Texte intégral
Travailleuses,
travailleurs,
camarades et amis,
Eh bien oui, j'ai annoncé ma candidature à l'élection présidentielle de 2007. Bien que je n'aie pas tout à fait les 500 parrainages d'élus nécessaires pour pouvoir déposer ma candidature, je n'en suis pas loin. Par ailleurs, j'ai bon espoir de la part de plusieurs dizaines d'élus qui, pour le moment, n'ont pas accordé leur parrainage mais qui ne l'ont pas refusé non plus : ils sont simplement dans l'attente de savoir qui seront les candidats, notamment celle ou celui du PS.
Il faut que, dans cette élection, soient réellement défendus les intérêts politiques et sociaux du monde du travail. Il faut que soit présente une candidature qui exprime clairement que le grand patronat, que la grande bourgeoisie sont les ennemis directs de toute la population. Une candidature qui dise pourquoi et comment la mainmise de la grande bourgeoisie sur l'économie et la société est la cause des maux principaux dont souffre la majorité des travailleurs.
Car, si on nous convoque périodiquement à des élections pour élire des responsables politiques à différents niveaux, dans le domaine économique c'est une véritable dictature où une toute petite minorité de possesseurs de capitaux a le droit de tout faire, fermer des entreprises, délocaliser, licencier, sans avoir de comptes à rendre à quiconque. Et, en dominant l'économie, cette petite minorité domine aussi toute la vie sociale et toute la politique.
Dans ce système économique, la concurrence, la recherche du profit déterminent tout : l'habitat, la santé, la production de biens utiles à la vie de tous, les transports. Tout ce qui est nécessaire à une vie normale exige que sa production rapporte beaucoup de profits, sinon on ne le fabrique pas ou on ne l'assure pas. C'est pourquoi on ferme des entreprises, des hôpitaux, des lignes de chemin de fer et des services. Et, quand on ne les ferme pas, on les laisse à l'abandon.
Voilà pourquoi la pauvreté s'accroît. Voilà pourquoi le niveau de vie baisse.
Pour les plus démunis parmi les travailleurs et parmi les retraités, la situation devient dramatique. Tout devient un problème, même se nourrir quotidiennement lorsqu'il s'agit d'une famille nombreuse, ou se soigner et, avant tout, se loger convenablement. Les retraités ont manifesté il y a deux jours pour protester contre la baisse du pouvoir d'achat des retraités modestes. Leurs pensions déjà faibles n'augmentent pas alors que le coût de la vie augmente. Le pouvoir d'achat n'est pas seulement rogné par l'inflation, par les hausses de prix, mais aussi par toutes ces dépenses supplémentaires qui résultent de décisions qui semblent parfois anodines pour ceux qui ne sont pas concernés. Je veux parler des forfaits de consultation chez les médecins et le déremboursement total ou partiel de certains médicaments, décisions qui, pour les pensions, voire les salaires, les plus modestes, sont dramatiques.
Ce qui pèse le plus sur le monde du travail, au plan matériel aussi bien qu'au plan moral, est certainement le chômage. Il est quand même invraisemblable et révoltant que, dans un pays comme le nôtre, des millions de travailleurs potentiels soient exclus de toute activité sociale, collective, simplement pour que fonctionne leur machine économique faite pour fabriquer du profit en fabriquant des chômeurs !
A écouter les ministres, tout va très bien, Madame la Marquise ! Le chômage baisse, la situation s'améliore. Ils mentent pire que des arracheurs de dents !
Qui, parmi les travailleurs, ne voit la pauvreté qui monte ? Qui, parmi les travailleurs, ignore que, lorsqu'on a perdu un emploi stable, on a peu de chances de trouver autre chose qu'un emploi précaire mal payé ? Qui, dans les familles ouvrières, ne sait qu'un jeune n'a pratiquement aucune chance d'entrer dans la vie active autrement qu'en galérant d'intérim mal payé en stage pas payé du tout ?
Et les pires mesures anti-ouvrières sont prises, bien sûr, au nom de l'intérêt de tous ! Les forfaits, les déremboursements de médicaments, ce serait pour sauver la Sécurité sociale !
Les contrats comme le CNE qui permettent aux patrons concernés de licencier quand et comment ils veulent pendant deux ans, ce serait pour créer des emplois !
Les contrats séniors qu'ils viennent d'inventer et qui permettent aux patrons d'embaucher pour pas cher des anciens, pour un CDD de 18 mois, renouvelable une seule fois, ce serait pour aider les vieux !
Ces politiques qui nous gouvernent sont aux ordres. Ils exécutent ce que le patronat leur demande et, en plus, ils assurent le service après vente. C'est à eux de justifier, de rendre acceptables les pires infamies patronales contre les travailleurs.
Les mensonges de la propagande gouvernementale, relayée par toutes les télés et radios, ne sont pas destinés au monde du travail, mais aux catégories sociales qui vivent une vie confortable et qui ne demandent qu'à croire que les travailleurs, et même les chômeurs, ne connaissent pas leur chance de vivre dans un pays comme la France !
Les larbins du grand patronat présentent la recherche du profit à tout prix non seulement comme un droit mais même comme un devoir sacré pour les entreprises. C'est au nom du profit qu'on impose sur les chaînes de production des cadences de plus en plus démentes ; qu'on impose dans les super et hypermarchés un rythme de travail insupportable ; c'est encore au nom du profit qu'on rogne les minutes de pause.
Et pourquoi faire, ces profits ? Même pas pour investir dans la production afin de créer, au moins plus tard, des emplois supplémentaires ! Non, le profit est pour l'essentiel englouti par la classe riche, encaissé comme revenu. Et la part qui ne l'est pas ne sert aux entreprises qu'à racheter l'entreprise concurrente, mettre la main sur son marché et, surtout, sur ses ouvriers qui, seuls, ont la capacité de suer du profit. Du moins, sur ceux qui ne sont pas licenciés sous prétexte de restructuration.
La société, l'Etat n'exercent aucun contrôle sur les conseils d'administration des grandes compagnies industrielles et financières. Pire, ceux qui les possèdent peuvent décider librement de la meilleure façon de gagner plus. Et, pour eux, tant pis si cela pousse à la misère des fractions croissantes de salariés, tant pis pour ceux qui en crèvent !
Eh bien, dans cette campagne, il faut qu'il y ait au moins quelqu'un qui puisse dire que c'est à ce système-là qu'il faut s'en prendre vraiment. Quelqu'un qui proclame qu'aucun des représentants des grands partis, aucun de ceux ou de celles qui ont une chance d'accéder à la présidence, ne le dit. Ils rivalisent de grandes phrases sur l'avenir de la France, sur le bonheur du peuple. Mais aucun d'entre eux n'osera s'en prendre au grand patronat et à ses intérêts, même pas en paroles, même pas par démagogie.
Alors, il ne faut pas être dupe des hommes et des femmes politiques qui occupent le devant de la scène. Ce ne sont pas eux qui détiennent le véritable pouvoir.
Alors, bien sûr, ils ne tiennent pas tous le même discours. Il faut bien que les électeurs les distinguent les uns des autres pour qu'ils aient le sentiment qu'ils ont un choix réel. De plus, les uns et les autres n'ayant pas le même électorat ne cherchent pas à plaire aux mêmes.
La droite qui est au pouvoir depuis quatre ans n'a que faire de l'opinion, des sentiments des travailleurs et des classes populaires. Elle ne cherche à plaire qu'aux possédants, petits et grands. Elle se prosterne devant l'argent et ceux qui le détiennent, auxquels elle est liée par une multitude de liens personnels et humains.
Récemment, le milliardaire François Pinault a annoncé sans prévenir qu'il est intéressé pour mettre la main sur le groupe Suez. Cette proposition remet en cause la fusion de ce groupe avec Gaz de France, votée la veille même à l'Assemblée. Des semaines de conciliabules pour convaincre les députés de la majorité eux-mêmes, réticents devant la privatisation de Gaz de France, des semaines de débats au Parlement, des ministres qui défilent à la télévision pour tenter de justifier la fusion : eh bien, il a suffi que Pinault annonce qu'il à 18 milliards à mettre sur la table pour que la belle combinaison mise en place par le gouvernement puisse être compromise. Finalement, il n'est pas dit que Pinault maintienne son offre s'il ne retrouve pas un partenaire pour dépecer Suez.
Mais, toute la presse a souligné que, si Pinault le veut, il aura toutes les chances de convaincre la majorité de droite de se déjuger. N'a-t-il pas, parmi ses amis ou, je dirais plutôt, ses protégés, parmi bien d'autres hommes politiques, Jacques Chirac lui-même ? Chirac a même fêté son élection de 2002 en dînant chez les Pinault !
Cette droite aux ordres des riches, mais cynique et arrogante à l'égard des classes populaires, a pris pendant les quatre années passées tellement de mesures anti-ouvrières, a tellement aidé le grand patronat à dégrader le sort des classes populaires, qu'elle mérite la haine de tous ceux, travailleurs, chômeurs, retraités, dont elle a écrasé les conditions d'existence.
Ces quatre ans au gouvernement, c'est quatre ans d'attaques tout azimut contre les travailleurs. Des attaques sur tous les terrains : contre la retraite, contre l'assurance maladie, contre les services publics, contre le peu qui dans la législation du travail gêne les patrons.
Et Sarkozy qui entend représenter la droite, l'incarne bien dans toute son arrogance et dans toute sa haine des pauvres, des quartiers populaires, des jeunes, des travailleurs immigrés, de tous les travailleurs.
L'empêcher d'atteindre le fauteuil présidentiel, stopper, même provisoirement, sa carrière politique, oui, cela ferait plaisir et espérons que cela se fera, même si perdre leur place actuelle est certainement moins dramatique pour ces gens-là que de perdre son emploi pour un salarié. Ils iront pantoufler dans les entreprises dont ils ont si bien servi les patrons lorsqu'ils étaient ministres. Ils seront même probablement mieux payés encore.
La renvoyer du pouvoir, cela ne peut se faire qu'en y ramenant la gauche, cette gauche dont les travailleurs ont pu mesurer, pendant les cinq ans du gouvernement de Jospin, à quel point elle ne constitue en rien un rempart contre l'avidité patronale.
Et puis, écoutons-les, même en pleine campagne électorale : les candidats socialistes se gardent bien de prendre des engagements au cas où ils reviendraient aux affaires.
Les trois candidats à la candidature au PS se sont affrontés, très courtoisement, cette semaine, à la télévision. On a pu les voir et les entendre dire ce qu'ils comptaient faire dans le domaine économique et social.
Sur les salaires : silence de Strauss-Kahn et de Royal. Seul Fabius a donné des chiffres, en tout cas pour le Smic en promettant 1500 euros mensuels brut, sans préciser à quel moment de la législature. Mais il a déjà dit dans le passé que les 1500 euros, c'est un objectif pour la fin de la législature. Mais 1500 euros brut, c'est à peu près le niveau qu'atteindra le Smic de toute façon avec l'ajustement automatique ! Et puis, combien de travailleurs précaires ou à temps partiel non choisi ne touchent de toute façon même pas le Smic ? Ah, si, quand même : Fabius a promis 100 euros brut par mois d'augmentation dès son élection. C'est déjà ça, mais ce n'est pas vraiment grand-chose et, s'il est élu, il faudra très certainement lui rappeler plusieurs fois sa promesse.
Les retraites : « Revaloriser le pouvoir d'achat des petites retraites sera une de mes priorités », a annoncé Royal. Avec cela, les retraités sont bien avancés ! Fabius a été plus précis : « Il faut fixer un niveau des retraites minimum à 80 ou 85 % du Smic ». Eh bien, 80 % du Smic, cela fait 80 % de 1254,28 euros, soit 1003,42 euros brut. Croyez-vous qu'on peut appeler cela une retraite décente après toute une vie de travail ?
Mais, s'il faut décerner une palme à l'un des trois, je la donnerai bien volontiers à Strauss-Kahn lorsque, sur le problème du logement, il a proposé de « créer de nouvelles villes à l'écart de celles qui existent », pour contourner le coût du foncier. L'humoriste Alphonse Allais avait déjà proposé, au début du siècle dernier, de résoudre le problème de la surpopulation des villes en les construisant à la campagne...
Et puis, rejeter les quartiers populaires de plus en plus loin, c'est imposer aux travailleurs de plus en plus de temps de transport et les dépenses qui vont avec.
Il n'y a un « problème du foncier » que parce qu'aucun gouvernement n'ose réquisitionner les terrains nécessaires pour construire, dans les villes elles-mêmes, des logements convenables que l'on puisse se payer avec un salaire d'ouvrier ou d'employé. Pas plus un gouvernement socialiste qu'un autre.
Alors, se débarrasser de la droite, oui, mais il ne faut pas que, par refus de la droite et de l'extrême droite, l'électorat populaire porte le PS au pouvoir sans rien en exiger en retour.
Alors, je souhaite que les voix qui se porteront sur ma candidature, qui seront des votes contre la droite et ce qu'elle représente, soient aussi une menace pour la gauche.
Il faut montrer à tous ces gens-là qu'on n'est pas dupe du duel droite-gauche. Il faut leur montrer qu'on sait que le spectacle électoral n'est qu'un spectacle de marionnettes. On aime bien que ce soit Guignol qui l'emporte sur le gendarme, mais derrière les marionnettes, il y a ceux qui les agitent.
Et ceux qui décident vraiment et dont le pouvoir n'est nullement mis en cause par les bulletins de vote, le grand patronat ne sera pas impressionné par le changement de la personne qui est installée à l'Elysée.
La seule chose qui peut les impressionner, c'est que les travailleurs en aient assez de subir les coups qu'on leur porte et qu'ils décident de les rendre collectivement, à leur façon, en les obligeant à utiliser les profits immenses qu'ils accumulent depuis tant de temps d'une manière qui soit utile à la société.
Il faut imposer que la population ait un accès direct à tout ce que les Conseils d'administration envisagent pour l'avenir de leurs entreprises, ce qui concerne en premier lieu l'avenir de toute la société et de la population.
Cela peut sembler utopique, c'est vrai !
Mais c'est nécessaire, indispensable, vital pour que nous tous puissions avoir une vie normale et décente. Et ce qui est vital n'est pas utopique car attendre qu'on nous écrase, sans réagir, est impossible.
Il faut donc que tous puissent savoir d'où l'ensemble des patrons tirent leurs financements et ce qu'ils en font. Pourquoi ils n'investissent pas leurs profits dans la production de biens utiles à la population pour en faire baisser le coût, au lieu de spéculer dangereusement.
Si on contrôle les profits des entreprises, si on contrôle d'où vient l'argent, par où il passe, quels sont les coûts réels de production, quels sont les profits et où ils vont, on pourrait empêcher qu'ils servent à racheter des entreprises déjà existantes aux quatre coins du monde. Si l'on compare cela au coût du travail dans la valeur ajoutée, on pourrait vérifier s'il est vraiment impossible de créer des emplois nouveaux correctement payés et même, tellement les profits sont élevés, en diminuant les efforts ou le temps de travail de chacun.
Les travailleurs font tant de choses pour la bourgeoisie que celle-ci peut en faire un peu pour les travailleurs !
On n'en est pas à tout leur prendre. Il s'agit seulement de les contrôler pour ne leur prendre que le superflu, voire le nuisible, qui permettra de sortir la société de l'ornière et de la misère qui nous menace.
Alors, ce que j'espère, ce que je souhaite, c'est que les travailleurs ne se contentent pas d'exprimer leurs sentiments dans les urnes, mais qu'ils les expriment par un coup de colère qui surprenne et terrorise vraiment le grand patronat et la bourgeoisie.
Je ne prétends pas être la porte-parole de tous travailleurs, mais je serai la porte-parole de leurs intérêts politiques et sociaux. Oui, mon camp est celui des travailleurs !
La raison de ma présence dans cette campagne, c'est de permettre à tous ceux qui sont ou qui se sentent eux-mêmes dans le camp des travailleurs, de faire entendre leur voix. Ceux qui trouvent, comme moi, intolérable le sort qui est réservé à la principale classe productive de la société ; ceux qui sont convaincus qu'il y a une autre façon de faire fonctionner la société que la seule recherche du profit, pourront le dire en votant pour ma candidature. Mais pourront le dire surtout ceux qui sont convaincus que toutes les promesses des politiciens de gauche ne sont que du vent s'ils ne sont pas capables de s'en prendre à la toute-puissance du capital sur l'économie, c'est-à-dire sur la société. C'est cela la signification principale du bulletin à mon nom qu'ils pourront mettre dans l'urne.
Alors, camarades, je vous souhaite une bonne fête aujourd'hui et du courage pour la campagne électorale qui commence !
Source http://www.lutte-ouvrière.org, le 23 octobre 2006
travailleurs,
camarades et amis,
Eh bien oui, j'ai annoncé ma candidature à l'élection présidentielle de 2007. Bien que je n'aie pas tout à fait les 500 parrainages d'élus nécessaires pour pouvoir déposer ma candidature, je n'en suis pas loin. Par ailleurs, j'ai bon espoir de la part de plusieurs dizaines d'élus qui, pour le moment, n'ont pas accordé leur parrainage mais qui ne l'ont pas refusé non plus : ils sont simplement dans l'attente de savoir qui seront les candidats, notamment celle ou celui du PS.
Il faut que, dans cette élection, soient réellement défendus les intérêts politiques et sociaux du monde du travail. Il faut que soit présente une candidature qui exprime clairement que le grand patronat, que la grande bourgeoisie sont les ennemis directs de toute la population. Une candidature qui dise pourquoi et comment la mainmise de la grande bourgeoisie sur l'économie et la société est la cause des maux principaux dont souffre la majorité des travailleurs.
Car, si on nous convoque périodiquement à des élections pour élire des responsables politiques à différents niveaux, dans le domaine économique c'est une véritable dictature où une toute petite minorité de possesseurs de capitaux a le droit de tout faire, fermer des entreprises, délocaliser, licencier, sans avoir de comptes à rendre à quiconque. Et, en dominant l'économie, cette petite minorité domine aussi toute la vie sociale et toute la politique.
Dans ce système économique, la concurrence, la recherche du profit déterminent tout : l'habitat, la santé, la production de biens utiles à la vie de tous, les transports. Tout ce qui est nécessaire à une vie normale exige que sa production rapporte beaucoup de profits, sinon on ne le fabrique pas ou on ne l'assure pas. C'est pourquoi on ferme des entreprises, des hôpitaux, des lignes de chemin de fer et des services. Et, quand on ne les ferme pas, on les laisse à l'abandon.
Voilà pourquoi la pauvreté s'accroît. Voilà pourquoi le niveau de vie baisse.
Pour les plus démunis parmi les travailleurs et parmi les retraités, la situation devient dramatique. Tout devient un problème, même se nourrir quotidiennement lorsqu'il s'agit d'une famille nombreuse, ou se soigner et, avant tout, se loger convenablement. Les retraités ont manifesté il y a deux jours pour protester contre la baisse du pouvoir d'achat des retraités modestes. Leurs pensions déjà faibles n'augmentent pas alors que le coût de la vie augmente. Le pouvoir d'achat n'est pas seulement rogné par l'inflation, par les hausses de prix, mais aussi par toutes ces dépenses supplémentaires qui résultent de décisions qui semblent parfois anodines pour ceux qui ne sont pas concernés. Je veux parler des forfaits de consultation chez les médecins et le déremboursement total ou partiel de certains médicaments, décisions qui, pour les pensions, voire les salaires, les plus modestes, sont dramatiques.
Ce qui pèse le plus sur le monde du travail, au plan matériel aussi bien qu'au plan moral, est certainement le chômage. Il est quand même invraisemblable et révoltant que, dans un pays comme le nôtre, des millions de travailleurs potentiels soient exclus de toute activité sociale, collective, simplement pour que fonctionne leur machine économique faite pour fabriquer du profit en fabriquant des chômeurs !
A écouter les ministres, tout va très bien, Madame la Marquise ! Le chômage baisse, la situation s'améliore. Ils mentent pire que des arracheurs de dents !
Qui, parmi les travailleurs, ne voit la pauvreté qui monte ? Qui, parmi les travailleurs, ignore que, lorsqu'on a perdu un emploi stable, on a peu de chances de trouver autre chose qu'un emploi précaire mal payé ? Qui, dans les familles ouvrières, ne sait qu'un jeune n'a pratiquement aucune chance d'entrer dans la vie active autrement qu'en galérant d'intérim mal payé en stage pas payé du tout ?
Et les pires mesures anti-ouvrières sont prises, bien sûr, au nom de l'intérêt de tous ! Les forfaits, les déremboursements de médicaments, ce serait pour sauver la Sécurité sociale !
Les contrats comme le CNE qui permettent aux patrons concernés de licencier quand et comment ils veulent pendant deux ans, ce serait pour créer des emplois !
Les contrats séniors qu'ils viennent d'inventer et qui permettent aux patrons d'embaucher pour pas cher des anciens, pour un CDD de 18 mois, renouvelable une seule fois, ce serait pour aider les vieux !
Ces politiques qui nous gouvernent sont aux ordres. Ils exécutent ce que le patronat leur demande et, en plus, ils assurent le service après vente. C'est à eux de justifier, de rendre acceptables les pires infamies patronales contre les travailleurs.
Les mensonges de la propagande gouvernementale, relayée par toutes les télés et radios, ne sont pas destinés au monde du travail, mais aux catégories sociales qui vivent une vie confortable et qui ne demandent qu'à croire que les travailleurs, et même les chômeurs, ne connaissent pas leur chance de vivre dans un pays comme la France !
Les larbins du grand patronat présentent la recherche du profit à tout prix non seulement comme un droit mais même comme un devoir sacré pour les entreprises. C'est au nom du profit qu'on impose sur les chaînes de production des cadences de plus en plus démentes ; qu'on impose dans les super et hypermarchés un rythme de travail insupportable ; c'est encore au nom du profit qu'on rogne les minutes de pause.
Et pourquoi faire, ces profits ? Même pas pour investir dans la production afin de créer, au moins plus tard, des emplois supplémentaires ! Non, le profit est pour l'essentiel englouti par la classe riche, encaissé comme revenu. Et la part qui ne l'est pas ne sert aux entreprises qu'à racheter l'entreprise concurrente, mettre la main sur son marché et, surtout, sur ses ouvriers qui, seuls, ont la capacité de suer du profit. Du moins, sur ceux qui ne sont pas licenciés sous prétexte de restructuration.
La société, l'Etat n'exercent aucun contrôle sur les conseils d'administration des grandes compagnies industrielles et financières. Pire, ceux qui les possèdent peuvent décider librement de la meilleure façon de gagner plus. Et, pour eux, tant pis si cela pousse à la misère des fractions croissantes de salariés, tant pis pour ceux qui en crèvent !
Eh bien, dans cette campagne, il faut qu'il y ait au moins quelqu'un qui puisse dire que c'est à ce système-là qu'il faut s'en prendre vraiment. Quelqu'un qui proclame qu'aucun des représentants des grands partis, aucun de ceux ou de celles qui ont une chance d'accéder à la présidence, ne le dit. Ils rivalisent de grandes phrases sur l'avenir de la France, sur le bonheur du peuple. Mais aucun d'entre eux n'osera s'en prendre au grand patronat et à ses intérêts, même pas en paroles, même pas par démagogie.
Alors, il ne faut pas être dupe des hommes et des femmes politiques qui occupent le devant de la scène. Ce ne sont pas eux qui détiennent le véritable pouvoir.
Alors, bien sûr, ils ne tiennent pas tous le même discours. Il faut bien que les électeurs les distinguent les uns des autres pour qu'ils aient le sentiment qu'ils ont un choix réel. De plus, les uns et les autres n'ayant pas le même électorat ne cherchent pas à plaire aux mêmes.
La droite qui est au pouvoir depuis quatre ans n'a que faire de l'opinion, des sentiments des travailleurs et des classes populaires. Elle ne cherche à plaire qu'aux possédants, petits et grands. Elle se prosterne devant l'argent et ceux qui le détiennent, auxquels elle est liée par une multitude de liens personnels et humains.
Récemment, le milliardaire François Pinault a annoncé sans prévenir qu'il est intéressé pour mettre la main sur le groupe Suez. Cette proposition remet en cause la fusion de ce groupe avec Gaz de France, votée la veille même à l'Assemblée. Des semaines de conciliabules pour convaincre les députés de la majorité eux-mêmes, réticents devant la privatisation de Gaz de France, des semaines de débats au Parlement, des ministres qui défilent à la télévision pour tenter de justifier la fusion : eh bien, il a suffi que Pinault annonce qu'il à 18 milliards à mettre sur la table pour que la belle combinaison mise en place par le gouvernement puisse être compromise. Finalement, il n'est pas dit que Pinault maintienne son offre s'il ne retrouve pas un partenaire pour dépecer Suez.
Mais, toute la presse a souligné que, si Pinault le veut, il aura toutes les chances de convaincre la majorité de droite de se déjuger. N'a-t-il pas, parmi ses amis ou, je dirais plutôt, ses protégés, parmi bien d'autres hommes politiques, Jacques Chirac lui-même ? Chirac a même fêté son élection de 2002 en dînant chez les Pinault !
Cette droite aux ordres des riches, mais cynique et arrogante à l'égard des classes populaires, a pris pendant les quatre années passées tellement de mesures anti-ouvrières, a tellement aidé le grand patronat à dégrader le sort des classes populaires, qu'elle mérite la haine de tous ceux, travailleurs, chômeurs, retraités, dont elle a écrasé les conditions d'existence.
Ces quatre ans au gouvernement, c'est quatre ans d'attaques tout azimut contre les travailleurs. Des attaques sur tous les terrains : contre la retraite, contre l'assurance maladie, contre les services publics, contre le peu qui dans la législation du travail gêne les patrons.
Et Sarkozy qui entend représenter la droite, l'incarne bien dans toute son arrogance et dans toute sa haine des pauvres, des quartiers populaires, des jeunes, des travailleurs immigrés, de tous les travailleurs.
L'empêcher d'atteindre le fauteuil présidentiel, stopper, même provisoirement, sa carrière politique, oui, cela ferait plaisir et espérons que cela se fera, même si perdre leur place actuelle est certainement moins dramatique pour ces gens-là que de perdre son emploi pour un salarié. Ils iront pantoufler dans les entreprises dont ils ont si bien servi les patrons lorsqu'ils étaient ministres. Ils seront même probablement mieux payés encore.
La renvoyer du pouvoir, cela ne peut se faire qu'en y ramenant la gauche, cette gauche dont les travailleurs ont pu mesurer, pendant les cinq ans du gouvernement de Jospin, à quel point elle ne constitue en rien un rempart contre l'avidité patronale.
Et puis, écoutons-les, même en pleine campagne électorale : les candidats socialistes se gardent bien de prendre des engagements au cas où ils reviendraient aux affaires.
Les trois candidats à la candidature au PS se sont affrontés, très courtoisement, cette semaine, à la télévision. On a pu les voir et les entendre dire ce qu'ils comptaient faire dans le domaine économique et social.
Sur les salaires : silence de Strauss-Kahn et de Royal. Seul Fabius a donné des chiffres, en tout cas pour le Smic en promettant 1500 euros mensuels brut, sans préciser à quel moment de la législature. Mais il a déjà dit dans le passé que les 1500 euros, c'est un objectif pour la fin de la législature. Mais 1500 euros brut, c'est à peu près le niveau qu'atteindra le Smic de toute façon avec l'ajustement automatique ! Et puis, combien de travailleurs précaires ou à temps partiel non choisi ne touchent de toute façon même pas le Smic ? Ah, si, quand même : Fabius a promis 100 euros brut par mois d'augmentation dès son élection. C'est déjà ça, mais ce n'est pas vraiment grand-chose et, s'il est élu, il faudra très certainement lui rappeler plusieurs fois sa promesse.
Les retraites : « Revaloriser le pouvoir d'achat des petites retraites sera une de mes priorités », a annoncé Royal. Avec cela, les retraités sont bien avancés ! Fabius a été plus précis : « Il faut fixer un niveau des retraites minimum à 80 ou 85 % du Smic ». Eh bien, 80 % du Smic, cela fait 80 % de 1254,28 euros, soit 1003,42 euros brut. Croyez-vous qu'on peut appeler cela une retraite décente après toute une vie de travail ?
Mais, s'il faut décerner une palme à l'un des trois, je la donnerai bien volontiers à Strauss-Kahn lorsque, sur le problème du logement, il a proposé de « créer de nouvelles villes à l'écart de celles qui existent », pour contourner le coût du foncier. L'humoriste Alphonse Allais avait déjà proposé, au début du siècle dernier, de résoudre le problème de la surpopulation des villes en les construisant à la campagne...
Et puis, rejeter les quartiers populaires de plus en plus loin, c'est imposer aux travailleurs de plus en plus de temps de transport et les dépenses qui vont avec.
Il n'y a un « problème du foncier » que parce qu'aucun gouvernement n'ose réquisitionner les terrains nécessaires pour construire, dans les villes elles-mêmes, des logements convenables que l'on puisse se payer avec un salaire d'ouvrier ou d'employé. Pas plus un gouvernement socialiste qu'un autre.
Alors, se débarrasser de la droite, oui, mais il ne faut pas que, par refus de la droite et de l'extrême droite, l'électorat populaire porte le PS au pouvoir sans rien en exiger en retour.
Alors, je souhaite que les voix qui se porteront sur ma candidature, qui seront des votes contre la droite et ce qu'elle représente, soient aussi une menace pour la gauche.
Il faut montrer à tous ces gens-là qu'on n'est pas dupe du duel droite-gauche. Il faut leur montrer qu'on sait que le spectacle électoral n'est qu'un spectacle de marionnettes. On aime bien que ce soit Guignol qui l'emporte sur le gendarme, mais derrière les marionnettes, il y a ceux qui les agitent.
Et ceux qui décident vraiment et dont le pouvoir n'est nullement mis en cause par les bulletins de vote, le grand patronat ne sera pas impressionné par le changement de la personne qui est installée à l'Elysée.
La seule chose qui peut les impressionner, c'est que les travailleurs en aient assez de subir les coups qu'on leur porte et qu'ils décident de les rendre collectivement, à leur façon, en les obligeant à utiliser les profits immenses qu'ils accumulent depuis tant de temps d'une manière qui soit utile à la société.
Il faut imposer que la population ait un accès direct à tout ce que les Conseils d'administration envisagent pour l'avenir de leurs entreprises, ce qui concerne en premier lieu l'avenir de toute la société et de la population.
Cela peut sembler utopique, c'est vrai !
Mais c'est nécessaire, indispensable, vital pour que nous tous puissions avoir une vie normale et décente. Et ce qui est vital n'est pas utopique car attendre qu'on nous écrase, sans réagir, est impossible.
Il faut donc que tous puissent savoir d'où l'ensemble des patrons tirent leurs financements et ce qu'ils en font. Pourquoi ils n'investissent pas leurs profits dans la production de biens utiles à la population pour en faire baisser le coût, au lieu de spéculer dangereusement.
Si on contrôle les profits des entreprises, si on contrôle d'où vient l'argent, par où il passe, quels sont les coûts réels de production, quels sont les profits et où ils vont, on pourrait empêcher qu'ils servent à racheter des entreprises déjà existantes aux quatre coins du monde. Si l'on compare cela au coût du travail dans la valeur ajoutée, on pourrait vérifier s'il est vraiment impossible de créer des emplois nouveaux correctement payés et même, tellement les profits sont élevés, en diminuant les efforts ou le temps de travail de chacun.
Les travailleurs font tant de choses pour la bourgeoisie que celle-ci peut en faire un peu pour les travailleurs !
On n'en est pas à tout leur prendre. Il s'agit seulement de les contrôler pour ne leur prendre que le superflu, voire le nuisible, qui permettra de sortir la société de l'ornière et de la misère qui nous menace.
Alors, ce que j'espère, ce que je souhaite, c'est que les travailleurs ne se contentent pas d'exprimer leurs sentiments dans les urnes, mais qu'ils les expriment par un coup de colère qui surprenne et terrorise vraiment le grand patronat et la bourgeoisie.
Je ne prétends pas être la porte-parole de tous travailleurs, mais je serai la porte-parole de leurs intérêts politiques et sociaux. Oui, mon camp est celui des travailleurs !
La raison de ma présence dans cette campagne, c'est de permettre à tous ceux qui sont ou qui se sentent eux-mêmes dans le camp des travailleurs, de faire entendre leur voix. Ceux qui trouvent, comme moi, intolérable le sort qui est réservé à la principale classe productive de la société ; ceux qui sont convaincus qu'il y a une autre façon de faire fonctionner la société que la seule recherche du profit, pourront le dire en votant pour ma candidature. Mais pourront le dire surtout ceux qui sont convaincus que toutes les promesses des politiciens de gauche ne sont que du vent s'ils ne sont pas capables de s'en prendre à la toute-puissance du capital sur l'économie, c'est-à-dire sur la société. C'est cela la signification principale du bulletin à mon nom qu'ils pourront mettre dans l'urne.
Alors, camarades, je vous souhaite une bonne fête aujourd'hui et du courage pour la campagne électorale qui commence !
Source http://www.lutte-ouvrière.org, le 23 octobre 2006