenne, les Etats-Unis, Hong-Kong et le groupe africain.
D'ici fin décembre, plusieurs membres (dont les Etats-Unis) ont annoncé qu'ils présenteraient des contributions explicitant les secteurs ou les thèmes de la négociation dans lesquels ils disposent d'intérêts offensifs. Hong Kong a par exemple déjà indiqué que l'audiovisuel figurerait au nombre de ses priorités offensives. Au niveau communautaire, le travail d'identification des intérêts sectoriels européens dans la négociation a commencé, la discussion n'est pas finie.
Au cours de cette année, les Etats membres de l'OMC ont également procédé, comme les dispositions de l'accord GATS les y invitaient, à l'examen des exemptions à la clause de la nation la plus favorisée, afin de déterminer si les conditions qui avaient rendu ces exemptions nécessaires existent toujours. Quelques délégations (Japon, Corée, Hong-Kong-Chine) ont tenté, sans succès, de mettre en cause la nécessité des exemptions, notamment dans le secteur audiovisuel. Elles se sont heurtées notamment à la détermination de l'Union européenne, du Canada et de la Suisse. Cette discussion n'est pas formellement achevée mais en tout état de cause elle ne peut déboucher sur une remise en cause de nos exemptions communautaires et nationales.
Les membres de l'OMC ont également entamé l'examen du secteur du transport aérien, comme ils s'y étaient engagés. Je vous rappelle que l'essentiel de ce secteur, et en particulier les droits de trafic, est exclu du champ du GATS. L'examen en cours a pour objet de déterminer si cette exclusion est toujours justifiée, et dans quelle mesure.
Que va-t-il se passer dans les prochains mois ?
Lors de la session de négociation de décembre, l'essentiel des discussions va porter sur la préparation des lignes directrices et des procédures. La date de leur adoption ne peut être déterminée avec certitude compte-tenu du degré de préparation très inégal des partenaires à l'OMC. Le bilan d'étape de mars 2001 pourrait donner aux membres l'opportunité de les adopter et d'établir le calendrier de la seconde phase, à tout le moins en fixant la date de remise des demandes bilatérales.
Je rappelle qu'il n'y a aucune date butoir fixée pour ces négociations. Les Etats-Unis avaient proposé la date de 2002, mais l'Union européenne, soutenue par un grand nombre de pays, tant développés qu'en développement, s'y est opposée. En effet, et je souhaite le réaffirmer devant vous, notre objectif, qui est celui de l'Union européenne dans son ensemble, reste d'intégrer ces discussions dès que cela sera possible dans le cadre d'un cycle global de négociations, qui soit à la fois un cycle d'ouverture et de régulation, avec une attention particulière à la question du développement. Ce n'est que dans le cadre d'un cycle global que nous progresserons réellement dans les négociations de l'agenda incorporé: cela vaut aussi pour l'agriculture.
2) Quels enseignements tirer des propositions actuellement présentées ?
Sur la méthode de négociation, il semble y avoir un large consensus pour reprendre celle qui a été appliquée pendant le cycle d'Uruguay, et qui consiste à présenter des demandes bilatérales de libéralisation, puis à élaborer des offres conditionnelles de libéralisation, qui font ensuite l'objet de négociations. Cette position a été proposée par l'Union européenne, largement à l'instigation de la France. Le recours à des formules alternatives n'est pas exclu, mais suscite une plus grande prudence. A tout le moins, sa justification doit être démontrée au cas par cas.
Sur l'articulation entre la libéralisation sectorielle et les disciplines à mettre en place dans le domaine dit des règles (sauvegardes, subventions, marchés publics, réglementation intérieure), la proposition européenne de les laisser progresser en parallèle ne suscite pas de contestation. Nous devons bien évidemment veiller à ce que la conclusion de la négociation services s'effectue globalement, à la lumière de l'équilibre général des engagements souscrits.
Sur le calendrier intermédiaire de la négociation, le point moyen des positions exprimées à Genève fait apparaître une disponibilité à distribuer des demandes bilatérales dans le courant ou à la fin de l'année 2001. La présentation des offres conditionnelles de libéralisation devrait intervenir ultérieurement, pour permettre à chaque membre de prendre en compte les demandes qui lui ont été adressées.
3) La position française :
J'en viens maintenant à la position de la France dans cette négociation. J'ai déjà eu l'occasion de rappeler notre attachement à la préservation de notre droit à réglementer, notamment au regard des services publics et de la diversité culturelle.
Je souhaiterais néanmoins indiquer l'esprit dans lequel nous abordons cette négociation. La France est un grand producteur mondial et un grand exportateur de services. 57% de notre PIB provient du secteur des services. Nous en sommes le 3ème exportateur mondial. Notre solde commercial dans ce secteur dégageait en 1999 un excédent de 125 milliards de francs.
Nous disposons d'entreprises très performantes et présentes au niveau mondial dans des secteurs aussi variés que les télécommunications, les services financiers, les services environnementaux, le transport aérien, le transport maritime, le commerce électronique: Havas Interactive est le 1er éditeur mondial de logiciels grand public, nos créateurs de jeux Ubisoft et Infogrames font partie des 5 premières entreprises mondiales du secteur des jeux électroniques.
Ce rapide inventaire - loin d'être exhaustif - montre que nous avons intérêt à aborder cette négociation dans un esprit ouvert et ambitieux, ce qui ne signifie pas que nous oubliions pour autant nos sensibilités et nos intérêts "défensifs". Le principe de base qui nous guide dans ces négociations est d'offrir et de demander à nos partenaires ce que nous avons déjà libéralisé en interne dans le cadre du marché unique. Je sais que certains de nos partenaires voudraient que nous adoptions la démarche inverse -libéraliser à l'OMC pour nous contraindre à libéraliser en interne- : ce n'est clairement pas notre démarche. Nous veillerons tout au long de ces négociations à ce que nos offres à l'OMC n'aillent pas au-delà de l'acquis communautaire.
L'ambition est légitime quand elle s'applique au développement des échanges internationaux, à l'ouverture de nouveaux marchés et au progrès de la règle de droit - pensons par exemple au principe de non-discrimination. Elle doit en revanche bien veiller à ne pas remettre en cause les identités, les particularismes. De ce point de vue, nous sommes très attentifs à ce que le développement de disciplines sur les règles ne conduise pas à une telle remise en cause.
Derrière les positions exprimées, par voie de presse parfois, sur cette négociation, se profilent des considérations plus globales sur la mondialisation et l'économie de marché.
Ceux qui refusent par principe la négociation sur les services, doivent prendre en compte que ce qui peut être vrai sur l'audiovisuel ne l'est pas forcément pour la banque : tous les services n'entretiennent pas des rapports avec l'identité fondamentale des peuples mais ont simplement une utilité économique.
Les formes alternatives, le micro-crédit, par exemple ne peuvent pas répondre à tous les besoins des populations, en particulier le développement de leurs propres entreprises.
Nous savons que les pays en développement ont besoin de capitaux et que ces capitaux ne pourront pas venir de l'aide publique à elle seule, même si elle augmentait considérablement.
Il me semble donc dans l'intérêt de tous que soit offert un cadre sûr pour les entreprises étrangères dans des secteurs comme l'environnement, les télécommunications, etc., si l'on veut que ces secteurs puissent décoller et avec eux les pays concernés.
Ceux qui s'opposent à ce type de raisonnement économique simple oublient que l'investissement des entreprises dans un pays étranger est avant tout une prise de risque débouchant parfois sur des gains importants mais pouvant aussi évoluer moins favorablement ou moins bien que prévu sur le plan de sa rentabilité . Ils peuvent aussi sous-estimer qu'un gouvernement démocratique d'un pays développé a aussi des devoirs par rapport à ses propres citoyens, en particulier ceux qui travaillent dans des entreprises dont la compétence internationale est élevée.
Bref, si nous gardons à l'esprit certains principes, si nous pratiquons le dialogue et la transparence, nous pouvons avec la négociation services mettre en place une logique d'ouverture qui serve le développement dans les pays industrialisés et dans les pays pauvres.
Je vous propose de commencer nos travaux en donnant d'abord la parole aux entreprises pour qu'elles nous disent ce que leur a apporté l'accord GATS conclu à Marrakech, et l'intérêt pour elles d'une poursuite, ou non, d'une libéralisation dans leur secteur. Nous avons parmi nous des représentants de plusieurs secteurs et je les invite à s'exprimer. Nous pourrons ensuite passer à des questions plus transversales telles que les règles et la question très importante des services publics. Nos amis parlementaires peuvent bien évidemment intervenir quand ils le souhaitent.
Avant de vous passer la parole, je souhaitais ajouter qu'un dossier vous sera remis en fin de réunion sur ces différents sujets. Dans un souci de parfaite transparence, et pour ceux qui souhaitent une information détaillée, vous trouverez notamment dans ce dossier les engagements spécifiques de Marrakech et les exceptions demandées par l'Union européenne.
(source http://www.commerce-exterieur.gouv.fr, le 22 novembre 2000)