Interview de M. Charles Pasqua, président du RPF, à RMC le 23 mai 2000, sur les candidatures RPR à la mairie de Paris, une éventuelle collaboration avec la droite pour l'élection du maire de Paris, le débat au sein du RPF et sur son opposition au quinquennat.

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Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

Bonjour, Monsieur Pasqua
Bonjour.
On est content de vous recevoir ce matin.
Mais je suis content de vous voir vous avez l'air en forme d'ailleurs.
Alors avant de parler de votre formation du RPF qui connaît quelques petits problèmes, un mot sur la situation à Paris, donc Françoise de Panafieu, candidate à la candidature, s'est retirée hier. Jean Tibéri qui est le dernier concurrent de Philippe Seguin dit c'est affligeant, c'est du grand-guignol.
Chacun porte le jugement qu'il veut et en fonction de son propre tempérament. Moi j'ai dit hier un peu en forme de boutade que ça compliquait la vie de Michèle Alliot-Marie parce qu'il ne lui reste plus que deux candidats effectivement Philippe Seguin et Jean Tibéri. Et il vaut mieux que ça se termine rapidement parce que ça dure depuis trop longtemps et ça ne grandit personne, ni le RPR en tant que formation politique, qui n'a pas voulu consulter ses militants ni d'une manière générale le monde politique. C'est vrai que ça a permis à l'opposition d'occuper le terrain et de gommer complètement Delanoe qui doit être fou de rage.
Philippe Seguin qui donc sera candidat désigné aujourd'hui, Monsieur Pasqua sera soutenu par l'ensemble de l'opposition sauf par le RPF alors qu'il a été longtemps finalement dans la même tranchée que vous, ça a été un compagnon.
Bien sûr j'aime bien Philippe Seguin, la question ne se pose pas mais nous sommes devant un problème qui est un problème de nature politique. Je sais bien que les élections municipales et la souveraineté nationale ne sont pas forcément liés mais nous, nous ne présentons pas des candidats pour le plaisir d'en présenter ou pour donner des postes aux gens, conseillers municipaux, adjoint au maire, etc. Nous entendons défendre les idées auxquelles nous croyons.
Mais Paris ne vaut pas que vous soyez ensemble avec Monsieur Seguin dans la bataille municipale à Paris ?
Ca mériterait d'abord un commentaire un peu plus long, la question qui se pose est de savoir, je rappelle qu'à Paris il y a non pas une élection mais vingt, il y a 20 arrondissements. Je rappelle également que c'est une élection à deux tours. Et par conséquent si il n'y a pas d'union au premier tout, rien n'empêche de réaliser cette union au second tour en fonction de la confiance que les Parisiens auront manifesté à telle ou telle liste.
Donc, vous êtes ouvert ?
C'est comme cela qu'il faut voir les choses.
Vous êtes ouvert à une collaboration ?
Au second tour oui. Enfin ça ce sont nos propres militants parisiens qui décideront. Nous nous aurons notre mot à dire, nous arbitrerons aussi les difficultés mais ce sera à nos propres militants parisiens de décider de ce qu'ils entendent faire.
Je retiens quand même que vous êtes d'accord pour éviter que la gauche gagne Paris.
Ca me paraît évident, vous ne me voyez pas tout de même dans la peau de quelqu'un soutenant Monsieur Jospin.
Non mais ...
Vous savez les choses qui vont sans dire vont encore mieux en le disant, merci de m'avoir amené à le dire.
Question à l'ancien ministre de l'Intérieur, un journal fait ce matin sa Une sur le fait qu'Yvan Colonna un an après être recherché par toutes les polices de France de Navarre et de Corse est toujours en cavale, vous pensez que c'est possible, ou qu'il y a une erreur politique ou policière ?
Non je ne crois pas du tout qu'il y ait une erreur politique ou policière, je crois que la police a vraiment envie, elle est motivée, elle souhaite arrêter Colonna ça c'est clair, est-ce que Colonna est toujours en Corse je n'en sais rien, est-ce qu'il est parti, est-ce qu'il est ailleurs ? Je ne le sais pas non plus. Vous savez en Corse, la Corse est grande.
Grande il faut le dire vite...
La Corse est suffisamment grande pour permettre à des gens de se cacher, mais enfin je ne serais pas étonné qu'il soit ailleurs qu'en Corse.
Le RPF votre formation politique, donc celle que vous avez créée, vous avez fait naître au moment des élections européennes des espoirs Monsieur Pasqua parce que vous avez réalisé un score absolument extraordinaire avec 13%, personne ne vous en donnait autant avant le jour du vote et pourtant c'est une formation qui est en crise alors qu'elle est toute neuve on va dire. Un de vos proches qui a travaillé longtemps avec vous a dit que le RPF était mort et puis le vice-président vous accuse de monter des coups tordus. Est-ce que cette crise ne menace pas votre mouvement ?
Non, je ne crois pas, d'abord vous savez aussi bien que moi que tous les mouvements politiques, quels qu'ils soient, qu'ils soient anciens ou qu'ils soient plus récents connaissent des turbulences, il est normal que chez nous
Oui mais enfin là elles sont plus fortes qu'ailleurs.
Nous, nous sommes un mouvement jeune, récent et nous avons en notre sein plusieurs sensibilités, pour arriver à obtenir une certaine symbiose de ces différents sensibilités ce n'est pas facile, ce n'est pas simple et je crois que d'autre part nous avons choisi la difficulté parce que nous avons décidé de faire un mouvement unitaire, c'est d'ailleurs Philippe de Villiers qui m'avait dit il vaut mieux faire un mouvement unitaire. Autrement on aurait pu imaginer une sorte de confédération. A partir du moment où nous avons un mouvement unitaire il faut que chacun privilégie ce qui rassemble sur ce qui peut différencier, ce qui peut diviser, et moi ce que je constate c'est qu'il y a à l'approche des élections municipales, alors qu'est-ce que ce sera à l'approche des législatives, une tendance à privilégier son ego personnel, je parle pour un certain nombre de personnes et puis aussi sa sensibilité d'origine. Alors je ne crois pas que l'on puisse continuer comme ça sans qu'il y ait de sérieuses difficultés, il y a donc une seule solution, la souveraineté, nous sommes des souverainistes, disons que la souveraineté appartient au peuple, alors si la souveraineté appartient au peuple en ce qui concerne la nation, en ce qui concerne notre mouvement politique, elle appartient aux adhérents. Donc je me retourne vers les adhérents, il n'y a pas de choses plus simples et plus éloignées d'un coup tordu que de se tourner vers les militants et de leur dire décidez. Je vous pose une question vous répondez oui, vous répondez non c'est votre droit, faites ce que vous voulez.
Mais on n'a pas l'impression que les choses au RPF se passent sans votre accord, on a quand même l'impression que...
Quoi donc ?
On a l'impression que peu de choses se passent au RPF sans votre accord. Pourquoi demander des pouvoirs étendus ?
Ce n'est pas aussi simple que vous le croyez, ce n'est pas aussi simple, d'abord moi je n'ai pas tendance à tout vouloir régenter, ce n'est pas ça du tout mais je crois que et je le répète à l'approche des élections municipales nous voyons certains dire il faut s'entendre à tout prix avec la droite même la droite la plus extrême, il y en a d'autres qui disent il faut absolument ne pas s'entendre avec la droite, bon on a un bureau national qui prend des décisions, et puis nous avons un certain nombre de gens qui ne les respectent pas, et qui se répandent en déclarations diverses et variées. Or ça il faut y mettre un terme et c'est pour mettre un terme à cette situation que je demande aux adhérents de se déterminer.
Et les pleins pouvoirs...
Les pleins pouvoirs n'exagérons rien, je demande à ce congrès de commission, il ne s'agit pas de pleins pouvoirs, je demande également la possibilité de suspendre de leur fonction ceux qui ne respecteraient pas les règles de solidarité et de discipline élémentaire.
Donc si j'ai bien compris, on se dirige au RPF quand même vers des exclusions à venir, une fois que le référendum sera passé par là ?
Non pas d'exclusion, il ne s'agit pas d'exclusion. Si vous êtes mon collaborateur et si vous prenez position contre moi, vous ne voulez pas que de surcroît je vous donne une augmentation.
Monsieur de Villiers dit par contre que vous allez l'exclure un jour.
Pas du tout pourquoi voulez-vous que je l'exclue, ça ne tient pas debout cela.
Un mot sur le quinquennat ?
Oui c'est plus intéressant.
Pourquoi êtes vous opposé au quinquennat ?
Parce que je considère que ceux qui prônent le quinquennat le font d'une manière hypocrite. Selon eux le quinquennat on ne peut vraiment le vouloir que pour une raison de fond qui est un changement radical des institutions, dans ce cas-là ça a un sens, alors on dit on fait le quinquennat parce qu'on veut aller vers le régime présidentiel. Si au contraire on se contente de dire il faut que les élections présidentielles, les élections législatives aient lieu en même temps, ça aura une conséquence, c'est de diminuer l'autorité du président de la République. Je rappelle qu'aujourd'hui le président de la République est élu lors d'un scrutin particulier et que le président de la République au second tour rassemble très largement au-delà de son propre camp, ce qui lui permet d'être au-dessus des partis et de représenter la France. Si le président de la république est élu en même temps que l'Assemblée nationale en réalité il sera un chef de parti. Ceci est totalement contraire à l'esprit des institutions et à l'intérêt national.
Et vous allez faire campagne pour le non ?
Evidemment avec force et détermination.
Bonne journée, Monsieur Pasqua.
(source http://www.rpfie.org, le 23 mai 2000)