Déclaration commune de M. Dominique de Villepin, Premier ministre, et de M. Jean Charest, Premier ministre du Québec, sur les relations franco-québécoises, Paris le 6 juillet 2006.

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Circonstance : Conférence de presse à l'occasion de la visite du Premier ministre du Québec en France le 6 juillet 2006

Texte intégral


Dominique de VILLEPIN : Permettez moi de dire d'abord tout le plaisir et le bonheur même que j'ai de recevoir ici mon ami le Premier ministre québécois Jean CHAREST. Nous avons bien sûr eu l'occasion d'échanger sur tous les sujets mais je voudrais d'abord réaffirmer la place particulière qu'occupe le Québec pour la France, la place particulière qu'occupe le Québec dans le coeur des Français. C'est à la fois les liens de l'histoire et les liens du coeur qui sont au rendez-vous aujourd'hui.
Je le dis avec beaucoup d'émotion parce que le Québec, c'est bien sûr un élément de l'identité partagée que nous avons les uns et les autres ; c'est vrai sur le plan culturel, c'est vrai dans tous les domaines qui nous rassemblent. Et puis nous voulons défendre cette ambition partagée entre le Québec et la France, à la fois sur le plan politique et le 400ème anniversaire du Québec sera l'occasion pour la France de montrer à quel point son attachement au Québec est un attachement profond, complet. Et Jean-Pierre RAFFARIN qui est le commissaire chargé de cet anniversaire veut avancer et nous tous avec lui. Nous avons de nombreux projets, à la fois des projets culturels avec une exposition du musée du Louvre, des projets dans le domaine économique avec une rencontre de nos entreprises. La France veut porter un projet d'un parc de l'Amérique française au Québec.
Nous voulons également développer nos relations sur le plan politique et les combats que nous menons ensemble pour la diversité culturelle sont autant de liens partagés, d'une volonté partagée, d'un effort fait en commun pour défendre ces valeurs. C'est vrai aussi sur le plan économique où force est de constater que nos entreprises travaillent bien dans le pays de l'autre : 15.000 emplois crées du côté français par les investisseurs français au Québec, 25.000 emplois crées par les investisseurs québécois en France, ce sont des liens très très profonds et nous souhaitons encourager encore davantage cette mobilité.
Beaucoup de Français souhaitent s'implanter chaque année au Québec et nous souhaitons faire en sorte que les échanges soient encore davantage possibles, que cette mobilité soit tous les jours davantage possible et saisir toutes les occasions qui permettent de rapprocher nos deux nations. C'est véritablement une ambition commune et un lien très fort que nous voulons faire vivre.
Jean CHAREST : Merci Dominique. Je vais prendre le ballon au vol pour dire au Premier ministre que la France fait partie de l'identité québécoise et même canadienne. Et aujourd'hui, cela a été l'occasion de se rappeler à quel point les relations que nous avons sont des relations uniques. Je ne connais aucun modèle, aucun exemple ailleurs sur la planète de deux nations, de deux peuples qui entretiennent des relations aussi fécondes que celles qui existent entre le peuple québécois et le peuple français. A un point tel que l'on suit de très près tout ce qui se passe au mondial de foot ; cela a été l'occasion d'écouter votre entrevue hier soir, de fêter avec les Français.
Et aujourd'hui, en faisant le point sur nos relations qui sont politiques, culturelles ; sur le plan économique aussi, je constate deux progrès très importants. D'abord, la relation se déploie maintenant beaucoup au niveau des régions, ce qui est unique, et en plus, cette volonté d'aller ailleurs ensemble dans le monde. Cela témoigne à mes yeux du niveau de maturité dans la relation qui n'existe pas ailleurs. Deux peuples qui partent ensemble sur les chemins à l'étranger, c'est unique. On l'a fait une première fois au Mexique. Aujourd'hui, on a eu l'occasion de s'en reparler à nouveau et on aura l'occasion, je l'espère, de le faire à l'avenir. Et cela a été l'occasion aussi de réitérer à quel point nous sommes fiers de ce succès à l'UNESCO avec la convention sur la protection et le promotion de la diversité des expression culturelles. A nos yeux à nous, Québécois, il est extrêmement important que la France et nous puissions continuer à travailler ensemble à la mise en oeuvre de la convention et on s'est engagés mutuellement à tout faire pour que ça puisse être fait le plus rapidement possible. Merci beaucoup.
Dominique de VILLEPIN : Est-ce que vous avez des questions ?
Journaliste : Vous deviez venir au Québec. Le voyage a été annulé. Cela casse le rythme des visites alternées. Ca veut dire que vous renoncez à ce voyage ?
Dominique de VILLEPIN : Certainement pas ! L'entretien et le plaisir que j'ai eu de retrouver Jean m'ont donné plus envie encore de revenir très vite au Québec. J'y suis profondément attaché. D'abord parce que c'est une terre que je connais bien et que j'aime. C'est une terre qui vit à travers d'expressions culturelles de chanteurs, de poètes, d'écrivains, de cinéastes. Donc c'est une terre très fraternelle. Et je souhaite que nous puissions au cours des prochains mois trouver le temps ; en tout cas, croyez bien que de mon côté ce sera certainement ma prochaine destination.
Journaliste : Votre agenda est quand même un peu serré ?
Dominique de VILLEPIN : Oui, mais vous savez, l'amitié fait que les agendas se desserrent.
Jean CHAREST : Et nous évidemment, on va s'ajuster. On comprend très bien les contraintes que le Premier Ministre français a devant lui. Les échéanciers sont toujours très courts mais à n'importe quel moment, on serait très heureux d'accueillir Dominique de VILLEPIN.
Dominique de VILLEPIN : On a une petite Coupe du Monde à régler et je garde espoir qu'on puisse faire ça assez vite. Et enfin on pourra trouver une date assez rapidement.
Journaliste : Sur le cas du 400ème anniversaire, tout est à peu près fixé sur les grands principes et sur les grands projets ?
Dominique de VILLEPIN : On en a parlé avec Jean CHAREST. Les choses avancent bien. Jean-Pierre RAFFARIN met beaucoup d'énergie, beaucoup de volonté et beaucoup de talent. Mais nous avons à coeur de faire en sorte que ce soit vraiment un rendez-vous exceptionnel. Ce que je souhaite, c'est qu'on saisisse toute la vitalité de cette relation entre le Québec et la France pour arriver à toucher le coeur de nos deux nations. Plus nous pourrons faire en sorte que nos créateurs se rencontrent, que nos entrepreneurs se rencontrent, que nos peuples se rencontrent, plus nous serons, à mon avis, à la justesse de ce rendez-vous. Donc nous n'aurons de cesse jusqu'à la date dite en 2008 de perfectionner ce rendez-vous et de faire en sorte que ce soit un vrai grand rendez-vous entre le Québec et la France.
Jean CHAREST : Et nous on est très impressionnés par la forte mobilisation de la partie française, la nomination de Jean-Pierre RAFFARIN. Pour nous, ça a été un signal très fort du Président CHIRAC, du gouvernement français et là, il est très ambitieux Jean-Pierre. Il nous a fait un plan de travail qui doit maintenant nous forcer du côté québécois à répondre et on est très très heureux. Mais comme le Premier Ministre le dit, c'est l'occasion de faire un rappel historique.
Dominique de VILLEPIN : Le 400ème anniversaire, parce que 400 ans ce n'est quand même pas rien, sera un moment formidable pour la jeunesse de nos deux nations. Moi, je me rappelle, je n'étais pas très vieux, j'étais amoureux d'une québécoise. Donc je peux dire que les liens entre les jeunes Québécois et les jeunes Français, c'est important pour moi.
Jean CHAREST : Vous ne voulez pas nous donner un nom ?
Dominique de VILLEPIN : Je ne donnerai pas de nom mais on était en classe ensemble à New-York en plus. Mais c'est vraiment quelque chose qui me touche. Vous savez quand les Français écoutent Céline DION, Garou, Gilles VIGNAULT, Robert CHARLEBOIS, c'est une part d'eux-mêmes. Donc, je veux que de part et d'autre, et bien cette proximité, cette identité, cette fraternité soient un lien commun. Et comme l'a très bien dit Jean, c'est une relation unique et vous savez quand c'est unique, on en prend soin. Tel le Petit Prince, on apprivoise sa rose tous les jours. Et bien nous, c'est pareil, on veut apprivoiser le bonheur de cette relation franco-québécoise tous les jours.
Jean CHAREST : J'ai été impressionné hier soir. Je n'avais aucune idée que tous les soirs sur les Champs-Élysées, il y avait 500.000 à 800.000 personnes qui se réunissaient pour faire la fête et nous on a craint cette montée trop vite dans les sondages. Alors, on va essayer de ralentir un petit peu.
Dominique de VILLEPIN : Il y un bon proverbe corrézien qui est un proverbe que le Président de la République a à coeur de citer en toute circonstance : « Il faut mépriser les hauts et repriser les bas ». En matière de sondages, c'est la seule règle qui vaille.
Dominique de VILLEPIN et Jean CHAREST : Merci beaucoup.Source http:www.premier-ministre.gouv.fr, le 10 juillet 2006