Déclaration de M. Christian Poncelet, président du Sénat, sur les relations politiques, culturelles et économiques entre la France et la Suède et sur la coopération entre les parlements, Stockholm le 26 avril 2006.

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Circonstance : Voyage de M. Poncelet en Suède les 26 et 27 avril 2006-dîner offert par M. Björn von Sydow, président du Riksdag

Texte intégral

Monsieur le Président du Riksdag,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Monsieur l'Ambassadeur,
Mesdames et messieurs,
Chers Amis,
Je voudrais d'abord vous dire à quel point je suis heureux d'avoir pu répondre enfin à votre invitation de me rendre dans votre pays. Cette joie, je la partage avec mon collègue Jean-François PICHERAL, sénateur des Bouches du Rhône, qui m'accompagne aujourd'hui. Il est en effet Président délégué pour la Suède du groupe d'amitié France - Europe du Nord.
On éprouve une certaine fierté et une réelle émotion à se trouver l'invité d'un des plus anciens Parlements du monde (il remonte au 16ème siècle), qui fut aux rendez-vous de tous les grands moments de votre histoire pour la faire évoluer avec succès et constance, souvent avec courage, vers plus de liberté et de démocratie.
Les 19ème et 20ème siècles furent à cet égard des exemples pour les autres parlements du continent depuis la constitution de 1809, qui instituait un partage du pouvoir entre l'institution royale et le Riksdag, jusqu'à votre constitution actuelle, celle de 1974.
Je n'oublie pas le choix du parlementarisme en 1917, le suffrage universel direct ouvert à tout citoyen suédois... et à toute citoyenne suédoise, dès 1921 (!), et beaucoup d'autres lois qui constituent aujourd'hui les fondements de la démocratie suédoise.
Dans cette remarquable et constante évolution, permettez-moi cependant de noter l'abandon du bicamérisme en 1971, épisode que je ne peux, vous le comprenez bien, qualifier d'exemplaire...
Mais c'est une grande joie d'être accueilli en Suède et je vous remercie de cet accueil si amical.
Les relations entre la France et la Suède ont toujours été intenses, même si, de manière paradoxale, elles ne sont pas toujours perçues ainsi par nos deux populations. Tout le monde a en mémoire l'extraordinaire destin personnel de Jean-Baptiste BERNADOTTE, fils d'un avocat du barreau de Pau, Maréchal d'Empire, devenu Roi de Suède sous le nom de Charles XIV Jean et fondateur de la dynastie actuelle.
Par une ironie de l'histoire, c'est le Maréchal BERNADOTTE lui-même, devenu avec son accession au Trône de Suède, ardent défenseur de l'indépendance et de la neutralité du pays, qui contribua par la suite à nous éloigner.
Mais sans interrompre notre dialogue, nos échanges dans les arts et la culture sont ainsi toujours demeurés intenses. Entamée de manière symbolique en 1649 par la venue de DESCARTES à la Cour de la Reine Christine, cette connivence s'est brillamment poursuivie sous le règne emblématique de Gustav III par son amour pour la France qu'il a souvent visitée et les liens d'amitié qu'il avait noués avec savants et artistes français.
Aujourd'hui, le succès des grands noms de votre littérature ne se dément pas : August STRINDBERG ou bien encore la romancière Selma LAGERLOF, prix Nobel en 1909, ont rencontré en France un public très large de même qu'Ingmar BERGMAN qui attire toujours autant de cinéphiles français. On pourrait aussi évoquer Astrid LINDGREN et son roman pour enfants « Pippi Longstrump » devenu chez nous « Fifi Brindacier ».
Depuis 1995 et l'adhésion de votre pays à l'Union européenne, les choses ont encore évolué et se sont même accélérées du fait de l'appartenance à la même organisation. Nos relations se sont multipliées dans tous les domaines, facilitées par des approches communes sur différents dossiers comme l'aide au développement, le fonctionnement de la communauté internationale ou l'avenir des Nations-Unies.
Nos échanges commerciaux ont doublé depuis votre adhésion à l'Union.
Grâce aux programmes européens, nombreux sont les étudiants des deux pays allant faire une partie de leur scolarité dans les universités de l'autre. La ville d'Aix-en-Provence, chère au Sénateur PICHERAL, possède ainsi un établissement d'enseignement supérieur qui, en 30 ans, a accueilli des centaines d'étudiants suédois dans les domaines linguistiques et culturels.
Il en va de même pour les échanges de chercheurs.
Les visites d'études faites par des élus locaux français sont nombreuses, cherchant à s'inspirer de quelques recettes du modèle suédois ou nordique tant vanté chez nous. Un grand nombre de vos compatriotes ont choisi la France comme « résidence secondaire » ou lieu de retraite en particulier la Région PACA (15 000 suédois y possèdent une propriété immobilière), et nous nous en réjouissons car ils contribuent à une meilleure connaissance réciproque jusqu'aux endroits les plus reculés de nos régions.
Tous ces échanges contribuent à l'image très positive de votre pays en France. Je suis certain qu'ils contribuent également à ce que mon pays bénéficie chez vous d'une image moderne et accueillante au-delà d'une actualité parfois mouvementée.
Monsieur le Président,
L'Europe connaît une période difficile aujourd'hui. On sait les réticences manifestées par la population suédoise face à certains aspects de la construction européenne (échec du référendum sur l'euro en 2003, par exemple). En France aussi -chacun doit balayer devant sa porte- le résultat du référendum sur la Constitution a montré que les citoyens voulaient des preuves d'une Europe proche de leurs préoccupations quotidiennes, une Europe qui les protège. Il importe, grâce à la période de réflexion mise en oeuvre depuis quelques mois et aux débats nationaux engagés sur ces thèmes, de trouver les solutions.
Cela ne peut cependant se faire sans la participation active des parlements nationaux.
Qui mieux que nous en effet peut représenter les intérêts des populations qui nous ont élus ? Nous avons là un rôle essentiel à jouer et le Sénat français s'y emploie. J'y suis personnellement engagé.
Je ne voudrais pas terminer sans souhaiter le développement de la coopération entre nos deux institutions via en particulier nos groupes d'amitié. Continuons à travailler et à échanger ensemble.
Un bibliothécaire du Sénat, devenu prix Nobel de Littérature sous le beau nom d'Anatole FRANCE, ne cachait pas son plaisir en 1921 au Grand Hôtel de Stockholm en déclarant qu'il avait eu à coeur de venir « contempler ce beau pays ».
Je suis heureux de faire mienne cette citation et de lever mon verre à notre amitié.
Vive la Suède !
Vive la France !
Et vive l'amitié franco-suédoise !Source http://www.senat.fr, le 28 avril 2006