Déclaration de M. Dominique de Villepin, Premier ministre, sur le renouveau économique de la ville de Toulon, le projet de loi sur l'égalité des chances et le contrat première embauche, Toulon le 10 février 2006.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Texte intégral

Monsieur le Sénateur Maire, cher Hubert,
Monsieur le Ministre, cher Jean-Louis,
Mesdames, Messieurs les parlementaires,
Monsieur le Président du Conseil régional,
Monsieur le Président du Conseil général,
Mesdames et Messieurs les élus,
Chers amis,
Avant toute chose, cher Hubert, je veux te remercier pour cet accueil qui me plonge un certain nombre de décennies en arrière quand jeune enseigne de vaisseau, j'arpentais les rues de Toulon. Toulon, où j'ai passé plusieurs mois de ma vie, merveilleux, plusieurs mois à naviguer, puisque j'étais dans la marine découvrant les grands horizons lointains qui m'ont conduit jusqu'à l'époque à Djibouti, pour l'indépendance de Djibouti, c'était en 77, mais où j'ai appris aussi à connaître les habitants de cette ville et de cette région et à m'y attacher. Et c'est pour cela que quand la première fois, tu m'as dit ton souhait de revenir vers les tiens, de revenir vers ta ville, de revenir servir cette terre à laquelle tu es tellement attaché, j'ai pu comprendre et j'ai retrouvé cette émotion et ces sensations ce matin en arrivant ici, contemplant ce ciel et regardant les visages des uns et des autres. Oui, il y a quelque chose de propre à cette terre, d'attachant, d'humain, de fraternel, et je comprends le choix qui a été le tien. Servir, servir pour accompagner, servir pour changer, servir un idéal, servir pour au jour le jour voir se transformer une ville, une terre que l'on aime, c'est l'engagement qui est le tien, et je le salue parce que c'est ce qu'il y a de plus beau, de plus noble, et de plus fort dans la politique.
Les combats politiques - vous le savez - vous l'écoutez à la radio, vous l'écoutez à la télévision, vous le lisez dans les journaux, on présente parfois cela de façon caricaturale, on veut y voir des joutes, des ambitions, des emportements, là où il y a des engagements, des idéaux, des batailles à défendre, des batailles pour notre pays, des batailles pour que la France, chacune de ses régions, chacun de ses départements, chacune de nos villes, occupent la place que nous souhaitons dans ce 21ème siècle. Et nous savons que rien n'est gagné, aucune place n'est réservée, tout est à conquérir. Et c'est bien cela qui fait aujourd'hui de l'engagement politique une donnée si importante, si essentielle, et c'est pour cela qu'on a tant besoin de l'énergie, de la passion, de la vigilance que seul peut donner le citoyen dans nos démocraties. Et pour cela, je me réjouis de voir à quel point dans notre pays, se développe une plus forte conscience des enjeux et des défis que nous avons à relever ; rien n'est possible sans les Françaises et les Français. Rien n'est possible sans l'engagement de chacun, rien n'est possible sans cette confiance chevillée au c?ur, que la France a les atouts, a les capacités, non seulement de regarder vers l'avenir, mais de réussir dans ce nouveau monde, marqué par des changements très rapides, où chacun de nos voisins lui-même relève les défis, dans ce monde-là, nous avons un impératif de mobilisation, d'action et de résultats.
Cher Hubert, j'ai eu l'occasion, pendant de longs mois, d'apprécier ton pragmatisme et ton humanité, lorsque tu étais ministre délégué aux Personnes âgées, aujourd'hui, je suis heureux, à ton invitation, d'être ici avec Jean-Louis BORLOO. Cette ville, je sais combien tu l'aimes, je sais que tu mets toute ton énergie, toute ta passion pour la servir, et elle le mérite, car Toulon, c'est d'abord une ville chargée d'histoire, une ville qui participe dans l'esprit de tous les Français du prestige de notre marine. Mais Toulon, c'est aussi une ville tournée vers l'avenir, une ville qui a fait le choix de renforcer la cohésion sociale, ici peut-être plus qu'ailleurs, vous avez connu des difficultés, vous avez connu des souffrances même, la crise des chantiers navals, un chômage élevé, des problèmes liés à l'immigration, des quartiers défavorisés, les extrêmes qui gagnent du terrain, mais vous ne vous êtes jamais résigné. Vous avez choisi de prendre les problèmes à bras le corps pour changer le visage de votre ville, vous y avez mis tout votre c?ur, et depuis bientôt cinq ans, sous l'impulsion d'Hubert FALCO, Toulon se transforme, Toulon retrouve sa fierté, Toulon renaît. Ce changement, qui est en marche, c'est celui de la vieille ville, que je me réjouis d'arpenter tout à l'heure, avec l'aide de l'Etat et de l'ANRU, le quartier va retrouver ses couleurs, le programme de rénovation est l'un des plus importants de France. Il concerne près de 6.000 logements, mobilise plus de cinquante millions d'euros. C'est une main tendue à tous ses habitants pour leur offrir des conditions de logement décentes et pour encourager la mixité sociale. C'est aussi un geste fort pour faire de Toulon l'un des pôles les plus dynamiques de la région PACA. Hubert FALCO est pleinement mobilisé pour que ce quartier soit classé en zone franche urbaine, l'examen doit avoir lieu très prochainement, mais l'investissement des élus, que je salue ici, est bien sûr un atout majeur pour le succès de ce projet.
Le renouveau à Toulon, c'est aussi le pari de l'innovation. Chefs d'entreprise, élus, chercheurs, vous avez compris que lorsqu'on se rassemble, on peut faire de grandes choses. Vous avez aussi compris que la meilleure solution pour créer des emplois et de l'activité, c'est d'avoir une longueur d'avance. Et c'est ce que vous avez fait en créant le pôle de compétitivité à vocation mondiale, consacré à la mer ; vous pouvez être fiers de ce projet qui représente un formidable espoir pour toute votre ville. Aujourd'hui, vos efforts portent leurs fruits. Le chômage baisse, plus de 6 % en moins en 2005 dans le département, plus de 7 % en moins en ce qui concerne le chômage des jeunes, surtout, Toulon retrouve son souffle.
Je suis aussi venu vous parler de l'ambition du gouvernement pour la France. Cette ambition, elle se fonde sur un double constat : aujourd'hui, dans notre pays, il y a des choses qui marchent, et nous le savons tous, il y a un chômage qui baisse, il y a des entreprises qui se créent, il y a un moral des ménages qui s'améliore, tout cela nous montre que les lignes bougent, que la France est un pays dynamique, et qu'elle a tous les atouts pour se moderniser. Mais il y a aussi une croissance qu'il faut soutenir, si nous voulons rester dans le peloton de tête, il y a aussi beaucoup de préoccupations, beaucoup d'inquiétudes face à l'avenir. Cette inquiétude, c'est d'abord celle des jeunes, qui ont souvent du mal à trouver un emploi stable, et qui sont confrontés à des années de précarité avant de pouvoir démarrer dans la vie. Mais c'est aussi - je ne l'ignore pas - celle de leurs parents, celle de leurs grands-parents et celle de notre société toute entière. Face à cette responsabilité, il n'est pas question de tergiverser. Face à cette responsabilité, il faut agir. Nous devons le faire en refusant les querelles idéologiques, parce qu'aujourd'hui, l'urgence, c'est la situation que vivent les jeunes de notre pays. Nous devons le faire en apportant des réponses à chaque difficulté qu'ils rencontrent.
Parmi ces difficultés, il y a trois obstacles que nous voulons lever. Le premier obstacle, c'est le manque d'expérience, aujourd'hui, lorsqu'un jeune se présente à un entretien d'embauche, on lui demande systématiquement ce qu'il a comme expérience, et vous le savez bien, quand on a 20 ans et qu'on vient de terminer ses études, de l'expérience, on en a rarement. La solution que nous apportons, c'est de valoriser les stages qui sont un moment privilégié pour acquérir une première expérience professionnelle, cela veut dire les rémunérer dès la fin du troisième mois, cela veut dire aussi mieux les reconnaître dans les cursus universitaires et professionnels. Le deuxième obstacle, c'est une préparation insuffisante à la vie professionnelle, aujourd'hui, certains jeunes peinent à trouver un emploi parce qu'ils ne connaissent pas assez le monde de l'entreprise, parce qu'ils ne maîtrisent pas un métier. La solution que nous apportons, et elle est confortée par l'expérience, c'est d'encourager l'alternance. Les jeunes de l'équipe de France des métiers, que j'ai rencontrés cette semaine, en sont la meilleure preuve. C'est une voie royale pour accéder à l'emploi ; qu'il s'agisse de contrats d'apprentissage ou de contrats de professionnalisation, notre objectif, c'est de développer l'alternance dans les grandes entreprises. Le troisième obstacle, ce sont les réticences mêmes des entreprises, trop souvent, les entreprises hésitent à recruter des jeunes parce qu'elles ne leur font pas suffisamment confiance ou parce qu'elles ne disposent pas des outils adaptés pour les embaucher facilement. La solution que nous apportons, c'est un contrat de travail spécifique pour les jeunes, le Contrat Première Embauche. C'est un vrai contrat qui leur donne droit à une rémunération normale, et qui leur permet d'accéder rapidement à un emploi à durée indéterminée. C'est un contrat qui répond à leurs préoccupations, en leur offrant un accès facilité au crédit et au logement ; pour accorder un prêt, une banque ne fera aucune différence entre un jeune en Contrat Première Embauche et un jeune en contrat à durée indéterminée classique, les jeunes en Contrat Première Embauche pourront également bénéficier du système Loca-Pass, et notamment de l'avance de la caution pour les locataires. C'est en prenant en compte ces réalités quotidiennes, auxquelles se heurtent les plus jeunes, que nous avons défini nos réponses, c'est en partant de leurs préoccupations, avec pragmatisme, que nous avons voulu avancer. Vous le voyez, ce que nous voulons proposer, c'est plus de chances sur le marché du travail, et plus de sécurité dans l'emploi.
Mesdames, Messieurs, chers amis, nous sommes aujourd'hui confrontés à un défi, le chômage des jeunes, le chômage, encore trop fort dans notre pays. C'est en conjuguant nos efforts, c'est en nous rassemblant que nous pourrons relever ce défi, et le rassemblement, vous tous, ici, réunis, vous savez mieux que personne ce que cela veut dire. Vous avez su vous regrouper au sein de la communauté d'agglomération Toulon/Provence/Méditerranée. Vous avez su mettre en commun votre énergie, vos talents, vos compétences, pour porter des projets ambitieux dans le cadre du pôle de la mer. Je compte sur votre mobilisation, je compte sur votre dynamisme pour qu'ensemble, nous marquions des points dans la bataille pour l'emploi. Dans notre histoire, nous avons connu, ô combien, des rendez-vous difficiles, et à chaque étape, nous avons su trouver en nous les solutions pour continuer d'avancer, fidèles à l'esprit de notre pays, fidèles à l'idée que nous nous faisons de notre communauté nationale, l'unité, le rassemblement, l'action. Voilà les clefs qui vont nous permettre, au cours des prochaines semaines, des prochains mois, des prochaines années, de donner le meilleur de nous-mêmes. Nous le savons, il y a quelque chose à cet instant qui nous dépasse tous, quelque chose qui a trait à notre unité nationale, quelque chose qui a trait à notre ambition nationale, quelque chose qui a trait à la place de notre pays dans le monde, à cet instant, nous n'avons pas le droit de nous livrer à des calculs, à des pensées ou à des arrières pensées médiocres. A cet instant, il faut puiser dans le meilleur, dans le plus profond, dans le plus fort de notre énergie nationale pour être à la hauteur des enjeux d'aujourd'hui. Et ici, à Toulon, je veux vous dire à chacune et chacun ma confiance, parce que ce chemin, c'est le chemin que vous avez emprunté année après année, et vous savez qu'il est le seul à pouvoir nous conduire dans la voie du succès. Je vous remercie.Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 14 février 2006