Texte intégral
Q- L'article 10, c'est-à-dire la privatisation même de GDF, est en discussion à l'Assemblée cet après-midi. Vous êtes contre cette privatisation, mais vous êtes plutôt pour le rapprochement Suez/GDF. Expliquez-nous comment on fait ?
R- Nous sommes pour un projet industriel qui permette un rapprochement de ces deux entreprises, mais nous avons proposé une autre solution que celle de la privatisation, c'est-à-dire tout simplement des participations croisées, de GDF dans le capital de Suez et de Suez dans le capital de GDF, de telle façon...
Q- Ça revient au même, non ? Cela finit par privatiser par vases communicants.
R- Non, non, puisque ça permettait à l'Etat de rester majoritaire dans le capital de GDF. Mais l'important aujourd'hui c'est de se dire qu'il faut répondre à une décision des chefs d'Etat européens, c'est d'ouvrir la concurrence de l'électricité et du gaz, de l'énergie, à partir de 2007, et faire en sorte que les entreprises françaises aient la capacité de répondre à la concurrence, puisque GDF et EDF ne peuvent pas fusionner, à l'inverse de ce que certains proposent, tout simplement parce que ça ferait un monopole en France...
Q- Certains à gauche et certains syndicats aussi.
R- Certains à gauche, mais certains à droite aussi, le problème n'est pas un débat droite/ gauche. Regardez ! Le reproche qu'on fait à ce rapprochement GDF/ Suez c'est que ces entreprises vont laisser ce qu'on appelle les actifs, en Belgique, pour qu'il n'y ait pas de monopole de cette nouvelle entreprise, mais en France, s'il y avait une fusion des deux, EDF serait obligé de se démanteler et d'une façon très importante, c'est ce que nous ne voulions pas, c'est pour ça que nous sommes pour le rapprochement sans privatisation.
Q- Alors, N. Sarkozy avait promis que l'Etat ne descendrait pas en dessous de 70%, il l'avait promis en 2004. L'opposition dit aujourd'hui : " il a trahi ". C'est votre sentiment aussi ? Sarkozy a trahi ?
R- On est face à un problème de la parole publique. Quand un gouvernement, un ministre propose une loi une année, qui dit "on ne descendra pas en dessous de 70%", et que ce même gouvernement, avec ces mêmes ministres, font l'inverse au bout d'un an, on a un problème de parole publique, c'est un des problèmes qu'on a dans le débat politique dans notre pays. La parole c'est quelque chose d'important, d'autant plus que je suis persuadé qu'à cette époque-là déjà, monsieur Sarkozy savait que pour GDF particulièrement, nous serions face à ce problème.
Q- Si le Gouvernement utilise le 49.3, ça sera un scandale ?
R- C'est du débat, je dirais, de la part des responsables politiques.
Q- Vous, en revanche, vous avez la responsabilité du débat dans la rue, vous les syndicats, or vous n'irez pas manifester le 3 octobre, pourquoi ?
R- Parce que c'est faire croire aux salariés de GDF que le rapprochement avec Suez est quelque chose auquel on peut échapper. Le pragmatisme, ce qui veut dire la vision de la réalité, fait que si on veut sauvegarder une entreprise comme GDF, il faut des alliances de GDF en Europe, parce que GDF est trop petit pour s'en sortir tout seul.
Q- 20.000 emplois supprimés, disent les autres syndicats en brandissant une étude. Vous contestez ce chiffre ?
R- Oui. Nous avons un engagement des entreprises qu'elles créeront 1.000 emplois par an. Alors qu'est-ce que c'est que ces 20 000 emplois ? C'est simplement ces fameux actifs que l'Europe va demander à ces entreprises de céder, en particulier en Belgique, qui seront repris par des autres entreprises, donc c'est des emplois qui ne resteront pas dans le groupe, mais qui continueront à exister dans d'autres entreprises, donc ce n'est pas des suppressions.
Q- Alors les partenaires sociaux devaient se rencontrer demain pour parler assurance chômage. Est-ce que la réunion aura lieu ?
R- Je ne pense pas. Madame Parisot nous a proposé d'élargir le débat, d'une part garder l'objectif de parler de la mise à plat de l'assurance chômage, ce qui est un engagement des partenaires sociaux lors de l'accord Unedic, mais d'élargir à d'autres débats, en particulier regarder le fonctionnement des contrats de travail dans notre pays, étudier les propositions des organisations syndicales sur la sécurisation des parcours professionnels, c'est-à-dire quelles sont les garanties nouvelles qu'on construit pour les salariés, et à partir de là d'ouvrir éventuellement des négociations. Il nous semble qu'il faut qu'on trouve une date maintenant, dans les jours qui viennent, pour le faire.
Q- Ça vous semble une bonne idée d'élargir la plate-forme des discussions ?
R- On est, dans notre pays, face à une drôle de contradiction. Les syndicats, on a l'habitude de dire au gouvernement, " ne décidez pas sans nous ", rappelez-vous le CPE, ça a fait une crise tel qu'on le voit rarement dans notre pays. Et aujourd'hui je serais dans une démarche de dire " je ne vais pas discuter avec le patronat parce qu'il y aurait tel et tel piège. "
Q- La CGT, elle, trouve que c'est un piège.
R- Mais il faut aussi que tous les syndicats soient logiques. On ne peut pas d'un côté reprocher aux politiques de décider toujours sans nous, sans nous prendre de responsabilités et de dialoguer avec le patronat. Nous ne sommes pas encore à une négociation, nous sommes simplement à une mise à plat du système pour voir qu'est-ce qu'on peut améliorer, c'est la moindre des choses que peuvent faire les partenaires sociaux. Il n'y a qu'en France qu'on se pose ces questions-là.
Q- Alors vous parlerez, dans cette future réunion, contrats de travail. Un CDI plus souple qu'on peut rompre plus facilement, est-ce que ce n'est pas la modernité ?
R- Mais le débat n'est pas, aujourd'hui, sur ce sujet-là, le débat est de savoir quelles sont, face à la précarité qui s'installe dans notre pays. La précarité elle existe. Regardez, les emplois qui ont été créés ces derniers mois du fait du redémarrage de l'économie, on dit à peu près 200.000 emplois, l'OFCE nous dit que c'est 70% des contrats à durée déterminée, donc la précarité est forte dans notre pays. Donc comment on construit un système où on amène de nouvelles garanties pour les salariés face à cette précarité et en échange, plus de souplesse pour les entreprises.
Q- Un CDI souple, c'est peut-être mieux que ces CDD multipliés.
R- Mais le problème n'est pas de savoir si on a un CDI souple ou pas un CDI souple, le problème est de regarder qu'en France on a 5, 6, 7 contrats de travail qui existent, quels sont les effets de ces contrats de travail, en particulier en terme de précarité, ou en terme de difficultés pour les entreprises, et quelles sont les démarches qui pourraient nous permettre de sécuriser mieux les salariés, tout en donnant de la souplesse pour les entreprises.
Q- Alors il y a un contrat de travail qui marche bien, c'est le contrat nouvelle embauche, le CNE. Vous êtes toujours contre ?
R- Mais le contrat nouvelle embauche, vous savez, ces emplois-là, on le voit bien, la relance de l'économie nous montre bien qu'il y a des emplois qui se sont créés. Alors quelle est la part de ce nouveau contrat là-dedans ? Personne ne le sait, on le saura éventuellement à la fin des deux années où vous savez que les entreprises peuvent licencier leurs salariés au bout de 2 ans sans les motiver. Nous avons une démarche juridique, actuellement, qui est en cours, et on fera la démonstration, j'en suis persuadé, que ce contrat est illégal.
Q- Pas de modification du code du travail sans concertation préalable, le président Chirac s'y est engagé. Est-ce que vous avez confiance en lui pour que tout ça soit voté dans une nouvelle loi avant la présidentielle ?
R- Nous avons une opportunité. Tout le monde a dit après la crise du CPE, les partis politiques de droite comme de gauche, les syndicats, le patronat, qu'on ne pouvait pas continuer dans notre pays à faire en sorte que les députés, les parlementaires, les politiques, décident sans les partenaires sociaux, sans laisser un espace à la négociation. Il faut que cet engagement, unanime dans notre pays, s'inscrive dans la loi, pour permettre l'ouverture des négociations systématiques. Il n'y a qu'en France que cela n'est pas réglementé. Il serait temps qu'on fasse un petit peu comme les autres pays européens.
Q- L'unité syndicale était forte au moment du CPE, elle est morte ?
R- Mais l'unité syndicale se fait sur des objectifs précis, lorsqu'on est d'accord pour, ou contrer une revendication gouvernementale ou patronale, ou défendre une autre. Il n'y a pas de raison qu'elle ne se mette pas en route sur d'autres thèmes. On est, par exemple, d'accord dans nos démarches juridiques sur le CNE, donc ne faisons pas en sorte que... l'unité syndicale ce n'est pas un mode de vie, c'est un outil pour faire avancer nos revendications.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 25 septembre 2006
Q- L'article 10, c'est-à-dire la privatisation même de GDF, est en discussion à l'Assemblée cet après-midi. Vous êtes contre cette privatisation, mais vous êtes plutôt pour le rapprochement Suez/GDF. Expliquez-nous comment on fait ?
R- Nous sommes pour un projet industriel qui permette un rapprochement de ces deux entreprises, mais nous avons proposé une autre solution que celle de la privatisation, c'est-à-dire tout simplement des participations croisées, de GDF dans le capital de Suez et de Suez dans le capital de GDF, de telle façon...
Q- Ça revient au même, non ? Cela finit par privatiser par vases communicants.
R- Non, non, puisque ça permettait à l'Etat de rester majoritaire dans le capital de GDF. Mais l'important aujourd'hui c'est de se dire qu'il faut répondre à une décision des chefs d'Etat européens, c'est d'ouvrir la concurrence de l'électricité et du gaz, de l'énergie, à partir de 2007, et faire en sorte que les entreprises françaises aient la capacité de répondre à la concurrence, puisque GDF et EDF ne peuvent pas fusionner, à l'inverse de ce que certains proposent, tout simplement parce que ça ferait un monopole en France...
Q- Certains à gauche et certains syndicats aussi.
R- Certains à gauche, mais certains à droite aussi, le problème n'est pas un débat droite/ gauche. Regardez ! Le reproche qu'on fait à ce rapprochement GDF/ Suez c'est que ces entreprises vont laisser ce qu'on appelle les actifs, en Belgique, pour qu'il n'y ait pas de monopole de cette nouvelle entreprise, mais en France, s'il y avait une fusion des deux, EDF serait obligé de se démanteler et d'une façon très importante, c'est ce que nous ne voulions pas, c'est pour ça que nous sommes pour le rapprochement sans privatisation.
Q- Alors, N. Sarkozy avait promis que l'Etat ne descendrait pas en dessous de 70%, il l'avait promis en 2004. L'opposition dit aujourd'hui : " il a trahi ". C'est votre sentiment aussi ? Sarkozy a trahi ?
R- On est face à un problème de la parole publique. Quand un gouvernement, un ministre propose une loi une année, qui dit "on ne descendra pas en dessous de 70%", et que ce même gouvernement, avec ces mêmes ministres, font l'inverse au bout d'un an, on a un problème de parole publique, c'est un des problèmes qu'on a dans le débat politique dans notre pays. La parole c'est quelque chose d'important, d'autant plus que je suis persuadé qu'à cette époque-là déjà, monsieur Sarkozy savait que pour GDF particulièrement, nous serions face à ce problème.
Q- Si le Gouvernement utilise le 49.3, ça sera un scandale ?
R- C'est du débat, je dirais, de la part des responsables politiques.
Q- Vous, en revanche, vous avez la responsabilité du débat dans la rue, vous les syndicats, or vous n'irez pas manifester le 3 octobre, pourquoi ?
R- Parce que c'est faire croire aux salariés de GDF que le rapprochement avec Suez est quelque chose auquel on peut échapper. Le pragmatisme, ce qui veut dire la vision de la réalité, fait que si on veut sauvegarder une entreprise comme GDF, il faut des alliances de GDF en Europe, parce que GDF est trop petit pour s'en sortir tout seul.
Q- 20.000 emplois supprimés, disent les autres syndicats en brandissant une étude. Vous contestez ce chiffre ?
R- Oui. Nous avons un engagement des entreprises qu'elles créeront 1.000 emplois par an. Alors qu'est-ce que c'est que ces 20 000 emplois ? C'est simplement ces fameux actifs que l'Europe va demander à ces entreprises de céder, en particulier en Belgique, qui seront repris par des autres entreprises, donc c'est des emplois qui ne resteront pas dans le groupe, mais qui continueront à exister dans d'autres entreprises, donc ce n'est pas des suppressions.
Q- Alors les partenaires sociaux devaient se rencontrer demain pour parler assurance chômage. Est-ce que la réunion aura lieu ?
R- Je ne pense pas. Madame Parisot nous a proposé d'élargir le débat, d'une part garder l'objectif de parler de la mise à plat de l'assurance chômage, ce qui est un engagement des partenaires sociaux lors de l'accord Unedic, mais d'élargir à d'autres débats, en particulier regarder le fonctionnement des contrats de travail dans notre pays, étudier les propositions des organisations syndicales sur la sécurisation des parcours professionnels, c'est-à-dire quelles sont les garanties nouvelles qu'on construit pour les salariés, et à partir de là d'ouvrir éventuellement des négociations. Il nous semble qu'il faut qu'on trouve une date maintenant, dans les jours qui viennent, pour le faire.
Q- Ça vous semble une bonne idée d'élargir la plate-forme des discussions ?
R- On est, dans notre pays, face à une drôle de contradiction. Les syndicats, on a l'habitude de dire au gouvernement, " ne décidez pas sans nous ", rappelez-vous le CPE, ça a fait une crise tel qu'on le voit rarement dans notre pays. Et aujourd'hui je serais dans une démarche de dire " je ne vais pas discuter avec le patronat parce qu'il y aurait tel et tel piège. "
Q- La CGT, elle, trouve que c'est un piège.
R- Mais il faut aussi que tous les syndicats soient logiques. On ne peut pas d'un côté reprocher aux politiques de décider toujours sans nous, sans nous prendre de responsabilités et de dialoguer avec le patronat. Nous ne sommes pas encore à une négociation, nous sommes simplement à une mise à plat du système pour voir qu'est-ce qu'on peut améliorer, c'est la moindre des choses que peuvent faire les partenaires sociaux. Il n'y a qu'en France qu'on se pose ces questions-là.
Q- Alors vous parlerez, dans cette future réunion, contrats de travail. Un CDI plus souple qu'on peut rompre plus facilement, est-ce que ce n'est pas la modernité ?
R- Mais le débat n'est pas, aujourd'hui, sur ce sujet-là, le débat est de savoir quelles sont, face à la précarité qui s'installe dans notre pays. La précarité elle existe. Regardez, les emplois qui ont été créés ces derniers mois du fait du redémarrage de l'économie, on dit à peu près 200.000 emplois, l'OFCE nous dit que c'est 70% des contrats à durée déterminée, donc la précarité est forte dans notre pays. Donc comment on construit un système où on amène de nouvelles garanties pour les salariés face à cette précarité et en échange, plus de souplesse pour les entreprises.
Q- Un CDI souple, c'est peut-être mieux que ces CDD multipliés.
R- Mais le problème n'est pas de savoir si on a un CDI souple ou pas un CDI souple, le problème est de regarder qu'en France on a 5, 6, 7 contrats de travail qui existent, quels sont les effets de ces contrats de travail, en particulier en terme de précarité, ou en terme de difficultés pour les entreprises, et quelles sont les démarches qui pourraient nous permettre de sécuriser mieux les salariés, tout en donnant de la souplesse pour les entreprises.
Q- Alors il y a un contrat de travail qui marche bien, c'est le contrat nouvelle embauche, le CNE. Vous êtes toujours contre ?
R- Mais le contrat nouvelle embauche, vous savez, ces emplois-là, on le voit bien, la relance de l'économie nous montre bien qu'il y a des emplois qui se sont créés. Alors quelle est la part de ce nouveau contrat là-dedans ? Personne ne le sait, on le saura éventuellement à la fin des deux années où vous savez que les entreprises peuvent licencier leurs salariés au bout de 2 ans sans les motiver. Nous avons une démarche juridique, actuellement, qui est en cours, et on fera la démonstration, j'en suis persuadé, que ce contrat est illégal.
Q- Pas de modification du code du travail sans concertation préalable, le président Chirac s'y est engagé. Est-ce que vous avez confiance en lui pour que tout ça soit voté dans une nouvelle loi avant la présidentielle ?
R- Nous avons une opportunité. Tout le monde a dit après la crise du CPE, les partis politiques de droite comme de gauche, les syndicats, le patronat, qu'on ne pouvait pas continuer dans notre pays à faire en sorte que les députés, les parlementaires, les politiques, décident sans les partenaires sociaux, sans laisser un espace à la négociation. Il faut que cet engagement, unanime dans notre pays, s'inscrive dans la loi, pour permettre l'ouverture des négociations systématiques. Il n'y a qu'en France que cela n'est pas réglementé. Il serait temps qu'on fasse un petit peu comme les autres pays européens.
Q- L'unité syndicale était forte au moment du CPE, elle est morte ?
R- Mais l'unité syndicale se fait sur des objectifs précis, lorsqu'on est d'accord pour, ou contrer une revendication gouvernementale ou patronale, ou défendre une autre. Il n'y a pas de raison qu'elle ne se mette pas en route sur d'autres thèmes. On est, par exemple, d'accord dans nos démarches juridiques sur le CNE, donc ne faisons pas en sorte que... l'unité syndicale ce n'est pas un mode de vie, c'est un outil pour faire avancer nos revendications.
Source:premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 25 septembre 2006