Déclaration de M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale, sur les relations franco-nigériennes, Paris le 25 février 1999.

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Circonstance : Visite officielle du Président de la République du Niger, à Paris le 25 février 1999

Texte intégral

Monsieur le Président, Madame,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mes chers amis,
Votre présence parmi nous aujourd'hui constitue l'annonce d'un dialogue renforcé entre le Niger et la France, le Niger et l'Union européenne, le Niger et la communauté des Etats démocratiques.
Cette visite, Monsieur le Président, intervient au moment où, grâce à l'esprit de conciliation et au sens de l'intérêt général dont ont fait preuve toutes les composantes de la société nigérienne, votre pays a choisi de s'engager - durablement, nous l'espérons tous - sur la voie d'un développement apaisé.
L'organisation des récentes élections locales constituait un véritable défi pour votre pays : 8000 bureaux de vote, plus de 1000 représentants à élire. En dépit des incidents que nous connaissons, et qui seront, nous le souhaitons, tous "rattrapés", les résultats obtenus reflètent la volonté du peuple nigérien. Cette participation nouvelle à la vie politique nationale ne peut que contribuer à la réconciliation. Chacun doit pouvoir et doit savoir maintenant trouver ses marques de manière pacifique et constructive dans ce nouveau jeu démocratique qui s'instaure. Cette étape électorale devrait également permettre la mise en oeuvre de cette réforme importante qu'est la décentralisation et ce n'est pas l'élu européen que j'ai été, Monsieur le Président, qui minimiserait l'importance du phénomène décentralisateur. Compte tenu des spécificité nigériennes, marquées par l'étendue du territoire, des infrastructures de communication encore insuffisantes et la diversité des populations, la réforme dans laquelle s'est engagé avec courage et lucidité votre gouvernement va dans le bon sens.
Je voulais ici saluer cette action et vous dire une nouvelle fois, Monsieur le Président, que vous pouvez compter non seulement sur le gouvernement auquel j'appartiens, mais aussi sur les organisations non-gouvernementales et les collectivités locales françaises - plusieurs sont représentées ici ce soir - pour accompagner cette dynamique. Je voudrais en particulier mentionner ici les relations étroites établies entre le Niger et le département des Côtes d'Armor, si cher à mon collègue Charles Josselin, qui m'a dit tout le regret qu'il avait de ne pas pouvoir être avec nous ce soir.
Cette entreprise, de longue haleine s'il en est, a été engagée alors que les contraintes économiques et financières que connaît votre pays demeurent fortes.
Grâce aux efforts des autorités nigériennes, votre pays a obtenu l'approbation par le FMI en août 1998 d'une troisième année du programme de "Facilité d'ajustement structurel renforcé" que vous avez conclu avec le Fonds. Cet accord qui permet de desserrer quelque peu la contrainte de trésorerie à court terme, d'apurer certains arriérés accumulés par l'Etat, témoigne de la confiance des institutions financières internationales. Reste que le Niger, pays parmi les plus déshérites au monde, mérite un soutien renforcé de la communauté internationale pour mener à bien le courageux programme de réformes économiques que vous avez engagé.
Pour sa part, la France qui entretient de longue date des liens d'amitié et de coopération avec vous, entend poursuivre et développer son aide multiforme. La réforme de nos instruments de coopération, la création d'une zone de solidarité prioritaire à laquelle le Niger appartient, la création du Comité interministériel de la coopération internationale au développement, ont notamment pour objectif de concentrer nos actions en faveur des pays les plus démunis. Le Niger devrait, Monsieur le Président, en être l'un des principaux bénéficiaires.
J'avais, en introduction, évoqué, pour m'en féliciter, la décrispation de la vie politique nigérienne. Je voudrais, également pour m'en féliciter, saluer l'action conjuguée des autorités nigériennes et des mouvements touaregs et toubous en faveur de la paix dans le nord et dans l'est du Niger. Votre pays, qui a été pendant plusieurs années en proie aux violences interethniques, connaît depuis les accords de Niamey d'avril 1995, accords confortés en 1997 et 1998, la paix et la stabilité sur l'ensemble de son territoire. Certes, ici ou là, quelques retards, souvent liés à des problèmes d'ordre financier, ont pu être constatés. Mais dans l'ensemble le programme d'intégration et de réinsertion des ex-rebelles va son chemin.
La France s'honore d'avoir apporté sa contribution en aidant à la constitution de ces "unités sahariennes de sécurité" qui, je le sais, vous tiennent à coeur, Monsieur le Président. Cette stabilité recouvrée est d'autant plus appréciable que la sous-région est traversée de tensions et de crises, souvent sanglantes. Les images d'horreur qui nous viennent quotidiennement de Sierra Leone en sont de déplorables témoignages.
Vous connaissez, Monsieur le Président, notre volonté de favoriser, en concertation avec les Nations unies, les organisations sous-régionales compétentes et les Etats intéressés, les capacités africaines de maintien de la paix. Cette entreprise, qui s'inscrit dans le long terme, nécessite le concours de tous, et en tout premier lieu des Etats africains eux-mêmes.
Je me réjouis à cet égard de la décision que vous avez prise, Monsieur le Président, d'envoyer un contingent de militaires nigériens pour rétablir la paix en Guinée Bissau. L'appui que la France a décidé d'apporter à la CEDEAO, et notamment au déploiement des forces de l'ECOMOG dans ce pays, s'en trouve facilité et justifié. Au-delà, cette implication de votre pays témoigne de l'intérêt porte par le Niger aux affaires de la sous-région et de sa volonté de promouvoir l'intégration de l'Afrique occidentale dans les domaines politique, militaire et économique.
C'est peu dire que votre démarche dans ce domaine se trouve en complète harmonie avec nos propres convictions sur ce qui pourra et devra fonder un développement enfin harmonieux du continent africain.
Permettez-moi, Monsieur le Président, de vous redire tout le plaisir que j'ai à vous accueillir ici à l'occasion de cette visite dont, j'en suis certain, l'amitié et la coopération entre le Niger et la France sortiront grandement renforcées.
Mesdames, Messieurs; c'est à cette amitié et à cette coopération que je vous invite maintenant à lever votre verre.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr)