Déclaration de Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, sur la coopération décentralisée, notamment avec Madagascar, à Antananarivo le 11 mai 2006.

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  • Brigitte Girardin - Ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie

Circonstance : Déplacement à Madagascar les 11 et 12 mai-séance plénière devant les assises franco-malgaches de la coopération décentralisée, à Antananarivo le 11 mai 2006

Texte intégral

Monsieur le Ministre de la Décentralisation et de l'Administration territoriale,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les Elus,
Chers Amis,

Les contraintes de mon emploi du temps ne m'ont pas permis d'être parmi vous, ce matin, à l'inauguration de ces rencontres de la coopération décentralisée, aux côtés du président de la République Marc Ravalomanana et des présidents des Sénats malgache et français, Guy Rakotomaharo et Christian Poncelet. En effet, j'étais hier 10 mai à Gorée, au Sénégal, afin de commémorer sur ce lieu de mémoire le souvenir du crime contre l'humanité qu'a été l'esclavage.
Pour autant, je me réjouis de vous rencontrer au moment où vous allez, au travers de quatre ateliers, décliner les thèmes de vos deux tables rondes de ce matin : la décentralisation et l'appui institutionnel. Ces sujets sont bien au coeur de nos réflexions sur la politique de développement, et sur la contribution que peut lui apporter la coopération décentralisée.
Je souhaiterais ici exprimer mes remerciements aux autorités malgaches pour la qualité de leur accueil et la préparation de ces assises. Les élus que j'ai croisés m'ont dit à quel point elles ont été organisées de manière efficace et pertinente ; depuis Madagascar dans un premier temps, puis, dans le cadre du dialogue noué avec le comité de pilotage français. Je remercie tout particulièrement Monsieur le Président de la République Marc Ravalomanana pour l'attention personnelle qu'il a portée à ces rencontres, ce dont témoignait sa présence parmi vous lors de l'ouverture des travaux.
Ma reconnaissance va également au président Forni et à l'association des régions de France qui ont bien voulu assurer la coordination des collectivités territoriales françaises dans la préparation des assises. Elle s'est déroulée au sein d'un comité de pilotage regroupant l'Etat, le Sénat, les régions, les départements et les villes, au-delà des clivages politiques et institutionnels, fidèle en cela à l'esprit de notre coopération décentralisée.
Je remercie enfin les Chambres hautes de nos deux pays et leur président, à l'origine, pour beaucoup, de ces rencontres. Je suis sensible à l'attention que porte le Sénat français à la coopération décentralisée et salue ici le sénateur Jean Faure, président de la délégation créée à cet effet au sein de cette Haute Assemblée.
L'importance que nous attachons à ces rencontres s'explique par la place qu'occupe Madagascar dans notre coopération décentralisée. Ce pays reçoit ainsi plus de 2,2 millions d'euros des collectivités territoriales françaises au titre de l'aide publique au développement, sans compter les cofinancements du ministère des Affaires étrangères qui, pour 2006, s'élèveront à 280 000 euros, déconcentrés à notre ambassade.
Cette coopération vit au travers de 44 partenariats décentralisés dans les secteurs les plus variés : gouvernance locale, agriculture, développement rural, éducation, formation, artisanat, santé. L'eau et l'assainissement, ou encore les transports, sont par ailleurs des domaines dont on peut prévoir l'essor. A ce jour, 9 régions françaises, 10 départements, 23 communes et 2 groupements de communes coopèrent avec leurs homologues malgaches. La présence à vos assises de nombreux élus et représentants des associations nationales de collectivités territoriales laisse espérer un approfondissement des relations existantes et l'établissement de liens nouveaux, sur les priorités identifiées en commun.
Sur cette base déjà solide, ces rencontres permettront, je n'en doute pas, de conforter Madagascar comme pays pilote pour la mise en oeuvre des réflexions menées avec les collectivités françaises.
Pour que la coopération décentralisée ait toute sa place dans notre dispositif de coopération, nous devons avoir trois ambitions :
Tout d'abord mieux articuler les différentes formes de coopération.
Cette première ambition est, je le sais, partagée par les associations nationales d'élus et le Sénat. C'est d'ailleurs parce qu'elles permettent, à échéances régulières, à des collectivités françaises oeuvrant dans un même pays de se rencontrer, d'échanger avec leurs partenaires locaux, que le ministère des Affaires étrangères soutient, y compris financièrement, l'organisation d'assises.
Cependant pour "la Grande île", comme on appelle ce beau pays, l'effort de coordination va bien au-delà : je note en effet, pour m'en féliciter, la volonté de l'association des régions de France d'accompagner ici le processus de régionalisation ; l'association des maires de France aussi est intéressée par une démarche équivalente à l'égard des communes malgaches.
Ainsi, l'engagement des collectivités locales françaises pour accompagner l'amélioration du dispositif institutionnel malgache aux échelons régional et local, s'inscrit en complémentarité de celui de l'Etat français dans son soutien au gouvernement malgache dans le domaine de la gouvernance et de l'Etat de droit. Cette cohérence s'observe aussi en ce qui concerne la coopération entre nos deux Sénats.
Ces convergences, fortement soutenues par notre ambassade, vont dans le sens d'une plus grande efficacité de chacun des partenaires à tous les niveaux.
Il nous faut par ailleurs, et c'est là notre seconde ambition, favoriser l'appui institutionnel
Vous avez décidé, sur proposition de nos amis malgaches, de centrer votre réflexion sur l'appui institutionnel comme par exemple le transfert de savoir-faire dans la gestion des services publics locaux, la maîtrise d'ouvrage locale, la formation des entités régionales et locales.
Partager des expériences, c'est ce que fait actuellement la région Ile-de-France avec la commune urbaine de Tananarive en matière d'urbanisme pour l'élaboration d'un plan vert pour la ville.
Un autre projet d'appui institutionnel illustre à mes yeux une complémentarité exemplaire entre d'une part des collectivités qui apportent leur compétence dans le montage d'un dossier, et d'autre part l'Etat qui s'engage dans la réalisation des infrastructures. Il s'agit de l'action novatrice associant Mulhouse, l'Institut régional de la coopération décentralisée d'Alsace et l'Agence française de Développement pour la réhabilitation et la gestion de 4 marchés à Majunga.
Les réflexions que vous mènerez durant ces deux jours, jointes à celles du groupe de travail que le ministère a demandé à Cités Unies France de mettre en place sur ce sujet, doivent nous amener ensemble à préciser encore davantage ce que peut être notre appui institutionnel.
J'en viens enfin naturellement à notre troisième ambition pour mettre la coopération décentralisée au service du développement : miser sur l'action locale.
Cette approche me semble particulièrement pertinente. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si la thématique de l'action locale a été retenue lors du forum mondial de Mexico du mois dernier sur l'accès à l'eau et à l'assainissement. Nous encourageons et soutenons financièrement nos collectivités à y prendre toute leur part.
En effet, cette nouvelle forme de coopération, certes plus éloignée des grands programmes internationaux, est aussi plus directement en prise avec les réalités et les besoins exprimés au niveau local. C'est pourquoi j'ai la conviction que le succès de l'aide au développement passe désormais aussi par elle. C'est le sens de notre politique en faveur de la décentralisation et de la gouvernance locale, par exemple en Afrique avec le programme pour le développement municipal, et en soutenant l'action de cités et gouvernements locaux unis dans ce domaine.
Si, au travers de notre appui institutionnel aux structures chargées de la proximité et de l'aménagement du territoire régional, nous pouvons favoriser ensemble la progression des responsabilités à l'échelon infra-étatique, accompagner les initiatives de la base, promouvoir la mobilisation des acteurs locaux en faveur du développement, alors j'en suis sûre, nous aurons contribué au dynamisme et au développement de ce grand pays.
Le ministère de la Coopération est, vous le savez, prêt à vous accompagner. C'est aussi la raison pour laquelle Madagascar figure parmi les 7 pays pionniers qui bénéficient, dès cette année, d'une enveloppe déconcentrée de soutien aux projets pluriannuels des collectivités territoriales françaises.
Notre ambassadeur est particulièrement attentif à votre action et tiendra compte des résultats de vos rencontres pour fixer les orientations qui dicteront l'utilisation du fonds d'aide à la coopération décentralisée franco-malgache.
Coordination, priorité à l'appui institutionnel, promotion de l'action locale, trois ambitions pour la coopération décentralisée que je sais partagées par vous tous. En les déclinant au cours de vos ateliers, vous irez au plus près de l'appui à la gouvernance au niveau local, là où elle peut être le plus efficace.
Je ne voudrais pas conclure mon propos sans rappeler devant vous la conviction qui est la mienne que la politique de coopération doit d'abord et avant tout être une politique de partenariat. Approche coordonnée bien sûr dans un premier temps entre l'Etat et les collectivités, en France. A cet égard, j'aurais l'occasion de débattre de ces sujets plus avant avec les associations représentatives des collectivités territoriales françaises dans le cadre de la Commission nationale de la Coopération décentralisée que j'ai l'intention de réunir prochainement.
Au-delà, il s'agit évidemment de construire ensemble des stratégies de développement, dans une attitude d'écoute mutuelle. C'est la condition du succès, et c'est tout le sens des documents-cadres de partenariat qui constituent désormais le cadre de la politique française de coopération. Ils ne pourront que s'enrichir de l'apport des coopérations de nos collectivités locales, dont les conventions de coopération sont, elles aussi, fondées sur cette notion de partenariat.
C'est la raison pour laquelle je suis heureuse de pouvoir signer le document-cadre de partenariat avec Madagascar au moment où se tiennent vos rencontres.
La France et Madagascar ont beaucoup à partager, outre une langue, le français et, ne l'oublions pas, la proximité au travers des collectivités territoriales de la Réunion ou de Mayotte.
Aux élus locaux français, présents nombreux dans cette salle, je veux dire tout notre soutien pour leur action au service du développement local à Madagascar, si complémentaire de l'action des Etats, de l'Europe et des organismes multilatéraux.
A nos amis malgaches, j'exprime l'espoir que nous mettons dans ce partenariat, qui englobe désormais tous les échelons de notre République décentralisée.
Je terminerai en vous adressant mes encouragements pour les travaux que vous allez poursuivre tout au long de vos deux jours de rencontres ainsi que mes voeux de succès.

Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 mai 2006