Déclaration de Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, sur le rôle de l'ambassadeur comme pivot de la politique de coopération dans la Zone de solidarité prioritaire, à Paris le 30 août 2006.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Brigitte Girardin - Ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie

Circonstance : XIVeme conférence des ambassadeurs, du 28 au 30 août 2006-table ronde sur la Zone de solidarité prioritaire, à Paris le 30 août 2006

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames, Messieurs,

Dans les pays de la Zone de solidarité prioritaire (ZSP), le rôle de l'ambassadeur comme pivot de notre politique de coopération est particulièrement crucial. Comme je l'ai déjà dit à plusieurs d'entre vous, vous vous devez d'être des ambassadeurs développeurs.
Je ne reviendrai pas sur les orientations que j'avais détaillées en introduction de la conférence. Vous aurez compris l'importance que le gouvernement attache à une mise en oeuvre effective des conclusions du dernier CICID, qu'il s'agisse en particulier des migrations ou des enjeux d'échelle planétaire.
Mais je voudrais surtout évoquer avec vous aujourd'hui la question de votre rôle en tant que chef de file sur le terrain de l'aide au développement française, tel qu'il a été défini lors de la réforme de 2004-2005.

Environ un an après le début de la mise en oeuvre de cette réforme, le bilan est globalement satisfaisant :

  • nous avons clarifié les rôles respectifs de l'Agence française de Développement (AFD) et des Services de coopération et d'action culturelle (SCAC) ;
  • 16 Documents-cadre de partenariat (DCP) ont déjà été signés et 4 le seront dans les semaines qui viennent.

S'agissant de ceux d'entre vous qui résident dans des pays où le DCP n'a pas encore été signé, je vous encourage à chercher toute occasion pour le faire, que ce soit dans votre pays de résidence ou en France. Bien entendu, il faut que les conditions soient réunies pour cela. En particulier, il serait inapproprié de signer un document de programmation à cinq ans avec des autorités de transition.
Je vous invite donc à vous approprier pleinement le DCP. C'est à l'ambassadeur que revient la tâche de conduire la négociation avec les autorités de son pays de résidence, sur la base des instructions reçues de Paris.

Je voudrais de ce point de vue en appeler à votre rôle de chef de file à un triple titre :

  • Premier rôle, dans le contenu des DCP. Je vous demande d'intégrer pleinement, dans tous les pays où cela se justifie, la problématique migratoire - c'est-à-dire l'effort que nous devons consacrer à une meilleure régulation des flux migratoires. Nos projets de coopération doivent notamment s'orienter vers les régions source d'immigration pour y créer les emplois destinés à fixer les populations Je vous demande aussi d'intégrer notre coopération militaire, lorsqu'elle existe, car je ne vois pas pourquoi il faudrait continuer à faire cette distinction avec la coopération civile alors que dans de nombreux domaines, l'humanitaire, par exemple, nous agissons ensemble.
  • Deuxième rôle, pour rassembler les différentes parties impliquées. Comme je l'évoquais en plénière, cela concerne en premier lieu les services de votre ambassade. Ce n'est pas au seul conseiller de coopération et d'action culturelle de gérer l'ensemble du DCP, même s'il y joue un rôle crucial. Tous vos services doivent être impliqués. En effet, comment être efficace sur la question migratoire sans les services consulaires ? Comment bien dialoguer avec les entreprises sans les missions économiques ? Comment parler de sécurité sans les services du Service de coopération technique internationale de police (SCTIP) ou la coopération militaire ? Comment bien intégrer les contraintes techniques sans associer les opérateurs de terrain, qu'il s'agisse notamment de l'AFD, de l'Institut de recherche et de développement (IRD) ou de la nouvelle agence Culture France ? Enfin, n'hésitez pas non plus à associer les acteurs non étatiques, comme les collectivités locales, les ONG ou les entreprises.
  • Troisième rôle, une fois le DCP signé, pour le faire vivre. D'une part parce qu'une stratégie doit pouvoir être évolutive. Il faut être capable d'en signer des avenants. Mais en premier lieu, parce qu'il faut auparavant s'assurer de l'effectivité de la mise en oeuvre de ce qui a été signé. Je vous demande d'organiser sur place chaque année, sous votre présidence personnelle, une réunion de suivi et de bilan. Je crois utile que vous discutiez aujourd'hui lors de cette table ronde d'orientations qui pourront servir de guide à cette réunion annuelle de suivi du DCP. Je demanderai à Philippe Etienne de me faire des propositions sur la base de vos discussions. Mais je voudrais vous donner quelques lignes directrices. Il s'agit d'être à la fois précis et stratégique. Soyez vigilant sur les orientations de notre aide, veillez au respect des engagements pris dans les DCP, mais n'entrez pas dans une micro-gestion à la place des opérateurs français. Il s'agit également d'être rigoureux dans le calendrier. Le premier DCP a été signé avec le Cambodge en septembre 2005. C'est donc dans les prochaines semaines qu'il faudra faire cette revue. Enfin, il s'agit d'être pleinement partenarial. Veillez à associer le pays cosignataire, mais également tous les services et opérateurs de l'Etat, ainsi que tous les acteurs non étatiques et, bien entendu, les autres bailleurs de fonds.

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, avant de conclure, je voudrais vous dire également un mot des ressortissants français dans vos pays de résidence, et en particulier de ceux qui ont cotisé à des caisses de retraite et qui ne reçoivent pas la retraite méritée. Nous avons engagé un processus de règlement de ce douloureux dossier, selon trois axes forts :

  • premièrement, sur le plan diplomatique, nous sommes prêts, auprès de tous nos interlocuteurs gouvernementaux, et y compris au plus haut niveau, à demander avec la fermeté maximale, aux pays défaillants le paiement des retraites dues ; l'ambassadeur doit lui-même saisir toute occasion en ce sens.
  • deuxièmement, nous sommes prêts à appuyer par tous moyens des audits qui permettront de faire valoir les droits des ressortissants français. Nos consulats doivent jouer un rôle particulier en la matière ;
  • troisièmement, nous sommes prêts, pour le paiement des retraites des Français, à prélever une partie des sommes affectées à l'aide publique au développement aux pays non respectueux de leurs obligations.

Je vous demande d'être particulièrement vigilant, si votre pays de résidence est concerné, sur cette question. Au-delà du rôle des consulats, notre position et notre action, doivent d'ailleurs être affirmées et soutenues par l'ensemble de nos outils et structures de coopération. Il ne s'agit bien entendu pas de faire de grandes déclarations et de susciter des demandes nouvelles abusives de retraite. Il s'agit avant tout d'être à l'écoute des Français qui manifestent leurs demandes légitimes et de leur apporter tout l'appui de la République française. Il ne s'agit pas non plus de démobiliser les autorités de votre pays de résidence en leur laissant entendre que la France se substitue à eux, et sans conséquence pour eux, ce qui serait faux. Il s'agit d'être ferme avec ces autorités sur le respect de leurs engagements.
Voilà, Mesdames et Messieurs les ambassadeurs,
Je vous souhaite d'excellents échanges.

Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 6 septembre 2006