Déclaration de M. Hervé Morin, président du groupe parlementaire UDF à l'Assemblée nationale, dans "les Echos" du 27 janvier 2006, sur le chômage des jeunes et le contrat première embauche.

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Texte intégral

Q - Le gouvernement multiplie les annonces sur bien de domaines où vous
réclamiez des actes. Pourquoi donc les critiquez-vous ?
R - Nous répétons depuis des lustres que les 35 heures nuisent au pays.
Nous réclamons des actes sur la réforme de l'Etat. Rien n'a été fait.
Je pourrais continuer longtemps. Au lieu de s'attaquer aux
problématiques qui permettraient au pays d'avancer, le gouvernement
fixe l'attention de l'opinion sur des choses secondaires mais
symboliquement très lourdes de sens comme le contrat de première
embauche.
Q - Que reprochez-vous au CPE ?
R - Dire aux jeunes : « Pour vous, nous allons faire un sous-contrat de
travail particulier en augmentant la précarité » est un message
terrible, qui porte en lui la même symbolique que le CIP de Balladur.
En outre, ce n'est pas prendre le problème par le bon bout. On segmente
le marché du travail, on multiplie les contrats, et plus personne n'y
comprend rien ? il y a eu au moins 15 ou 20 types de contrats de
travail nouveaux en quatre ans ! L'économie a besoin d'un système qui
donne de la souplesse aux entreprises pour embaucher, mais il lui faut
avant tout de la stabilité juridique et de la simplicité. Le
gouvernement a décidé de faire le CNE. Soit ! Alors laissons le temps
de l'expérimentation et, s'il porte réellement ses fruits au bout d'un
an, étendons-le. Mais arrêtons de vibrionner en permanence et cessons
les effets d'annonce. Les Français subissent la course à l'échalotte
qu'a engagée Dominique de Villepin pour rattraper Nicolas Sarkozy !
Q - Quelle alternative proposez-vous pour lutter contre le chômage des
jeunes ?
R - Le CPE ne règlera pas le problème. C'est au système scolaire de le
faire, en amont. Il faut s'attaquer aux racines du mal, c'est-à-dire à
la formation et à la qualification car le chômage des jeunes touche
principalement ceux qui sont sans formation. Pour le reste, ils sont
frappés comme toutes les catégories de la population et ce sont donc
des solutions globales qu'il faut mettre en place. Par exemple modifier
le financement de la protection sociale afin qu'il ne pèse plus
uniquement sur le travail pour réduire massivement le coût du travail
chargé.
Q - Comme le propose Jacques Chirac ?
R - Il exerce le pouvoir depuis onze ans et il n'a rien fait. Qui peut
croire à ces promesses à un an de la fin de son mandat ?
Q - La réforme des institutions proposée par Nicolas Sarkozy va-t-elle
dans le bon sens ?
R - Sa réforme reste bancale. En face d'un exécutif concentré, il faut
un vrai renforcement du pouvoir du parlement et une véritable
indépendance de la magistrature. Sinon les risques de dérive du pouvoir
sont importants.
Q - Plus audible dans sa critique que dans ses propositions, l'UDF
peine à percer dans les sondages.
Quand vous n'êtes pas en charge des affaires, on vous écoute moins. Ce
sera plus facile quand la campagne commencera. D'ici là, il nous faut
continuer à développer nos propositions : l'agriculture, l'immigration,
la justice et la fiscalité....
R - J'espère, par exemple, que nous serons la formation politique qui
proposera la suppression de l'ISF qui pénalise lourdement l'économie
française. Il faut avoir le courage de dire la vérité aux Français même
si elle déplaît.
Propos recueillis par Pierre-Alain Furbury source http://www.udf.org, le 1 février 2006