Entretien avec M. Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement, sur le plan de cohésion sociale, les maisons de l'emploi et l'éparpillement des acteurs de l'emploi (ANPE et Unédic).

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Dans les Maisons de l'Emploi, ce sont les acteurs de terrain
qui prennent les commandes

Entretien avec le ministre de l'Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement.
Jean-Louis Borloo
le 20 juin 2006
Q - Vous êtes, on le sait, attaché à ce que toutes les mesures du Plan de Cohésion Sociale soient mises en place. Les Maisons de l'emploi vous tiennent plus particulièrement à coeur. Pourquoi ?
Jean-Louis Borloo : C'est une mesure phare du Plan de cohésion sociale et effectivement un dispositif qui me tient particulièrement à coeur parce que je suis vraiment convaincu de son utilité à la fois et d'abord pour les demandeurs d'emploi, mais aussi pour tous les acteurs du Service public de l'emploi.
En un mot, la Maison de l'Emploi, c'est tout le contraire de ce qui a été fait pendant des années : c'est mettre fin aux antagonismes des deux acteurs principaux -l'Anpe et l'Unedic- qui ont bien sûr vocation à travailler ensemble au service du demandeur d'emploi. L'Anpe et l'Unedic composent, avec l'Etat, des piliers solides pour cette « nouvelle demeure ».
Qu'est-ce qui se passait jusqu'alors ? L'éparpillement des acteurs de l'emploi rendait leur action peu lisible, aussi bien pour le demandeur d'emploi que pour le chef d'entreprise. L'indispensable suivi personnalisé du demandeur d'emploi était trop faible. Les prévisions des besoins en ressources humaines au niveau des bassins d'emploi étaient insuffisantes, voire inexistantes trop souvent et l'action prospective manquait de données objectives, reconnues et partagées sur lesquelles s'appuyer. Ce qui induisait notamment un profond décalage dans l'adaptation de l'offre et de la formation. Et enfin il n'existait pas de pilotage unique de la politique de l'emploi au niveau des bassins. En conséquence, les mesures mises en place par l'Etat avaient du mal à donner pleinement leur efficacité.
Voilà tout ce à quoi les Maisons de l'emploi vont remédier. Actuellement, 158 maisons de l'emploi ont été labellisées. Certaines sont bien lancées, d'autres sont encore sur les starting-blocks.
Mais quoiqu'il en soit, les trois cents structures qui mailleront à terme le territoire national vont permettre de gérer, au plus près du terrain, les ressources humaines de notre pays.
Ce qui nous permettra de mieux faire face aux inévitables mutations économiques ainsi qu'à la pénurie de main d'oeuvre qui se profile à la veille des départs massifs à la retraite des « baby-boomers ».
Et je peux vous assurer que cela marche : dans les secteurs où des Maisons de l'emploi sont opérationnelles, le taux de retour à l'emploi s'est nettement amélioré. C'est un gage de la réussite de ces regroupements !
Q - Quel est selon vous « le » point fort d'une MDE, celui dont dépend la réussite ?
JLB : Je ne crois pas que l'on puisse citer un seul point fort. Il s'agit en fait d'une conjonction de plusieurs facteurs.
Le premier, c'est de laisser aux acteurs de terrain l'initiative de monter un projet. La Maison de l'emploi n'est pas un « machin » réalisé et imposé par l'Etat. C'est un outil qui est proposé. Je dirai que c'est un produit « modulable », selon les territoires et le tissu économique local. Les partenaires -du privé ou du public, les chambres consulaires, le Service public de l'emploi local, les associations d'insertion, d'aide à la création d'entreprise et bien d'autres encore - connaissent bien leur secteur, ses atouts, ses faiblesses. C'est quand même mieux pour mettre en place des actions efficaces.
Ce projet, il est porté par un élu. Ça aussi c'est bien. Parce que l'élu a les deux pieds dans son territoire. Il est obligé d'être concret, pragmatique.
Le deuxième, c'est de fournir des outils en ordre de marche. J'entends par là un service public de l'emploi qui a des moyens pour agir. Je dois dire que je suis très heureux de voir se conclure d'une façon très positive le travail que nous menions depuis un an et demi avec la signature de la convention Etat-Anpe-Unedic. Pour moi, c'est une vraie victoire : le demandeur d'emploi sera pris en charge plus rapidement : un dossier unique le suivra tout au long de sa recherche d'emploi. Une recherche d'emploi qu'il conduira, chaque mois, avec le même conseiller jusqu'au retour rapide et réussi à l'emploi.
Cela fait 25 ans, qu'on parlait de dossier unique ! Ce nouveau dispositif arrive enfin. Il fera partie des éléments de réussite pour conduire le chômeur vers l'emploi, par le biais des Maisons de l'Emploi.
Le troisième point fort, c'est que tout cela va fonctionner en un même lieu ! Tous ces outils, tous ces acteurs, seront en effet réunis dans un même lieu -physique ou virtuel- sous la vigilance d'un coordinateur qui veillera à ce que le travail aboutisse à des actions concrètes.
Q - Qu'attendez-vous de cette journée nationale des Maisons de l'emploi ?
JLB : Je serai particulièrement ravi de rencontrer les élus présidents des structures existantes et ceux qui ont décidé de se lancer. Pour moi, les élus du terrain sont les acteurs essentiels de la cohésion sociale.
Ils sont plus que jamais les partenaires nécessaires, aux côtés des services de l'Etat pour conduire une action durable en matière d'emploi, bien sûr, mais aussi de logement et d'égalité des chances. Sans eux, le Plan de Cohésion Sociale ne peut aboutir.
Alors oui, je serai heureux de leur dire tout cela. J'attends également que tous ces acteurs puissent échanger des idées, raconter des expériences qui puissent servir aux voisins, évoquer aussi librement les petits dysfonctionnements qui sont inhérents aux projets novateurs de façon à ensuite pouvoir les régler. Car l'objectif de cette journée est aussi pédagogique : comme dans une Maison de l'emploi, ils trouveront ici, en un même lieu et en une journée, tout un panel de « techniciens » pour leur fournir des solutions.
Enfin, cette journée pourrait être le commencement d'un travail en réseau. Il me semble que ce travail en réseau est indispensable à la réussite de l'action que nous voulons tous, unanimement, mener au service des demandeurs d'emploi de notre pays, pour les accompagner plus efficacement vers le retour à l'emploi.Source http://www.cohesionsociale.gouv.fr, le 22 juin 2006