Entretien de Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux affaires européennes, avec RFI le 9 mai 2006, sur la journée de l'Europe et la perspective de l'adhésion à l'Union européenne de la Roumanie et de la Bulgarie.

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Circonstance : Journée de l'Europe, le 9 mai 2006

Média : Radio France Internationale

Texte intégral

Q - Catherine Colonna, nous sommes aujourd'hui le 9 mai. C'est la fête de l'Europe. Un certain nombre d'initiatives, de manifestations vont avoir lieu en France et dans les 25 pays de l'Union. Ici, en France, par quoi cela va-t-il se traduire ?
R - La journée de l'Europe, ce 9 mai, existe depuis 20 ans dans tous les pays européens, mais franchement, en France cela ne se voyait pas beaucoup jusqu'ici. On s'est dit que, cette fois-ci, 20 ans, c'était un bel âge pour célébrer l'Europe. Elle le mérite, parce que, non seulement il n'y a pas de honte à faire l'Europe, mais il faut avoir de la fierté d'avoir réussi à la faire, jour après jour, pas à pas. Mais cela doit être aussi un moment de réflexion. On a prévu des manifestations très visibles, la Tour Eiffel en bleu aux couleurs de l'Europe, l'Arc de Triomphe, l'Assemblée nationale, le Sénat et le Quai d'Orsay. Mais surtout, et cela j'en suis tout à fait heureuse, il y a partout en France, dans toutes nos régions, des manifestations, des expositions, des débats ou des concerts. Il y 350 événements partout sur le territoire. C'est un signe intéressant des volontés positives qu'il y a en France sur l'Europe, à rebours de pas mal d'idées reçues, donc je trouve cela très satisfaisant.

Q - La fête, pour que l'Europe soit visible, soit gaie, mais est-ce que cette journée du 9 mai ce n'est pas aussi une journée de réflexion, de débat sur l'avenir de l'Europe qui est tout de même en crise, en tout cas qui connaît une période assez difficile ?
R - C'est aussi l'occasion, bien sûr, d'avoir un moment de réflexion, de prendre un peu de recul par rapport à l'événement et de regarder ce que l'Europe a fait. La date du 9 mai a été choisie en hommage au 9 mai 1950, jour de la déclaration Schuman, premier début de la construction européenne. Cela offre l'occasion de réfléchir à tout ce que l'Europe a fait depuis les lendemains de la guerre jusqu'à aujourd'hui, de se souvenir d'où nous venons, de savoir ce que nous voulons et de se rendre compte que l'Europe dépend de nous. Elle n'est pas là par hasard, elle ne vient pas de la planète mars, elle est là parce que des hommes et des femmes ont su la faire. Nous en sommes tous co-responsables. Je vais même plus loin : que nous soyons satisfaits de la façon dont elle marche ou non, nous en sommes tous collectivement responsables. Elle dépend de nous et elle sera ce que nous en ferons. C'est ce double message de fête, de célébration, mais aussi de réflexion et de responsabilité, que nous avons passé aujourd'hui.

Q - Catherine Colonna, le Commissaire européen à l'élargissement, Olli Rehn, s'apprête à faire connaître les conclusions des rapports sur la Roumanie. La question qui devra être tranchée dans les tous prochains jours est : est-ce que la Roumanie va pouvoir adhérer à l'Union européenne très bientôt, c'est-à-dire au 1er janvier 2007, ou est-ce qu'il va falloir encore attendre un an, 1er janvier 2008. En l'état actuel de vos connaissances, vers quoi se dirige-t-on ?
R - Le rapport de la Commission donnera des indications précieuses. Ensuite, le Conseil décidera, mais, très vraisemblablement, il devrait suivre la recommandation de la Commission. Nous ne connaissons pas la teneur du prochain rapport. Nous savons que le rapport précédent avait relevé des insuffisances dans la préparation de la Roumanie à son adhésion à l'Union européenne, je sais que, depuis, beaucoup d'efforts ont été faits. Nous-mêmes, nous avons fréquemment, et à tous les niveaux, rappelé aux responsables roumains qu'il fallait peut-être mettre les bouchées double pour faire ce qu'il faut pour être prêts. L'Europe est prête à les accueillir, elle leur ouvre volontiers les bras, mais, pour cela, il faut être prêt. Le destin de la Roumanie en Europe est, d'abord et avant tout, aujourd'hui dans les mains des Roumains.

Q - Vous semblez nous préparer à l'idée que l'adhésion se ferait plutôt à l'échéance 2008 ?
R - Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. Le rapport précédent était marqué par une certaine sévérité. Depuis, un gros travail a été fait, des efforts importants ont été menés. Seront-ils suffisants ? C'est souhaitable pour tout le monde, parce que si ces pays sont prêts à nous rejoindre, tant mieux, je crois que tout le monde y gagnera et l'Europe, collectivement, aussi. Mais il faut faire une évaluation objective, relever si tout a été rempli en temps et en heure, si oui, très bien, si non, il faudra le dire, en espérant que ce ne soit pas le cas.

Q - Quels sont les domaines spécifiques pour lesquels la Roumanie a, ou avait dans les dernières recommandations, des efforts importants à faire ?
R - Essentiellement ceux qui avaient trait à l'Etat de droit, au fonctionnement du système judiciaire, la transparence dans les relations économiques et financières. Beaucoup de dispositions ont été prises depuis quelques mois par le Parlement et par le gouvernement roumain. Rendez-vous donc, dans moins d'une semaine.

Q - Catherine Colonna, le Commissaire européen à l'élargissement, Olli Rehn, s'apprête à faire connaître les conclusions du rapport sur la Bulgarie. On saura si la Bulgarie va pouvoir adhérer à l'Union européenne au 1er janvier 2007, s'il faudra attendre le, 1er janvier 2008. Vers quoi se dirige-t-on ?
R - Nous ne connaissons pas encore, bien sûr, le contenu du rapport de la Commission. Le rapport précédent avait relevé un certain nombre d'insuffisances dans la reprises de l'acquis communautaire, c'est-à-dire dans la préparation de la Bulgarie à son adhésion pleine et entière à l'Union européenne. Elle a fait beaucoup de travail depuis et la commission l'a salué. Cette évaluation de la mi-mai va être la dernière étape, cela signifie que c'est le rendez-vous à ne pas manquer par la Bulgarie. Si elle est prête, tant mieux, l'Europe lui ouvre les bras, mais il faut une évaluation objective, c'est ce que fera la Commission. Nous avons vu régulièrement nos collègues bulgares, ils ont pris à coeur de relever le défi pour être prêts le 1er janvier 2007. Rendez-vous dans quelques jours pour savoir si cela est possible.

Q - Vous pensez que depuis les dernières recommandations, la Bulgarie a pu faire toutes les mises à jour, tous les progrès demandés pour adhérer au 1er janvier 2007 ?
R - De très gros efforts ont été faits. Est-ce que la Commission sera satisfaite dans l'ensemble des dispositions qu'il est de son devoir de vérifier ? C'est un travail très précis, très technique. Nous nous baserons très largement sur l'évaluation qu'elle fera pour savoir si la décision est prise d'accueillir ce pays en 2007 ou en 2008. Je crois qu'il faut saluer les efforts qui ont été faits par la Bulgarie qui, en quelques mois, a mis les bouchées double.

Q - Vous ne vous avancez pas. Avez-vous un sentiment personnel ?
R - Je suis d'une nature optimiste, mais, une fois que j'ai dit cela, je n'ai pas réglé le problème. J'observe que sur ce dossier, la plupart de nos partenaires le sont.

Q - Qu'est-ce qu'on a demandé à la Bulgarie d'accomplir comme progrès essentiel pour adhérer le plus rapidement possible à l'Europe ?
R - Pour tout pays candidat, les règles sont les mêmes : le respect de l'ensemble des critères politiques et économiques. Dans le cas particulier de la Bulgarie, il y avait encore un certain nombre de progrès à faire dans le domaine de l'Etat de droit et des relations financières.

Q - Merci.

Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 mai 2006