Point de presse de M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, sur l'état des négociations sur l'élargissement de l'UE à plusieurs pays d'Europe de l'Est (Pologne, Estonie, République tchèque, Slovénie, Hongrie) et à Chypre, Bruxelles le 5 décembre 2000.

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Circonstance : Conférences ministérielles d'adhésion avec la Pologne, l'Estonie, la République tchèque, la Slovénie, Chypre et la Hongrie, Bruxelles le 5 décembre 2000

Texte intégral

Nous venons vous informer des résultats des conférences ministérielles d'adhésion qui se sont tenues les 4 et 5 décembre avec la Pologne, l'Estonie, la République tchèque, la Slovénie, la Hongrie et Chypre. La Présidence française était accompagnée du commissaire Verheugen et de la ministre suédoise.
Nous sommes à l'avant veille de l'ouverture du Sommet de Nice. Vous savez que ce Conseil européen est un moment très important pour le processus d'élargissement. D'abord en raison de la réforme des institutions, qui est un enjeu capital pour l'Union européenne en tant que telle, mais aussi pour que l'élargissement soit réussi.
J'ai déjà eu l'occasion de le dire souvent dans le travail intense qui a été accompli dans la Conférence intergouvernementale pour préparer le Conseil européen de Nice. J'ai calculé que nous en sommes à 330 heures de négociation sur la réforme des institutions. Nous travaillons autant pour les pays candidats, qui seront bientôt de nouveaux membres, que pour les actuels pays membres, parce que nous avons tous intérêt à être dans une l'Union européenne forte, qui fonctionne mieux et bien, même après l'élargissement. De cette force, nous aurons tous besoin. Cet enjeu est fondamental et nous devons réussir à Nice car nous devons tenir nos engagements, c'est à dire être en mesure d'accueillir de nouveaux Etats membres, ceux qui, de leur côté, auront rempli leurs obligations, réglé leurs problèmes, et qui seront en mesure de reprendre l'acquis à partir de la fin 2002, comme nous nous y étions engagés au Conseil européen d'Helsinki.
Par ailleurs, nous arrêterons à Nice une ligne claire et volontaire pour la poursuite des négociations d'adhésion avec les douze pays candidats. Nous avons adopté hier, à l'occasion du Conseil Affaires générales, un texte de conclusions politiques qui sera transmis au Conseil européen de Nice. Ce texte reflète nos débats à 15, notamment celui du 20 novembre, à partir du document de la Commission, que le commissaire Verheugen avait transmis au Conseil le 8 novembre. Ce sont des documents très importants qui vont être très utiles pour la suite. Je pense à la feuille de route proposée par le commissaire, qui est le cadre de référence important, ambitieux, utile en même temps, pour notre travail d'avenir. Quant à l'Union, nous avons réaffirmé notre détermination à traiter dans les délais toutes les questions de fond qui restent à régler avec chaque pays candidat, dans le respect des principes fixés à Helsinki, en particulier le principe de différenciation, qui est très important.
Ceci correspond totalement aux objectifs qui avaient été fixés par la Présidence française. Vous vous rappelez qu'au début de la Présidence française nous avions dit que les grandes déclarations c'était très bien, mais que la bonne façon d'avancer c'était d'entrer dans la réalité des négociations difficiles et ce n'était que comme cela que l'on pouvait avancer. Nous avions dit aussi qu'il fallait une "vue d'ensemble". Même si ce sont douze négociations séparées, nous avons besoin d'une vue d'ensemble, d'une stratégie. Il faut que chaque pays candidat sache exactement où il en est et les problèmes qui sont encore à surmonter. Donc, chaque fois que nous clarifions, que nous rationalisons, chaque fois que nous sommes sérieux dans cette affaire, nous avançons.
Je voudrais d'ailleurs souligner les avancées remarquables réalisées ces derniers mois dans les négociations grâce à l'impulsion que je viens de rappeler. Au cours des 6 derniers mois, nous avons présenté aux pays candidats près d'une centaine de nouvelles propositions de négociation. Il s'agissait d'ouvrir les discussions sur de nouveaux domaines de l'acquis avec les pays entrés en négociation cette année. La présidence française avait pour objectif, en constante et étroite liaison avec la Commission, d'ouvrir 42 nouveaux chapitres de négociation. Cet engagement a été tenu.
Il s'agissait aussi, et je tiens à le souligner, d'aborder les questions de fond, les questions difficiles. C'est ce que nous avons fait, en nous prononçant, de façon positive, sur plus d'une vingtaine de demandes de périodes transitoires. Dans certains cas, les enjeux étaient de taille, puisque l'issue de la négociation dépendait de la réponse de l'Union selon qu'elle accepte ou qu'elle refuse les demandes de périodes transitoires. Pour la première fois sous présidence française, la réponse positive apportée par l'Union aux demandes de certains candidats a permis la "clôture provisoire" de chapitres importants de l'acquis, comme la libre prestation de services, la libre circulation des marchandises ou encore la politique sociale.
Au total, tous pays confondus, nous avons pu aboutir dans les négociations sur 30 chapitres.
Nous sommes également satisfaits que la Commission ait commencé à élaborer, à la suite d'une suggestion française, des "tableaux de suivi" permettant d'évaluer, pays par pays et chapitre par chapitre, les progrès réalisés et le respect des engagements pris dans le cadre des négociations. La Commission a également décidé, et j'en remercie M. Verheugen, de procéder à une synthèse annuelle de ces tableaux, qui donnent une vision claire et précise de l'état des négociations avec chacun.
Voilà ce que je voulais vous dire en préambule. Je vais maintenant passer la parole au commissaire Verheugen.
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Merci. Je vais maintenant proposer aux ministres qui sont à mes côtés, de prendre la parole. Juste un mot avant. On mesure bien les progrès à l'occasion de ces conférences et dans chaque cas, en terme de chapitre, nous avons manifestement, et de façon tangible et précise, intensifié le rythme.
Interventions des ministres des Affaires étrangères hongrois, chypriote, slovène, polonais ().
Q - Nous savons que l'un des sujets les plus importants de la négociation sera l'agriculture, tout particulièrement pour le gouvernement français. Comment pensez-vous arriver à une position commune sur cette question ?
R - En ce qui concerne la négociation à venir sur l'agriculture, tout le monde sait que c'est un sujet important, qui sera difficile. Cela concerne les 15 et pas uniquement la France et il n'y a aucune raison de poser la question en s'adressant particulièrement à la France. La négociation sera menée par la Commission, avec l'appui des présidences successives, et il n'y aura aucune espèce de problème ni pour la France, ni, je l'espère, pour aucun autre pays, pour fixer ses positions.
Q - inaudible
R - Votre question donne l'impression que nos discussions oscillent entre "veto" ou "pas de veto". Cela ne se présente pas ainsi puisque dans le premier pilier nous avons déjà les trois quarts des sujets qui sont traités à la majorité qualifiée. C'est une discussion point par point. A l'heure actuelle, il y a 12 pays sur 15 qui ont des problèmes sur l'extension à la majorité qualifiée à tel ou tel sujet. Aucun ne dit "non" globalement. Des pays acceptent sur certains sujets mais ne peuvent pas sur d'autres. C'est compliqué.
Je voudrais juste exprimer ma satisfaction personnelle parce que je n'avais pas eu l'occasion auparavant de présider des conférences ministérielles d'adhésion. Je trouve que cela rend optimiste. Les progrès se font là, beaucoup plus que dans les grandes déclarations, les discours et dans la rhétorique diplomatique en général. C'est là où on voit la vraie négociation qui progresse. C'est là où nous voyons les vrais problèmes, les vrais progrès, les vraies solutions apportées aux problèmes et je trouve cela très encourageant. On a l'impression d'être sur un terrain solide et d'avancer sérieusement. Je trouve cela très bien.
Je voudrais également rajouter que nous sommes tous conscients de l'ampleur de la tâche. Vous savez qu'il y a à l'heure actuelle plus de 500 demandes de périodes transitoires, si l'on additionne les 340 qui portent sur l'agriculture et les 170 autres. Cela veut dire que le commissaire Verheugen a un énorme travail devant lui, que chaque pays candidat à l'adhésion a un énorme travail chez lui et que l'Union européenne en tant que telle a aussi un énorme travail. Je voudrais dire que, après la Présidence française, pendant la Présidence suédoise et après, chaque fois que cela sera nécessaire, la France continuera à apporter son appui au commissaire Verheugen, à la présidence suivante et à tous ceux qui vont, avec beaucoup d'énergie, prendre chaque sujet sérieusement et trouver des solutions pour arriver aux adhésions que nous souhaitons.
Je vous remercie.

(source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 8 décembre 2000)