Texte intégral
Monsieur le Député-maire, Cher Serge Grouard,
Madame la Vice-Présidente du Conseil régional,
Monsieur le Président de la mission Val de Loire, Cher Jean-Claude Antonini,
Monsieur le Directeur de l'architecture et du patrimoine, Cher Michel Clément,
Monsieur le Préfet,
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
Je suis très heureux de vous retrouver ce matin, en tant que Ministre de la culture et de la communication mais également comme élu de notre région. Car mon expérience d'élu du Val de Loire, les nombreux témoignages que m'apportent mes multiples interlocuteurs et la connaissance personnelle que j'ai de cette région, me confortent chaque jour dans ma conviction que le patrimoine joue un rôle essentiel dans la société contemporaine. Le patrimoine n'est pas une valeur de nostalgie, il n'est pas une simple vénération du passé pour le passé, mais il est un lien identitaire nécessaire, un facteur de rapprochement, de cohésion entre les individus, les nations et les peuples, en particulier dans une époque marquée par la violence et la tentation communautaire. Le patrimoine est aussi, dans notre région, un facteur essentiel de développement économique, par les nombreuses activités qu'il génère en matière de tourisme mais il est également un facteur d'emploi culturel.
C'est bien cette conception dynamique du patrimoine que nous défendons ici, un patrimoine que nous devons préserver, mais pas figer, défendre mais pas pétrifier. Car cette « Loire aux sables d'or et aux verdiaux d'argent » que chantait Maurice Genevoix est aussi un bassin économique actif, une région très attractive du point de vue touristique et culturel, un lieu de vie magnifique pour tous les Ligériens. Cette circulation, ces échanges, en ont fait sa richesse tout au long de l'histoire, et il nous appartient aujourd'hui de faire vivre cet héritage.
Dès 1960, l'UNESCO lança, pour sauver les monuments de Haute-Egypte, un appel international auquel Malraux répondit au nom de la France. Il employa à cette occasion l'une de ces formules dont il avait le génie et qui me paraît encore résumer la portée de l'oeuvre de l'UNESCO qui nous réunit aujourd'hui : " la première civilisation mondiale revendique publiquement l'art mondial comme son indivisible héritage ". Encore convient-il aujourd'hui de faire la part de l'évolution de la notion de patrimoine, élargie, au-delà de l'art, au-delà de la culture, vers la nature, vers ce monde dont les hommes ne sont pas tout à fait " maîtres et possesseurs ", un monde qu'ils ont la charge et l'immense responsabilité de transmettre aux générations futures.
L'élargissement de la notion de patrimoine fut consacrée dès 1972 lorsque fut adoptée, dans le cadre de l'UNESCO, la convention concernant le patrimoine mondial, patrimoine culturel et naturel. Je rappelle qu'en anglais, le patrimoine se dit précisément en français, grâce à ce mot d'origine latine : Heritage.
Il ne me paraît pas inutile de rappeler, dans leur limpide simplicité, les termes mêmes de cette convention : " le patrimoine culturel et naturel fait partie des biens inestimables et irremplaçables non seulement de chaque nation mais de l'humanité tout entière ". Et de poursuivre : " on peut reconnaître, en raison de leurs remarquables qualités, une valeur universelle exceptionnelle à certains des éléments de ce patrimoine qui, à ce titre, méritent d'être tout spécialement protégés contre les dangers croissants qui les menacent ". La convention a précisément pour objet de définir les critères et les procédures d'établissement de la Liste du patrimoine mondial destinée à recenser ces biens qui sont des biens communs de l'humanité, " biens culturels et naturels considérés comme étant de valeur universelle exceptionnelle ".
Le 30 novembre 2000, il y a un peu plus de cinq ans, le Val de Loire a donc été inscrit sur cette liste prestigieuse de ce patrimoine mondial de l'UNESCO, consacrant officiellement l'exceptionnelle beauté et richesse de son patrimoine monumental comme de son patrimoine naturel, se substituant à celle du seul château de Chambord, couronnant ainsi les efforts réalisés par l'ensemble des acteurs de notre région, tant en matière de patrimoine culturel, que de patrimoine naturel - avec la création du parc naturel régional Loire-Anjou-Touraine - et de la gestion du fleuve - avec le plan Loire grandeur nature.
Vous avez raison, Monsieur le Président, Cher Jean-Claude Antonini, de rappeler que, bien loin de constituer un simple aboutissement, ou même le simple constat d'une beauté éternelle, cette reconnaissance nous confère avant tout des devoirs : nous avons aujourd'hui l'obligation de ne pas relâcher nos efforts, mais au contraire de mobiliser tous les instruments à notre disposition pour améliorer la gestion à long terme de ce patrimoine. Le Val de Loire, comme je le soulignais, est un « paysage culturel vivant », et à ce titre, il nous impose de concilier patrimoine et développement, préservation et évolution.
Nous bénéficions d'une vaste palette d'outils pour y parvenir : des protections ponctuelles ou classiques, au titre des monuments historiques ou des sites, jusqu'aux instruments plus élaborés de gestion d'espaces et de territoires plus vastes, intégrant la notion de paysage, comme les Zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP). De tels dispositifs, qui résultent d'une démarche concertée de l'Etat et des collectivités, s'accordent pleinement à cette responsabilité partagée qui nous incombe vis-à-vis de la Convention du patrimoine mondial.
J'ai tenu à ce que le dossier de la demande d'extension du classement de l'UNESCO, que j'appuie avec beaucoup de détermination, soit étudié de façon prioritaire et soumis à l'expertise des services spécialisés. Il a été transmis par mes soins à l'Ambassadeur qui représente la France à l'Unesco.
Je suis heureux de vous annoncer que dans les jours qui viennent, le dossier parviendra au centre du patrimoine mondial, et je ne ménagerai pas mes efforts pour soutenir l'inscription d'éléments essentiels de cet ensemble naturel, géographique et historique. Je pense notamment au château de Langeais, au château de Chenonceaux et au pont canal de Briard, autant de merveilles qui mériteraient sans aucun doute cette inscription au patrimoine de l'humanité.
Mais, comme vous le savez, cette demande d'extension est une première dans l'histoire du patrimoine mondial. Nous suivrons donc tous avec beaucoup d'attention les travaux du Comité du patrimoine mondial qui auront lieu en juillet prochain.
Je tiens à saluer à ce sujet la grande ouverture des différents responsables du patrimoine ligérien, des gestionnaires et des élus, qui ont développé de nombreux échanges internationaux et des expériences bilatérales avec d'autres sites inscrits sur la liste. Je pense notamment aux échanges qui se sont amorcés entre la Loire et le fleuve Niger, et qui me paraissent riches de promesses : au-delà de leurs différences apparentes, les deux fleuves ont véritablement créé un territoire, nourri une civilisation, accumulé les traces de l'histoire et sont aujourd'hui confrontés à des problèmes de gestion similaires : gestion des ressources, conservation des écosystèmes, aménagement des rives, maintien des pratiques culturelles.
Je suis très heureux que de nouveaux échanges naissent de cette inscription, que de nouveaux liens se tissent entre des hommes qui ont aujourd'hui ce patrimoine en partage, qui ont la responsabilité de le transmettre aux générations futures et de le faire vivre au présent.
Je tiens à saluer votre engagement. Je suis sûr que ces rencontres permettront des échanges très riches. Je ne pourrai malheureusement pas assister à toutes les réflexions de la journée, mais j'en suivrai les conclusions avec la plus grande attention.
Je vous remercie.
Source http://www.culture.gouv.fr, le 4 avril 2006