Conférence de presse de M. Philippe Douste-Blazy, ministre des affaires étrangères, sur les questions internationales liées aux dossiers iranien et nord-coréen de prolifération nucléaire, au Liban, au processus de paix israélo-palestinien, aux relations entre la Russie et la Géorgie, au Kosovo et à la crise du Darfour, Luxembourg le 17 octobre 2006.

Prononcé le

Circonstance : Réunion du Conseil Affaires générales et Relations extérieures le 17 octobre 2006 à Luxembourg

Texte intégral

Ce Conseil Affaires générales a été presque exclusivement consacré aux grandes questions internationales, après la session Développement du Conseil à laquelle a participé Brigitte Girardin hier et ce matin.
Nous avons évoqué la Corée du Nord. L'essai nucléaire annoncé par la Corée du Nord le 9 octobre met en cause directement le système international de non-prolifération. Nous devons y répondre avec fermeté.
Les résolutions du Conseil de sécurité doivent être mises en oeuvre sans faiblesse, la résolution 1695 qui avait été adoptée par le Conseil de sécurité à la suite des tirs de missiles de la Corée du Nord en juillet dernier, comme la résolution 1718 du 14 octobre.
Je pense que seule une réponse ferme et claire de la communauté internationale aura valeur d'exemple pour la crédibilité du Conseil de sécurité d'abord et du système multilatéral de non-prolifération de l'autre.
J'ai rappelé à mes collègues européens qu'il fallait travailler ensemble, dès aujourd'hui, à la mise en oeuvre de ces textes. Je me suis prononcé en faveur de mesures européennes dans le cadre des régimes de non-prolifération auxquels nous sommes parties. J'ai également demandé des restrictions en matière de visas à l'égard de la Corée du Nord.
Sur l'Iran, Javier Solana vient de rendre compte de ses dernières discussions avec M. Larijani. Nous avons constaté, qu'en dépit des efforts de l'ensemble de la communauté internationale, les Iraniens refusent toujours toute suspension de l'enrichissement de l'uranium.
Cette attitude met en jeu la crédibilité même du système international et la sécurité internationale. Le refus des Iraniens ne nous laisse aujourd'hui pas d'autre choix que de suivre la voie du Conseil de sécurité. Le Conseil devra adopter des mesures progressives, réversibles et proportionnées aux actions iraniennes, il y travaille ardemment.
Notre objectif demeure, comme nous ne cessons de le dire, celui d'une solution négociée. Nous continuons à appeler Téhéran à revoir sa position et à cesser de répondre par la provocation.
Sur le Liban, nous avons fait le point sur la mise en oeuvre de la résolution 1701, qui progresse avec le retrait des troupes israéliennes en dehors de Gaza et avec le déploiement de la FINUL.
Il faut consolider ces acquis et obtenir la cessation des survols israéliens au-dessus du Liban ainsi que le respect de l'embargo sur les armes.
Nous avons, par ailleurs, de nouveau exprimé notre soutien à la Commission d'enquête internationale et j'ai souligné auprès de mes collègues l'importance de l'établissement d'un tribunal à caractère international, comme l'a demandé le Conseil de sécurité des Nations unies.
J'ai évoqué la prochaine conférence internationale des amis du Liban sur la reconstruction du pays à l'organisation de laquelle il est urgent de travailler avec les Etats-Unis, les pays du Golfe et les institutions financières internationales.
S'agissant du Processus de paix au Proche-Orient, nous sommes revenus sur la situation des Territoires palestiniens qui ne cesse de se dégrader avec des conditions humanitaires à Gaza qui ne sont pas dignes de la communauté internationale. L'Union européenne a reconduit le Mécanisme international temporaire et envisage son extension pour venir en aide aux populations ; je rappelle que depuis plus de cinq mois et demi, les fonctionnaires n'ont pas été payés dans les Territoires palestiniens.
Nous avons réitéré notre appel à la libération sans condition et rapide du caporal Shalit, sans laquelle rien ne sera possible, tant du côté israélien que palestinien.
Nous avons aussi réaffirmé notre soutien au président Mahmoud Abbas et à ses efforts pour parvenir à la constitution d'un gouvernement palestinien d'union nationale qui seul pourrait permettre le sauvetage de l'Autorité palestinienne. J'ai rappelé à mes collègues que seule une médiation extérieure était capable de surmonter l'absence totale de confiance entre les parties et que si l'Union européenne en avait les capacités, elle en avait aussi l'ambition.
Je terminerai en disant qu'avec nos partenaires arabes, nous devons trouver les moyens d'aboutir à la convocation d'une conférence internationale rétablissant les conditions de la confiance et définissant les garanties et assurances nécessaires à une relance.
Enfin, nous avons débattu de la Géorgie et de la Russie, nous avons adressé aux deux partenaires un appel à la retenue et au dialogue qui doit enfin être renoué. Il faut absolument éviter toute mesure qui vise à déstabiliser l'ensemble de la région, c'est pourquoi nous appelons la Russie et la Géorgie à respecter tous les accords, tous les arrangements antérieurs, notamment ceux portant sur les conflits de l'Ossétie du Sud et d'Abkhazie.
Un mot concernant le Kosovo qui nous a pris une très grande partie du déjeuner : les Européens ont apporté leur appui à l'approche du Groupe de contact - j'ai fait partie du Groupe de contact à New York. Vous le savez, nous soutenons tous les efforts de M. Ahtisaari, l'Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies, dans le processus qui est conduit, depuis le début de l'année, en vue d'élaborer une proposition globale sur la situation du Kosovo. Je pense que nous devrons agir avec une solution réaliste mais acceptable par toute la population du Kosovo et garante de la stabilité pour la région.
Nous avons terminé par l'Afrique, qui n'est pas la moindre de mes préoccupations ; je viendrai d'ailleurs à Bruxelles, le 15 novembre, présenter l'initiative UNITAID pendant les Journées européennes de développement.
Nous avons aussi évoqué aujourd'hui la situation dramatique du Darfour. C'est probablement la plus grande crise africaine qui existe puisque c'est en effet le plus grand pays africain, il a 9 pays voisins et parce qu'il y a un triple risque : un risque humanitaire avec, je le rappelle, déjà plus de 300.000 morts, avec plus de 2 millions de personnes déplacées, avec 300.000 réfugiés au Tchad. Il y a aussi un risque politique avec une possibilité de partition du Soudan, avec malheureusement, peut-être pour certains, une remise en cause des accords du Sud qui pourtant ont été signés - accord de paix en 2004 - après 20 ans de guerre civile et enfin, un risque régional, en particulier au Tchad, en Centrafrique, en Ouganda et dans tous les pays voisins.
Devant cela, nous avons un triple objectif, d'abord faire en sorte que l'Union africaine, qui a accepté de rester jusqu'au 1er janvier, puisse bénéficier de tous les moyens nécessaires ; l'Union européenne doit donner les moyens à l'Union africaine pour être efficace. Elle doit également étendre les Accords de paix d'Abuja, c'est ce qui a commencé d'être fait à Khartoum et enfin, il faut aller à Khartoum et je souhaite me rendre là-bas à la fin du ramadan pour pouvoir parler avec les autorités de ce pays pour leur dire qu'il faut à tout prix trouver une solution pour passer de l'Union africaine aux Nations unies le plus rapidement possible. Je rappelle que la résolution 1706 a permis une opération de maintien de la paix, la plus importante jamais votée par le Conseil de sécurité, de près de 20.000 hommes dont 16.000 soldats?Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 octobre 2006