Déclaration de M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la culture et de la communication, sur la Cité nationale d'histoire de l'immigration, Paris le 2 octobre 2006.

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Circonstance : Lancement officiel du chantier de la Cité nationale d'histoire de l'immigration à Paris le 2 octobre 2006

Texte intégral

Monsieur le Ministre, cher Jacques Toubon,
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Je suis très heureux de vous accueillir aujourd'hui dans ce lieu chargé d'histoire, le Palais de la Porte Dorée, qui abrite d'ores et déjà la Cité nationale de l'histoire de l'immigration. La belle et noble ambition que nous portons tous, celle du « vouloir vivre ensemble », trouve ici un écrin à sa hauteur. Cette Cité est un lieu de mémoire, bien sûr, mais aussi un lieu de réflexion, de partage, d'apprentissage et d'échanges sur le rôle considérable de l'immigration et des immigrés dans notre histoire.
Nous pouvons être fiers de lancer aujourd'hui le chantier, après vingt-sept mois seulement, avant de revenir ici même ouvrir au printemps 2007 l'exposition permanente, au coeur de cet ensemble. Il faut y voir le fruit de l'énergie de Jacques Toubon, qui a porté le projet depuis le début. Il faut également saluer les efforts déployés par les équipes de la CNHI, de l'Etablissement public de maîtrise d'ouvrages des travaux culturels, et du ministère de la Culture et de la Communication. Le ministère est en effet le moteur de ce projet commun, aux côtés des ministères de la Cohésion sociale, de l'Education nationale et de l'Intérieur. Il en finance près de 60% de l'investissement et plus de 40% du budget total jusqu'en 2009.
Si la conduite d'un projet de cette ampleur, dans le respect d'un calendrier si serré, est un motif légitime de satisfaction, la nature même de ce projet doit inspirer la fierté et l'espoir. La Cité nationale de l'histoire de l'immigration est en effet un établissement unique, un lieu ouvert et, par-dessus tout, nécessaire.
Unique tout d'abord, ce projet l'est dans sa conception, associant dans un même lieu et dans une même structure un musée témoignant de la richesse patrimoniale de l'histoire de l'immigration, une médiathèque, un forum, un lieu de découverte, d'expositions et de rencontres artistiques, et un centre de recherches à vocation nationale et internationale.
Je tiens à remercier Mme Hélène Lafont-Couturier, conservatrice en charge, avec ses collaborateurs, de concevoir et d'assembler la collection du musée, pour son travail mené dans des délais inhabituels. Je vous adresse, à tous, tous mes encouragements pour les mois qui nous séparent de l'ouverture au public.
Lieu de mémoire mais aussi de création, la Cité mettra en lumière les regards que portent nos artistes contemporains sur l'immigration, et sur le dialogue des cultures. A l'occasion du colloque organisé jeudi et vendredi derniers à la Bibliothèque nationale, et dont la direction scientifique a été assurée par Nancy Green, historienne et directrice de recherches à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales, c'est le film Indigènes, qui, avant de connaître un grand succès dans les salles, a été projeté en avant-première, en inaugurant brillamment une programmation dédiée à la connaissance du passé, à l'intelligence du présent, et résolument tournée vers l'avenir.
Ouverte ensuite, la Cité nationale de l'histoire de l'immigration sera bien plus qu'un simple lieu, elle sera un réseau. Espace physique et symbolique de rencontre, véritable forum pour toutes les personnes, tous les organismes qui s'intéressent à l'étude de l'immigration et de sa contribution à la culture et à l'identité de la France, elle trouvera sa pleine expression au travers du réseau d'associations, d'organisations syndicales, d'universités, d'administrations et d'entreprises qu'elle anime. Le rôle des associations est évidemment essentiel. Je tiens à saluer chaleureusement l'engagement de l'association Génériques, et de son Délégué général Driss El Yazami, membre du conseil scientifique et culturel de la CNHI, de l'association ELELE, de la Médiathèque des trois Mondes, de l'association Echanges et productions radiophoniques, de l'Association Rhône-Alpes pour le Logement et l'Insertion Sociale, de la Fédération des associations et centres d'Espagnols émigrés en France, de l'association Au nom de la mémoire, et de Mémoires vives.
Ce réseau est à l'origine même du projet, au travers de l'Association de développement des relations interculturelles, puis du groupement d'intérêt public de préfiguration de la Cité. Je forme donc le voeu qu'il reste au coeur de l'établissement dans les années à venir, pour l'animer, lui transmettre son souffle, sa passion et son goût du débat. C'est la diversité de ses partenaires qui lui donnera tout son dynamisme et sa faculté de rayonnement.
Ce lieu sera un véritable creuset, à l'image du creuset français cher à l'historien Gérard Noiriel, qui est également à l'origine du projet.
L'ouverture de la Cité sera aussi marquée par une programmation culturelle originale, conçue par Patrice Martinet, proposant colloques, débats et spectacles, y compris hors les murs, ainsi que par l'accent mis sur la diffusion du savoir, grâce à une politique éditoriale, et à un site Internet qui attire déjà de très nombreux visiteurs.
Enfin, sans attendre l'ouverture officielle, Jacques Toubon m'a fait part de son souhait d'ouvrir le chantier au public, pour en faire un lieu de rencontre entre les futurs visiteurs de l'établissement et ses bâtisseurs. C'est une excellente idée.
Nécessaire, enfin, la Cité nationale de l'histoire de l'immigration l'est par le coeur même de son projet. Cela fait plus de deux cents ans que notre République se construit et se renouvelle sur les principes d'égalité, des droits, des devoirs, des chances, sur la fraternité entre tous les Français, ces mêmes principes qui ont fait de notre pays la patrie des Droits de l'homme, de l'humanisme, et une terre accueillante, généreuse, et ouverte à l'Autre.
Mais, à l'heure où la mondialisation efface les frontières entre les pays, la ségrégation communautariste et les replis identitaires dressent des barrières nouvelles entre les hommes. Je suis convaincu que la Cité nationale de l'histoire de l'immigration a un rôle de tout premier plan à jouer pour maintenir et faire vivre le pacte qui unit nos concitoyens entre eux. Parce qu'elle mettra en lumière les trajectoires de ces hommes, de ces femmes, de ces familles pour qui la France a été un idéal avant de devenir une patrie. Parce qu'elle sera avant tout un lieu d'histoire, qui nous aidera, tous, à considérer, avec recul, ce phénomène ancien, fondateur, constitutif de notre nation et du territoire français, qu'est l'immigration. Oui, c'est à un véritable changement des mentalités, qu'elle invite chacun d'entre nous, à l'ouverture des esprits et des coeurs à cette fabuleuse diversité qui fait toute la richesse de notre société. Diversité des histoires, des héritages et des mémoires, mais aussi diversité des cultures, dont je défends ardemment la préservation et le dynamisme. Parce que je suis convaincu que la culture est un élément clé de notre identité, et qu'elle constitue une réponse adaptée aux inquiétudes, aux fractures, qui traversent notre société.
En développant un accès plus égal à la culture et au savoir sous toutes leurs formes, et en encourageant la diversité des publics, mais aussi de la création et du patrimoine, la Cité jouera un rôle positif en faveur de la cohésion sociale.
Je fais entièrement confiance à l'architecte, Patrick Bouchain, et au scénographe, Pascal Payeur, pour que cet ancien Palais des colonies devienne la nouvelle cité de la connaissance, du respect, de la tolérance et du vouloir vivre ensemble. Dès avril 2007, le public pourra découvrir le hall d'accueil et les salles de l'exposition permanente, en attendant l'ouverture des autres espaces, étalée jusqu'en 2009. Progressivement, la reconquête de l'ancien Palais sera réalisée pour mettre au service du public, du réseau et des chercheurs, cet outil exceptionnel. Je vous donne donc rendez-vous en avril pour l'ouverture de cette Cité, et je souhaite sans attendre le plus grand succès à toutes les équipes qui se sont engagées sur ce magnifique chantier, dans l'accomplissement de leurs missions. Elles ne sont pas seulement belles et utiles, elles sont essentielles pour notre mémoire, et indispensables pour notre avenir.
Je vous remercie.Source http://www.culture.gouv.fr, le 3 octobre 2006