Déclaration de Mme Brigitte Girardin, ministre déléguée à la coopération, au développement et à la francophonie, sur le partenariat de l'Etat avec les ONG, l'aide apportée aux jeunes pour leur engagement dans la solidarité internationale et sur les outils plus spécifiques proposés aux jeunes issus des migrations, à Paris le 17 novembre 2006.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Inauguration du Salon de la solidarité internationale, à Paris le 17 novembre 2006

Texte intégral

Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Monsieur le Président de Coordination Sud,
Monsieur le Directeur général d'Action contre la Faim,
Monsieur le Président d'Etudiants et Développement,
Mesdames et Messieurs,
Chers Amis,
C'est un grand plaisir pour moi de vous accueillir si nombreux au ministère de la Coopération, du Développement et de la Francophonie, à l'occasion de l'inauguration de ce 1er Salon de la Solidarité internationale.
Avant toute autre chose, je tiens à remercier chaleureusement les organisations non gouvernementales ainsi que tous les autres acteurs, privés et publics, qui se sont mobilisés pour faire de ce salon, l'événement-phare de la 9ème édition de la Semaine de la Solidarité internationale.
C'est en effet en 1998 qu'a été organisée pour la première fois une telle semaine consacrée à la solidarité internationale, à partir du constat fait à l'époque d'un besoin de sensibilisation de l'opinion publique. Depuis lors, je crois que d'énormes progrès ont pu être accomplis : j'en veux pour preuve plusieurs sondages récents, qui montrent bien l'intérêt croissant que portent nos concitoyens à ces questions. Dans un sondage IFOP de juillet dernier, ils étaient ainsi 83 % à considérer que la France joue un rôle important dans le monde en matière d'aide humanitaire et d'aide publique au développement. Mieux encore, les Français se disent prêts à 63 % à donner de leur temps pour une association de solidarité internationale. Et selon un sondage BVA d'octobre dernier, 87 % des Français considèrent que l'aide au développement est un thème sur lequel les candidats à l'élection présidentielle devront se prononcer.
On le voit bien à travers ces quelques chiffres, la sensibilisation progresse, et nous sommes tous ici à nous en réjouir : nos concitoyens, et surtout les jeunes, sont toujours plus nombreux à vouloir s'engager en faveur du développement. Ils révèlent en cela une formidable générosité, à laquelle je veux rendre hommage, en même temps qu'aux ONG dont l'inlassable travail de terrain auprès des populations les plus défavorisées, partout à travers le monde, a contribué pour beaucoup dans les progrès ainsi enregistrés en matière de mobilisation.
J'observe d'ailleurs, cette année, combien cette nécessaire sensibilisation de l'opinion publique aux enjeux d'une politique de développement ambitieuse n'est plus seulement un objectif national : l'Union européenne, à l'initiative du commissaire au Développement Louis Michel - que j'aurai le plaisir d'accueillir ici demain - organise en ce moment-même à Bruxelles les premières journées européennes du développement, qui sont appelées à devenir un grand rendez-vous international annuel dans le domaine du développement et de la solidarité internationale.
La mobilisation est donc en marche, mais il nous faut encore la stimuler : c'est pourquoi j'ai souhaité cette année m'engager résolument aux côtés des ONG pour cette semaine de la solidarité internationale, avec l'organisation de ce Salon que nous avons conçu ensemble, et dont nous avons souhaité qu'il puisse s'adresser plus particulièrement aux jeunes, afin de leur proposer les outils et les moyens de s'engager efficacement en faveur des pays du Sud.
A l'occasion de cette inauguration, je souhaite d'ailleurs évoquer brièvement devant vous chacun de ces trois aspects : le partenariat de l'Etat avec les ONG, l'accompagnement que nous devons aux jeunes qui souhaitent s'engager dans la solidarité internationale, et enfin les outils plus spécifiques que nous souhaitons proposer aux jeunes issus des migrations.
En premier lieu, donc, la nature des liens qui unissent l'Etat et les ONG.
A toutes les ONG ici rassemblées pour ce Salon, je tiens à le réaffirmer haut et fort : vous êtes des acteurs à part entière de la coopération française, et vous êtes, à ce titre, des partenaires indispensables pour l'Etat.
Pourquoi ce rôle irremplaçable ? Tout simplement, parce que votre capacité d'intervention au plus près des populations, votre connaissance des relais locaux sur lesquels s'appuyer, votre réactivité, votre esprit d'initiative, mais aussi votre indépendance, vous confèrent une vraie légitimité sur le terrain, et surtout une réelle complémentarité avec les actions menées parallèlement par les pouvoirs publics.
Naturellement, il vous faut les moyens financiers d'assumer ce rôle croissant. C'est pourquoi le président de la République s'est engagé à doubler la part de notre aide au développement transitant par les ONG entre 2004 et 2009. Cet engagement, le gouvernement est en passe de le tenir, puisque le projet de budget pour 2007 que je défends actuellement au Parlement prévoit de porter cette part à 157 millions d'euros, contre 85 millions en 2004. Il s'agira donc d'un quasi-doublement des volumes transitant par les ONG entre 2004 et 2007.
La semaine dernière, en Ethiopie, j'ai encore eu l'occasion de le constater sur le terrain, y compris dans une région parmi les plus reculées et défavorisées, comme le Tigré : les ONG françaises accomplissent un travail remarquable, reconnu et apprécié, et qui repose pour l'essentiel sur l'engagement personnel de toutes celles et ceux qui y mettent en oeuvre, dans des conditions souvent précaires et difficiles, des programmes humanitaires.
Cela m'amène à aborder la question centrale de l'engagement, et notamment de celui des jeunes qui est au coeur des thématiques voulues pour ce Salon.
Ce choix de la jeunesse se justifie pleinement. D'abord, parce qu'en voulant aider le Sud, et notamment l'Afrique, il ne faut pas oublier que l'on s'adresse à des pays où la moitié de la population a moins de 25 ans, et qu'il nous faut donc offrir des perspectives de développement à toute cette jeunesse africaine, si l'on veut pouvoir mettre un terme aux terribles images de Ceuta et Melilla.
Ensuite, parce que ce sont aussi, en France, les jeunes qui s'inquiètent le plus - et à juste titre - des inégalités croissantes entre les populations du Nord et du Sud, et qui se déclarent prêts à s'engager d'une manière ou d'une autre, ici ou là-bas, contre ces inégalités.
Tous ces jeunes qui souhaitent s'engager, nous nous devons de les accompagner, et de les aider à concrétiser leurs projets, en leur proposant les outils pour un engagement efficace. Car l'humanitaire ne s'improvise pas. C'est pourquoi ce Salon permettra aux acteurs actuels et futurs de la solidarité internationale, de se rencontrer et d'échanger sur leurs attentes et sur leurs pratiques.
Depuis le bénévolat dans une petite association locale en France jusqu'à l'engagement dans une mission de volontariat à l'étranger pour plusieurs années, les modalités de l'investissement des jeunes Français présentent une grande diversité. C'est cette diversité qu'il faut expliquer, afin de mieux faire connaître les différents dispositifs existants. Qu'il s'agisse des 1.700 Volontaires de solidarité internationale (VSI) répartis à travers le monde auprès d'associations, ou encore des Volontaires internationaux en entreprises (VIE), des Volontaires internationaux administratifs (VIA), sans oublier les 1.100 jeunes engagés chaque année dans des chantiers à l'étranger, il existe de nombreuses formules s'efforçant de répondre à cette soif d'engagement exprimée par notre jeunesse.
Je sais que nombre d'associations souhaitent encore diversifier l'offre de volontariat de solidarité internationale. Elles réfléchissent à de nouvelles formes de partenariat avec les associations émergentes des pays du Sud, notamment par la mise en place d'un volontariat Sud-Sud et, à terme, d'un volontariat Sud-Nord. Elles ont également la volonté de proposer des missions à d'autres publics, moins qualifiés. Je souhaite apporter mon soutien à ces réflexions, qui me paraissent aller dans la bonne voie.
Je rappelle par ailleurs que le service civil volontaire (SCV) qui a été créé par la loi du 31 mars 2006 sur l'égalité des chances, offre aussi de nouvelles perspectives : il permet à un jeune de 16 à 25 ans de s'engager pour une période de 6 à 12 mois dans une mission d'intérêt général, aussi bien en France qu'à l'étranger. Dès 2006, cette nouvelle forme d'engagement concernera 30.000 jeunes, et jusqu'à 50.000 en 2007.
Pour terminer, je voudrais m'adresser plus particulièrement aux jeunes issus des migrations, pour leur dire notre souhait de leur proposer de nouveaux outils qui leur soient plus spécifiques, afin qu'ils puissent s'engager au titre de ce que l'on appelle le co-développement.
Entendons-nous bien : ces jeunes Français ont naturellement vocation à participer à l'ensemble des dynamiques et des programmes dédiés à la jeunesse que je viens d'évoquer ; mais leur identité plurielle les conduit parfois à souhaiter investir plus spécifiquement le champ du développement des pays d'origine de leurs parents. Je sais notamment qu'il s'agit d'une forte attente exprimée par le Forum des jeunes issus des migrations - le FOJIM - avec lequel je travaille sur le sujet.
Des outils de coopération plus spécifiques ont donc été élaborés à leur intention, afin d'appuyer au mieux leurs initiatives, sans pour autant les enfermer dans une forme de discrimination positive qui pourrait devenir une entrave à leur engagement.
Mon ministère est donc prêt à accompagner financièrement ces projets de co-développement élaborés par les jeunes générations. Je précise que notre appui, concentré jusqu'ici au Mali, au Sénégal et au Maroc qui sont nos partenaires-pilotes en matière de co-développement, sera étendu en 2007 à l'ensemble de l'Afrique subsaharienne francophone, à Haïti, et à l'Ethiopie.
Mesdames et Messieurs,
Au moment de conclure, je voudrais saisir l'occasion de cette inauguration pour dévoiler le nouveau logo "France Coopération", en vous expliquant brièvement sa raison d'être.
Il résulte d'un constat, celui du manque de visibilité sur le terrain de l'effort français en matière d'aide au développement. Je le vois bien lorsque je visite des projets en Afrique, en Asie, ou encore en Amérique latine : l'intervention de la France n'apparaît pas toujours clairement. Chaque agence d'exécution de notre aide accomplit un énorme travail sous ses propres couleurs, ce qui est parfaitement légitime, mais sans pour autant toujours faire apparaître qu'au final, nous travaillons tous pour la "Maison France". Parfois, les bénéficiaires de l'aide ignorent même que la France a financé leur projet.
C'est pourquoi le gouvernement a décidé en juin dernier la mise en place d'un logo "rassembleur" pour toutes les actions de coopération menées par la France à l'étranger. C'est ce logo que je vous présente aujourd'hui, pour la première fois.
Il comprend deux éléments caractéristiques :
- le nom "France coopération" apparaît clairement, et ce terme a été choisi pour pouvoir être également compris en anglais ;
- par ailleurs, le drapeau tricolore est mis en avant, comme élément symbolique.
Ce logo n'est pas un logo institutionnel. Il ne représente pas un ministère particulier, ni même l'Etat dans son ensemble. Il est destiné au contraire à devenir le symbole de l'action de la France en matière de coopération internationale. Toute institution, tout organisme intervenant dans les pays en développement pour le compte de la France devra donc pouvoir l'arborer, y compris les opérateurs privés comme les associations. Bien entendu, chaque établissement, comme par exemple l'AFD, l'Agence française de développement, ou l'IRD, l'Institut de recherche pour le développement, pourra continuer à y accoler son propre logo. Toutes ces conditions d'utilisation seront d'ailleurs rapidement précisées dans une charte.
Dès les prochaines semaines, attendez-vous donc à voir fleurir ce logo dans les pays en développement. Je fais le pari que lorsque vous voyagerez dans ces pays, vous serez surpris de constater à quel point l'effort de la France en faveur des plus pauvres est devenu important.
En cela, nous rejoignons bien l'esprit de cette semaine de la solidarité internationale : mieux faire connaître la coopération française, dans toute la diversité de ses acteurs - associations, entreprises, collectivités territoriales, structures d'enseignement et de recherche, agences, et bien sûr l'Etat.
Tous, nous partageons cet objectif de vouloir contribuer à un monde plus juste et équitable. Audacieuse ambition sans doute que celle-là, mais qui vaut bien que l'on s'engage résolument pour elle. Précisément, c'est à cette forme d'engagement que nous voulons convier notre jeunesse.
Je vous remercie.Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 20 novembre 2006