Texte intégral
Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Il y a tout juste une semaine, des élections ont eu lieu au Tchad. Elles se sont déroulées dans le calme et le président Déby en est semble-t-il le vainqueur. Pourtant la participation au vote a été limitée. Et un certain nombre d'opposants ont annoncé de nouvelles attaques.
La France est, comme vous le savez, présente militairement au Tchad. Pourquoi demeure-t-elle là-bas ? Risquons-nous d'être pris dans un engrenage de violence ? Quelle est notre contribution à la stabilité de cette région ?
Pour répondre à ces questions, je rappellerai tout d'abord brièvement la situation politique et militaire, avant de préciser le cadre et les perspectives de notre engagement au Tchad.
Situation actuelle
La situation politique
Le Tchad est un pays fragile dont l'unité nationale reste difficile à construire.
Depuis maintenant dix ans, et plus particulièrement depuis six mois, le Tchad est déstabilisé, par la situation au Darfour, du fait notamment des nombreux réfugiés qui s'y trouvent.
Je me suis rendue dans l'Est du pays le 4 août 2004 pour superviser l'opération humanitaire à laquelle les forces françaises ont contribué, et contribuent encore aujourd'hui. J'y ai mesuré les dangers économiques, sociaux mais aussi politiques que ce drame humanitaire faisait courir au Tchad.
Le président Deby, en décidant de ne pas soutenir la rébellion au Darfour a pris le risque de rompre avec ses soutiens traditionnels.
Ce risque s'est concrétisé lorsque les militaires appartenant à l'ethnie du président (Zaghawa) ont fait défection pour créer la rébellion du SCUD.
Certains Zaghawas ont tenté d'éliminer le président Deby en 2004 ou sont à l'origine des troubles survenus depuis la fin de l'année 2005 dans l'Est du pays.
la situation militaire
A partir d'octobre 2005, les différentes rebellions ont multiplié - souvent depuis le Soudan - leurs attaques contre les forces de sécurité tchadiennes, mais aussi contre les populations civiles et les réfugiés soudanais au Tchad.
Le Président Déby a déployé des milliers de militaires à l'Est du pays.
En décembre 2005 puis en mars 2006, les forces loyalistes ont obtenu des succès sur la frontière avec le Soudan.
Le 13 avril, plusieurs centaines de rebelles sont arrivés aux portes de N'Djamena, en s'infiltrant par la République centrafricaine ; certains ont réussi à y entrer.
L'Armée nationale tchadienne a repris le contrôle de la capitale et de la frontière, après de violents combats.
Le cadre et les perspectives de notre action
Certains s'interrogent sur la raison de la présence de nos forces dans ce pays.
Cette raison est triple :
- La protection de nos concitoyens :
1400 de nos compatriotes y sont présents.
- Le respect de nos engagements :
L'accord de défense qui existait avec le Tchad a été abrogé en 1976. Il a été remplacé par un accord de coopération militaire.
Nous le respectons scrupuleusement.
Cet accord de coopération prévoit d'abord qu'à la demande du Tchad et dans la mesure de ses moyens, la France apporte son concours en personnels pour l'organisation et l'instruction des forces armées tchadiennes.
Il prévoit aussi la fourniture et l'entretien à titre gratuit ou onéreux de matériels et équipements militaires. Il prévoit aussi un concours au soutien logistique des armées tchadiennes.
En revanche, cet accord précise que les personnels français détachés ne peuvent en aucun cas participer directement à l'exécution d'opérations de guerre, ni de maintien ou de rétablissement de l'ordre ou de la légalité.
- Le souci de stabilisation du continent
Le Tchad fait l'objet d'une menace mettant en danger sa stabilité et, par un effet domino, celui de toute la région.
La France - comme les Nations Unies, l'Union Africaine et l'Union Européenne - a condamné toute tentative de prise de pouvoir par la force.
Le soutien militaire de la France est ciblé.
Durant les attaques de mars et d'avril, les forces françaises n'ont, à aucun moment, participé aux opérations menées par l'armée nationale tchadienne.
Elles ont en revanche assuré diverses missions conformes à l'accord de coopération :
- Transport aérien au profit du président Déby et de l'armée nationale tchadienne ;
- Evacuation des blessés tchadiens ;
- Soutien logistique en carburant et, à une occasion, en munitions d'infanterie dans le cadre des contingents prévus par nos accords ;
- Assistance en matière de renseignement.
Le tir de semonce réalisé par un Mirage F1, devant une colonne rebelle, le 12 avril au matin avait pour but de montrer notre présence si des intentions agressives se manifestaient à l'égard de nos compatriotes.
Dans ce même but, nous avons renforcé notre dispositif avec deux compagnies d'infanterie et des moyens de renseignement, soit 500 hommes en renfort des 1000 habituellement présents. Une partie de ces renforts a maintenant quitté le Tchad.
Je conclurai cette brève présentation de notre action militaire au Tchad en soulignant trois points importants à mes yeux.
- Les élections qui viennent d'avoir lieu doivent constituer une opportunité à saisir pour engager au Tchad un véritable dialogue politique avec la société civile et l'opposition légale. C'est ainsi que pourront être réunies les conditions d'une réconciliation et du développement d'un pays disposant d'un potentiel incontestable.
- La stabilité du Tchad est nécessaire au règlement de la crise au Darfour. Notre soutien logistique en dépend ; une future opération de l'ONU sans doute également.
- La présence de nos unités au Tchad nous permettra enfin d'apporter un appui aérien éventuel à la force de l'Union Européenne qui s'apprête à superviser les élections en République Démocratique du Congo, étape majeure dans la stabilisation de cette région sensible d'Afrique.
Voilà Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, un certain nombre d'éléments susceptibles d'éclairer les objectifs et le cadre de notre présence militaire au Tchad.Source http://www.defense.gouv.fr, le 15 mai 2006
Mesdames et Messieurs les Députés,
Il y a tout juste une semaine, des élections ont eu lieu au Tchad. Elles se sont déroulées dans le calme et le président Déby en est semble-t-il le vainqueur. Pourtant la participation au vote a été limitée. Et un certain nombre d'opposants ont annoncé de nouvelles attaques.
La France est, comme vous le savez, présente militairement au Tchad. Pourquoi demeure-t-elle là-bas ? Risquons-nous d'être pris dans un engrenage de violence ? Quelle est notre contribution à la stabilité de cette région ?
Pour répondre à ces questions, je rappellerai tout d'abord brièvement la situation politique et militaire, avant de préciser le cadre et les perspectives de notre engagement au Tchad.
Situation actuelle
La situation politique
Le Tchad est un pays fragile dont l'unité nationale reste difficile à construire.
Depuis maintenant dix ans, et plus particulièrement depuis six mois, le Tchad est déstabilisé, par la situation au Darfour, du fait notamment des nombreux réfugiés qui s'y trouvent.
Je me suis rendue dans l'Est du pays le 4 août 2004 pour superviser l'opération humanitaire à laquelle les forces françaises ont contribué, et contribuent encore aujourd'hui. J'y ai mesuré les dangers économiques, sociaux mais aussi politiques que ce drame humanitaire faisait courir au Tchad.
Le président Deby, en décidant de ne pas soutenir la rébellion au Darfour a pris le risque de rompre avec ses soutiens traditionnels.
Ce risque s'est concrétisé lorsque les militaires appartenant à l'ethnie du président (Zaghawa) ont fait défection pour créer la rébellion du SCUD.
Certains Zaghawas ont tenté d'éliminer le président Deby en 2004 ou sont à l'origine des troubles survenus depuis la fin de l'année 2005 dans l'Est du pays.
la situation militaire
A partir d'octobre 2005, les différentes rebellions ont multiplié - souvent depuis le Soudan - leurs attaques contre les forces de sécurité tchadiennes, mais aussi contre les populations civiles et les réfugiés soudanais au Tchad.
Le Président Déby a déployé des milliers de militaires à l'Est du pays.
En décembre 2005 puis en mars 2006, les forces loyalistes ont obtenu des succès sur la frontière avec le Soudan.
Le 13 avril, plusieurs centaines de rebelles sont arrivés aux portes de N'Djamena, en s'infiltrant par la République centrafricaine ; certains ont réussi à y entrer.
L'Armée nationale tchadienne a repris le contrôle de la capitale et de la frontière, après de violents combats.
Le cadre et les perspectives de notre action
Certains s'interrogent sur la raison de la présence de nos forces dans ce pays.
Cette raison est triple :
- La protection de nos concitoyens :
1400 de nos compatriotes y sont présents.
- Le respect de nos engagements :
L'accord de défense qui existait avec le Tchad a été abrogé en 1976. Il a été remplacé par un accord de coopération militaire.
Nous le respectons scrupuleusement.
Cet accord de coopération prévoit d'abord qu'à la demande du Tchad et dans la mesure de ses moyens, la France apporte son concours en personnels pour l'organisation et l'instruction des forces armées tchadiennes.
Il prévoit aussi la fourniture et l'entretien à titre gratuit ou onéreux de matériels et équipements militaires. Il prévoit aussi un concours au soutien logistique des armées tchadiennes.
En revanche, cet accord précise que les personnels français détachés ne peuvent en aucun cas participer directement à l'exécution d'opérations de guerre, ni de maintien ou de rétablissement de l'ordre ou de la légalité.
- Le souci de stabilisation du continent
Le Tchad fait l'objet d'une menace mettant en danger sa stabilité et, par un effet domino, celui de toute la région.
La France - comme les Nations Unies, l'Union Africaine et l'Union Européenne - a condamné toute tentative de prise de pouvoir par la force.
Le soutien militaire de la France est ciblé.
Durant les attaques de mars et d'avril, les forces françaises n'ont, à aucun moment, participé aux opérations menées par l'armée nationale tchadienne.
Elles ont en revanche assuré diverses missions conformes à l'accord de coopération :
- Transport aérien au profit du président Déby et de l'armée nationale tchadienne ;
- Evacuation des blessés tchadiens ;
- Soutien logistique en carburant et, à une occasion, en munitions d'infanterie dans le cadre des contingents prévus par nos accords ;
- Assistance en matière de renseignement.
Le tir de semonce réalisé par un Mirage F1, devant une colonne rebelle, le 12 avril au matin avait pour but de montrer notre présence si des intentions agressives se manifestaient à l'égard de nos compatriotes.
Dans ce même but, nous avons renforcé notre dispositif avec deux compagnies d'infanterie et des moyens de renseignement, soit 500 hommes en renfort des 1000 habituellement présents. Une partie de ces renforts a maintenant quitté le Tchad.
Je conclurai cette brève présentation de notre action militaire au Tchad en soulignant trois points importants à mes yeux.
- Les élections qui viennent d'avoir lieu doivent constituer une opportunité à saisir pour engager au Tchad un véritable dialogue politique avec la société civile et l'opposition légale. C'est ainsi que pourront être réunies les conditions d'une réconciliation et du développement d'un pays disposant d'un potentiel incontestable.
- La stabilité du Tchad est nécessaire au règlement de la crise au Darfour. Notre soutien logistique en dépend ; une future opération de l'ONU sans doute également.
- La présence de nos unités au Tchad nous permettra enfin d'apporter un appui aérien éventuel à la force de l'Union Européenne qui s'apprête à superviser les élections en République Démocratique du Congo, étape majeure dans la stabilisation de cette région sensible d'Afrique.
Voilà Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les députés, un certain nombre d'éléments susceptibles d'éclairer les objectifs et le cadre de notre présence militaire au Tchad.Source http://www.defense.gouv.fr, le 15 mai 2006