Texte intégral
Bonjour à tous,
Je voulais vous dire à chacune et chacun combien j'étais à la fois heureux de vous retrouver, heureux d'entendre ce qui s'est dit à cette tribune. C'est normal, il y a débat et l'UDF a toujours été un lieu de débat et je veux croire qu'il le restera.
Je remercie Jean-Marie Cavada et François Bayrou, au moment de son accueil, afin de remettre les choses en place.
Oui, ce Conseil sera un moment de tension. Quand on se parle, il y a toujours moins de tensions et je suis toujours pénétré de la phrase prononcée par François Bayrou à Toulouse en 2002 où il disait : "Quand tout le monde pense la même chose, c'est que l'on ne pense plus rien".
Je refuse la pensée unique, je refuse la parole unique, comme je refuse le parti unique. Une fois pour toutes, il faut que ce soit dit ici. Je refuse le parti unique et c'est pour cela que je suis et que je reste à l'UDF. L'UDF est un lieu de dialogue et il doit le rester.
Est-ce une raison suffisante pour évacuer les questions que nous nous posons, que certains d'entre vous se posent et que, je le sais, au-delà de cette grande assemblée, dans nos régions et dans nos départements, beaucoup se les posent. Il faut progressivement obtenir des réponses pour que ce mouvement "Allez la France !..." gagne en 2007.
Je voudrais d'abord souligner ce qui nous réunit et ensuite évidemment parler avec vous de ce qui fait débat, le cas échéant, entre nous, pour que nous puissions l'aborder et y trouver des réponses.
Parlons d'abord de ce que nous partageons ensemble, de ce qui nous permet de nous retrouver dans un esprit de tolérance qui a toujours été une constante de l'UDF, que je vis depuis vingt-huit ans, pas plus de mérite que celui qui nous a rejoints il y a un an.
Les racines de l'UDF, je les ai chevillées au corps et il n'est pas question de les couper.
Oui, nous voulons une UDF libre et autonome, et Congrès de Lyon ou pas, cela fait vingt-huit ans que cela existe et l'UDF doit être libre, autonome, indépendante, elle ne dépend de personne et ne devra dépendre de personne. Elle prend ses décisions en grand parti politique français qui aspire à être la majorité de la majorité.
A l'UDF, ce qui nous rassemble, d'abord et avant tout, c'est le fond, ce sont les valeurs communes, c'est la place de l'homme au centre de toutes préoccupations de celui qui a la moindre parcelle de décision. Ce qui nous rassemble, c'est la force que nous donnons, que nous abordons avec confiance envers le milieu associatif, les partenaires sociaux, tous ces corps intermédiaires, les élus locaux qui font la richesse de notre pays et, comme vous, je suis absolument opposé à la suppression des 36000 communes de France au profit de je ne sais quelle infrastructure ou structure qui viendrait gommer ce réseau extraordinaire de démocratie locale.
Oui, le système français repose sur une générosité à tous les échelons. Il n'y a pas de hiérarchie là-dedans. Oui à l'élu local de base comme au ministre, au premier ministre, et au président de la République. C'est tout un corps social qui doit travailler dans le même sens et c'est l'une valeur fondamentale de l'UDF.
Cet équilibre subtil, difficile à mettre en place, entre une économie de marché à laquelle nous croyons, que nous devons accompagner, encourager, ce n'est pas le capitalisme du CAC 40, c'est l'économie de marché, le sens de l'initiative, le goût de l'entreprise que j'ai fait mettre dans le socle commun de connaissance et de compétence que tous les jeunes de France, de la République devront posséder, non pas pour bénéficier ou faire bénéficier les actionnaires, même petits, moyens ou grands, mais également dans un esprit de solidarité indispensable pour que notre société soit équilibrée et qu'elle voie les avantages de la création de richesses, mais qu'elle voit également à tous les échelons et les retours évidents de cette richesse, et notamment pour les moins favorisés par la vie, par le handicap, le manque de connaissances et de culture, le manque d'éducation ou d'instruction. Bref, le moins de chances. C'est l'une des valeurs de l'UDF.
Bien sûr, je voulais vous parler de cette valeur, l'envie et le besoin d'un projet européen qui facilite l'émergence d'une citoyenneté européenne. Je vous le dis sans fierté excessive, je suis heureux, d'avoir fait admettre, il y a quinze jours, au Conseil des ministres européens de l'éducation, cette citoyenneté européenne dans le socle des connaissances et des compétences de tous les jeunes en Europe.
Dorénavant, grâce à l'initiative de la France, ils connaîtront mieux les procédures et les institutions européennes et ils vivront l'Europe et, un jour, ils se sentiront citoyens européens. C'est la France qui est à l'origine de cette initiative.
Ce que nous partageons également, c'est ce désir souvent exprimé de voir la France être gouvernée au centre. Celui qui m'a amené à la vie politique, c'est Valéry Giscard d'Estaing. Deux Français sur trois peuvent se retrouver autour de valeurs communes, de projets communs pour faire véritablement acte ensemble et de pouvoir et de solution pour l'ensemble de la société française.
Pour moi, il s'agit évidemment de rassembler sur des idées et sur un projet, des femmes et des hommes qui peuvent peut-être se sentir éloignés les uns des autres, mais quand on parle de valeurs, ils découvrent que les valeurs humanistes qui sont notre ciment le plus fort au sein de l'UDF, ce sont des valeurs humanistes qui savent rassembler les hommes et les femmes.
Enfin, nous voulons une UDF forte au coeur de la vie politique française. C'est la garantie pour notre pays d'éviter tous les extrêmes et ces extrêmes et ces extrémismes nous menacent et Jean-Christophe Lagarde a raison sur ce point. Ces risques d'extrémisme nous ont menacés en 2002 et nous menaceront en 2007.
L'UDF doit être au centre de la vie politique française. Elle doit rassembler sur des valeurs communes, elle doit rassembler deux Français sur trois.
Nous voulons tous , et je le dis avec la même limpidité qu'il y a un an et quelques mois à un autre Conseil national, qu'il y ait un candidat UDF aux élections présidentielles. A chaque échéance présidentielle, j'ai souhaité que nos couleurs soient portées et, même en 1995, quand l'état-major de notre parti UDF a soutenu quelqu'un qui n'était de notre famille, je m'y suis opposé et c'est normal qu'un militant dise que ce n'est pas bien. Il faut soutenir un candidat UDF aux élections présidentielles.
Nous savons tous que François Bayrou, président de l'UDF, élu par les militants, est légitime pour porter les couleurs de l'UDF. Personne ne lui conteste cette capacité, personne ne lui conteste cette envie et, François Bayrou, ce n'est pas une envie des ors et des dorures de la République, c'est une envie de servir, que ce soit à la présidence de la République -je ne sais pas si tu équiperas l'Elysée ou une tente berbère du côté d'un grand restaurant sur les Champs Elysées, peu importe-, quand je suis ministre, j'ai envie de servir, d'être actif et j'ai envie d'apporter des solutions.
Ce que nous savons que, si tu es président de la République, ce n'est pas pour les ors de la République, mais pour servir la République.
Jusqu'ici, nous sommes presque tous d'accord, nous sommes peut-être tous d'accord, mais il y a également ce qui fait débat. Et, avec la même simplicité -j'ai vu dans la presse dire que c'était tendu, mais cela ne l'est pas-, je voudrais que nous posions les termes de ce débat important, un débat vraiment fondateur pour notre démarche présidentielle que je viens d'affirmer et de confirmer pour la énième fois.
Tout d'abord, je veux et je souhaite que l'UDF soit la plus pluraliste possible, la plus démocratique possible. Démocratique, elle l'est, elle peut l'être davantage.
La démocratie, je vie cela dans ma ville, plus vous approcher de ce que vous croyez être la perfection et plus l'horizon s'éloigne. Nous avons encore des progrès à faire en termes de démocratie interne à l'UDF.
Il s'est produit quelque chose de fort, l'appel du président à voter une motion de censure. On aurait bien aimé que les militants soient informés avant et puissent donner leur opinion. Certes, c'est l'affaire des députés mais, aujourd'hui, reconnaissons qu'il y a vraiment quelque chose à faire de mieux pour la démocratie interne.
Ensuite, pour le pluralisme. Oui, j'ai connu une UDF forte de sa diversité. Elle rassemblait le CDS, les Républicains indépendants, les clubs Perspectives et réalités, le Parti social-démocrate, les radicaux. Tout cela faisait la grande UDF.
Je souhaite que, dans l'avenir, l'UDF se retrouve dans une diversité. C'est aussi pour cela qu'aux côtés de l'UDF, et en parfaite loyauté avec l'UDF, j'ai créé un club de réflexion pour accueillir celles et ceux qui ne souhaiteraient pas prendre une carte d'un parti politique, car certains hésitent encore à franchir ce pas. C'est pour cela que j'ai créé « Société en mouvement » sur l'ordre de personne, sauf de mon initiative propre, et qui va mener la réflexion et des propositions d'action pour l'UDF.
J'ai hâte de voir une UDF qui, au-delà des réflexions importantes et du débat important, du débat parlementaire et du débat au sein des fédérations, soit une UDF qui innove et qui, vite, se mette à agir dans le concret d'une vie gouvernementale future.
Je crois que nous n'avons pas à rougir les uns et les autres de ce que l'UDF a pu inspirer et mettre en oeuvre depuis cinq ans. Après tout, même depuis un an. Je suis en charge de l'Education nationale, des centaines d'entre vous sont venus me donner des idées et je les mets en oeuvre. Dans quelques jours, je sortirai le statut des parents pour la relation entre les parents et les écoles. C'est formidable et vous pourrez vous dire que c'est l'UDF qui l'a inspiré.
J'ai vu des élus de l'UDF qui m'ont dit, par exemple : aujourd'hui, 150 000 jeunes ne savent pas lire en entrant en sixième. Je me suis plongé dans ce dossier, un dossier scientifique et on voit que tous les chercheurs en neurosciences admettent que la méthode globale ou semi-globales, ou toutes autres assimilées ne sont pas bonnes pour la lecture et qu'il faut revenir à la méthode syllabique ou phènome-graphème.
Oui, j'ai pris cette décision aussi inspirée par l'UDF.
Tout à l'heure, Aziz Senni a dit quelque chose notamment sur la carte scolaire. Qu'il sorte d'ici rassuré, j'ai commencé à faire des expérimentations dans des ZEP, c'est-à-dire, pour les collèges en mission réussite, il y aura des exceptions justement à la carte scolaire.
C'est le début d'un process qui, avec beaucoup de concertation, nous amènera, j'en suis sûr, un jour, à avoir énormément de souplesse pour permettre à chacune et chacun, lorsque l'on sort du collège, de choisir son lycée ou, en sortant du lycée, de choisir son université, en fonction de ses choix et du projet individuel qu'on porte chacun pour faire du mieux possible.
Je veux venir à une autre question, c'est la clarté de notre démarche, parce qu'il nous faut un contrat clair avec les Français, sinon les Français hésiteront à nous rejoindre. Je veux un contrat clair. J'ai dit une UDF pluraliste évidemment pour donner des gages d'écoute et pas seulement des gages, mais je voudrais également qu'il y ait un contrat clair avec les Français. Ni nos valeurs ni notre programme ne sont compatibles avec le Parti socialiste, c'est clair.
Le projet socialiste vient de sortir. Un militant socialiste nous a rejoints, parce qu'il partage nos valeurs et elles sont, pour la plupart, incompatibles avec notre démarche. Si vous voulez faire un bout de chemin avec le Parti socialiste, c'est l'économie administrée de nouveau, les 35 heures obligatoires. C'est 50 Mdeuros de dépenses supplémentaires, par des cotisations, par des impôts, des par des contributions diverses.
Maintenant, j'ai tout de même deux ou trois questions à poser et c'est ma conclusion. Je ne demande pas à François Bayrou d'y répondre tout de suite, mais nous devons y réfléchir ensemble. J'en parlerai avec lui comme en 2002 quand j'étais son directeur de campagne. Je n'ai pas changé.
Je voudrais revenir un instant sur la motion de censure pour me poser la question, même si c'est une question du passé : en appelant à voter la censure déposée par le Parti socialiste et soutenue par le Parti communiste, dix députés ont appelé et ont voté cette censure. Est-ce que, dans ce cas, l'UDF a progressé ou elle s'est divisée ?
La deuxième question que je veux poser est très simple : c'est qu'après avoir appelé à voter pour une motion de censure déposée par le Parti socialiste et soutenue par le Parti communiste, je veux savoir si, un jour, l'UDF est prête à voter la confiance déposée par le Parti socialiste dans un Gouvernement PS avec le Parti communiste ? C'est quand même normal de savoir cela !
La troisième question, à laquelle Jean-Christophe Lagarde a fait allusion, est le danger de l'extrémisme. Nous avons assisté en 2002 à un tremblement de terre démocratique. Oui, un parti extrémiste en France, et encore on ne compte pas les extrémistes de gauche, est arrivé second aux élections présidentielles.
C'est de la faute à Lionel Jospin et à Jean-Pierre Chevènement. Je n'ai pas de réponse, mais je voudrais en parler avec François et aussi avec vous : comment allons-nous faire pour éviter qu'un parti extrémiste arrive au deuxième tour en 2007 ?
En posant ces questions, je cherche à ce que l'UDF soit le premier parti de France, qu'il sache rassembler au-delà des diversités, parce que, et je terminerai sur cette belle phrase qui également inspire mon action politique : "Quand les hommes cherchent, quand ils doutent, quand ils se chamaillent parfois, faites leur construire un pont ensemble et vous en ferez des frères !
Source http://www.udf.org, le 15 juin 2006