Interview de M. Philippe Douste-Blazy, président du groupe parlementairre UDF à l'Assemblée nationale, dans "Libération" du 7 novembre 2000, sur la volonté de la droite de bâtir un projet d'alternance et sur les débats entre le RPR, l'UDF et Démocratie libérale.

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A chacun ses rendez-vous. Alors que la gauche plurielle se réunit en grande pompe aujourd'hui, les parlementaires de droite se retrouveront au troisième sous-sol de l'Assemblée nationale. Pour y discuter retraites. C'est la troisième fois qu'ils se rencontrent pour parler de sujet de fond. En janvier, ils se reverront pour évoquer le thème de la sécurité. Ces "ateliers de l'alternance", auxquels participeront Michèle Alliot-Marie, François Bayrou et Alain Madelin, respectivement patrons du RPR, de l'UDF et de DL, sont organisés par les groupes parlementaires. Favorables à une union de la droite, leurs trois présidents au Palais-Bourbon, Jean-Louis Debré, Philippe Douste-Blazy et Jean-François Mattéi, entendent jeter les bases d'une campagne commune pour les législatives. Les chefs de partis, s'ils ne disent rien, ne regardent pas l'initiative d'un très bon oeil. Pour eux, les députés et les sénateurs roulent pour Jacques Chirac et préparent sa réélection. Ils craignent également que ces conventions thématiques cachent une offensive des partisans d'un parti unique de la droite. Il y a quinze jours, de nombreuses personnalités, dont les anciens Premiers ministres gaullistes Edouard Balladur et Alain Juppé, ont réclamé une formation unique de l'opposition. Un serpent de mer qui ressort régulièrement. Sans jamais aboutir.
Député UDF des Hautes-Pyrénées, Philippe Douste-Blazy, ancien ministre de la Santé, étiqueté chiraquien, veut, lui, croire que l'opposition est en passe de sortir de sa spirale d'échecs.
La gauche plurielle se réunit en sommet aujourd'hui, pourquoi la droite n'est pas capable d'en faire autant ?
Quand la gauche étale ses divisions, le Premier ministre explique que la majorité débat. Quand l'opposition débat, certains disent qu'elle est divisée. Il suffit de regarder l'actualité pour se convaincre du contraire. Les hasards du calendrier font que se tiennent aujourd'hui deux rencontres importantes : d'un côté un sommet qui relève de la politique spectacle, de l'autre une convention qui présente le résultat d'un travail collectif sur un sujet capital de l'avenir des Français et sur lequel le gouvernement a jugé qu'il était urgent d'attendre : les retraites. D'un côté il s'agit de faire croire que la majorité est encore unie, de l'autre de faire savoir que l'opposition travaille, propose et construit.
Ces ateliers de l'opposition ne sont-ils pas un maigre pansement sur les plaies d'une droite déchirée ?
Les ateliers sont le fruit d'un travail des groupes RPR, UDF et DL de l'Assemblée nationale et du Sénat. Il y en aura encore d'autres. Leur but est clair : bâtir le projet d'alternance qui sera soumis aux Français au moment des élections législatives. Sur le thème des retraites comme sur d'autres, nous montrons que nous sommes d'accord sur une plate-forme politique qui n'est pas réduite au plus petit commun dénominateur mais qui comporte des propositions ambitieuses.
De nombreuses voix se sont élevées à droite pour demander la fusion des partis de l'opposition. Qu'en pensez-vous ?
Il est clair que les structures de l'opposition doivent évoluer. C'est une question dont tout le monde s'accorde à souligner l'importance. Rien ne peut exister sans avoir, au préalable, organisé le dialogue et appris à travailler ensemble pour produire des propositions de fond. C'est par un travail sur les idées qu'une nouvelle organisation va émerger tout naturellement. Pour l'heure, nous devons inventer une méthode. Il faut surtout éviter de voir cette nouvelle organisation bloquer sur des questions mettant en jeu les susceptibilités des chefs et des sous-chefs.
Pour vous, ce sont les chefs de parti qui empêchent aujourd'hui la droite d'être réellement unie ?
Nous devons faire, en France, comme José Maria Aznar l'a fait en Espagne : créer une identité forte sur des idées. L'opposition sera alors crédible et non sans cesse remise en cause par ses divisions.
Qui dit organisation commune dit chef commun. Qui peut, selon vous, prendre la tête d'une droite unie ?
Depuis trop longtemps, l'opposition se déchire sur des questions de personnes. Il ne faut plus tomber dans ce travers. La victoire sera le fruit d'un travail collectif. Pour le reste, nous verrons plus tard.

(Source http://www.udf.org, le 07 novembre 2000)