Déclaration de Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, en réponse à une question sur la directive sur les services, à l'Assemblée nationale le 1er février 2006.

Prononcé le 1er février 2006

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Circonstance : Questions d'actualité à l'Assemblée nationale, le 1er février 2006

Texte intégral


Q - Contrairement à ce qui avait été annoncé par le chef de l'Etat lors de la campagne de référendum sur le projet de Constitution européenne, non seulement la directive Bolkestein de libéralisation des services n'est pas purement et simplement abandonnée, mais, au mépris du vote des Français le 29 mai, on veut nous l'imposer. Elle va, en effet, faire l'objet d'un vote du Parlement européen le 14 février prochain. Or, que dit, répétons-le toujours, ce projet de directive, car les Français doivent à nouveau le savoir ? Au coeur du texte, se trouve le principe du pays d'origine qui ouvre la voie au dumping social et réglementaire, on veut casser les règles sociales, la protection des consommateurs, la préservation de l'environnement. Il signifie, demain, de nouvelles délocalisations, de nouveaux plans sociaux, de nouveaux licenciements et fera peser dès lors, des menaces sur les droits des salariés et les conventions collectives. Le projet de directive Bolkestein participe d'une logique purement libérale qui était aussi celle de votre gouvernement, la casse de notre droit du travail et le démantèlement des acquis sociaux. Le projet de contrat première embauche, dont le gouvernement propose aujourd'hui l'adoption dans la précipitation et en l'absence de toute concertation, est une nouvelle et terrible illustration de la mainmise exercée par le patronat et les lobbies de la finance sur les politiques économiques et sociales, tant en France qu'en Europe. Monsieur le Premier ministre, les Françaises et les Français ont dit "non" au projet de traité constitutionnel et redoutent, avec raison, les conséquences de l'application de cette directive sur l'emploi, sur les salaires et sur leurs droits. C'est pourquoi nous considérons que voter pour ce texte serait un déni de démocratie et une manifestation de mépris de la souveraineté populaire. Nous voudrions donc connaître quelle sera la position précise de votre gouvernement si ce texte devait être adopté demain et soumis au Conseil des ministres ?
R - Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Monsieur le Député,
Je vous remercie de votre constance sur ce sujet, qui n'a d'égale que celle du gouvernement à obtenir, avec l'aide de ses partenaires et du Parlement européen, une révision profonde de la proposition de directive en question.
La France est performante en matière de services, elle est même le 2ème exportateur de services en Europe et cela contribue fortement à la richesse nationale. Néanmoins le premier projet était déséquilibré et comportait des éléments inacceptables. Logiquement, le Conseil européen a donc demandé à l'unanimité sa remise à plat, au printemps dernier.
Ce travail est en cours au Parlement européen : deux votes ont eu lieu en Commission ces derniers mois ; le vote en plénière doit avoir lieu le 16 février.
Le projet a d'ores et déjà été profondément remanié et ce vote en plénière aura bien sûr une grande importance. Le gouvernement le suivra de près : nous souhaitons qu'il aille dans le sens des préoccupations de la France et assure le respect des exigences sociales de l'Union.
Après ce vote il reviendra à la Commission de réécrire sa proposition initiale en prenant en compte l'ensemble des préoccupations qui se seront exprimées, tant au Parlement européen qu'au Conseil, où beaucoup partagent notre point de vue.
Sa responsabilité est importante ; je souhaite qu'elle prenne le temps nécessaire pour intégrer les observations de chacun et présenter ainsi un nouveau texte au Conseil, un texte différent du premier. Et puisque la Commission a été renouvelée en 2004, c'est d'ailleurs un nouveau commissaire, M. McCreevy, qui est chargé du dossier. Ensuite ce sera au Conseil, c'est-à-dire aux Etats membres, de décider.
Comme vous le voyez, Monsieur le Député, le gouvernement est vigilant. Il le reste : cette question figurera à l'ordre du jour au prochain Comité interministériel sur l'Europe, lundi prochain, qui se réunira sous la présidence du Premier ministre, Dominique de Villepin.

Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 3 février 2006