Déclaration de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, sur l'emploi des réserves des fonds de prévoyance militaire, à Paris le 17 octobre 2006.

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Circonstance : Séance extraordinaire du Conseil Supérieur de la Fonction Militaire, à Paris le 17 octobre 2006

Texte intégral

Monsieur le Secrétaire général,
Mesdames, Messieurs les officiers généraux,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec plaisir que je me retrouve encore une fois parmi vous dans cette séance extraordinaire.
Les événements qui se sont produits depuis la dernière fois que nous nous sommes vus, en juin, ont montré à quel point l'action de nos militaires en France et dans le monde était déterminante pour protéger les Français et assurer la survie et la liberté de populations en détresse.
Ils sont la preuve aussi que le métier du militaire est, chaque jour, un engagement qui comporte des risques. Je pense aux morts que nous avons eus en Afghanistan, mais aussi à la quantité de missions délicates de nos soldats sur de nombreux théâtres d'opération, et notamment au Liban, et de nos gendarmes sur le sol de France.
Je me félicite de voir que ces missions se déroulent avec patience et savoir-faire et sais combien l'appui de la communauté militaire et de la défense tout entière est nécessaire pour continuer à en assurer le succès.
Je salue la mémoire de ceux qui ont payé de leur vie leur engagement au service de la sécurité et de la paix, en France comme ailleurs.
Je voudrais donc rappeler ce qui nous réunit encore aujourd'hui.
Il y a quatre mois, nous étions convenus de nous revoir
Nous avions traité des règles de versement des prestations des fonds de prévoyance, mais non de l'emploi de leurs réserves.
C'est donc l'objet de notre rencontre d'aujourd'hui, comme je vous l'avais promis.
Il y a urgence à traiter la totalité de ce sujet et ce pour plusieurs raisons.
la 1ere est liée à votre métier : vos engagements en opérations se multiplient. Vous payez malheureusement quelquefois le prix du sang, en OPEX ou en mission sur le territoire national. Les avancées prévues dans les décrets doivent être publiées.
la 2e , c'est que je connais la nature de vos préoccupations en matière de condition militaire : la première d'entre elle a trait au logement. Le seul moyen d'améliorer l'offre, c'est de mobiliser les réserves des fonds.
la 3e est que nous avons à présent peu de temps pour conclure. Je porte le dossier en votre nom, mais le temps nous est désormais compté, en raisons des prochaines échéances.
Ce sujet est suffisamment important pour constituer à lui seul l'ordre du jour de cette session.
Les autres sujets de condition militaire seront abordées à la 74e session d'automne.
En revanche, toutes les questions relatives aux fonds doivent être traitées.
I. Je veux d'abord rappeler où nous en sommes
Depuis maintenant plus de quatre ans :
Le Budget se fait fort de récupérer une large partie des réserves des fonds et bloque toute évolution. J'ai du intervenir déjà trois fois au plus haut niveau de l'Etat pour empêcher cette captation.
Cette menace s'est aujourd'hui éloignée, mais cet éloignement n'est que temporaire.
En effet, la menace persistera tant que les réserves excédentaires des fonds resteront inemployées et continueront de croître. Elles représentent aujourd'hui un montant de 656 Meuros.
Cette situation aura eu au moins le mérite de nous forcer à réfléchir à un projet global.
Nous avons progressé, mais le dossier n'est pas clos.
Lors de la 73e session, nous avons traité la question des allocations des fonds et du juste niveau des cotisations.
Je vous avais notamment proposé une évolution des décrets relatifs aux fonds, améliorant sensiblement le niveau des allocations versées et le champ de leurs bénéficiaires.
J'ai retenu en outre les suggestions complémentaires que vous m'avez proposées dans la mesure où elles étaient réalistes et compatibles avec notre calendrier.
Vous avez donné un avis favorable. Les textes sont en cours d'examen interministériel.
Cette fois-ci, nous devons conclure sur la gestion des réserves des fonds
Il nous faut traiter 2 points :
la mise en place d'une structure dédiée à la gestion des fonds ;
une utilisation rationnelle des réserves pour, tout à la fois, disposer de liquidités immédiatement disponibles et pour en mobiliser une partie en faveur de la condition militaire.
Sur ce projet, le Conseil d'Etat nous a aidés mais nous a aussi imposé des contraintes :
Les points favorable de l'avis du 13 juillet sont les suivants :
s'il a établi que ces fonds appartiennent à l'Etat, et non à ses affiliés, il a néanmoins conclu que les réserves ne pouvaient être ponctionnées sans modifier le statut général des militaires, et notamment la clause de sauvegarde que j'avais fait inscrire à son article 12 ;
s'il a rappelé que la finalité des fonds n'était pas d'améliorer la condition militaire, il a admis que des placements de nature immobilière étaient possibles;
il a enfin rappelé que l'Etat, pour satisfaire aux règles budgétaires, devait individualiser ces fonds : soit au sein du budget général, à travers un compte d'affectation spéciale, soit en leur conférant une personnalité morale.
Cela étant, le conseil d'Etat nous a aussi imposé des contraintes qu'il nous faut respecter.
Le placement des réserves nécessite d'abord une rentabilité proche de celle du marché.
Les investissements opérés nécessiteront enfin de satisfaire aux règles prudentielles de diversification des placements et des opérateurs.
La voie est étroite mais la solution que je vous propose me semble correspondre à vos attentes.
Pour y parvenir, l'ensemble des services du SGA a été mobilisé.
Je vous rappelle brièvement ce projet:
S'agissant de la gestion et de la gouvernance des fonds, le Conseil d'Etat proposait deux solutions. Ma préférence va vers l'établissement public : ce statut me semble plus protecteur et permet, sous tutelle du ministère de la défense, de passer des conventions et de contrôler la politique d'emploi des fonds ;
La gestion des fonds sera assurée à travers trois compartiments financiers :
le premier, liquide, permettra de faire face aux risques militaire et aéronautique ;
le second, axé sur l'aide au logement, aura pour vocation d'apporter une aide à la location et à l'accession à la propriété ;
·le troisième permettra, par ses rendements, de faciliter le financement du compartiment précédent et de répondre aux critères de rentabilité fixés par le Conseil d'Etat.
De ce fait, l'intégralité des réserves sera conservée au bénéfice de votre communauté, grâce à une stratégie financière qui sera le meilleur garant de la pérennité des réserves.
En matière de logement, le dispositif que je vous propose complète celui du ministère de la défense .
En effet, il n'est pas question de ralentir notre effort budgétaire en matière de logement : nous y consacrons déjà près de 100 Meuros par an.
Malgré l'effort consenti, les besoins identifiés par notre chaîne du logement ne pourront être satisfaits avant 10 ans.
Le fonds de prévoyance offre par ailleurs l'opportunité de disposer d'un parc supplémentaire pour répondre à la pluralité des besoins de ses affiliés.
Vous l'avez compris, cette session est décisive
Si la partie est gagnée pour la conservation des fonds, les modalités d'exploitation restent à débattre sur le plan interministériel. Vous pouvez compter sur ma détermination.
Cela étant, j'ai besoin de vous, de votre appui, pour pouvoir conclure.
Si nous partageons les mêmes vues, les textes relatifs à l'organisation et la gestion des fonds peuvent être très rapidement lancés dans le circuit interministériel.
Au préalable, cependant, mettons-nous bien d'accord.
Il n'est de réforme réussie que celle pour laquelle les esprits ont mûri et qui suscite l'adhésion des principaux intéressés.
C'est le but de la discussion que je souhaite maintenant mener avec vous.
Source http://www.defense.gouv.fr, le 20 octobre 2006