Interviews de M. François Hollande, premier secrétaire du PS, à Europe 1 le 27 novembre et le 15 décembre 2000, sur le souhait de M. Jospin d'inverser le calendrier électoral pour 2002, les affaires de financement occulte du RPR et l'immunité de M. Chirac.

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Média : Europe 1

Texte intégral

J.-P. Elkabbach Le Premier ministre a donc créé la surprise à Grenoble en se prononçant lui aussi en faveur de l'élection du Président de la République avant celle des députés. Est-ce qu'il avait l'accord du maître institutionnel du temps : le Président de la République ?
- "Je n'en sais absolument rien. Je pense qu'il a pris sa décision, il a fait son choix en fonction d'une conception des institutions. Il est préférable - et il n'est pas le seul à le dire - de commencer par une élection présidentielle pour faire les choix principaux. Il a aussi fait cette déclaration en fonction de ce qu'il pense être son rôle de Premier ministre dans les institutions. Et par rapport à un débat qui a été ouvert par d'anciens Premier ministre, par d'éminents constitutionnalistes, il dit : "oui, c'est vrai pour la clarté, ce serait mieux d'avoir un printemps de cohérence, un printemps où on commence par une élection présidentielle..."
Ne me refaites pas le discours de L. Jospin...
- "C'est important de le rappeler à vos auditeurs. Ils n'ont pas tous écoutés L. Jospin, comme tous les congressistes socialistes."
Ils ont écouté Europe 1, ils ont regardé la télé, ils l'ont vu et entendu. Est-ce qu'il avait prévenu le Président de la République ?
- "Je n'en sais rien. Je pense qu'ils en ont déjà parlé. Cela a pu leur arriver. J. Chirac s'était exprimé le 14 juillet pour dire qu'a priori, il n'y était pas spécialement favorable mais qu'il était ouvert. Et quand L. Jospin a à prendre une décision ou à faire un choix en conscience et qui ne regarde que lui, généralement, il ne consulte que ses amis - je l'en remercie - et que sa conscience. Il l'a fait."
Quand l'a t-il décidé ? Et quand a-t-il décidé de l'annoncer ?
- "Dès lors qu'il venait devant ses amis socialistes, dès lors qu'il prenait la responsabilité de couvrir tous les sujets d'actualité, d'aborder tous les débats ; il m'a confié dès samedi qu'il envisageait effectivement d'évoquer cette question de cohérence quant au calendrier de nos élections en 2002."
Jusqu'ici on disait, y compris au PS, que les deux de l'exécutif n'avaient pas l'intention de modifier les règles du jeu à 18 mois de la partie. Cela ferait magouille. Vous avez entendu Mme Alliot-Marie : elle a aussitôt dénoncé "le tripatouillage." Et d'autre part, elle, comme d'autres leaders de l'opposition, disent que c'est la crainte que la droite gagne les législatives qui vous a inspiré ?
- "Cet argument est cocasse, il est même savoureux parce qu'il est désobligeant à l'égard de J. Chirac. Pourquoi commencer par une présidentielle serait, pour la gauche, préférable à des élections législatives ? Cela voudrait dire que J. Chirac serait, pour nous, un candidat plus facile à battre que tous les candidats de sa famille politique à l'occasion des élections législatives. Ou cet argument est désobligeant ou il est absurde. Donc, nous, nous avons fait nos choix, et notamment L. Jospin par sa préférence pour un calendrier commençant par une élection présidentielle suivie des élections législatives, en fonction des intérêts du pays, de la démocratie, de la clarté."
Et pas de vos intérêts ?
- "Non, parce que je ne suis pas capable aujourd'hui de vous dire s'il est mieux de commencer par une élection présidentielle, si J. Chirac est un candidat à ce point vulnérable que nous serions sûrs de le battre alors que la droite serait tellement forte aujourd'hui, tellement unie, tellement cohérente que nous prendrions un risque au moment des élections législatives."
Elle se réorganise et se rassemble. Vous avez vu la pétition du Figaro ?
- "Il est vrai que chaque fois que la droite organise des pétitions - on l'a vu sur la Corse ; je ne sais ce qu'est devenue la pétition que M. Alliot-Marie avait lancée à la fin de l'été, au début du mois de septembre, sur la Corse, je n'en ai pas encore vu le début d'une trace. Quant au Figaro, avec D. Baudis à sa tête dont on ne sait plus très bien s'il est aujourd'hui encore maire de Toulouse - pour combien de temps ? -, parlementaire, directeur de la rédaction du Figaro, ou peut-être demain - on l'annonce - président du CSA ; c'est lui aujourd'hui qui lance cette opération de fusion de l'opposition signée par des candidats alternatifs à J. Chirac pour l'élection présidentielle. Comprenne qui pourra... Peut-être que c'est simplement une opération de communication de D. Baudis ? Je crois que c'est davantage cela plutôt qu'une opération pour favoriser J. Chirac et l'union de la droite."
J.-L. Debré du RPR vous répondra ici demain. Mais qu'est-ce que vous attendez du Président de la République maintenant ?
- "Autant il était normal que le Premier ministre fasse connaître son point de vue sur un débat - d'ailleurs légitime - lancé par d'autres - d'anciens Premiers ministres -, autant il me paraît aujourd'hui nécessaire, légitime et attendu que le Président de la République nous donne aussi son interprétation de la Constitution. Ce n'est pas rien d'ailleurs, puisque c'est lui qui a justement en charge ces institutions et que sa tradition politique devrait plutôt l'amener à penser que l'élection présidentielle devrait normalement précéder l'élection législative."
Encore une fois, vous voulez lui forcer la main comme au moment du quinquennat ?
- "Quand on lui a forcé la main, cela a plutôt donné des résultats...
Bons pour vous, ou pour qui ?
- "Bons pour la République parce que c'était mieux d'avoir un quinquennat."
Est-ce que vous n'avez pas l'impression que L. Jospin fait preuve, en la matière, d'imprudence et peut-être d'impatience ?
- "D'impatience, sûrement pas puisque les élections auront lieu à leur date, que ce soit dans un ordre ou dans un autre : en 2002."
L'impatience d'entrer dans la campagne présidentielle qui a commencé encore plus ou qui s'est amplifiée, hier, à Grenoble.
- "Pourquoi ce serait rentrer dans la campagne présidentielle ou législative que de vouloir fixer un calendrier suffisamment tôt à l'avance pour que, précisément, aucun soupçon ne puisse être éventuellement tracé dans la position des uns et des autres ? Quand deux anciens Premiers ministres, R. Barre et M. Rocard, prennent cette même position, on ne leur dit pas qu'ils vont entrer dans la campagne présidentielle ! Je ne le crois pas."
Eux ne peuvent pas...
"Justement. S'ils le font, c'est parce qu'ils doivent avoir des convictions, l'un et l'autre. Et pourquoi ceux qui pourrait éventuellement être candidats n'aurait pas de convictions ?"
Prêt à se sacrifier dans l'intérêt des institutions de la Vème République, ce serait intéressant et nouveau...
- "Cela peut arriver."
Pendant trois jours à Grenoble, le Congrès PS a passé le Président de la République aux fléchettes et à la moulinette. Vous avez encore tellement peur de lui ?
- "Non. Mais lorsqu'il y a des déclarations politiques qui sont faites par le chef de l'Etat, qui parfois peut-être aussi de l'opposition, il est quand même assez normal que dans un congrès d'une grande formation politique, on puisse lui répondre. Cela fait partie du débat démocratique et rien n'a été fait de désobligeant ou de déshonorant à son endroit."
Si cela se fait, vous voulez que cela se passe très vite ?
- "Quoi ?"
S'il y a, par exemple, une proposition de R. Barre d'une loi organique, le PS vote ?
- "C'est au Parlement de prendre sa responsabilité. Si une proposition est déposée. Si elle a une chance d'être votée, si un consensus peut être trouvé, c'est vrai que ce serait quand même mieux de le faire avant les élections municipales, par exemple, pour que la règle puisse être fixée suffisamment tôt à l'avance pour précisément nous priver de tous débats sur la suspicion."
Vous croyez avoir la majorité ?
- "Pour l'instant, je n'en sais rien. Il dépendra beaucoup de l'intervention du Président de la République. Si le Président de la République va dans ce sens - c'est-à-dire dans le sens de la clarté et de la cohérence -, c'est vrai qu'on peut avoir un vote au Parlement qui soit lui-même plus unanime."
Vous avez entendu la réaction, le refus de R. Hue sur Europe 1 hier ?
- "Je peux comprendre R. Hue comme les Verts qui sont attachés à une conception plus parlementaire de nos institutions et qui s'inquiètent peut-être aussi de la bipolarisation. Si on allait dans le sens de l'inversion du calendrier - je n'en sais rien encore aujourd'hui -, je trouverai normal d'avoir des négociations avec nos partenaires qui tiennent compte de ce changement de dates"
Pour le investitures par exemple ?
- "Notamment pour les investitures aux législatives."
Dans les prochains jours la direction du PS, c'est-à-dire le gouvernement du PS jusqu'en 2002 va changer. Avec qui ?
- "Avec tous les talents et toutes les personnalités que l'on puisse rassembler."
Exemple ?
- "Par exemple, M. Aubry qui va s'occuper du projet, C. Trautmann qui va être la présidente de la fédération des élus - si mes camarades me suivent dans cette voie. Et puis beaucoup d'autres qui, jeunes ou moins jeunes, peuvent apporter toutes leurs expérience ou toute leur imagination. Je vais même demander aux sensibilités minoritaires du Parti socialiste - si elles acceptent un principe de solidarité - de venir dans la direction du Parti parce que nous avons de tous dans ces moments où il faudra faire des choix importants, programmatiques, de négociations avec nos partenaires et également de préparations des échéances."
Quand on dit que votre défaut ou votre faiblesse, c'est l'électorat populaire, les catégories populaires, puisqu'on a noté qu'il n'y a pas de coup de barre à gauche à Grenoble, est-ce que cela veut dire que nous allons entrer dans la saison des pluies électorales ? Il va pleuvoir : on va arroser la campagne pour faire pousser des électeurs ?
- "C'est effectivement le problème de la gauche - ce n'est pas simplement le problème du Parti socialiste - et plus largement celui de la démocratie. Les catégories populaires sont encore loin du suffrage - on le voit bien avec l'abstention -, loin de la mobilisation, loin de la confiance. C'est donc vers elles qu'il faut travailler. En luttant contre le chômage et en améliorant le partage des revenus, nous allons dans ce sens."
(source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 27 novembre 2000)
J.-P. Elkabbach On a voulu qu'il parle. Il a parlé de tout, y compris des affaires. Avez-vous été surpris de voir J. Chirac si mordant et si combatif hier ?
- "Dans la forme, ce n'était pas la plus mauvaise de ses émissions. Mais juge-t-on un Président de la République simplement sur la forme même quand il est en forme ? "
Mais la forme a aussi sa valeur, son utilité dans un cas pareil ?
- "Mieux vaut être clair, mieux vaut être en forme. Mais ce qu'il faut, c'est être convaincant."
Le retournement du calendrier 2002 est traité, dit le Président de la République, à la sauvette, sans vrai débat, mesure de circonstance et pas convenable. Après cela, est-ce que vous aurez la majorité ?
- "Il faut faire en sorte d'avoir une majorité pour rétablir un calendrier cohérent et clair. "
Pour toujours ou pour un coup ?
- "Pour toujours. Bien sûr, on ne peut pas empêcher un président de mourir - la politique ne peut pas quand même faire ce genre de miracle - et on ne peut pas non plus empêcher un président de dissoudre, même s'il faut y réfléchir à deux fois - et J. Chirac parle d'expérience. Mais en même temps..."
Ne soyez pas ingrat. Dites-lui merci :
- "Mais en même temps, l'idée, c'est quand même d'avoir une présidentielle avant les législatives tous les cinq ans. C'est la conséquence du quinquennat. Le Président de la République a fait un référendum sur le quinquennat. S'il avait voulu faire une grande réforme constitutionnelle à cette occasion, pas un débat à la sauvette, il aurait pu le faire. Deuxièmement, comment arrive-t-on à ce calendrier curieux - si on ne change rien - d'avoir des législatives avant une présidentielle ? C'est parce qu'il y a eu une dissolution. Donc, nous essayons de faire en sorte que la réforme du quinquennat trouve son prolongement et que la dissolution n'ait pas les conséquences dommageables qu'elle a eues. Pas forcément pour les Français parce qu'elle a permis une alternance, mais elle a eu comme conséquence de mettre un calendrier à l'inverse de ce qui est normal. "
Vous ne m'avez pas répondu.
- "Et donc, il faut avoir une majorité. Cette majorité ne sera pas la seule gauche. Elle-même, vous le savez, n'étant pas cohérente sur ce point. C'est dommage. Il va donc falloir avoir une majorité avec d'autres. Et les autres, j'ai entendu M. Barre, j'ai entendu M. Bayrou qui ont même été les premiers à souhaiter cette inversion de calendrier."
Mais est-ce qu'on ne va pas vers une reprise en main des députés UDF ? Est-ce qu'ils oseront après ça ?
- "Chaque parlementaire, chaque responsable politique a une conscience. Il n'a pas simplement des coups de fouet à recevoir et à se mettre en bon ordre et à marcher en ordre serré jusqu'au vote à l'Assemblée nationale ou au Sénat. Donc, je n'ai pas de leçon à donner à qui que ce soit. Si on a pris une position, le mieux, généralement, est de la garder."
La Corse : "bravo à la décentralisation !", dit M. Chirac, "attention au transfert de compétences"... Avec le plan Jospin-Vaillant sur la Corse - ce n'est pas lui qui le dit mais c'était ça -, ce n'est plus une République unitaire, mais une fédération de régions. Est-ce qu'il a tort ?
- "Je n'ai pas très bien compris son raisonnement. Il dit d'abord "bravo. Bravo à quoi ? Bravo au processus qui a été engagé ? Bravo à l'évolution ? Bravo à l'avant-projet de loi ? Mais il dit "attention", il peut y avoir d'autres conséquences. Nous jugerons. Pour le moment, il y a un avant-projet de loi qu'il semble approuver. Eh bien, nous passerons ce projet de loi bientôt à l'Assemblée nationale et au Sénat, il sera voté. Et ce n'est qu'en 2004. Qui sera Président de la République en 2004 ? Nous le verrons bien. Qui décidera de l'intérêt du pays ? Nous le verrons aussi. Les Français seront forcément consultés, c'est sûr, en 2004 sur l'évolution nouvelle qu'il faut donner à la Corse. Mais pour l'instant, prenons ce qui a réussi. Il y a eu tellement d'échecs en Corse - et J. Chirac n'en est pas forcément exonéré - qu'on peut aujourd'hui saluer ensemble, consensuellement, le succès."
M. Chirac était attendu sur les affaires. Il ne voit pas de crise morale. La France n'est pas un pays corrompu. Votre avis ?
- "La France n'est pas un pays corrompu, c'est vrai. Mais il y a eu des pratiques - J. Chirac l'a reconnu - pendant les années 80 et sans doute après, qui ne sont pas acceptées. Donc, il y a une exigence morale. Et ne pas comprendre qu'il faut aller jusqu'au bout de la recherche de la vérité, c'est commettre un aveuglement par rapport à la démocratie."
Donc, il y a crise morale ?
- "Il y a une demande de clarification, de vérité et donc d'éthique, de morale, par rapport à ce qui doit être un fonctionnement normal des pouvoirs publics, que ce soit au niveau de l'Etat, au niveau des collectivités locales. Il faut l'entendre. Il faut traiter."
Pas de repentance, pas d'amnistie ?
- "Là, c'est le bon sens. J. Chirac a dit une nouvelle fois à P. Séguin qu'il avait tort mais nous le savions ; qu'on ne peut pas réclamer une amnistie, encore moins une repentance. Il faut demander la vérité et il faut que la justice passe. Encore faut-il que la justice passe pour tout le monde."
Sur les marchés truqués d'Ile-de-France, il ne savait pas, il ne peut pas y croire. Est-ce qu'il vous a convaincu sur ce point ?
- "C'est à la justice d'établir..."
Mais pour vous ! La justice, c'est un disque qui revient : la justice, il faut qu'elle soit sereine, il faut qu'elle soit indépendante...
- "Non, mais ce n'est pas un disque. Heureusement qu'elle existe. C'est elle qui fait sortir ces affaires, c'est elle qui cherche la vérité."
Mais est-ce qu'il vous a convaincu ?
- "J. Chirac dit qu'il ne savait pas pour les marchés d'Ile-de-France. Savait-il ce qui se passait à la tête du RPR à ce moment-là ? Il dit que non. Savait-il ce qui se passait à la ville de Paris ? Et quand même, tous les jours, il y a un certain nombre d'affaires et il ne s'agit plus simplement de gestion d'un parti politique, mais de la gestion d'une grande collectivité locale ; était-il au courant des emplois fictifs, des marchés truqués de l'Office HLM ; était-il au courant des fraudes électorales ? C'est à lui de s'expliquer. Ce n'est pas à nous de le dire, je ne suis pas une machine à détecter la vérité. Je pense simplement qu'il y a eu beaucoup d'affaires pendant qu'il était lui-même maire de Paris - parce que c'est de cela qu'il s'agit au-delà même de la présidence du RPR - et que c'est à la justice d'aller jusqu'au bout pour connaître cette vérité."
Mais quand il dit : " là où je suis, avec mes responsabilités de Président de la République, je ne peux pas me défendre, je suis une victime permanente ".
- "J'entends ce qu'il dit. D'abord, il affirme très nettement qu'il faut que la justice passe et c'est aussi notre position. Il dit qu'il faut aller le plus loin possible dans l'exigence de vérité, c'est également notre position. Mais il dit : "je suis une victime, je ne peux pas porter plainte pour diffamation et je ne peux pas venir non plus comme témoin". Si le statut actuel de l'immunité présidentielle est à ce point dangereux pour le Président de la République lui-même, il faut en changer. Il n'est pas bon, il n'est pas normal qu'un Président de la République - il nous l'a confié - puisse se dire victime d'un système, victime d'une justice spectacle et ne pas pouvoir lui-même se défendre, soit comme témoin, ou même mettre en cause ces personnes qui l'attaquent..."
Ce sera un argument de la campagne présidentielle de 2002 ?
- "Il en a fait finalement la démonstration sans peut-être le vouloir, mais il a expliqué pourquoi il fallait changer le système de l'immunité présidentielle. Je pense que le Président de la République - et cela doit valoir au-delà de 2002 pour le prochain quinquennat et pour le prochain Président de la République - doit être effectivement protégé par rapport aux actes qui sont les siens comme chef de l'Etat. Mais qu'en revanche, par rapport aux attaques dont il est l'objet sur des faits qui se sont passés antérieurement à sa prise de fonction, alors il doit pour sa propre défense être un citoyen comme les autres."
Pour 2002 ?
- "Pour 2002, parce que je crois qu'il ne faut pas faire de loi de circonstance. Mais c'est, je crois, une aspiration que les Français doivent avoir et qu'ils ont finalement eu maintenant comme une démonstration par le Président de la République hier soir."
Quand P. Poivre d'Arvor lui a demandé : "un juge à l'Elysée ?", il a répondu un "non" catégorique, un peu à la Mitterrand. Vous lui donnez raison ? Parce que Mitterrand ne voulait pas voir de juge du côté de l'Elysée.
- "Il a une conception extensible de l'immunité présidentielle. Il dit ce que rappelle le Conseil constitutionnel : c'est la Haute Cour ou rien. Je crois - et c'est pour cela que je fais cette proposition pour l'avenir - qu'il peut y avoir entre la Haute Cour et rien un système qui permette au chef de l'Etat sur des faits qui n'ont rien à voir avec ses fonctions, de pouvoir s'expliquer et même de porter plainte. Il n'y a aucune raison que lorsque le chef de l'Etat est attaqué ne puisse pas faire valoir ses droits. Donc, il faut changer le système."
Est-ce que L. Jospin va bientôt parler ?
- "Mais il ne cesse de parler."
Non mais sur les affaires, le PS la démocratie, la justice...
- "Vous pouvez interroger L. Jospin quand vous le voulez. Et il est même deux fois par semaine devant les députés à l'Assemblée nationale pour répondre aux questions. Si les questions lui sont posées, généralement, il ne se dérobe jamais. Donc, le Premier ministre est toujours en confrontation avec les parlementaires, avec les journalistes. Et s'il est interrogé, je ne sais sur quoi, mais pas forcément sur les mêmes sujets que le Président de la République. "
Non mais on peut lui demander pourquoi et comment des socialistes se sont souvent trouvés embringués dans une machinerie comme les marchés de l'Ile-de-France, etc.
- "Mais cette question vous pouvez me la poser à moi. "
Et alors, la réponse ?
- "Nous disons très clairement que nous avons déjà payé dans les années 70 et 80, - souvenez-vous du procès Urba - par rapport à des financements illégaux. Et là, tout le monde disait : " il n'y a que le Parti socialiste ". Maintenant, J. Chirac lui-même a fait l'aveu que c'était tous les partis. Ensuite, nous avons strictement respecté la loi et nous faisons confiance à la justice. Si tel n'est pas le cas, je l'ai dit, les conséquences seront directes."
Terribles dans votre propre parti ?
- "Absolument."
Et quand vous dites J. Chirac dit "tous les partis maintenant", c'est-à-dire que vous reconnaissez que tous les partis...
- "Non, je ne reconnais rien du tout. C'est quand même au sein du Conseil régional d'Ile-de-France présidé par un RPR que, visiblement, une corruption a eu lieu. Je ne voudrais pas qu'on jette l'opprobre sur les autres formations politiques."
Vous avez compris après hier soir que J. Chirac sera en 2002 un candidat rude et offensif?
- "Ah bon ? Vous avez vu qu'il était candidat ? Cela ne m'a pas finalement frappé. "
Vous pensez qu'il aurait pu ne pas être candidat ?
- "Vous pensez qu'il a réagi comme candidat ? Je pensais qu'il avait réagi comme Président de la République. Vous me donnez là une interprétation, une clé peut-être de compréhension."
(Source http://sig.premier-ministre.gouv.fr, le 15 décembre 2000)