Interview de M. Bernard Accoyer, président du groupe parlementaire UMP à l'Assemblée nationale et député UMP, à France-Info le 27 juin 2006, sur les relations entre l'UMP et le gouvernement.

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Média : France Info

Texte intégral

Q- On va parler des propos de Chirac, hier soir à la télévision. Mais d'abord un petit mot. Ce soir, il y a une séance à l'Assemblée. Vous n'allez pas pouvoir suivre le match.
R- Oui, il y a une séance, mais je pense que le début, la reprise des travaux de la séance du soir sera un petit peu décalée.
Q- Vous avez demandé une suspension de séance pendant le match.
R- Je crois que la conférence des présidents le prévoira.
[2ème partie]
Q- Les parlementaires UMP ont multiplié les gestes de mécontentement, pour ne pas dire de défiance, à l'égard du Premier ministre ces derniers temps. De toute évidence, J. Chirac n'en a cure, êtes-vous amer ce matin ?
R- Non, pas du tout, c'est vrai qu'il y a eu quelques voix qui se sont exprimées ici ou là. Mais le président de la République a su hier bien fixer le cap, il a levé toute ambiguïté et il a expliqué pourquoi on ne pouvait pas marquer le pas, on ne pouvait pas perdre du temps et qu'il fallait se concentrer sur les priorités que vous venez de rappeler d'ailleurs qui sont l'emploi, le pouvoir d'achat, la sécurité.
Q- On ne va pas faire de la langue de bois. Quand on rencontre les parlementaires UMP en ce moment, ils vous disent tous la même chose : "D. de Villepin est en train de plomber la majorité, on craint pour notre réélection de l'année prochaine". La plupart souhaitent quand même le départ de D. de Villepin, ils n'ont pas été entendus ?
R- Non, je ne partage pas cette vision. Encore une fois, quelques-uns se sont exprimés, il y en aura peut-être quelques-unes, elles resteront très isolées. Mais maintenant, les choses sont claires : en politique comme en toute chose, il faut savoir où l'on va, où l'on veut aller et pourquoi on y va. Où l'on va ? L'on va travailler pour compléter un bilan dont il faut rappeler combien il est important : en matière d'emploi, en matière de sécurité, en matière de sauvegarde du pacte social, et où l'on va aller sans s'arrêter. Il faut continuer à poursuivre ces réformes parce qu'il y a un élan qui maintenant est positif. Et si l'on s'arrêtait quelques mois, par exemple pour un changement de Gouvernement, comme l'a expliqué hier le président de la République, ce serait un temps perdu. Et un quinquennat - sans vouloir enfoncer les portes ouvertes - c'est cinq ans. Et c'est une nouveauté qui montre et qui exige que l'on ne perde pas de temps. C'est cela qu'a dit le président de la République et je ne doute pas que la majorité, désormais avec cette feuille de route précise, avec ce tempo précis avec ces objectifs précis, pourra poursuivre son action.
Q- Cela veut dire que tous les parlementaires de l'UMP vont faire corps avec D. de Villepin maintenant ?
R- Chacun doit faire son travail, le président l'a dit, sans se laisser distraire, chacun doit faire son travail. Le Gouvernement va continuer de proposer un certain nombre de réformes, d'améliorations de ce qui a déjà été fait et d'ouvrir d'autres domaines. Hier, on a entendu parler de l'orientation. Et puis la majorité travaillera les textes, en amont, comme a insisté le président. Il a insisté sur la nécessité d'une concertation, d'une plus grande concertation, d'une plus grande écoute avec les parlementaires, ce qui sera une amélioration, c'est vrai, ce qui permettra, je n'en doute pas, d'avancer.
Q- Prenons un exemple concret : une session extraordinaire aura donc lieu en septembre pour voter la fusion GDF/Suez. Pour le moment, la majorité autour de ce texte n'existe pas. Croyez-vous que cela va changer pendant l'été ?
R- Oui, d'abord parce que l'on a dit un petit peu tout et son contraire...
Q- Donc les parlementaires de l'UMP sont des godillots...
R- ...tout et son contraire sur cette affaire de GDF et de fusion avec Suez. Il y a un besoin d'explication, c'est en train de se faire. On a vu qu'une grande centrale , une confédération telle que la CFDT, avait fait savoir qu'elle était favorable à cette perspective, favorable pour le coût du gaz - je veux dire pour les consommateurs - favorable pour l'emploi, c'est-à-dire les 60.000 emplois de Suez en France, cela n'est pas rien. Tout cela les parlementaires l'entendent, ils ont des rencontres avec les syndicats, avec les milieux économiques. Et, bien entendu, que la réflexion continue et, au mois de septembre, la question viendra d'abord à l'ordre du jour en commission et ensuite dans l'hémicycle.
Q- A vous entendre, tout va pour le mieux dans la majorité. J. Chirac a quand même dit : "il faut que D. de Villepin soit plus à l'écoute de sa majorité". Concrètement, comment cela pourrait se caractériser, est-ce que vous demandez des choses à D. de Villepin ?
R- C'est une façon de travailler qu'il convient de renforcer qui consiste à préparer le plus en amont possible les décisions qui sont du ressort du Parlement, c'est à dire évaluer leur impact leur contenu, les régler au mieux en fonction de ce que les parlementaires entendent, ressentent sur le terrain. Parce que le rôle d'un parlementaire, c'est cette interface entre le terrain, les Français et le Gouvernement.
Q- Justement, ils ont l'impression de ne pas être entendus.
R- C'est pour cela que le président de la République a recommandé une meilleure écoute des parlementaires au Gouvernement.
Q- Que doit faire D. de Villepin ?
R- Exactement suivre la route que le Président a indiqué, la feuille de route que le Président a indiqué, c'est-à-dire s'appuyer sur un bilan qui est excellent et qui était inconnu jusque là sous la Vème depuis le début de cette législature, le renforcer, le compléter dans les directions que nous avions indiquées tout à l'heure, et le faire dans la concertation avec les parlementaires c'est à dire avec les Français.
Q- Vous avez entendu J. Chirac nier la réalité Villepin-Sarkozy - ce n'est pas un problème - c'est votre opinion aussi ?
R- Il y a une émulation comme partout parce que les hommes sont des hommes. Mais si chacun, comme le dit le président de la République, ne se laisse pas distraire et se consacre à la tâche qui lui est assignée, à la responsabilité qui est la sienne, les tensions auxquelles vous faites allusion seront dépassées par l'élan, par le travail et par l'action.
Q- Mais cela n'aurait pas été un grand service à rendre à la majorité pour J. Chirac que d'adouber N. Sarkozy par exemple ?
R- Mais la démocratie ne fonctionne pas comme cela, il y a une liberté qui est laissée aux citoyens, aux élus aux responsables politiques. Il est de leur ressort personnel de clarifier leur position afin de rendre leur action encore plus lisible et efficace.Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 29 juin 2006