Déclaration de M. Dominique de Villepin, Premier ministre, sur la politique de l'emploi, la réforme fiscale et la transmission des entreprises, Cholet le 16 décembre 2005.

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Texte intégral

Monsieur le Député Maire, Cher Gilles,
Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Président du Conseil Régional,
Monsieur le Président du Conseil Général,
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
erci Monsieur le Président de nous accueillir ici dans ce bel établissement, dans cette belle ville. C'est un formidable cadeau que vous nous faites ce matin à Jean-Louis BORLOO et à moi-même. Un formidable cadeau d'abord que d'entendre les résultats du Choletais, 6,7 % de taux de chômage. Vous ne vous rendez plus bien compte de ce que cela signifie pour Jean-Louis BORLOO et moi. On se bat jour après jour pour arracher centième par centième une progression dans ces chiffres. 6,7 %. Vous avez encore baissé de 2 % en un mois vos résultats. C'est une ambition, c'est un exemple, et effectivement on peut ici parler d'un modèle Choletais. Et puis pour Jean-Louis BORLOO et moi-même, quelle leçon que cette terre de tradition, cette terre de fidélité et en même temps cette terre de conquête.
Nous sommes ici dans un établissement qui est leader mondial et nous sommes dans une terre avec des PME qui sont capables de se porter au niveau mondial. Là encore quelle leçon, quel exemple. Et il faut cette fougue, il faut cette passion, il faut ce dynamisme, il nous faut ce goût du travail bien fait, et j'ai été heureux d'entendre tout à l'heure ces hommes et ces femmes au travail dire toute la joie qu'ils ont au quotidien de s'engager pour faire des bateaux magnifiques qui vont aller à la conquête des mers. Avec des parcours différents, des parcours parfois difficiles, c'est vrai, passer de la mode de l'habillement au monde nautique, cela n'apparaît pas spontanément naturel et pourtant. Et pourtant avec enthousiasme, avec conviction, avec ardeur, eh bien le pas est franchi, le pas est gagné. Cette leçon c'est une leçon qui vaut pour nous c'est un beau cadeau de Noël et c'est une leçon qui vaut aussi pour notre pays tout entier et croyez bien que pendant les fêtes, parce qu'on va quand même un peu travailler, on va s'efforcer de pousser la réflexion, pour voir comment à la rentrée, au début de l'année, eh bien nous pourrons justement tirer tous les enseignements de ce que vous faites ici et que l'on pourrait aussi faire ailleurs.
Je voudrais saluer la mobilisation exceptionnelle de la population et des acteurs économiques du Choletais. Je me réjouis de vous voir nombreux aujourd'hui, cela témoigne d'un engagement, cela témoigne d'une conviction. Ce matin, en visitant cette usine de la société JEANNOT, je le redis une usine à la pointe de son secteur. Bien sûr un leader mondial, bien sûr un leader qui exporte ses bateaux sur les continents, mais aussi une entreprise qui embauche. Une entreprise qui est bien à l'image du dynamisme de votre région, à l'image du dynamisme que nous voulons donner à tout notre pays. Alors dans un temps où volontiers on s'exerce à regarder ce qui ne marche pas, je voudrais avec vous et grâce à vous, constater à quel point nous marquons des points dans la compétition mondiale. Votre région c'est bien l'exemple, le meilleur exemple que nous pouvons prendre ce matin. Passer de l'habillement, du textile, du cuir, pour se tourner vers des secteurs à forte valeur ajoutée, toutes les industries traditionnelles, les mouchoirs de Cholet, merci, merci encore du cadeau, les mines de Segré, nous le savons, ont connu des difficultés même si elles continuent et perpétuent un savoir et une tradition. Mais vous avez su réagir au bon moment et faire le pari de l'innovation. Vous avez fait le choix de l'avenir.
Et aujourd'hui votre région accueille des entreprises leader dans tous les secteurs. Je pense bien sûr à THALES à Cholet pour les technologies de pointe, je pense aussi aux brioches PASQUIER, aux viandes CHARAL, à l'entreprise GRIMAUD pour l'agroalimentaire. Je pense enfin à des entreprises du Ségréen, où je me rendrai tout à l'heure comme LONGCHAMP, pour les métiers du cuir et du luxe, ou encore LEFRANC. Aujourd'hui les résultats sont là. En dix ans les industries du cuir et de l'habillement ont perdu plus de 6000 emplois mais dans le même temps vous en avez créés plus de 11 000 dans des secteurs comme les services, ou l'agroalimentaire. Cette réussite vous pouvez en être fiers, car vous la devez d'abord à votre esprit d'entreprise, et à votre audace, vous avez développé vos entreprises, vous avez crée de l'activité et des emplois, vous êtes partis à la conquête des marchés étrangers, à l'image des créations Hervé GAMBS qui exporte dans le monde entier. Cette réussite vous la devez aussi à votre esprit de rassemblement. Entrepreneurs, chercheurs, élus, vous vous êtes tous ensemble mobilisés autour d'objectifs ambitieux. Je pense au pole de compétitivité enfant, je pense aussi au pole de vocation mondiale, que vous avez créé dans le domaine de la recherche sur le végétal, avec l'aide de l'Etat vous avez supporté des projets originaux et en même temps innovants.
Vous nous montrez et vous nous rappelez que la France a des atouts, pour être au premier rang dans le monde, votre enthousiasme et votre goût d'entreprendre je les ai rencontrés souvent dans mes déplacements, dans les Ardennes, à Oyonnax ou à Amiens. C'est sur ces atouts que nous devons nous appuyer pour faire gagner la France. Ma responsabilité, notre responsabilité c'est de créer un environnement favorable pour soutenir vos ambitions. Je connais vos efforts, je sais les difficultés auxquelles vous êtes confrontés. Aujourd'hui, nous le savons, tout le monde change, la compétition s'étend à tous les domaines, les coûts de production, mais aussi l'innovation ou la fiscalité.
Je veux vous donner les moyens de vous battre à armes égales et pour cela j'ai trois objectifs. Le premier c'est donner aux petites entreprises les moyens d'embaucher et de réussir. Aujourd'hui pour une petite entreprise embaucher c'est une décision importante. C'est une décision difficile. C'est un engagement que vous prenez à l'égard d'une femme ou d'un homme. C'est aussi un véritable investissement pour vos sociétés. Et c'est en prenant en compte cette préoccupation que nous avons crée le contrat "nouvelles embauches" qui offre plus de souplesse aux employeurs tout en donnant des garanties aux salariés. En moins de trois mois, nous avons réussi à mettre en place ce dispositif novateur. Et vous êtes au rendez-vous : 250 000 contrats "nouvelles embauches" ont déjà été signés. C'est une première victoire dans la bataille pour l'emploi.
Le second objectif c'est réformer notre fiscalité pour la rendre plus lisible et plus compétitive. Plus lisible pour que vous puissiez faire des prévisions à moyen ou à long terme. C'est pourquoi j'ai confirmé la poursuite de l'allègement des charges. Plus compétitive ensuite pour vous permettre de faire face à la concurrence internationale, et pour cela j'ai engagé trois réformes. La réforme de la taxe professionnelle, d'abord, car cet impôt pénalisait l'investissement en le plafonnant à 3,5 % de la valeur ajoutée, ce sont plus de 200 000 entreprises qui verront leurs charges fiscales allégées. La deuxième réforme c'est l'impôt sur le revenu, nous avons voulu permettre aux salariés de vos entreprises de bénéficier davantage des fruits de leur travail.
La troisième réforme c'est faciliter la transmission des entreprises. Et c'est un enjeu majeur dans la France d'aujourd'hui. Au cours des 10 prochaines années, 500 000 entreprises vont changer de mains. Dès le 1er janvier 2006 les dirigeants de PME qui souhaitent céder leurs entreprises bénéficieront d'une exonération totale. Quand on s'est investi personnellement dans une société il est normal de pouvoir transmettre le flambeau le moment venu sans pour autant être pénalisé.
Notre troisième objectif c'est pour créer un environnement plus favorable, muscler la recherche et l'innovation. C'est la clé pour que notre pays garde une longueur d'avance et reste dans le peloton de tête des économies développées, et la bataille nous le savons je joue dès maintenant. J'ai décidé d'y consacrer des moyens considérables. L'agence pour l'innovation industrielle est dotée de 2 milliards d'euros. Elle est d'ores et déjà opérationnelle pour des premiers financements prévus début 2006. Les pôles de compétitivité répondent également à la même logique, rassembler nos forces pour être plus forts à l'échelle mondiale. 1 milliard et demi d'euros y seront consacrés dans les trois prochaines années. Vous le voyez nous avons engagé des réformes profondes. Nous devons travailler ensemble pour continuer à moderniser notre pays. C'est tout le sens du patriotisme économique, c'est tout le sens de ce défi collectif. Une mobilisation de tous. Comme vous avez su le faire ici, pour nos entreprises et pour nos emplois.
J'ai bien retenu, Monsieur le Président, les messages que vous m'avez adressés. Effectivement chaque filière, chaque entreprise rencontre ses propres difficultés. Et notre responsabilité c'est bien de vous accompagner dans ce développement. Donc c'est vrai construire des bateaux certes, trouver des places pour ancrer ces bateaux c'est l'évidence et c'est notre responsabilité de faire en sorte que dans ce domaine aussi, nous soyons attentifs à chaque étape du processus pour que la France reprenne toute la place, assume la vocation qui doit être la sienne, de la même façon pour les tracasseries des réglementations souvent tatillonnent et excessives. C'est bien le message au quotidien que nous donnons, chacun des ministres, l'ensemble du gouvernement, et nous savons que la tâche est encore importante mais c'est dans ce sens que nous nous mobilisons. Nous voulons faire profiter tous nos concitoyens de ce nouvel élan. Il s'agit bien de partager aujourd'hui cette exigence de dynamisme.
Cela veut dire d'abord permettre à chacun de trouver sa place sur le marché du travail. Dans votre région vous le savez mieux qu'ailleurs changer de métier, se reconvertir, cela demande de la détermination, et des efforts considérables. C'est pourquoi nous devons accompagner ceux qui en ont besoin, leur offrir une formation, pour leur donner toute leur chance. J'ai décidé de créer ce véritable accompagnement personnalisé, d'en faire le fil conducteur, le fil directeur de l'action gouvernementale, que l'on parle de l'éducation, que l'on parle de l'emploi, que l'on parle de la situation de ceux qui rencontrent le plus de difficultés. Ma conviction, c'est que chacun doit pouvoir trouver tout au long de son parcours un interlocuteur capable de le guider. L'exemple du parrainage dans votre entreprise, ici ce matin, en est une bonne illustration. C'est plus facile quand quelqu'un vous tend la main, pour vous apprendre, vous faire découvrir un nouveau métier. C'est plus facile. On avance avec le sentiment d'être soutenu, encouragé. Il faut d'abord être capable de mieux choisir sa voie. Trop de jeunes se dirigent sans le savoir vers des filières qui ne leur conviennent pas ou qui ont trop peu de débouchés. Nous voulons mettre en place un service public de l'orientation pour que chaque jeune puisse disposer de toutes les informations nécessaires pour choisir le métier qui corresponde à ses talents et à ses aspirations. Nous mettrons en place ce service public de l'orientation dès la rentrée 2006. Ensuite, nous voulons aider ceux qui sont touchés par des restructurations, et vous en avez l'expérience.
L'objectif c'est de tout faire pour leur éviter de passer par la case chômage, et nous voulons expérimenter le contrat de transition professionnelle en 2006, il offrira une formation, un revenu presque équivalent au dernier salaire perçu, et donnera la possibilité d'exercer des missions auprès d'entreprises publiques ou privées et nous allons commencer par expérimenter ce contrat sur six bassins d'emploi en difficulté. Enfin, pour permettre à chacun de progresser et d'acquérir de nouvelles compétences. Nous le savons, suivre une formation, avoir un diplôme, c'est un avantage considérable pour trouver un emploi. J'ai proposé un droit universel à la formation, d'une durée d'un an, qui bénéficiera à tous ceux qui n'ont pas eu la possibilité de poursuivre leurs études au-delà de 16 ans, et qui ont au moins deux ans d'expérience professionnelle. Là encore commençons par cela, voyons comment ce crédit formation peut donner des chances supplémentaires dans la vie avec la possibilité de s'en servir quand on en éprouve le besoin, quand on a le sentiment qu'un nouvel investissement dans un domaine ou un autre, informatique, linguistique, est nécessaire pour franchir une nouvelle étape, un nouveau palier, dans sa carrière professionnelle. Nous devons aussi permettre à tous les Français de mieux bénéficier des fruits de la croissance.
Nos compatriotes veulent être davantage associés au destin de leur entreprise. Ils veulent mieux participer aux décisions de leur société, et bénéficier de leur succès. L'actionnariat salarié est un bon outil pour cela, en le développant nous voulons permettre aux entreprises et à leurs salariés de travailler dans la même direction. J'ai demandé à Thierry BRETON et à Gérard LARCHER de préparer un projet de loi pour aller dans cette voie, il prévoira notamment une incitation à la distribution d'actions gratuites pour tous les salariés.
Mesdames et Messieurs, Chers Amis,
Vous le savez le monde change. L'économie se mondialise, les technologies évoluent à une vitesse sans précédent, face à ces bouleversements la France a fait le choix d'une voie originale. Nous entreprenons les réformes indispensables, notre pays se modernise, mais nous avançons en restant fidèles à nos valeurs et à nos principes car nous ne voulons ne laisser personne au bord du chemin. Aujourd'hui les choses commencent à bouger. Les premiers résultats sont là à l'échelle nationale, 130 000 chômeurs en moins au cours des cinq derniers mois, une croissance parmi les plus élevées d'Europe avec 0,7 %, au troisième trimestre, un investissement qui repart, une consommation qui se maintient. Ces résultats, c'est d'abord à vous que nous les devons, à votre esprit d'initiative, à votre dynamisme. Dans votre région vous êtes aux avant postes de notre bataille pour l'emploi. Tous les jours, vous marquez des points, et vous pouvez être fiers des résultats que vous obtenez. Ensemble, poursuivons cet effort. Nous sommes à un tournant, nous devons aller plus loin, pour faire encore davantage reculer le chômage, consolider la croissance, préparer l'avenir de notre pays tous ensemble, et je retiens et je garde au fond de moi avec Jean-Louis BORLOO cette leçon d'aujourd'hui, cette leçon du Choletais, cette leçon de courage, de dynamisme, cette volonté d'avancer tous ensemble, cette leçon-là nous la ferons vivre pour notre pays en 2006.
Je vous remercie.
http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 28 décembre 2005