Entretien de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, dans "Sud-Ouest" du 17 mai 2006, sur l'industrie aéronautique.

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Média : Sud Ouest

Texte intégral


Q - Le ministère de la Défense a souvent été mis en cause, notamment à propos des avions C130 dont il a perdu le marché.
R - Depuis longtemps, la Défense n'est qu'un client mineur de Sogerma (5 % du plan de charge). Le dossier des C130 était le résultat d'une procédure de mise en concurrence engagée sous la majorité précédente. Le résultat était clair et difficilement contestable à mon arrivée au ministère. J'ai alors indiqué aux dirigeants de Sogerma que nous accueillerions avec intérêt leurs offres commerciales compétitives. C'est le cas des deux contrats qui viennent d'être achevés : l'A319 présidentiel et la transformation d'un C135 en avion médicalisé.
Lorsque la direction de Sogerma, qui n'a pas su ou pu trouver un nouveau modèle économique pérenne, nous a fait part de la situation dramatique de l'entreprise, nous avons travaillé et fait l'inventaire avec elle de l'ensemble des contrats susceptibles d'être remis en concurrence dans les prochaines années. La disponibilité de mes services a été totale pour aider la direction à présenter son dossier à EADS. Ces perspectives sont malheureusement très lointaines, car elles se situent au-delà de 2008-2009, voire bien plus loin pour l'A400M.
Q - L'A400M va entrer en service dans l'armée de l'air. Ne peut-on pas envisager dès maintenant le plan de charge correspondant à Mérignac ?
R - Il ne faut pas bercer de fausses illusions les salariés qui souffrent beaucoup de la situation de leur entreprise. Sur les cinquante exemplaires d'A400M commandés par la France, les deux premiers ne seront livrés qu'en 2009. Les livraisons allemandes sont encore plus tardives. S'agissant d'avions neufs, il va de soi que les premières grandes visites d'entretien sont encore bien plus éloignées : il s'agit donc d'une charge de travail à très long terme.
Q - En matière de défense, le gouvernement peut s'affranchir de l'obligation des appels d'offres européens.
R - Il est effectivement possible, pour certains matériels de guerre et à des conditions strictes, de déroger au Code des marchés publics. Toutefois, la question n'est pas aujourd'hui celle de la mise en concurrence, mais celle de l'existence effective d'une demande de la part des clients et d'une offre performante de Sogerma.
Dans le domaine aéronautique, les entretiens sont programmés et donc prévisibles : nous avons fourni toutes ces informations à l'entreprise, pour qu'elle dispose d'hypothèses réalistes vis-à-vis de son actionnaire. Nous avons donné le maximum de visibilité à Sogerma, mais c'est à EADS de faire ses choix.
Pour ma part, avec les autres membres du gouvernement, je suis très attachée à la qualité des mesures d'accompagnement que le groupe EADS mettra en place : les personnels doivent avoir les explications et les réponses aux questions industrielles et sociales qu'ils se posent. Il faut aussi, et c'est très important, qu'EADS fasse des propositions concrètes et opérationnelles pour accompagner le développement du bassin dans les hautes technologies, notamment aérospatiales.
Q - Plus globalement, le ministère de la Défense est un client important de l'industrie aéronautique. L'Aquitaine que vous êtes ne pourrait-elle pas faciliter la connaissance des marchés aux entreprises régionales ?
R - La Défense, j'y ai veillé depuis quatre ans, se positionne comme acteur local du développement économique. C'est un travail quotidien, qui va bien au-delà d'échanges ponctuels. C'est aussi une question d'avenir. C'est le sens du pôle de compétitivité Aéronautique et Espace, constitué par les deux régions Aquitaine et Midi-Pyrénées.
La Défense est le deuxième contributeur, derrière l'Industrie, du fonds commun interministériel, et le pivot de l'expertise technique. Je souhaite que la Défense soit un acteur de premier rang de cette politique d'innovation et de développement technologique, atout pour l'Aquitaine et impérieuse nécessité pour la France. source http://www.defense.gouv.fr, le 18 mai 2006