Texte intégral
1 . Tout d'abord, je veux remercier CB Richard Ellis de m'avoir invité à intervenir devant vous. Cela traduit un changement fondamental : en gérant activement son patrimoine immobilier, et en réalisant 630 millions d'euros de cessions en 2005, l'État est désormais un acteur du marché. Et il se doit d'entretenir une relation de dialogue avec les professionnels.
2. Ensuite, je veux souligner devant vous l'importance que j'attache au sujet :
? La gestion immobilière est pour moi un chantier emblématique de l'action que le Gouvernement conduit en matière de réforme de l'État.
? Le Président de la République a pris des décisions sur le sujet le 6 janvier dernier lors de ses voeux aux agents publics. J'ai présenté hier une communication au conseil des ministres sur leur mise en oeuvre.
3. Le but est de respecter les trois exigences que j'ai décidé de me fixer en matière de réforme de l'État : apporter une meilleure qualité du service public aux usagers ; faire un usage optimal des impôts payés par les contribuables ; améliorer le cadre de travail des agents, car rien ne se fera sans eux.
4. En matière d'immobilier, je considère que cela implique d'évoluer vers un parc moins coûteux, plus adapté, mieux entretenu. Cela veut dire aussi valoriser au maximum les biens dont l'État n'a pas l'usage, et mobiliser les réserves foncières, lorsque c'est possible, afin de contribuer à la production de logements.
5. Je voudrais, pour le public averti que vous formez, faire un point d'étape de la démarche de modernisation conduite par le Gouvernement. Je vais vous :
- rappeler, très brièvement, la situation d'où nous sommes partis ;
- décrire l'acquis réalisé par le Gouvernement, jusqu'à ce jour ;
- annoncer les étapes nouvelles que nous allons franchir en 2006 et 2007.
I - Il y a trois ans, le Gouvernement est parti d'une situation d'immobilisme
En matière de gestion immobilière, l'État était resté à l'écart du mouvement de modernisation qu'ont connu depuis 15 ans les entreprises, comme France Telecom, ou des administrations étrangères, comme en Allemagne.
Premier constat : l'État vendait peu. Mis à part quelques opérations exceptionnelles, portant en particulier sur des emprises militaires, les cessions s'élevaient à quelques dizaines de millions d'euros par an.
Deuxième constat : l'État ne disposait pas des outils de gestion nécessaires pour gérer son parc immobilier. En particulier, le tableau général des propriétés de l'État, qui recense et évalue ses biens, n'était pas tenu à jour. Certains immeubles n'étaient même pas recensés.
Troisième constat : les ministères n'étaient pas incités à vendre , car les règles de retour pour ceux qui libéraient les immeubles, fixées par la circulaire Cresson, n'étaient pas assez lisibles. Les administrations préféraient rester sur les lieux, et s'y comporter en propriétaires.
Conséquence : l'État faisait l'objet de critiques permanentes sur sa gestion immobilière, de la part du Parlement, de la Cour des comptes, mais aussi des professionnels du secteur. Cette situation nuisait à son image.
II - À partir de 2003, le Gouvernement a commencé à rattraper le retard
Deux facteurs lui ont permis d'enclencher un mouvement de modernisation :
1er facteur : à partir de 2003, dans le cadre de la maîtrise des déficits budgétaires, le Gouvernement décide de se fixer des objectifs annuels de produits de cessions immobilières et de programmer les opérations les plus nécessaires, pour réduire la dépense immobilière de l'État. Cette démarche volontariste a permis de commencer à faire respirer le parc, et à engager la modernisation du dispositif. Deux éléments ont favorisé les cessions :
* 1er élément : le déclassement des bureaux de l'État en 2004. Jusque là, les bureaux de l'État, en tant qu'éléments du domaine public, ne pouvaient pas être vendus sans avoir été au préalable libérés et déclassés, ce qui faisait obstacle à leur commercialisation ;
* 2nd élément : la création de la mission interministérielle de valorisation du patrimoine immobilier de l'État, chargée de piloter les cessions et professionnaliser la gestion des immeubles de l'État.
2nd facteur : le patrimoine immobilier de l'État a été recensé en 2004, dans une logique de transparence financière proche de la comptabilité privée, afin de préparer le premier bilan de l'État, conformément à la LOLF. Ce travail a été étendu en 2005 aux collectivités d'outre-mer et à l'étranger.
En bon propriétaire, l'État actualise annuellement l'inventaire de ses immeubles. Je vous annonce que leur valeur au 1er janvier 2006 s'élève à 38 milliards d'euros.
Les gestionnaires immobiliers des ministères peuvent accéder en ligne au tableau général des propriétés de l'État et l'alimenter. Chaque année 20 % des évaluations sont réexaminées par France Domaine.
Malgré tout, le résultat de ces mesures est resté en deçà des attentes.
En dépit d'une forte montée en puissance, avec 170 millions d'euros de produits de cessions en 2004, l'État n'a pas atteint les objectifs fixés.
A l'été 2005, le rapport, critique mais largement justifié, établi par Georges Tron, dans le cadre de la mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale, a identifié plusieurs dysfonctionnements majeurs.
III - Dans ces conditions, j'ai décidé de prendre les choses en main
Dès l'instant où le Premier ministre m'a confié le portefeuille de la réforme de l'État, en juin dernier, j'ai pris la décision de changer de braquet . Durant plusieurs mois, j'ai donc réuni tous les 15 jours les responsables administratifs concernés pour concevoir et appliquer un plan d'action opérationnel. Je me suis donné trois priorités.
1. Première priorité : passer à la vitesse supérieure sur la mise en oeuvre des programmes de cessions . J'ai tout fait pour atteindre le montant de 600 millions d'euros de produits 2005 sur lequel je m'étais engagé devant les parlementaires. Résultat : l'État a atteint pour la première fois l'objectif, et l'a dépassé, avec un total de 630 millions d'euros. Ce succès traduit deux mouvements de fond :
1er mouvement : l'État s'est professionnalisé, et a conduit des cessions majeures aux standards du marché, y compris pour des opérations de niveau international. France Domaine a ainsi vendu l'immeuble de la rue du bac pour 165 millions d'euros, soit largement plus que les anticipations des professionnels, naturellement consultés vu l'importance de la cession. Le principe est l'appel à la concurrence le plus large et transparent.
- conformément aux recommandations des acteurs du marché, les opérations sont annoncées dans la presse. Les dossiers techniques élaborés avec des professionnels et les conditions de vente sont accessibles à tous sur internet. Le projet d'acte y figure, la traduction anglaise est jointe si besoin. Afin d'améliorer l'accès, j'ai décidé dans les prochaines semaines de moderniser l'ergonomie du site ;
- j'ai donné instruction aux agents, dont les noms et coordonnées figurent sur tous les documents, de faire preuve d'une disponibilité totale. Une visite a été organisée de nuit dans l'immeuble de la rue du bac, compte tenu des contraintes d'un candidat ;
- les offres sont sélectionnées sur la base du critère financier. Une caution permet de garantir objectivement la solidité financière du candidat. Tout se passe dans une transparence totale : j'ai créé une commission avec un inspecteur général des finances et des magistrats du Conseil d'État et de la cour des comptes, qui ont accès à tout, et dont la mission est de garantir la régularité des procédures ;
- enfin, mon principe est que nous devons avoir une relation de confiance exemplaire avec les investisseurs : l'État ne peut pas, sous prétexte d'informer le marché, se permettre de faire fuiter le nom d'un acquéreur ou le montant d'une transaction tant que tout n'est pas signé. Après signature, en revanche, tout est évidemment public.
2e mouvement : la modernisation du parc est engagée . Les cessions de l'État portent sur des immeubles libérés par les administrations, et elles permettent de réduire la dépense immobilière. Deux exemples :
- la cession des immeubles parisiens occupés par les douanes (bac et Tour des Dames) et le transfert des services à Montreuil, dans des locaux plus modernes, permet une économie de 30 % pour l'État ;
- nous avons tiré la conséquence logique de l'achèvement du transfert de l'école nationale d'administration à Strasbourg, en vendant son siège parisien de la rue de l'Université, pour 46,5 millions d'euros.
2. Deuxième priorité : donner à la gestion immobilière de l'État un cadre financier adapté : j'ai pris deux mesures qui figurent dans la loi de finances pour 2006 :
1re mesure ; j'ai adapté le cadre budgétaire en créant le compte d'affectation spéciale de la gestion immobilière de l'État. Le but est de retracer en toute transparence les opérations de l'État, en faisant figurer en recettes les produits des cessions et en dépense leur affectation :
15 % au moins des produits de chaque cession sont versés au budget général, pour contribuer au désendettement ;
Le ministère qui a libéré l'immeuble bénéficie, pour ses relogements et ses dépenses immobilières, d'un retour de 85 %, qui est toutefois ramené à 50 % quand l'immeuble est inoccupé.
2nde mesure : je suis en train d'expérimenter un système de loyers , sur 178 immeubles dans trois ministères (affaires étrangères ; économie, finances, industrie ; justice). Les gestionnaires sont des locataires :
- ils reçoivent une facture au titre des immeubles qu'ils occupent et doivent la payer sur une dotation reçue en début d'année ;
- les économies qu'ils réalisent leur restent acquises pour un certain temps ; les dépenses supplémentaires sont à leur charge.
3. Troisième priorité : je crée, au sein de l'administration domaniale, un opérateur immobilier performant , capable également de gérer le compte d'affectation spéciale et les loyers budgétaires. Afin de symboliser ces changements, elle a pris le nom de France Domaine le 1er février dernier.
1er changement : France Domaine va sortir d'une fonction de notaire pour devenir gestionnaire du parc, et se positionner en initiative à l'égard des ministères. Afin de lancer le mouvement, je lui ai donné pour objectif de monter cent opérations en 2006 sur tout le territoire.
2e changement : j'ai décidé d'ouvrir davantage France Domaine aux expertises privées pour qu'il assume au mieux sa mission. Cela implique :
- le recours, déjà assez large, à des experts externes pour les prestations techniques : conseil juridique, arpentage par un géomètre ;
- l'appel à des conseils pour conduire certaines ventes , sur des biens atypiques au regard du parc de l'État. C'est le cas par exemple de deux superbes villas, dont l'État est propriétaire au Cap d'Ail ;
des recrutements de professionnels . Les premiers sont en cours. Une trentaine de postes de contractuels sera ouverte dès 2007 ;
- Enfin, j'ai décidé que France Domaine s'engagerait à partir du 1er janvier 2007 dans une démarche de certification de qualité.
3e changement : j'ai décidé que France Domaine serait transféré de la direction générale des impôts à celle de la comptabilité publique . Le mouvement est en cours et sera achevé au 1er janvier prochain :
- en administration centrale, à Paris, France Domaine est identifié comme un service sous la responsabilité du directeur général ;
- dans les départements, sous l'autorité du préfet, le trésorier-payeur général sera responsable de France Domaine, et le fera bénéficier de ses relations de travail avec les autres ministères, et les élus.
IV En 2006, mon objectif est de donner à l'État une stratégie immobilière
1. J'ai décidé en 2006 de continuer la politique des cessions , pour alimenter la nécessaire respiration du parc. Le Parlement m'a fixé un objectif de 480 millions d'euros pour l'État, ce qui représente un effort maintenu par rapport à l'année dernière, abstraction faite de l'opération exceptionnelle de la rue du bac. Mais les choses se présentent de manière différente sur trois points.
1re différence : le mouvement de modernisation commence à diffuser : les recettes de 2005 étaient fortement concentrées sur quelques grosses cessions (environ 70 % sur les 30 plus importantes), alors que les produits attendus en 2006 sont bien plus répartis sur tout le territoire.
2e différence : la valorisation du patrimoine immobilier de l'État et la politique du logement ont été mises en cohérence .Les deux démarches s'appuient sur une gestion dynamique des immeubles de l'État, et passent par une accélération des opérations. Les ventes de terrain pour la production de logement constitueront une part significative des cessions en 2006.
Le Gouvernement a pris des mesures destinées à faciliter la vente du foncier détenu par l'État : il peut céder les terrains du ministère de la défense, en confiant, sans se dégager de sa responsabilité, la dépollution éventuelle à l'acquéreur ; il peut également accorder une décote en faveur du logement social, pouvant aller jusqu'à 35 % de la valeur vénale du bien cédé dans les zones les plus tendues.
Dans le cadre du projet de loi portant engagement national pour le logement, le Gouvernement va rattacher le droit de préemption à celui de priorité, dans le cas des biens cédés par l'État, ce qui permettra de gagner deux mois en fin de procédure de vente.
3e différence : l'effort porte aussi sur les biens de Réseau ferré de France dont il n'a pas besoin pour sa mission ferroviaire. Les cessions se montent à une centaine de millions d'euros par an depuis plusieurs années. J'ai décidé d'accélérer la valorisation de ce patrimoine, qui inclut une réserve foncière importante :
J'ai décidé, dans le cadre de la loi de finances pour 2006, que ce patrimoine serait transféré à une foncière détenue par l'État ;
J'ai fixé un objectif pour 2006 de 350 millions d'euros de recettes, budgétaires qui reviendront en cours d'exercice au budget de l'État ;
Une masse importante de biens sera mise sur le marché dans des délais courts, selon des procédures adaptées à chaque type d'actifs. Une partie sera destinée à produire des logements ;
Si l'opération est un succès, ce type de dispositif pourrait permettre d'accélérer la valorisation des biensd'autres établissements publics.
2. Mais vendre n'est pas un objectif en soi. Le but n'est surtout pas d'en rester à une logique de court terme, et de brader notre patrimoine. J'ai décidé de donner à l'État des instruments pour gérer son parc immobilier dans la durée. J'ai présenté hier le dispositif en conseil des ministres.
1re mesure : les ministères sont en train d'établir, pour le 31 mai 2006, les schémas pluriannuels de stratégie immobilière de leurs administrations centrales . Ces documents feront l'objet de discussions au sein du Gouvernement, pour qu'ils portent une vision de l'avenir de l'État :
- ils comporteront un diagnostic intégrant des données de gestion (comme des ratios d'occupation ou de coûts) et des orientations sur cinq ans avec des objectifs quantifiés (d'économies par exemple) ;
- sur la base de ce cadre stratégique, l'État sera en mesure de restructurer ses implantations parisiennes, en utilisant tous les outils, par exemple des sociétés foncières sur les parties du parc qu'il va quitter à l'échéance de deux ou trois ans. Pas question en revanche de céder en bloc des biens dans lesquels il devra rester pendant des années : les loyers finissent par effacer le gain réalisé.
- l'exercice des schémas sera étendu aux services déconcentrés . Les établissements publics, dont le parc immobilier est considérable et mal répertorié, feront aussi en 2006 l'objet d'un recensement.
2e mesure : j'ai décidé de réunir le conseil de surveillance de l'immobilier de l'État dans les prochaines semaines . Dans un souci de transparence, et pour recueillir les meilleurs avis, je le constituerai de parlementaires, de représentants des diverses professions, du responsable du parc immobilier d'une administration étrangère.
Le conseil examinera l'état d'avancement de la gestion immobilière de l'État, et il débattra des nouvelles orientations ;
J'ai choisi Jean-Pierre LOURDIN, que vous connaissez, pour assurer son secrétariat général. Dans le but d'assurer une bonne articulation avec les acteurs opérationnels, il animera en parallèle les travaux du conseil d'orientation de la politique immobilière de l'État, qui réunit les responsables immobiliers des ministères.
V En 2007, nous allons engager une nouvelle étape
1. La décision du Président de la République le 6 janvier 2006 de confier la propriété des immeubles de l'État à France Domaine est un pas essentiel. En la mettant en oeuvre, nous allons identifier la fonction de propriétaire au sein de l'État, et mettre en place un partage clair des responsabilités avec les services occupants. Nous rompons avec le système du passé, dans lequel personne n'était vraiment responsable, entre l'administration domaniale qui se contentait de jouer les notaires, et les ministères qui n'étaient absolument pas responsabilisés. J'ai présenté au conseil des ministres d'hier l'architecture cible, qui comportera trois nouveautés fondamentales :
1re nouveauté : France Domaine incarne l'État propriétaire . Les droits d'occupation des ministères ne reposeront plus sur l'affectation, qui leur conférait une sorte de quasi-propriété, mais sur des conventions qu'ils négocieront et concluront avec France Domaine.
2e nouveauté : l'occupation des immeubles de l'État sera désormais inscrite dans le cadre de véritables contrats de bail , à part le cas particulier des infrastructures, des routes par exemple, ou de biens spécifiques, comme le château de Versailles :
- les conventions seront à durée limitée, et revues à échéance régulière. Cela permettra de garantir la bonne occupation du parc, en assurant une respiration permanente, et en mettant sur le marché au fur et à mesure les biens qui deviennent inutiles et inadaptés.
- elles donneront désormais lieu au paiement de loyers, dans le prolongement du système que je suis en train d'expérimenter.
3e nouveauté : France Domaine sera votre interlocuteur privilégié . En tant que propriétaire, il sera responsable de toutes les étapes des procédures de cession, et associé systématiquement aux acquisitions.
4e nouveauté : l'organisation de l'entretien des immeubles de l'État sera modernisée . C'est un enjeu essentiel, car il s'agit d'améliorer l'accueil des usagers et les conditions de travail des agents, et d'éviter des travaux de reconstruction coûteux. J'ai lancé, avec le Ministre de l'Equipement, une mission technique pour faire un diagnostic et des propositions opérationnelles, y compris en matière de financement.
2. Après un premier bilan des expérimentations en cours, ce nouveau dispositif sera appliqué à compter du 1er janvier 2007 aux administrations centrales.
La modernisation accélérée de la gestion immobilière de l'État participe du chantier d'ensemble de la modernisation de l'État.
Si je reprends les termes de vos débats de ce matin, mon objectif est de mettre l'État en mesure de ne pas rester en arrière, mais de s'adapter et de se moderniser en permanence, afin d'accomplir au mieux sa mission, qui est de rendre le meilleur service public au meilleur coût.
Source http://www.minefi.gouv.fr, le 24 février 2006
2. Ensuite, je veux souligner devant vous l'importance que j'attache au sujet :
? La gestion immobilière est pour moi un chantier emblématique de l'action que le Gouvernement conduit en matière de réforme de l'État.
? Le Président de la République a pris des décisions sur le sujet le 6 janvier dernier lors de ses voeux aux agents publics. J'ai présenté hier une communication au conseil des ministres sur leur mise en oeuvre.
3. Le but est de respecter les trois exigences que j'ai décidé de me fixer en matière de réforme de l'État : apporter une meilleure qualité du service public aux usagers ; faire un usage optimal des impôts payés par les contribuables ; améliorer le cadre de travail des agents, car rien ne se fera sans eux.
4. En matière d'immobilier, je considère que cela implique d'évoluer vers un parc moins coûteux, plus adapté, mieux entretenu. Cela veut dire aussi valoriser au maximum les biens dont l'État n'a pas l'usage, et mobiliser les réserves foncières, lorsque c'est possible, afin de contribuer à la production de logements.
5. Je voudrais, pour le public averti que vous formez, faire un point d'étape de la démarche de modernisation conduite par le Gouvernement. Je vais vous :
- rappeler, très brièvement, la situation d'où nous sommes partis ;
- décrire l'acquis réalisé par le Gouvernement, jusqu'à ce jour ;
- annoncer les étapes nouvelles que nous allons franchir en 2006 et 2007.
I - Il y a trois ans, le Gouvernement est parti d'une situation d'immobilisme
En matière de gestion immobilière, l'État était resté à l'écart du mouvement de modernisation qu'ont connu depuis 15 ans les entreprises, comme France Telecom, ou des administrations étrangères, comme en Allemagne.
Premier constat : l'État vendait peu. Mis à part quelques opérations exceptionnelles, portant en particulier sur des emprises militaires, les cessions s'élevaient à quelques dizaines de millions d'euros par an.
Deuxième constat : l'État ne disposait pas des outils de gestion nécessaires pour gérer son parc immobilier. En particulier, le tableau général des propriétés de l'État, qui recense et évalue ses biens, n'était pas tenu à jour. Certains immeubles n'étaient même pas recensés.
Troisième constat : les ministères n'étaient pas incités à vendre , car les règles de retour pour ceux qui libéraient les immeubles, fixées par la circulaire Cresson, n'étaient pas assez lisibles. Les administrations préféraient rester sur les lieux, et s'y comporter en propriétaires.
Conséquence : l'État faisait l'objet de critiques permanentes sur sa gestion immobilière, de la part du Parlement, de la Cour des comptes, mais aussi des professionnels du secteur. Cette situation nuisait à son image.
II - À partir de 2003, le Gouvernement a commencé à rattraper le retard
Deux facteurs lui ont permis d'enclencher un mouvement de modernisation :
1er facteur : à partir de 2003, dans le cadre de la maîtrise des déficits budgétaires, le Gouvernement décide de se fixer des objectifs annuels de produits de cessions immobilières et de programmer les opérations les plus nécessaires, pour réduire la dépense immobilière de l'État. Cette démarche volontariste a permis de commencer à faire respirer le parc, et à engager la modernisation du dispositif. Deux éléments ont favorisé les cessions :
* 1er élément : le déclassement des bureaux de l'État en 2004. Jusque là, les bureaux de l'État, en tant qu'éléments du domaine public, ne pouvaient pas être vendus sans avoir été au préalable libérés et déclassés, ce qui faisait obstacle à leur commercialisation ;
* 2nd élément : la création de la mission interministérielle de valorisation du patrimoine immobilier de l'État, chargée de piloter les cessions et professionnaliser la gestion des immeubles de l'État.
2nd facteur : le patrimoine immobilier de l'État a été recensé en 2004, dans une logique de transparence financière proche de la comptabilité privée, afin de préparer le premier bilan de l'État, conformément à la LOLF. Ce travail a été étendu en 2005 aux collectivités d'outre-mer et à l'étranger.
En bon propriétaire, l'État actualise annuellement l'inventaire de ses immeubles. Je vous annonce que leur valeur au 1er janvier 2006 s'élève à 38 milliards d'euros.
Les gestionnaires immobiliers des ministères peuvent accéder en ligne au tableau général des propriétés de l'État et l'alimenter. Chaque année 20 % des évaluations sont réexaminées par France Domaine.
Malgré tout, le résultat de ces mesures est resté en deçà des attentes.
En dépit d'une forte montée en puissance, avec 170 millions d'euros de produits de cessions en 2004, l'État n'a pas atteint les objectifs fixés.
A l'été 2005, le rapport, critique mais largement justifié, établi par Georges Tron, dans le cadre de la mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale, a identifié plusieurs dysfonctionnements majeurs.
III - Dans ces conditions, j'ai décidé de prendre les choses en main
Dès l'instant où le Premier ministre m'a confié le portefeuille de la réforme de l'État, en juin dernier, j'ai pris la décision de changer de braquet . Durant plusieurs mois, j'ai donc réuni tous les 15 jours les responsables administratifs concernés pour concevoir et appliquer un plan d'action opérationnel. Je me suis donné trois priorités.
1. Première priorité : passer à la vitesse supérieure sur la mise en oeuvre des programmes de cessions . J'ai tout fait pour atteindre le montant de 600 millions d'euros de produits 2005 sur lequel je m'étais engagé devant les parlementaires. Résultat : l'État a atteint pour la première fois l'objectif, et l'a dépassé, avec un total de 630 millions d'euros. Ce succès traduit deux mouvements de fond :
1er mouvement : l'État s'est professionnalisé, et a conduit des cessions majeures aux standards du marché, y compris pour des opérations de niveau international. France Domaine a ainsi vendu l'immeuble de la rue du bac pour 165 millions d'euros, soit largement plus que les anticipations des professionnels, naturellement consultés vu l'importance de la cession. Le principe est l'appel à la concurrence le plus large et transparent.
- conformément aux recommandations des acteurs du marché, les opérations sont annoncées dans la presse. Les dossiers techniques élaborés avec des professionnels et les conditions de vente sont accessibles à tous sur internet. Le projet d'acte y figure, la traduction anglaise est jointe si besoin. Afin d'améliorer l'accès, j'ai décidé dans les prochaines semaines de moderniser l'ergonomie du site ;
- j'ai donné instruction aux agents, dont les noms et coordonnées figurent sur tous les documents, de faire preuve d'une disponibilité totale. Une visite a été organisée de nuit dans l'immeuble de la rue du bac, compte tenu des contraintes d'un candidat ;
- les offres sont sélectionnées sur la base du critère financier. Une caution permet de garantir objectivement la solidité financière du candidat. Tout se passe dans une transparence totale : j'ai créé une commission avec un inspecteur général des finances et des magistrats du Conseil d'État et de la cour des comptes, qui ont accès à tout, et dont la mission est de garantir la régularité des procédures ;
- enfin, mon principe est que nous devons avoir une relation de confiance exemplaire avec les investisseurs : l'État ne peut pas, sous prétexte d'informer le marché, se permettre de faire fuiter le nom d'un acquéreur ou le montant d'une transaction tant que tout n'est pas signé. Après signature, en revanche, tout est évidemment public.
2e mouvement : la modernisation du parc est engagée . Les cessions de l'État portent sur des immeubles libérés par les administrations, et elles permettent de réduire la dépense immobilière. Deux exemples :
- la cession des immeubles parisiens occupés par les douanes (bac et Tour des Dames) et le transfert des services à Montreuil, dans des locaux plus modernes, permet une économie de 30 % pour l'État ;
- nous avons tiré la conséquence logique de l'achèvement du transfert de l'école nationale d'administration à Strasbourg, en vendant son siège parisien de la rue de l'Université, pour 46,5 millions d'euros.
2. Deuxième priorité : donner à la gestion immobilière de l'État un cadre financier adapté : j'ai pris deux mesures qui figurent dans la loi de finances pour 2006 :
1re mesure ; j'ai adapté le cadre budgétaire en créant le compte d'affectation spéciale de la gestion immobilière de l'État. Le but est de retracer en toute transparence les opérations de l'État, en faisant figurer en recettes les produits des cessions et en dépense leur affectation :
15 % au moins des produits de chaque cession sont versés au budget général, pour contribuer au désendettement ;
Le ministère qui a libéré l'immeuble bénéficie, pour ses relogements et ses dépenses immobilières, d'un retour de 85 %, qui est toutefois ramené à 50 % quand l'immeuble est inoccupé.
2nde mesure : je suis en train d'expérimenter un système de loyers , sur 178 immeubles dans trois ministères (affaires étrangères ; économie, finances, industrie ; justice). Les gestionnaires sont des locataires :
- ils reçoivent une facture au titre des immeubles qu'ils occupent et doivent la payer sur une dotation reçue en début d'année ;
- les économies qu'ils réalisent leur restent acquises pour un certain temps ; les dépenses supplémentaires sont à leur charge.
3. Troisième priorité : je crée, au sein de l'administration domaniale, un opérateur immobilier performant , capable également de gérer le compte d'affectation spéciale et les loyers budgétaires. Afin de symboliser ces changements, elle a pris le nom de France Domaine le 1er février dernier.
1er changement : France Domaine va sortir d'une fonction de notaire pour devenir gestionnaire du parc, et se positionner en initiative à l'égard des ministères. Afin de lancer le mouvement, je lui ai donné pour objectif de monter cent opérations en 2006 sur tout le territoire.
2e changement : j'ai décidé d'ouvrir davantage France Domaine aux expertises privées pour qu'il assume au mieux sa mission. Cela implique :
- le recours, déjà assez large, à des experts externes pour les prestations techniques : conseil juridique, arpentage par un géomètre ;
- l'appel à des conseils pour conduire certaines ventes , sur des biens atypiques au regard du parc de l'État. C'est le cas par exemple de deux superbes villas, dont l'État est propriétaire au Cap d'Ail ;
des recrutements de professionnels . Les premiers sont en cours. Une trentaine de postes de contractuels sera ouverte dès 2007 ;
- Enfin, j'ai décidé que France Domaine s'engagerait à partir du 1er janvier 2007 dans une démarche de certification de qualité.
3e changement : j'ai décidé que France Domaine serait transféré de la direction générale des impôts à celle de la comptabilité publique . Le mouvement est en cours et sera achevé au 1er janvier prochain :
- en administration centrale, à Paris, France Domaine est identifié comme un service sous la responsabilité du directeur général ;
- dans les départements, sous l'autorité du préfet, le trésorier-payeur général sera responsable de France Domaine, et le fera bénéficier de ses relations de travail avec les autres ministères, et les élus.
IV En 2006, mon objectif est de donner à l'État une stratégie immobilière
1. J'ai décidé en 2006 de continuer la politique des cessions , pour alimenter la nécessaire respiration du parc. Le Parlement m'a fixé un objectif de 480 millions d'euros pour l'État, ce qui représente un effort maintenu par rapport à l'année dernière, abstraction faite de l'opération exceptionnelle de la rue du bac. Mais les choses se présentent de manière différente sur trois points.
1re différence : le mouvement de modernisation commence à diffuser : les recettes de 2005 étaient fortement concentrées sur quelques grosses cessions (environ 70 % sur les 30 plus importantes), alors que les produits attendus en 2006 sont bien plus répartis sur tout le territoire.
2e différence : la valorisation du patrimoine immobilier de l'État et la politique du logement ont été mises en cohérence .Les deux démarches s'appuient sur une gestion dynamique des immeubles de l'État, et passent par une accélération des opérations. Les ventes de terrain pour la production de logement constitueront une part significative des cessions en 2006.
Le Gouvernement a pris des mesures destinées à faciliter la vente du foncier détenu par l'État : il peut céder les terrains du ministère de la défense, en confiant, sans se dégager de sa responsabilité, la dépollution éventuelle à l'acquéreur ; il peut également accorder une décote en faveur du logement social, pouvant aller jusqu'à 35 % de la valeur vénale du bien cédé dans les zones les plus tendues.
Dans le cadre du projet de loi portant engagement national pour le logement, le Gouvernement va rattacher le droit de préemption à celui de priorité, dans le cas des biens cédés par l'État, ce qui permettra de gagner deux mois en fin de procédure de vente.
3e différence : l'effort porte aussi sur les biens de Réseau ferré de France dont il n'a pas besoin pour sa mission ferroviaire. Les cessions se montent à une centaine de millions d'euros par an depuis plusieurs années. J'ai décidé d'accélérer la valorisation de ce patrimoine, qui inclut une réserve foncière importante :
J'ai décidé, dans le cadre de la loi de finances pour 2006, que ce patrimoine serait transféré à une foncière détenue par l'État ;
J'ai fixé un objectif pour 2006 de 350 millions d'euros de recettes, budgétaires qui reviendront en cours d'exercice au budget de l'État ;
Une masse importante de biens sera mise sur le marché dans des délais courts, selon des procédures adaptées à chaque type d'actifs. Une partie sera destinée à produire des logements ;
Si l'opération est un succès, ce type de dispositif pourrait permettre d'accélérer la valorisation des biensd'autres établissements publics.
2. Mais vendre n'est pas un objectif en soi. Le but n'est surtout pas d'en rester à une logique de court terme, et de brader notre patrimoine. J'ai décidé de donner à l'État des instruments pour gérer son parc immobilier dans la durée. J'ai présenté hier le dispositif en conseil des ministres.
1re mesure : les ministères sont en train d'établir, pour le 31 mai 2006, les schémas pluriannuels de stratégie immobilière de leurs administrations centrales . Ces documents feront l'objet de discussions au sein du Gouvernement, pour qu'ils portent une vision de l'avenir de l'État :
- ils comporteront un diagnostic intégrant des données de gestion (comme des ratios d'occupation ou de coûts) et des orientations sur cinq ans avec des objectifs quantifiés (d'économies par exemple) ;
- sur la base de ce cadre stratégique, l'État sera en mesure de restructurer ses implantations parisiennes, en utilisant tous les outils, par exemple des sociétés foncières sur les parties du parc qu'il va quitter à l'échéance de deux ou trois ans. Pas question en revanche de céder en bloc des biens dans lesquels il devra rester pendant des années : les loyers finissent par effacer le gain réalisé.
- l'exercice des schémas sera étendu aux services déconcentrés . Les établissements publics, dont le parc immobilier est considérable et mal répertorié, feront aussi en 2006 l'objet d'un recensement.
2e mesure : j'ai décidé de réunir le conseil de surveillance de l'immobilier de l'État dans les prochaines semaines . Dans un souci de transparence, et pour recueillir les meilleurs avis, je le constituerai de parlementaires, de représentants des diverses professions, du responsable du parc immobilier d'une administration étrangère.
Le conseil examinera l'état d'avancement de la gestion immobilière de l'État, et il débattra des nouvelles orientations ;
J'ai choisi Jean-Pierre LOURDIN, que vous connaissez, pour assurer son secrétariat général. Dans le but d'assurer une bonne articulation avec les acteurs opérationnels, il animera en parallèle les travaux du conseil d'orientation de la politique immobilière de l'État, qui réunit les responsables immobiliers des ministères.
V En 2007, nous allons engager une nouvelle étape
1. La décision du Président de la République le 6 janvier 2006 de confier la propriété des immeubles de l'État à France Domaine est un pas essentiel. En la mettant en oeuvre, nous allons identifier la fonction de propriétaire au sein de l'État, et mettre en place un partage clair des responsabilités avec les services occupants. Nous rompons avec le système du passé, dans lequel personne n'était vraiment responsable, entre l'administration domaniale qui se contentait de jouer les notaires, et les ministères qui n'étaient absolument pas responsabilisés. J'ai présenté au conseil des ministres d'hier l'architecture cible, qui comportera trois nouveautés fondamentales :
1re nouveauté : France Domaine incarne l'État propriétaire . Les droits d'occupation des ministères ne reposeront plus sur l'affectation, qui leur conférait une sorte de quasi-propriété, mais sur des conventions qu'ils négocieront et concluront avec France Domaine.
2e nouveauté : l'occupation des immeubles de l'État sera désormais inscrite dans le cadre de véritables contrats de bail , à part le cas particulier des infrastructures, des routes par exemple, ou de biens spécifiques, comme le château de Versailles :
- les conventions seront à durée limitée, et revues à échéance régulière. Cela permettra de garantir la bonne occupation du parc, en assurant une respiration permanente, et en mettant sur le marché au fur et à mesure les biens qui deviennent inutiles et inadaptés.
- elles donneront désormais lieu au paiement de loyers, dans le prolongement du système que je suis en train d'expérimenter.
3e nouveauté : France Domaine sera votre interlocuteur privilégié . En tant que propriétaire, il sera responsable de toutes les étapes des procédures de cession, et associé systématiquement aux acquisitions.
4e nouveauté : l'organisation de l'entretien des immeubles de l'État sera modernisée . C'est un enjeu essentiel, car il s'agit d'améliorer l'accueil des usagers et les conditions de travail des agents, et d'éviter des travaux de reconstruction coûteux. J'ai lancé, avec le Ministre de l'Equipement, une mission technique pour faire un diagnostic et des propositions opérationnelles, y compris en matière de financement.
2. Après un premier bilan des expérimentations en cours, ce nouveau dispositif sera appliqué à compter du 1er janvier 2007 aux administrations centrales.
La modernisation accélérée de la gestion immobilière de l'État participe du chantier d'ensemble de la modernisation de l'État.
Si je reprends les termes de vos débats de ce matin, mon objectif est de mettre l'État en mesure de ne pas rester en arrière, mais de s'adapter et de se moderniser en permanence, afin d'accomplir au mieux sa mission, qui est de rendre le meilleur service public au meilleur coût.
Source http://www.minefi.gouv.fr, le 24 février 2006