Discours de M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, sur les nouveaux défis du tourisme dans le contexte international actuel de concurrence accrue et de tensions économiques et politiques, et sur les priorités à l'emploi notamment, le 15 novembre 2005.

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Intervenant(s) : 
  • Dominique Perben - Ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer

Circonstance : Assises nationales du tourisme à Paris le 15 novembre 2005

Texte intégral

Monsieur le Ministre délégué,
Mesdames et Messieurs,

Je me réjouis de me trouver aujourd'hui parmi vous à l'occasion de ces 3èmes Assises du Tourisme.
Elles s'inscrivent dans le prolongement des deux précédentes Assises qui ont permis, d'abord en 2003, d'aborder la question de l'attractivité touristique de notre pays. Puis, en 2004, elles ont porté sur le renouvellement nécessaire de l'offre touristique, sur les risques et les opportunités des professions touristiques, et sur les financements possibles de l'économie touristique.
Il s'agit donc d'une contribution essentielle et originale à notre réflexion, pour la mise en place d'une politique globale.
C'est pourquoi je félicite chaleureusement tous les organisateurs et tous les participants de ces 3èmes Assises, qui s'inscrivent dans cette dynamique nouvelle.
Vous avez choisi d'aborder ce matin des thèmes qui sont au coeur de l'action gouvernementale :

J'attends beaucoup de l'atelier qui sera consacré au Tourisme et à l'Emploi, l'emploi priorité numéro un du Gouvernement. Comme vous le savez, les mesures de la Bataille pour l'emploi sont entrées en vigueur en août dernier, notamment
"le contrat nouvelle embauche".

50 000 postes restent non pourvus dans le secteur du tourisme. Je souhaite que les professionnels s'emparent de ce dispositif, en fassent profiter leurs entreprises, et les personnes en quête d'emploi.

Je me félicite également que le littoral fasse l'objet d'un atelier spécifique. Notre littoral est la destination préférée de nos touristes français et étrangers. Mais il faut en moderniser les équipements en tenant compte des impératifs de durabilité, comme l'a rappelé le Président de la République, à l'occasion du 30ème anniversaire du Conservatoire du Littoral.

Enfin, vous allez aborder le thème du tourisme et du changement climatique, en même temps que les participants au "Rendez-vous climat" qui se déroule aujourd'hui à Paris. C'est l'occasion d'illustrer une prise de conscience, chez les professionnels, de la responsabilité du tourisme dans la consommation des ressources énergétiques, et la sauvegarde des sites naturels. Il nous
faut tourner la page du tourisme prédateur, avec une vision planétaire des problèmes.

1) Bilan des enjeux actuels
Notre premier constat est que le tourisme français, dans un contexte de concurrence accrue et de tensions économiques et politiques internationales, doit relever de nouveaux défis, et faire face à de nouveaux enjeux :

Des événements comme les attentats, la guerre en Irak, les épisodes d'épidémie de SRAS ont eu un impact certain sur le tourisme en France. Ils ont pu expliquer la relative désaffection des touristes américains pour la France. Aujourd'hui, la tendance s'inverse progressivement : en 2004, nous avons enregistré une augmentation de 7 % du flux des touristes américains chez nous.

Mais nous devons en ce moment être très attentifs aux conséquences possibles du traitement par certains médias étrangers des violences urbaines qu'a connues notre pays.
Comptez sur Léon BERTRAND et moi-même, et le Gouvernement, comme l'a fait hier Jean-François COPPE avec l'ensemble de la presse internationale, pour porter à l'étranger une image positive de la France.
Tout ceci explique que, après une période de croissance soutenue des recettes touristiques internationales en France pendant 10 années, la situation actuelle soit plus incertaine. Après des baisses en 2002 et 2003, les recettes apportées par les touristes étrangers en France ont été stables en 2004, et sont à nouveau en nette augmentation en 2005.
Cependant, la forte augmentation des dépenses des touristes français à l'étranger a diminué d'un milliard d'euros le solde du poste voyages de la balance des paiements en 2004, faisant régresser le tourisme au deuxième rang des secteurs excédentaires, derrière le secteur automobile.
Par ailleurs, l'accélération de la croissance touristique mondiale et l'ouverture politique de certains pays positionnent, sur le marché, de nouvelles destinations. C'est le cas de la Chine, du Continent Sud-américain et, dans les années à venir, probablement, des pays baltes ou des ex-républiques soviétiques d'Asie centrale.
Nos principaux concurrents développent des produits touristiques de qualité, très compétitifs, valorisés par une politique de promotion agressive et ambitieuse. Je pense au Plan Qualité espagnol, ou à la marque Italia, dotés de budgets très conséquents.
Parallèlement, on observe que jamais les infrastructures de transports n'ont autant favorisé l'accroissement des flux touristiques. La mobilité des personnes est devenue beaucoup plus grande. Il faut s'adapter à cette nouvelle donne touristique mondiale.
La montée des préoccupations en matière de sécurité, tant au niveau des destinations que des produits, s'est fortement accentuée au niveau mondial. Nous devons y répondre avec efficacité.
Enfin, le besoin d'esthétique conditionne de plus en plus les choix d'aménagement et de développement touristique. C'est un tournant qu'il nous faut prendre. Nous en avons les moyens.

2) Nos ambitions pour l'avenir
Dans ce contexte nouveau de mondialisation, aux conséquences environnementales, économiques, culturelles et sociales nombreuses, je suis venu vous dire que l'État veut être le garant d'un développement touristique maîtrisé, cohérent et durable :

Il s'agit tout d'abord de valoriser mieux encore les atouts de notre pays, en adaptant ses structures au contexte national et international, et aux nouvelles exigences du secteur. Dans le domaine de l'accueil réservé aux touristes, nous pouvons encore beaucoup progresser. C'est ce que confirment de nombreux articles de la presse étrangère. J'ai donc demandé au Directeur du Tourisme d'être l'animateur d'une Conférence du Tourisme, qui pourrait réunir l'ensemble des grandes directions de mon Ministère, pour faire le point, dans un premier temps, sur ce thème de l'accueil des touristes. Les grands moyens de transports aériens, maritimes et ferroviaires pourraient grandement contribuer à l'amélioration de cette situation.

Avec le Plan Qualité France, nous pourrons par ailleurs améliorer sensiblement le standard moyen de nos prestations touristiques, en termes de confort et de services.

Ensuite les acteurs privés du tourisme doivent pouvoir s'appuyer sur les outils et les actions du Ministère délégué au tourisme. C'est comme cela que je conçois le partenariat entre acteurs économiques et responsables institutionnels.

Par ailleurs, le développement de l'emploi et la cohésion sociale doivent demeurer plus que jamais au coeur de notre action.

Le premier rang de la France en matière touristique et l'exigence de compétitivité qui en découle imposent que tout ce dispositif comporte une dimension européenne et internationale.
Avant de reprendre ces différents points, je souhaite vous dire que les Comités Interministériels sur le Tourisme réunis par le Premier Ministre, à moins d'un an d'intervalle, ont constitué des étapes importantes dans la mise en oeuvre d'une stratégie touristique de la France pour la décennie à venir.
Je suis heureux de vous annoncer ce matin que le tout prochain Comité Interministériel du Tourisme sera concentré sur "les enjeux de l'Emploi et du Tourisme".

3) Pour moi, cinq priorités actuelles se dégagent des mesures arrêtées lors de ces deux Comités Interministériels sur le Tourisme :
Première priorité : l'attractivité touristique de la France
Même si la France reste la première destination touristique au niveau mondial, elle ne se positionne qu'au 3ème rang en terme de recettes. Elle doit donc maintenir un effort soutenu pour valoriser son potentiel. Les clientèles ne sont jamais définitivement acquises.
Dans le cadre de la promotion du plan de relance de la Destination France, et du Plan Qualité France, Maison de la France accomplit une oeuvre remarquable.
Sa nouvelle stratégie de marketing 2005-2010 permet de renouveler l'image de la France, et de repositionner notre pays sur des créneaux porteurs. Pour mieux y parvenir, il faudra davantage encore cibler nos actions sur des marchés prioritaires.
Deuxième priorité : L'emploi et la cohésion sociale
Vous connaissez les mesures que le Gouvernement a prises, dans le cadre de la Bataille pour l'emploi, dont certaines sont particulièrement adaptées au secteur du tourisme :

90 % des entreprises du tourisme comptent moins de 20 salariés. Elles ont donc pu pleinement profiter du nouveau dispositif du "Contrat nouvelle embauche" pour gérer leurs effectifs avec une grande souplesse. Je vous rappelle également le crédit d'impôt de 1 000 euros accordé aux jeunes chômeurs reprenant un emploi dans un secteur connaissant des difficultés de recrutement, comme la restauration.

Les collectivités territoriales et les acteurs du tourisme institutionnel peuvent également profiter pleinement des contrats d'avenir et des contrats d'accompagnement dans l'emploi. Ces deux dispositifs du plan BORLOO s'adressent respectivement aux allocataires de minima sociaux et aux chômeurs de longue durée.

Les premiers résultats de ces mesures sont très encourageants, puisque le chômage a reculé durant ces six derniers mois, et que le cent millième contrat nouvelle embauche sera bientôt signé.
Déclarée grande Cause nationale 2003 par le Président de la République, l'insertion des personnes handicapées doit évidemment concerner aussi le tourisme.
Je souhaite intensifier ces mesures. La mise en place d'infrastructures touristiques accessibles aux handicapés doit être accélérée, en collaboration avec les principaux acteurs du tourisme dans le domaine du handicap. Comptez sur moi pour appuyer les projets en cours, et progresser avec vous dans ce domaine.
De plus, l'accès aux vacances doit être facilité par la mise en oeuvre de politiques spécifiques en faveur des jeunes, des populations défavorisées. Cela passe par le développement des chèques-vacances, du Groupement d'Intérêt Public "Bourse Solidarité Vacances", ainsi que par l'aide à la rénovation des hébergements du tourisme social et familial.
Troisième priorité : le développement de l'activité touristique et sociale
La fréquentation touristique en Outre Mer se redresse depuis deux ans, notamment dans les Antilles. La diffusion du chèque vacances dans ces territoires s'est nettement améliorée.
Cela me paraît capital, car l'industrie touristique, dans les territoires, départements et collectivités d'Outre Mer, représente une part très élevée du PIB. Je serai tout particulièrement attentif à cette dimension de notre politique
Enfin, des actions ont été engagées en faveur du tourisme rural. Les premières mesures qui ont été prises ont permis de favoriser, grâce à des avantages fiscaux, des installations touristiques dans des zones de revitalisation rurale.
Ces réalisations doivent être poursuivies, car elles nous donnent l'opportunité d'un développement plus harmonieux et plus équilibré de nos territoires.
Quatrième priorité : la réforme de l'État
Nous avons inauguré la semaine dernière avec le Ministre délégué au tourisme, mon ami Léon BERTRAND, la Maison du Tourisme, qui vient d'être installée place de Catalogne.
Cette Maison va enfin regrouper l'ensemble des services dédiés au tourisme : la Direction du Tourisme, bien sûr, mais aussi le Conseil du Tourisme, ODIT France, la Conférence Permanente du Tourisme Rural, ainsi que Maison de la France en 2007.
Ce nouveau pôle d'expertise permettra au Ministère de répondre de manière plus efficace aux demandes des acteurs privés du tourisme en France et à l'international. Il mettra en oeuvre des stratégies de marketing et contribuera à l'analyse des marchés, ce qui constitue un enjeu central pour notre politique du tourisme.
Cinquième priorité : l'adaptation du cadre juridique
Notre cadre juridique doit être modernisé, rendu plus cohérent avec les nouvelles évolutions du tourisme, afin de faciliter le travail des entreprises du secteur et des collectivités.
Je voudrais à ce sujet faire part de mon soutien attentif aux élus. Je souhaite qu'ils sachent que je prendrai en compte leurs réflexions et leurs suggestions dans la mise en place des réformes qui les concernent, et qui sont actuellement en cours :

Je pense notamment à la réforme des stations classées, qui a été décidée lors des deux Comités Interministériels du Tourisme. Leur objectif est de simplifier et de moderniser le régime juridique qui leur est applicable.
Je remercie tout particulièrement Léon BERTRAND d'avoir associé les élus à une concertation, sur les aspects législatifs de ce projet. Elle a été très fructueuse.

Je sais également que la réforme de la taxe de séjour a appelé des observations de votre part, dont il sera tenu compte.
Nous sommes aussi à l'écoute des préoccupations des acteurs professionnels du tourisme, qu'il s'agisse du secteur voyage, du secteur de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration, ainsi que du secteur du tourisme social.
Je n'oublie pas non plus nos partenaires institutionnels du tourisme : offices du tourisme, comités régionaux et départementaux du tourisme,. La décentralisation en a fait des relais essentiels de notre action.
Mesdames et Messieurs,
Ces 3èmes Assises du Tourisme consacrent la volonté de concertation, de dialogue, et de partenariat, qui fut à l'origine de cette démarche.
Les professionnels du tourisme doivent pouvoir s'appuyer sur un service public simplifié, unifié, et modernisé : en un mot, EFFICACE.
C'est une condition essentielle pour répondre de manière mieux adaptée à vos attentes.
Votre activité constitue l'un des secteurs les plus dynamiques de notre économie, avec ses 200 000 entreprises et ses 2 millions d'emplois.
Comptez sur Léon BERTRAND et moi-même pour permettre à votre dynamisme de s'exprimer, et pour être à votre écoute. Nous tiendrons compte des messages que ces Assises vont vous donner l'occasion de nous exprimer !

(Source http://www.equipement.gouv.fr, le 25 novembre 2005)